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penfée d'en avertir mon oncle. MARTON.

Cela n'auroit de rien fervy, Madame. Il la verroit dans les bras de trente hommes, qu'il n'en prendroit aucun foupçon. Ses dehors affectez, fes difcours eternels de mora

le & de vertu, fon déchaînement contre tous les plaifirs, dont elle fçait goufter juf qu'aux moindres delicateffes, luy donnent un empire abfolu fur l'efprit de Monfieur voftre oncle.

CID ALI SE.

C'eft auffi ce qui m'a empefché de hazarder la chofe.

MARTON.

Vous avez fort bien fait.

CIDALISE.

Mais enfin ils auront beau me persecuter. La jaloufie de ma tante, le pouvoir de mon oncle, ny celuy de mon pere mesme, ne me forceront point à me remarier contre mon inclination.

MARTON.

Gardez-vous bien, Madame, de rien pre cipiter là deffus. Vertu de ma vie ce ne font point icy des bagatelles, vous iriez prendre quelque brutal de Provincial, peut-eftre qui nous tailleroit de la befogne. Hé ne vous mariez point, Madame, fans avoir bien

examiné celuy que vous choifirez. Brutal pour brutal, j'aime mieux un oncle qu'un

mary.

CIDALISE.

Il faudra que je fois bien affurée de la complaifance de celuy qui me déterminera au mariage.

MARTO N. .

Vous parlez en femme de bon fens; Un choix bon ou mauvais eft excufable la premiere fois, la curiofité peut faire bien des chofes ; mais la feconde, il faut d'autres raifons que la curiofité.

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CIDALISE.

Ah je fçais trop ce qu'il m'en a cousté pour avoir obeï aveuglement !

MARTO N.

Dans les fentimens où je vous vois, Monfieur Durcet eft celuy qu'il vous faut.

CIDALIS E.

Et furquoy juges-tu cela Marton ?

MARTO N.

Sur le grand attachement que vous avez la liberté.

pour

CIDALISE.

Monfieur Durcet eft un fort honnefte homme mais ma pauvre Marton, je n'aime point les gens de robe.

MARTON.

Je ne vous en parlois que pour cette liberté qui vous eft fi precieufe. Il y a de certaines heures avec ces Meffieurs là, où l'on en prend tout à fon aife, & celuy-cy me paroiffoit homme à vous en laiffer autant que vous en auriez voulu. S'il découvre vos fentimens, il se pendra, Madame, Madame, affurément. Il est vray que vous ne le traitez pas plus mal que les autres, à qui vous promettez la mefme chose.

CIDALIS E.

Tant que mon procés durera, dont il est Rapporteur, je me garderay bien de le defa bufer.

MARTON.

J'ay ouy dire que c'eftoit un homme admirable pour les procés defefperez; mais, Madame, Monfieur Baffet n'eft point homme de robe, c'est un de ceux que vous flatez auffi de la mefme efperance.

CIDALISE.

Il n'eft pas Gentilhomme feulement.

MARTO N.

Comment, Madame, vous moquez-vous ? fon pere & luy ne font-ils pas dans les af

faires ?

CIDALISE.

Ce n'est pas une consequence.

MARTO N.

Mais n'eft-ce pas dans les affaires où l'on

s'enrichit.

Ordinairement.

CIDALISE.

MARTON.

Allez, allez, Madame, il fera bien-toft noble, le nom changé fait tout, au lieu de Baffet, Monfieur le Marquis, achetter une Charge, répandre deux miliers de piftoles à prefter à propos ; il trouvera des amis & des parens à la Cour, mefme fon pere l'a fait riche; il fera fon pere Gentilhomme; la plume ufurpe la Nobleffe auffi bien que l'épée.

CIDALISE.

Quoy qu'il en foit Marton, je ne feray ja mais la femme de Monfieur Baffet,fous quelque nom ny quelque qualité que ce foit. MARTON.

Pourquoy le luy promettez-vous? Ah vrayment je l'avois oublié. Les mille piftolles qu'il vous envoya hier, devoient bien m'en faire fouvenir.

CIDALISE.

En verité c'eft l'homme le plus obligeant que je connoiffe. Il fit cela de la meilleure grace du monde ; & fans luy, en verité, je ne fçais ce que je ferois, tout mon bien eftant faifi, comme il eft.

MARTON.

Enfin donc, Madame, la roture de Monfieur Baffet, & la robe de Monfieur Durcet vous détermine en faveur d'Eraste.

CIDALISE.

Tay-toy, voicy Monfieur Durcet.

SCENE V.

CIDALISE, Mr. DURCET, MARTON.

EN

CIDALISE.

'N verité, Monfieur Durcet, je vous ay des obligations infinies ! vous faites pa roître en tout ce qui me regarde une exactitude charmante.

Mr DURCET.

Vous voyez, Madame, que je n'ay seulement pas voulu quitter ma robe pour en estre plûtoft auprés de vous.

CIDALIS E.

L'empreffement des gens que l'on confi dere fait un extrême plaifir.

MARTON.

Monfieur ne feroit pas de ces gens, qui au

retour d'un voyage vont décendre chez le

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