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noiffiez combien il est trifte de méprifer une Maîtreffe fi digne d'être écoutée ; & qu'après avoir méprisé sa voix, vous reffentiez les coups qui font encore des leçons, & par conféquent des faveurs, dont l'amertume eft un prix qui les reléve. Soutenez avec une tranquille foumiffion la jufte peine, que vous vous êtes attirée ; ne refufez pas de fentir le poids d'une mifere trop long-tems volontaire. Soufcrivez à la sévérité de ces arrêts que la Grace prononce. Portez contre vous-même vos reproches encore plus loin que les fiens. Soyez inconfolable d'avoir été fi long-temps indocile. Les confolations de la vertu s'achetent par des larmes, & les douceurs de la grace par les amertumes de la componction. Le Seigneur ne confole que ceux qui pleurent, & dont le cœur fe partage entre le defir de lui plaire, & le regret de lui avoir déplû. Tandis que contre les partisans du monde, les fleurs

fe changent en épines, les fêtes en deuil, les plaisirs en remords: c'eft en faveur des ames touchées & fideles que les épines fe changent en fleurs, la trifteffe en joye, & les larmes en confolation.

LETTRE IV.

Avis après une Confeffion générale. JE viens vous ordonner, M. de vous

tranquillifer fur votre Confeffion. Tout ce que vous me marquez, eft renfermé dans ce que vous m'avez dit. Ces différens retours font des artifices de l'ennemi, qui jaloux de votre bonheur, veut vous le ravir, ou par le dégoût, ou parle défespoir. Les précautions prifes pour l'exactitude de l'accufation fuffifent. Ne penfez plus à vos péchés qu'en général, pour en gémir, pour les détester, pour les pleurer, &

pour

les expier par

la fi

délité, & par la ferveur de la pénitence. Priez, & appliquez-vous beaucoup à réfléchir fur les motifs, qui doivent faire couler de votre cœur les larmes de la componction, & y allumer le feu facré de l'Amour Divin. Ne vous occupez que du regret d'avoir déplû, & du defir de plaire à celui qui feul mérite d'être aimé; donnez à la piété ce que vous donniez au monde. Allez encore plus loin dans la vertu, que vous n'aviez fait dans vos égaremens; foyez généreuse pour Jefus-Chrift, confacrez-vous fans réserve à ce Dieu fi patient à vous fouffrir, fi empreffé à vous rechercher, & fi magnifique pour vous recevoir. Sentez tout ce qu'il fait pour vous, & ayeż foin de le reconnoître: portez-le dans votre cœur, & ferrez bien étroitement les douces chaînes que fa Grace vient de former pour vous attacher à fon fervice. Ne le perdez pas de vûe,confervez-vous toujours pour lui feul; voyez-le dans

toutes chofes, & que tout ferve à votre bonheur, en fervant de matiere à votre fidélité. Détachez-vous de ce qui flatte, acceptez ce qui crucifie, mourez à toutes chofes & fur-tout à vous-même : afin de ne vivre que pour celui, qui eft mort pour tous & pour vous en particulier; foyez fidele à vos exercices, particu liérement à l'oraifon, à la préfence de Dieu, & à la componction. Portez dans votre ame une fource de gémiffemens & de larmes, dont vous laifferez le cours libre en particulier; mais qu'il faut con centrer & renfermer, quand yous ferez avec les autres. Confidérez comme une partie de votre penitence & de vos devoirs, les ménagemens innocens qu'exigent les droits & les prétentions de la bonne Mére. Redoublez par mortification pour vous votre attention, & vos égards pour elle. Engagezla par votre douceur à en avoir pour yous. Donnez-lui du tems, quand il le

faudra, il fera alors confacré par l'obéiffance, par la charité, par le fupport, par le renoncement à vous-même; & vous pratiquerez ainfi les plus héroïques vertus, lorfqu'étant à fa compagnie, vous femblerez être défœuvrée, & ne rien faire pour la piété. Pratiquer la vertu, ce n'eft ce n'eft pas faire ce qui eft de notre goût; mais fouvent ce qui y eft contraire, quand il s'agit de ménagemens & d'égards tels que ceux-ci, & qui font doublement refpectables, puifqu'ils font innocens. Portez votre retraite dans l'appartement de la B. M. Parlez à Dieu en lui parlant à elle-même, & fans affectation; foyez dans le monde, comme n'y étant pas ; accréditez la piété, en lui laiffant ces douces complaifances dans lefquelles elle eft si féconde, quand elles ne font pas oppofées à fon exactitude & à fa rigidité. La charité eft douce, patiente, elle fouffre, elle endure tout, quand il ne s'agit pas

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