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Fontanus. quel il n'eût furpaffé les Anciens, & il auroit pû traiter les Maîtres & les Peres même qui ont donné la naiffance à ce bel Art, comme Jupiter a traité Saturne (8), c'est-à-dire détrôner tous les autres & regner feul. Il prétend qu'il palle fouvent Catulle dans fes Hendécafyllabes; qu'il a effacé tous ceux qui ont fait des piéces funébres par les fiennes, qu'il y a peu de Poëtes à qui il devoit céder le pas pour fes Elégies, pour fes Jardins des Helpérides, & fon Úranie, où il tait une alliance affés ingénieufe de l'Aftrologie & de la Philofophie.

Mais quelque grand flateur que paroiffe ce Critique, il n'a point laiffé de reconnoître que Pontanus n'avoit paffé perfonne dans le genre Lyrique, & c'eft prefque vouloir nous laiffer croire qu'il n'y a pas fort bien réuffi. Et pour ce qui regarde les Hendécafyllabes, Floridus Sabinus a jugé (9) que c'étoit faire encore beaucoup d'honneur à Pontanus de lui laiffer prendre le rang d'après Catulle fur le Parnaffe.

La modération de ce fentiment eft d'autant plus remarquable que Sabinus étoit un de ces zélés admirateurs de Pontanus, qui tâchoient de le rendre égal aux plus grands hommes de l'Antiquité. Et l'on doit encore eflimer la violence qu'il s'eft faite pour excepter Virgile de ce nombre, & pour vouloir reconnoître que Pontanus a tâché de fe former fur ce modéle, afpirant à la perfection du genre héroïque. Il dit qu'il n'y a rien dans la majesté, la mefure, la cadence, l'ingénuité, la douceur, la force, la gravité, l'élévation, la clarté, l'agrément & les autres qualités ou ornemens du vers héroïque dans Virgile, qu'il n'ait obfervé fort éxactement, & qu'il ne fe foit rendu comme propre & naturel (10).

8. Jacob. Gaddius tom. 2. de Scriptorib. Non-Ecclefiaft. pag. 164. 165. & fequentib. apud Leon. Nicod. in Addit. ad Nic. Topp.

9. Francifc. Florid. Sabin. Apclog. adverf. calumniat. L. L.

10. Gerard. Joh. Voffius lib. fingul. de Poëtis Latin. pag. 78. 79. ex eod. Flor. Sabino.

11. Lil. Gregor. Gyrald. Dialog. 1. de Poëtis fui avi pag. 383. 384. &c.

12. Olaus Borrichius Differtation, de Poët. Latin. pag. 103. 104.

13. Leonard. Nicodem. add. ad Bibliothec. Neapolitan, Nic. Topp. in Gioviano.

Le Giraldi parlant des Poëtes de fon Pentanus, fiécle, dit (11) qu'il a coutume de comparer notre Pontanus avec tous ceux de l'Antiquité; mais que ce Paralléle, qui ne mérite pourtant pas ce nom à caufe de fon inégalité, ne fert prefque qu'à lui faire voir. la différence qui fe trouve entre le Poëte moderne & ceux d'entre ces Anciens principalement, qui font au-deffus de toute comparaifon. Il prétend que Pontanus fe donne trop de liberté, qu'il n'a point affés de fermeté ni d'uniformité, & qu'il n'eft pas même toujours fort régulier, foit parce qu'il n'a pas crû devoir s'atfujettir à des régles qu'il ne jugeoit pas bien établies, foit parce qu'étant Sécrétaire d'Etat fous le Roi Ferdinand, & Préfident de la Chambre Royale ou de la Cour Souveraine de Naples, les affaires publiques lui ôtoient le loifir qu'il auroit fouhaité donner aux Mufes. Mais ces obftacles n'ont pû empêcher néanmoins qu'il ne devînt le plus docte, & le plus accompli des Poëtes de fon fiécle, felon le même Giraldi, & qu'il ne pallat même Politien en élégance, en beauté & en politeffe. C'a été auffi le fentiment de Mr. Borrichius (12), & le Sieur Lionardo Nicodemo qui a fait les additions à la Bibliothéque Napolitaine du Toppi, prétend (13) que Pontanus eft à l'égard de Politien ce qu'Entellus avoit paru à l'égard de Dares.

7. Léonard Nicodéme n'a fait en cela que copier.

Jules Scaliger reconnoît (14) que les Poë fies de Pontanus ont du nerf, de l'harmonie, du naturel, & de la beauté (15); & que toutes ces qualités jointes enfemble, ont bien été capables de former le corps de. fes vers, mais qu'elles n'ont pû leur donner l'ame qui confifte dans la belle médiocrité, & dans le jufte tempérament qui eft néceffaire à toutes chofes. Il a fait, dit

mot à mot Gyraldus.

il,

14. Jul. Caf. Scaliger Hypercritic. feu lib. 6. Poëtices cap. 807.

15. T. Ces deux mots candorem & venuftatem qu'il rend par du naturel & de la beauté, devoient être rendus par de la netteté, & de l'agrément. Pontan n'avoit pas beaucoup de naturel pour la Poëfie. Raphaël Volaterran qui l'avoit connu en rend ce témoignage, & le compare à Silius Italicus, moins Poëte par nature que par art; ajoutant qu'il étoit néanmoins parvenu en imitant les anciens à mettre dans fes vers une politeffe qu'aucun de ses contemporains n'avoit égalée,

Pontanus. il, le contraire de ce qu'on raconte de Vir- fes Epigrammes (1), ajoutant avec raison Pontanus, gile, qui avoit coutume de produire un que cela en diminue beaucoup le prix. grand nombre de vers le matin que fon efprit étoit plus libre, plus tranquile, & en mêACCIUS, me tems plus échauffé, & qui les réfor moit l'après midi par des retranchemens qui réduifoient fouvent ces productions du matin à la dixiéme partie de ce qu'elles étoient.

Poëte Moderne, vivant au commencement
du feiziéme fiécle, felon Jules Scali-
ger (2).

Au lieu que Pontanus jettoit fur le pa- 1238. ON attribuoit à cet Auteur une Accius,

pier tout ce que fon imagination lui four-
niffoit d'abor, & qu'en le relifant il a-
voit coutume d'y ajouter toujours quelque
chofe & d'y inferer de nouveaux vers. Ain-
fi il femble avoir eu pour fes vers plus de
refpect & de retenue que pour fa propre
réputation, à laquelle il a fait une brêche
confidérable pour n'avoir ofé toucher à
ceux-là. C'est ce qui l'a rendu trop diffus,
& trop enflé dans les endroits même où
l'on trouve des agrémens.

Mais il y a un défaut dans les Poëfies
de Pontanus, qui eft encore plus confidé-
rable que ceux que nous venons de mar-
quer. C'eft celui de l'honnêteté & de la
pudeur, qu'il n'a point fait difficulté de
violer en divers endroits par des expreffions
lafcives & par des obfcénités. C'est ce
qu'Erafme a remarqué principalement dans

1. Erafm. in Dialogo Ciceroniano pag. 204.

2. q. On a déja remarqué dans le Ménagiana pag. 172. & 173. du tom. 1. que Jule Scaliger le trompoit extrémement, foit dans le jugement trop avantageux qu'il faifoit de cet Auteur, foit dans le tems où il le faifoit vivre, le plaçant vers le milieu du feiziéme fiécle, quoiqu'il fût aifé de prouver qu'il étoit plûtôt du treizième. 11 fe trompe encore & bien fort quand il l'appelle Accius, apparemment parce qu'il avoit vu une vieille édition de ces fables in 8. fans marque de tems ni de lieu, mais très-asfurément d'Italie, le premier feuillet defquelles por toit ce titre: Fabula de Efopo hiftoriate, & celui-ci au revers: Accii Zucchi Summa Campanee Veronenfis viri eruditiffimi in Æsopi Fabulas interpretatio per rythmas in libellum Zuccharinum infcriptum contexta feliciter incipit. Ce titre que j'ai copié tout au long avec fes fautes d'orthographe, fait voir que Scaliger n'a pas pris garde qu'Efope eft regardé comme le véritable Auteur de ces fables Latines en vers Elégiaques, & que cet Accius Zucchus né dans la Campagna di Verona eft Auteur de la Summa; c'est-à-dire du Commentaire Italien fur ces fables. Ce Commentaire confifte en deux mauvais Sonnets à la fuite de chaque fable, le premier intitulé Sonetto materiale, parce qu'il eft comme une traduction litérale de la fable Latine; le fecond, Sonetto morale, parce qu'il expofe le fens moral qu'elle contient. Rien au refte ne marque mieux le peu de goût de Scaliger en matiére de ftyle que

Paraphrafe des Fables d'Efope

en vers Elégiaques. Jules Scaliger dit (3) que c'eft un Poëte tout-à-fait éxact & fort harmonieux. Il ajoute que fes Maîtres avoient remarqué qu'il n'avoit jamais fait une Ecthlipfe, c'est-à-dire, une élifion de I'm dans tous fes vers, mais que pour lui il en avoit pourtant trouvé une ou deux (4). Mais voici, dit ce Critique, le jugement que je fais de cet Auteur. Il a fi bien dit ce qu'il a voulu dire que je n'aurois pas pû mieux faire MOI-MEME. C'est pourquoi les Poëtes novices doivent l'étudier & Papprendre, non feulement à cause de l'utilité des fables, mais encore pour la netteté & la pureté des vers. Il ne faut pourtant pas s'affujettir fi fort à l'imiter dans l'affectation qu'il fait paroître quelquefois à renfermer beaucoup de fens en peu de mots, & à employer des

poin

l'estime qu'il fait de la diction de ces fables, où l'on
trouve comme Barthius même en convient, les fa-
çons de parler les plus barbares.

3. Jul. Cæf. Scalig. Hypercritic. feu lib. 6. Poëtic.
pag. 789.

4. T. Pour moi qui ai lu ces fables avec attention d'un bout à l'autre, j'ai reconnu que l'Auteur abhorroit fi fort ces élifions que dans le feul endroit de fes vers qui en demandoit une, il n'avoit pas voulu l'admettre ayant mieux aimé dire:

In gallo ftolidum, in jaspide pulchra Sophia

Dona notes,

que de manger devant in la derniére fyllabe de stoli-
dum. Barthius n'a rien fait qui vaille en lifant con·
tre l'intention du Poëte;

In gallo ftolidum, tu in ïaspide pulchra Sophia

Dona notes.

Il n'a pas pris garde que l'Auteur écrivoit & pro-
nonçoit jafpis comme jam & jactare, témoin ce 2.
vers de la même fable qui eft la premiére de toutes:
Dum ftupet inventa jafpide, gallus ait.

5. T. Quelques-uns difent que fon nom de famil-
le étoit Hungaret. 11 ne peut avoir vécu au commen-
cement du 16. fiécle, puifqu'il mourut avant Mathias
Corvin Roi de Hongrie, mort l'an 1490. C'eft ce
que Pierius, cité ici par Baillet, attefte l. 1. de Lite-
rat. infelic.

6. q. 11 étoit fils de Jean Huniade, mais il n'est appelle que Corvin: Mathias Corvin, & non pas, Mar

Janus

pointes & des jeux de mots comme on feroit dans l'Epigramme.

JANUS (5) PANNONIUS,

Evêque de la Ville de Cinq-Eglifes dans la baffe Hongrie, dite par les Allemans

J. FRANC. QUINTIANUS STOA (9)

De Breffe, vivant vers l'an 1510. & plus tard (10) Poëte Latin.

Auteur a fait diverfes Poë- Quintianus

Funfkirchen, par les Hongrois Otegia- 1239. Et Chrétiennes fur les princi- Stoa.

fac, & par les Turcs Petfcheu, vivant fous le Roi Mathias Huniade (6), au commencement du feiziéme fiécle.

C'E

1238. 'Etoit le premier homme de fon Pannonius. bis. pays pour les belles Lettres qu'il étoit venu cultiver en Italie auparavant que de les faire fleurir en Hongrie. On dit qu'il parloit & qu'il écrivoit en Latin comme un Romain du bon fiécle, & en Grec comme un véritable Athénien.

Il a laiffé des Elégies & des Epigrammes qui lui ont acquis de la réputation, au moins en fon tems. Mais quelques-uns prétendent qu'il s'eft furpaffé lui-même dans les Annales d'Hongrie qu'il a mifes en vers héroïques (7). En un mot il avoit trop de mérite pour avoir donné lieu à la difgrace dans laquelle Pierius dit qu'il finit Les jours (8).

* Panegyricus, Elegia, & Epigrammata. in-8. Venet. 1553.

Mathias Huniade.

7. ¶. Cet Ouvrage n'eft point connu, & nul Auteur digne de foi n'en a parlé.

8. G. Math. Konigius Biblioth. Vet. & Nov. pag. 604.

Joh. Pierius Valerian. de infelicitate Literator. pag.

27. 28. &c.

9. q. 11 quitta, dit le Ghilini, fon nom de famille, qui étoit Conti, pour prendre celui de Quintianus, de Quinzano Bourg où il naquit dans le territoire de Breffe. Quintianus, lui, nous en donne une autre raison que fa vanité lui fait imaginer. Il dit que les Poëtes fes camarades le furnommérent ainfi, parce qu'il prenoit soin de les garantir des Plagiaires, à l'exemple de ce Quintianus qui en garantiffoit Martial, comme celui-ci le témoigne, Epigramme 53. du 1. livre. Cela eft un peu tiré de loin. Un trait de vanité encore plus grande, lui a fait dire que fes mêmes camarades admirant fa prodigieufe facilité pour les vers, jufque là qu'il en faifoit quelquefois un millier par jour, s'écrioient en le voyant, qu'il étoit Muov sod, le portique des Mufes, d'où cet autre furnom de Stoa lui étoit demeuré. Tout cela fe trouve en divers endroits de fes Epographies, c'eft le titre d'un Traité de profodie qu'il a compofé, où voulant enfeigner la jufte mesure des fyllabes, il enfeigne fouvent à faire bréves les longues, & longues les brévės.

10. ¶. Quintianus c, 21, de fa 1. Epographie dit

fies

paux Myfteres de notre Rédemption, & particuliérement fur la Naiffance de J. C. fur fa Mort, fa Réfurrection, fon Afcenfion, & fur le Jugement qu'il doit faire des vivans & des morts. Elles parurent à Paris in-fol. en 1514. avec les autres Ouvrages (11).

Jules Scaliger témoigne (12) qu'il eft un peu plus éxact dans fes vers que dans fa profe, ou du moins que fes affectations y font plus fupportables; mais qu'ayant fuivi le génie des deux Beroaldes & de J. B. Pie (dont nous avons parlé aux Critiques Grammairiens), il a augmenté encore leurs fautes par la grandeur de fon efprit (13).

Il ajoute que les Sommaires qu'il a faits des Métamorphofes d'Ovide, font affés connoître que rien ne lui manquoit que le jugement (14). I reconnoît pourtant qu'il y en a un peu dans une Tragédie (15)

que

qu'il n'y avoit pas long-tems qu'il étoit dans fa 25. année, & comme ce fut le dernier de Juin 1511. qu'il acheva ce Traité, on juge de là qu'ayant 25. ans en 1511. il étoit né l'an 1486. Jean Planerius Quintianus, dont il y a 57. Epitres Latines imprimées à Venife in-4. 1584. a écrit dans la 56, la Vie de ce Quintianus fon compatriote, qu'il dit être mort d'efquinancie le 7. d'Octobre 1557. agé de 73. ans, d'où il s'enfuivroit que Quintianus feroit né en 1485. Cela n'eft pas d'une grande conféquence, d'autant plus que le Ghilini ne donnant à Quintianus que 72. ans de vie, cet age s'accorde bien avec le tems de la naiflance du Poëte placée en 1486. avant le mois de Juin, & avec le tems de fa mort placée en 1557. au mois d'Octobre.

11. . Ce fut Badius qui imprima en 1514. à Paris in-fol. les Ouvrages ici fpécifiés: mais ce fut Jean Gourmont qui la même année y imprima in-4. d'autres Poëfies du même Auteur, favoir la Cléopolis, l'Orphée, les Diftiques fur chaque fable des Métamorphofes d'Ovide &c. C'est ce qu'il étoit à propos de diftinguer.

12. Jul. Cæf. Scalig. Hypercritic, feu lib. 6. Poëtic. pag. 788. 789.

13. q. 11 devoit dire par l'extravagance de son esprit. 14. . Il faloit ajouter & le ftyle.

15. . Il y a deux Tragédies de Quintianus, l'une de la Paffion Theandrothanatos, l'autre du Jugement final Theecrifis, dont la meilleure ne vaut rien.

Quintianus que Stoa avoit faite, & qui n'eft pas tout à-fait à rejetter felon lui, difant que la difficulté de la matiére ne l'a point empêché de faire de bons vers.

Stoa.

JEAN AURELIUS AUGU-
RELLUS,

De Rimini, furnommé Le Petit-homme
au grand Génie (1), Poëte Latin, vi-
vant vers l'an 1510. & 1515. mort âgé
de 83. ans à Trevis.

Augurel- 1240.

des Elégies, dans lesquelles Na de cet Auteur des Odes & Paul Jove dit (2) que l'on trouve une fimplicité tout-à-fait Romaine, & des vers iambes, qui, felon le même Auteur, approchent allés de la perfection de ceux des Anciens; ce qui eft d'autant plus eftimable que perfonne d'entre les Modernes n'y a

voit encore réuffi.

Mais Scaliger prétend que les iambes qu'il a mêlés parmi fes piéces Lyriques, font moins coulans & moins beaux que les autres, qu'ils n'ont ni liaison ni force pour fe foutenir (3). Il a donc fait auffi des piéces Lyriques, mais elles ne font prefque pas fupportables au jugement du même Critique; parce que ce genre de Poëfie demande de la vivacité, de l'enjoument, de la force, de la délicateffe, de la nobleffe,

1. q. Ceci est avancé fans preuve. On n'en fait du moins aucune, fi ce n'eft que Baillet en lifant cet éloge d'Augurel dans Paul Jove: Non eft cur miremur in pufillo corpore vivaciffimi hominis Aurelii Augurelli praaltum ingenium enituiffe, ait cru que ces paroles in pufillo corpore præaltum ingenium n'etoient pas de l'invention de Paul Jove, mais qu'il les avoit rapportées comme une façon de parler qui couroit alors en faveur d'Augurel, & qui avoit paffé en Proverbe. Ce qui eft une pure illufion. Voyés touchant cette louange de praaltum ingenium donnée à Augurel, ce qu'en a dit Balzac dans fes Entretiens pag 615. du tom. 2. in-fol.

2. Paul Jovius Elogior. num. 68. pag. 159. 160. edit, in-12.

3. Jul. Cæf. Scaliger Hypercritic. feu lib. 6. Poëtic. pag. 785.

4. . Il faloit dire Chrysopée. On a fait bien des contes d'Augurel à l'occafion de ce Poëme: Entre autres que l'ayant préfenté à Leon X. le Pape en reconnoiffance lui avoit donné une belle & grande bourfe toute vuide, difant qu'un homme qui avoit le fecret de faire l'or, la rempliroit aifement. Ce qu'en rapporte Verville chap. 79. de fon Moyen de parvenir, eft fort plaifant.

5. Lorenzo Craflo de Poët, Græc. pag. 80,

de la grandeur, un tour aifé, un air poli, Augurel& beaucoup de jugement. Cependant Au- lus. relio Augurelli n'avoit prefque aucunes de ces excellentes qualités, & fes Lyriques font dans le genre le plus bas & le plus rampant, & ils font fans charnure, fans couleur & fans ame.

tablement que des difcours, c'est-à-dire des Ses Difcours ou Sermons ne font véritées fans folidité, on n'y trouve aucune fomots & du babil, les chofes y font débilidité, tout y eft trivial pour ne pas dire gre, pour me fervir des termes du Criti fordide, enfin il n'y a mis ni fel ni vinaique.

Augurelli étoit fou de la paffion de souffler & de faire de l'or, & il en fit un Poëme fous le titre Grec de Chryfopoie (4); ce qui a donné lieu à plufieurs de le railler, comme l'a remarqué Lorenzo Craffo (5). Cependant c'est la meilleure de fes piéces, au jugement des Connoiffeurs. Scaliger lui-même témoigne qu'elle eft plus travaillée que les autres, mais il ajoute qu'elle n'a prefque rien de l'efprit Poëtique, & qu'elle eft fi languiffante, que vous diriés qu'elle n'eft compofée que de vers qui vont rendre l'ame.

* Jo. Aur. Augurelli, lib. 111. Chryfopoe Carmin. in 8. Antuerpia 1582.

Ejufdem Poëmata quædam in-8. De

net.

6. ¶. Baillet, ce qui eft remarquable pour un Bibliothécaire, ne connoiffant point un Poëte auffi fameux que le Pulci, & n'en pouvant rapporter que ce qu'il en avoit lu dans les Réflexions du P. Rapin fur la Poëtique, fe trouva extrémement embaraffé touchant ce qu'il en devoit dire. Pour en avoir des nouvelles, au lieu d'aller à Florence, il prit le chemin de Naples. Il confulta la Bibliothéque du Toppi, où, à la faveur de la Table, ayant démêlé un Aleflio Pulci, Auteur d'un panegyrique du Roi d'Espagne Philippe IV. il s'eft imaginé, parce que ce Pulci étoit d'Aquila au Royaume de Naples, que le Pulci Auteur du Morgante pouvoit bien en être auffi. Jamais conjecture n'a eté moins heureufe que celle-là. Le Pulci dont il s'agit, nommé Luigi, étoit de Flo rence, 11 entreprit fon Morgante à l'inftance de Lucrèce Tornabuoni mére de Laurent de Médicis, morte le 25. Mars 1482. C'est un Poëme en rime octave de 28. chants, d'un goût original. L'Auteur s'y eft mis au deffus des régles, non pas de deflein, comme Vincent Gravina lui a fait l'honneur de le croire, mais parcequ'il les a entiérement ignorées. Fort en repos du jugement des Critiques, il a confondu les lieux & les tems, allie le comique au ferieux, fait mourir burlefquement de la morlure d'un cancre marin au talon le Géant fon Héros, & cela dès le 20.

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Tofcane qui appartient au Pape, vivant vers l'an 1510. (8).

Poëte Italien, dont je ne connois ni le tems ni le lieu natal, à moins qu'on ne dife qu'il étoit d'Aquila au Royaume de Naples, qui eft le lieu de la naissance des Pulci de notre fiécle.

E P. Rapin dit que le Pulci, 1241. dans fon Poëme du Morgante, ne garde pas la bien-féance, & qu'il y confond le férieux avec le plaifant (7).

Il écrit encore ailleurs que ce Poëte pa roît s'être laiffé gâter aux Livres de Che valerie & aux Romans de fon tems. Voyés ci-après au titre d'Ariofte.

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*Morgante Maggiore, composto per Luigi Pulci, in-4. in Firenze 1500. Idem corretto per M.. Lodovico Domenichi in-4. in Vinegia 1545. Girolfo Calvano di Luca Pulci, con la Giostra, del magnifico Lorenzo de Medici in-4. in Fiorenza 1572. Opere Poëtice di Luca Pulci, infiemo con le Epiftole compofte del medefimo in-4. in Fiorenza 1582.

RICHARD BARTOLIN,

De Perouse, Ville de cette partie de la

livre, enforte qu'il n'en eft plus parlé dans les huit fuivans. La naïveté de sa narration a couvert tous ces défauts. Les amateurs de la diction Florentine font encore aujourd'hui leurs délices de la lecture du Morgante, fur tout quand ils en peuvent rencontrer un éxemplaire de l'édition de Venise 1546, our 1550. accompagnée des explications de Jean Pulci neveu de l'Auteur. Quelques-uns comme Teofilo Folengo ftance 20. du chant 1. de fon Orlandino, & après lui Ortenfio Lando dans fa Sferza de gli Scrittori ont voulu attribuer le Morgante à Politien, & dire qu'il en avoit fait don au Pulci, à quoi il n'y a pas d'apparence, tout ce que nous avons de Poëfies Italiennes de Politien étant d'un ftyle très différent, outre qu'étant mort, comme on fait, à 40. ans & ayant travaillé en profe & en vers à tant d'autres Ouvrages qui demandoient une grande application, il n'auroit pas eu le loifir de compofer un Poëme de fi longue haleine. Le Morgante du Pulci, & ses stances à la villageoife in lode de la Beca ont place parmi les écrits claffiques dans le Dictionnaire de la Crufca. Je le crois mort quelques 5. ou 6. ans avant Laurent de Médicis fon patron qui mourut le 9. Avril 1492.

7. René Rapin, Réfléxions fur la Poëtique 1. partie Reflex, xxxix. Item Réflex. xvi. a. part.

1242. douze Livres fous le titre d'Aus- Bartolin. triade, à l'honneur de la Maifon d'Autriche, & un Itinerare.

La fait une efpéce de Poëme en Richard

Gafpar Barthius témoigne (9) qu'il n'auroit point fait difficulté de le comparer à quelques-uns des Anciens, s'il eût bien fû ménager fon efprit & fes forces, appliquer les régles que fon jugement pouvoit lui preferire, & faire un bon ufage de fon éloquence.

Janus Douza nous affure (10) que Bartolin avoit entrepris plus qu'il n'étoit capable d'éxécuter, & qu'ainti on ne doit pas s'étonner de l'avoir vû fuccomber fous le fardeau, mais qu'il mérite au moins quelque louange pour avoir tâché de donner au Public des marques extraordinaires du respect & du zèle qu'il avoit pour fon Prin. ce qui étoit alors Maximilien I.

Il fut dix ans à travailler fur cet Ouvrage, dans lequel il a voulu décrire la guerre des Ducs de Baviere & des Comtes Palatins. Nous avons ce Poëme parmi les Hiftoriens d'Allemagne, recueillis dans le tome qu'a publié Juitus Reuberus. Nous l'avons encore féparément avec les Commentaires d'un Ecrivain d'Alface, nommé Jacques Spiegel (11). Les

8. . Il faloit dire vivant l'an 1515. & apparemment quelques années au-delà, parce que dans le Recueil des cent Lettres Philologiques publiées par Goldaft, il y en a une de ce Bartholin datée de Vienne le 27. Juillet 1515. & qu'il étoit plein de vie le 6. d'Octobre fuivant comme en fait foi l'Epitre dédicatoire de Joachim Vadien au devant de l'Aufiriade.

9. Gafp. Barth. Comment. in Stat. Papin. ad lib. 2. Thebaid. pag. 279.

Et ex co G. Konigius in Biblioth. Vet. & Nov. pag. 88.

10. Janus Douza P. Præfat. fecundá Annal. Batavicor. Carmine confcript.

Et ex eo Ger. Joh. Voffius lib. 3. de Hiftor. Latin, cap. 12. pag. 679.

11. 4. C'eft ce qui a fait prendre pour Allemand ce Poëte à l'Auteur de l'Art de penter, foit Mr. Arnaud, foit Mr. Nicole chap. 19. de la 3. part. dans cet endroit que je rapporterai tout au long parcequ'il contient une judicieufe Critique d'une faute d'autant plus réprehenfible dans Bartholin qu'il étoit Ecclehaftique,, Il y a même des Poëtes, dit l'Auteur ,, de l'Art de penfer, qui s'imaginent qu'il eft de l'effence de la Poefie d'introduire des Divinités Païennes, & un Poëte Allemand aufli bon verfi,,ficateur, qu'Ecrivain peu judicieux, ayant été re›› pris

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