25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 25 ACTEUR S. FLORISE. ARISTE, Ami de Florise. DORIMON, Amant de Florife. L'APPARENCE TROMPEUSE: COMEDIE. EN UN ACTE. SCENE PREMIERE. D DORIMON. E toutes les efpeces d'amour, que fa Nature nous infpire pour un Sexe trop charmant, il n'y en a point de plus pénible que celui que l'on fent pour une Veuve. Une Fille coute bien moins à conquerir. Le charme de la nouveauté, l'attrair d'un bonheur inconnu, & le penchant d'un cour fans expérience, lui font faire la moitié du chemin; & fi la pudeur, ou l'orgueil, ou fa petite malice lui impofe filence fur fes fentimens, une démarche, un› coup d'œil, un gefte la trahit & les décele. Avec une Veuve on n'a point ces reffources-là, & il femble que par une fatalité attachée à ce que l'on poffede, elle tire de l'étendue de fes connoiffances le droit & le pouvoir d'en méprifer l'ufage. J'aime Florise depuis un an ; je me fuis declaré fix mois A iij après; depuis trois mois je demande à l'époufer, & je ne fçais pas encore fi elle m'aime..... Oh, parbleu, je perds patience, & il eft tems enfin que je forte d'une incertitude fi cruelle. Je ne vois que Nerine & Carlin qui foient à portée de m'en délivrer. Ils tardent bien à venir me joindre. !... Mais les voici. SCENE I I. DORIMON, CARLIN, NERINE. M NERINE. Onfieur, au moins ce n'eft pas moi qui vous CARLIN. Par ma foi, Monfieur, j'ai cru que Nerine ne m'avoit mandé que pour elle, & je ne me fuis pas preffé. Quand on vient trouver fa femme, on ne va pas fi vitę. NERINE. Ce fat-là tranche du mari à la mode. C'eft CARLIN. que tu n'es pas trop de mode, toi.. Laiffez-là ce ftile d'Epoux, & foyez unis du moins. pour me rendre un fervice important. Vous fçavés que j'aime Florife, & que mon but eft de l'époufer. Je l'en ai affurée elle-même tant de fois & depuis fi long-tems, qu'elle ne fçauroit en douter; & cependant je ne fuis pas plus avancé que le premier jour. Y a t'il dans fon cœur, dans fon efprit, ou dans fes affaires quelque obftacle qui s'opofe à mon bonheur? Vous pouvés avoir penetré ce myftere. Tirés-moi d'inquiétude, & comptez que pour votre recompenfe je vous mettrai en état de vivre enfemble commodément, & de vous paffer de Maître & de Maîtreffe. Monfieur..... CARLIN. NERINE. Alte-là, mon mari. Il s'agit de Madame ; j'ai l'honneur de lui appartenir, & c'est à moi à com mencer. CARLIN. Mais moi j'ai l'avantage d'apartenir à Monfieur Arifte, qui eft fon ami, fon confident & l'arbitre de toutes les affaires. DORIMON. Patience, Carlin, patience, tu auras ton tour: Mais l'ordre veut que Nerine parle la premiere. NERINE. Sans doute. Pretez-moi donc attention, Monfieur. Je vais vous apprendre bien des chofes, quoique jo ne ferve Florife que depuis quinze jours. Mais j'ai des yeux & de l'efprit ; je vois & je rai fonne. A iiij Premierement (& je vous demande pardon de ma franchife; mais vous l'avez exigée) je crois que ma Maitreffe ne vous aime point. CARLIN. Moi, je crois tout le contraire. DORIMON. Sur quoi, Nerine, as-tu conçu une idée qui m'est peu favorable? NERINE. Sur ce qu'elle me fait taire, lorfque je lui parle Marque-t'elle de l'aigreur dans fon ton, ou dans fon air? NERINE. Non; c'eft de l'indifference quand elle ne dit mot, & de l'enjouement quand elle parle. Comment donc, Nerine, eft-ce qu'il vous auroit gagnée ? Car elle ne me tutoye point lorfqu'elle me boude ). f'aimerois affez que Monfieur Dorimon prit cette voye-là: ( & remarquez-le Monfieur Dorimon: Partout ailleurs elle vous appelle Dorimon tout court) Ce feroit bien la vraiment le moyen de réuffir! La protection de Nerine! Hé, comment pourroit - on s'en deffendre? Allons, voilà qui eft fait: Fe defere à vos fentimens pour Monfieur Dorimon, pourvu que vous ne m'en parliez plus. Et tout de fuite elle change de converfation, d'humeur & de vifage, |