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dérober la moindre portion à celui qui en eft l'auteur, en aimant quelque chofe, ou plus, ou autant que lui, ou contre lui, ou fans rapport à lui. Son amour doit régler tous les mouvemens de notre ame; & peu contens de lui confacrer nos cœurs, nous devons encore ne pas lui dérober le cœur des autres.Nous fommes obligés de l'aimer fi uniquement, que nous defirions qu'il foit aimé de même. Ce n'est pas l'aimer, que de vouloir être aimé avec lui; ce feroit s'affocier à fon empire, partager sa gloire, s'affeoir fur fon trône, ou plutôt le détrôner, parce qu'il veut, & qu'il doit régner feul. Ce font les fentimens qui font exprimés dans les trois premieres demandes de l'Oraifon Dominicale; il faut en être pénétré, & en faire l'ame de nos actions.

Votre faute renfermoit une autre in

justice ; vous dérobiez à Dieu un tems qu'il a confacré à fon culte, & qu'il

faut

faut par conféquent employer à des exercices qui l'honorent. La profanation des falnts jours renferme un larcin plus énorme que l'on ne penfe. Tous les tems appartiennent à Dieu ; il n'est jamais permis de vivre un feul moment pour d'autres que pour lui. Comme il doit régner feul, il doit régner toujours. Mais les faints jours lui appartiennent en quelque forte doublement. Il veut alors être finguliérement honoré. Les actions extérieurés doivent dans ces jours être autant d'hommages rendus à la Religion. Quel crime, quand les actions font profanes, ferviles, ou criminelles, & qu'elles rempliffent en entier, ou en grande partie un tems qui ne doit être confacré qu'à la Religion.

Ces inquiétudes, pendant votre Oraison, ne font pas un mal; elles empêchent cependant un plus grand bien. On prétend dans l'Oraifon s'occuper de Dieu, & c'eft ne rien faire de con

C

traire à cette intention, que de s'occu per de la crainte de lui avoir déplû, d'examiner sa conscience, & de penser à connoître fes fautes, pour s'en purifier. Chaque chofe a néanmoins fon tems, & celui de l'Oraifon ne doit pas être celui de l'examen. Ce n'eft pas un péché de changer l'oraison en examen ; mais alors ce n'eft pas faire l'oraison, & c'est se priver des avantages attachés à cet exercice; voilà un piége de la part de l'ennemi, qui, ne pouvant réussir à nous faire tomber dans le mal, gagne quelque chofe, en nous empêchant de faire un plus grand bien. Il faut donc ne pas fe départir de l'oraison, & renvoyer l'examen à fa place; par cette précaution, vous confondrez l'ennemi, & vous le forcerez à vous laiffer tranquille.

Vous voyez que j'ai bien déchiffré vos petits mots, s'il eft permis de les traiter fi mal. Il n'y a rien de petit dans

vos idées, fur-tout, quand elles ont rapport à celui, qui eft le feul grand. Ne vivez que pour lui rendre des hommages.

La partie que vous me propofez, n'y fera pas contraire. Toute réflexion faite, cet arrangement vaudra mieux pour l'ame, & pour le corps. Vous rangez les chofes au mieux : c'eft ainfi que je les range dans le parti que je prens d'être toujours tout à vous en JefusChrist.

LETTRE IX.

Les Communions doivent être fréquentes, Jelon la ferveur, & le profit que l'on en tire.

RIEN IEN n'eft plus précieux, M. que le tems, & la grace. Vous devez crain

dre d'abufer de l'un & de l'autre. Vous

n'êtes pas affez fidéle imitatrice, ni fervente compagne des Anges pour vous affeoir fi fouvent à leur table. Vous aviez coutume de communier l'Octave confacrée à honorer ces efprits bienheureux; une fi grande grace ne s'accorde pas à la coutume, mais à la ferveur dont vous êtes trop éloignée. Vous exigez beaucoup de Jefus-Chrift, & vous lui donnez peu. Vous n'avez pas de générofité pour lui plaire ; & vous youlez qu'il foit à votre égard, magnifique. Vous êtes tiéde par votre négligence à vous vaincre, & vous voulez qu'il foit libéral; rendez-vous digne de fes faveurs par un redoublement de fidélité. Remportez des victoires pour obtenir des couronnes. Faites des facrifices pour participer à celui de JesusChrist. Mourez avec lui pour boire fon Calice. La peine que vous avez d'être refufée, en demandant cette grace, & qui fait que vous aimez mieux vous en

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