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Les deux BEROALDES (1) de
Boulogne,

(Philippes). Le Pere né l'an 1450. & mort
l'an 1510. (ou 1504. felon d'autres, âgé
de 51. ans). Le Fils paroiffant princi-
palement depuis l'an 1515.

LesBeroal- 1243. Jregarde leur Poëtie, ayant parlé

E ne rapporterai ici que ce qui

des.

peut dire que l'un & l'autre partagent éga- LesBeroal lement ce que ces vers ont pu leur produi- des. re de gloire ou de deshonneur.

MICHEL MARULLE,

De Trachanie ou Tarchanie (6) Grec, natif de Conftantinople, Poëte Grec & Latin, noyé en Tofcane dans la riviére de Cecina le 14. (7) Juin 1511.

ailleurs de ce qu'ils ont fait concernant la 1244. Paul Jove ne fait point difficulté Michel

Critique & la Philologie.

Le Pere étoit un fort médiocre Verfificateur, & chacun (2) femble avoir confpiré à lui préférer fon fils pour la Poefie. En effet, felon Paul Jove, le jeune Beroalde excelloit dans les vers Lyriques (3): & je crois que c'eft de lui plutôt que du Pere, que Mr. Borrichius a voulu parler, lorfqu'il a fait les Eloges des Lyriques, des lambes, des Hendecafyllabes, des Epigrammes, & des Elégies de Béroalde; & que c'est au Pere qu'appartiennent les vers Epiques (4), que le même Critique blâme comme des vers rampans (5). Mais parce que les vers de l'un & de l'autre paroisfent confondus dans le premier tome des Délices des Poëtes Latins d'Italie, comme s'ils n'étoient que d'un même Auteur, on

"

,, pris avec raifon par François Pic de la Mirande d'avoir fait entrer dans un Poëme, où il décrit des guerres de Chrétiens contre Chrétiens, toutes les Divinités du Paganifme, & d'avoir mêlé ,, Apollon, Diane, Mercure, avec le Pape, les E,, lecteurs, & l'Empereur, foutient nettement que fans cela il n'auroit pas été Poëte, en fe fervant » pour le prouver, de cette étrange raifon, que les vers d'Héliode, d'Homére, & de Virgile font ,, remplis des noms & des fables de ces Dieux, d'où il conclud qu'il lui eft permis de faire le ,, même.

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1. 4. J'ai ci-deffus à l'article 324. fait voir par de très-bonnes preuves que Beroalde furnommé le jeune mort l'an 1518, étoit neveu & non pas fils du Béroalde furnommé l'ancien mort le 17. Juillet 1705. 2. Lil. Gregor. Gyrald. Dialog. 1. de Poëtis ævi fui.

3. Paul. Jov. lib. 3. de Vita Leonis X. Pont. Rom. pag. 67. edition. 1549. & ex eo Voff, de Hiftor. Latin. lib. 3. cap. 11. pag 668.

4. . Ces vers Epiques ne confiftent qu'en deux pieces, en une verfion du Cantique de Pétrarque à la Vierge, Vergine bella, & dans une Lamentation pour le Vendredi Saint. C'eft ce que Marot qui l'a traduite appelle les triftes vers de Béroalde.

s. Olaus Borrichius Differt. de Poëtis Lat. pag. 95. 6. T. Que veut-il dire par ces mots de Trachanic

rable dans fes vers Grecs & dans fes Latins, ajoutant que fes Poëfies ont eu du cours & du fuccès dans le Monde (8).

C'est un éloge un peu exceffif, pareil à plufieurs de ceux que cet Auteur à donné à d'autres. Car Marulle n'a jamais paffé dans l'efprit des Critiques (9) pour un merveilleux Poëte. Quoiqu'il fût Grec de naiffance, il avoit néanmoins plus d'inclination & de facilité même pour les vers Latins. Mais Scaliger témoigne qu'on n'y trouve que de la dureté, du caprice, & du chagrin, qu'il n'a aucun agrément, & que Crinitus a fuivi les mouvemens de fon amitié plûtôt que les régles de la vérité, lorfqu'il lui a donné des louanges (10).

Scaliger ne s'eft pas contenté de nous

don

ou Tarchanie, comme fi c'étoit quelque payis ainfi nommé dont Marulle fût originaire. Il étoit de Conftantinople. Michel eft fon nom de batême, & fes deux autres noms Marullus Tarchaniota fignifient que du côté paternel il étoit de la famille des Marulles, & du maternel de celle des Tarchaniotes, noble l'une & l'autre. Son pere s'appelloit Manile Marulle, fa mére, Euphrofynė Tarchaniote. Bayle en a fait la remarque au mot Marulle.

7. 4. Ce fut le x1. Avril 1500. Voyés Bayle au mot ci deffus marqué, lettre F.

8. Paul. Jovius Elog. 28. pag. 66. 67. edit. in-12,

9. . Il faloit dire dans l'esprit de certains critiques, car Marulle conftamment foit pour l'expreffion, foit pour la penfée, a parfaitement réuffi dans la plûpart de fes vers. On y trouve le τὸν ἀρχαῖον πῖνον. Voyes Victorius fur l'Epitre 20. du x1. 1. de Cicéron ad familiar.

10. Jul. Cæf. Scaliger Hypercritic, feu lib. 6. Poëtic. cap. 4. pag. 769. & feqq.

11. Erafme in Dialog. Ciceronian. pag. 161. editio. Lugd. Batavor. Et in Epiftola ad Jofeph. Wimphelingum.

T. Il n'y a dans l'édition des Oeuvres d'Erafme à Leyde, qui eft la plus ample de toutes, qu'une feule Lettre très-courte à Wimphéling, dans laquelle il n'eft parlé ni de Marulle, ni de Mantuan. J'avouë que le P. Cuper Carme dans fon Epitre dédicatoire

des

Michel

Marulle.

donner une notion générale de la qualité des vers de Marulle, il a voulu nous faire voir encore par le détail d'un affés long éxamen qu'il en a fait,qu'il ne l'a point blamé en vain, & qu'il auroit encore pû l'accufer de peu de jugement & de quelques autres défauts. Erafine faifoit fi peu de cas de ce Poëte, qu'il dit qu'il aimoit mieux un demi-vers du Mantouan que dix

mitte vers des fiens (11). Il veut croire

pourtant qu'ils feroient allés tolérables s'il y avoit moins de Paganifine (12). C'est peutêtre à quoi Voffius a voulu nous faire faire réfléxion, lorfqu'il dit que la Religion de Marulle étoit fufpecte, & qu'il n'étoit pas fort bon Chrétien, quoiqu'il fût d'ailleurs aflés favant (13).

Mais au rette Marulle avoit beaucoup meilleure opinion de lui-même que les autres. Il ne fe croyoit inférieur à perfonne (14), & nous avons dit ailleurs combien il avoit mauvaise grace de méprifer & maltraiter Politien qui le paffoit de fort loin (15). * Michael. Tarchaniote Marulli Epigrammata Hymni in-8. Parif. 1529. & & in-12 1561. Ejufdem Poëmata in-8. Spira 1595. Epigrammata & Hym

ni in-4. Argent. 1509.

des Oeuvres de Mantuan imprimées en 4. volumes in-8. à Anvers 1576. cite la Lettre d'Erafme à Wimpheling, & en rapporte les termes que Baillet a indiques: Malim hemiftichium Mantuani, quam tres Ma rulicas myriadas, ce qui fignifie trente mille vers de Marulle, & non pas dix mille, comme l'a interprété Baillet. Mais encore une fois cette Lettre, que je ne crois pourtant pas fuppofée, ne fe trouve pas dans le corps des imprimées.

12. Erafine faifoit alors le dévot à contre-tems. Il s'agiffoit, religion à part, de favoir qui faifoit le mieux des vers, de Marulle ou de Mantuan? J'avertirai ici par occafion qu'il y a une édition in-8. très-rare d'environ quatre ou cinq cens vers de Marulle lefquels je penfe avoir été feparés des autres comme n'étant pas dignes d'être imprimés. Ils l'ont pourtant été fous le titre de Marulli Nenia à Fano 'an ISIS. par les foins de Marc Antoine Flaminius agé pour lors de 18. ans.

13. Voffius de Hiftoricis Lat. lib. 3. cap. 8. pag. 616. . L'irreligion de Marulle ne l'empecha pas de traduire en vers Latins la chanfon de Petrarque Vergine bella. Le Crefcimbeni pag. 192. du Commentaire fur fon Hiftoire della volar Pofia dit avoir vu cette traduction que Marulle fit apparemment pour contrecarrer celle de Philippe Beroalde l'ancien. Le même Crefcimbeni ajoute que Marulle avoit auffi fait un Capitolo en rime tierce & un Sonnet, l'un

Tom. IV..

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JEAN ANDRE' (16) LASCARIS,

Defcendant des Empereurs de ce nom, Grec de Rhyndace, vivant en Italie & en France fous Leon X. (17) & Louïs XII. Poëte Grec & Latin, mort à Rome âgé de près de yo aus.

1245. Lafcaris a laillé un grand nombre d'Epigrammes en l'une & l'autre Langue, & que ce que l'on en a imprimé à Bâle, n'en eft qu'une fort petite partie (18).

E Giraldi nous apprend que ce Lascaris,

Erafine dit qu'il paroît vif, judicieux & harmonieux dans fes Epigrammes, mais que les emplois qu'il a eus dans l'Etat pour des Negociations & des Ambaffades, l'ont empêché de faire quelque chofe de meilleur (19).

QUINTIUS EMILIANUS

CIMBRIACUS,

Poëte Latin d'Allemagne, vivant vers l'an 1515. (20).

1246. LEs Poëfies de cet Auteur ont Cimbriaparu à Francfort en divers tems cus. & en diverfes forines. Quelques Criti

ques

& l'autre à l'honneur de la Croix, mais qui n'ont été ni l'un ni l'autre imprimés, & qui ayant été faits vers l'an 1490. fe tentoient fort du mauvais goût de la Poëfie Italienne de ce tems-là.

14. Idem G.J. Voff. lib. fing de Puet. Lat pag. 81. 15. ¶. Politien dans les vers de Marulle eft defigné par le nom d'Ecnomus, exvoues iegulier ou mechant; & Marulle dans ceux de Politien par le nom de Mabilius quafi mala bilis.

16. ¶. Andre Jean. Voyés ci deffus l'Art. 323. 17. . Il faloit dire fous Leon X. Hadrien VI. Cle ment VII. Paul III. Papes, & Louis XII. & François I. Rois de France.

18. . Il ya dans l'édition de Bâle in-8. 1537. douze Epigrammes Grecques de moins que dans l'Edition de Paris in 4. 1544. Daniel Heinfius dans l'Epitre dédicatoire de fon Peplus, à quelques unes près qui lui paroiffent fort bonnes, trouve dans le refte de la durere & de l'obfcurite.

Lil. Greg. Gyrald. Dialog. 1. de Poët. fui ævi, & ex co Laurent. Craff. de Poët. Græc. pag. 257. Ital.

19. Erafin. Dialog. Ciceronian. pag. 159. edit. in12. Lugd. Bat.

20. ¶. J'ai dit un mot de Cimbriacus page 33. du Menagiana tom. 2. où j'ai fait voir qu'il etoit un des perfonnages des Dialogues de Petrus Hoedus dont nous avons un Ouvrage intitulé de amoris gene

E

ribuz

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Cimbria ques prétendent (1) qu'il n'étoit inférieur ni à Pontanus ni à Strozza pour l'Epigramme & l'Elégie; & que fi on avoit voulu lui faire bonne juftice, on lui auroit donné peut-être la préféance fur ces deux Poëtes. Emilien a beaucoup d'agrémens, difentils, mais il a encore plus de gravité. Les plus eftimées d'entre fes piéces, font l'Asteride ou de la guerre de Rhode, & les Encomiaftiques aux Empereurs Maximilien & Frederic jufqu'au nombre de cinq, entre lefquels il s'en trouve un à Frederic qui a enlevé la palme aux autres.

touan,

*Poëmata Quintii Emiliani in-8. Francofurti 1612. Ejufdem Encomiaftica Ejufdem Encomiaftica quinque ad Fridericum Maximilianum in-8 ibidem 1602.

LE MANTOUAN,

(Battista Spagnolo) Général des Carmes, né l'an 1448. fous le Pape Nicolas V.mort l'an 1516. fous Leon X. appellé par quelques-uns Johannes Baptifta Hifpaniolus (2) en Latin. Paul Jove qui par le fort mal de fa naiffance (3) lui donne plus de 80. ans de vie, mais il fe trompe auffi bien que ceux qui l'ont fait naî tre l'an 1444. (4)•

Le Man- 1247.Uoiqu'il y ait un grand nombre des Poëties du Mantouan qui ait vû le jour, nous ne pouvons pas néanmoins nous vanter encore de poffeder

ribus ou Anteroticorum libri 3. Petrus Hoedus étoit un Prêtre de Pordenone, Bourg du Frioul, & j'ai opinion que Cimbriacus étoit d'un payis voifin. Ce qui m'y confirme, c'est que Sabellic Elégie s. met Cimbriacus in Cenomanis, en ces termes:

Cupidufque huc plectra require. Cenemani multum febria Cimbriaci.

Les Cenomani d'Italie font les peuples de la Marche Trévifane contigue au Frioul. Le voifinage de Cimbriacus & de l'etrus Hoedus fit naitre leur liaifon. Cimbriacus n'étoit donc pas Alemand. Il auroit du, s'il l'avoit été, avoir en qualité d'ancien le pas fur Conradus Celtès, celui-ci n'étant né qu'en 1459. au lieu qu'il feroit aifé de prouver par l'Elégie de Sabellic ci-deflus alléguée, que dès ce tems-là Cimbriacus étoit déja reconnu pour un Poëte contemporain d'Antoine de Palerme, qu'on fait qui mourut affes agé en 1467. Ce qu'on voit de Poëfies de Cim-. briacus ne va pas à 500. vers qui ont été imprimés non pas à Francfort, mais à Vienne en Autriche &

par la gratification de l'Imprimerie toutes Le Man celles qu'il avoit compofées, s'il eft vrai, touan. comme on le publie, qu'il avoit fait plus de cinquante-cinq mille vers (5).

Le bon homme Tritheme n'a point fait difficulté de dire (6) que notre Mantouan a égalé Virgile pour les vers, & Ciceron pour la profe, il doute même s'il n'a point furpaflé ce dernier. On doit l'excufer d'en avoir dit fi peu fur la bonne volonté qu'il a eu de faire encore quelque chofe de plus, & fur l'impuiffance de rien ajouter à ce qu'il a dit. Mais au refte il n'étoit pas le feul homme de mauvais goût qui fût dans ce fiécle, où la barbarie que les beaux esprits chaifoient de la République des Lettres, ne laiffoit pas de trouver encore quelque retraite chés les perfonnes fimples & ignorantes.

Il faut qu'il y en ait eu un peu parmi tant de bien-veillance que fes compatriotes ont témoigné avoir pour lui, lorfqu'ils ont prétendu l'élever fur un degré de gloire auffi exhauffé que celui de Virgile, en lui dreffant une Statuë de marbre couronnée du Laurier Poëtique, auprès, & à l'égal de celle de cet ancien Prince des Poëtes.

Si les Compatriotes du Mantouan s'applaudiffoient d'avoir formé un fi beau parallele, fes Confreres de Religion n'endevoient pas être, ce femble, trop mécontens, puifque la gloire de leur membre, & qui plus eft de leur tête, pouvoit rejaillir

fur

à Strasbourg in-4. Ce font 4. plaintes funébres en
mauvais hexamêtres fur la mort de l'Empereur Fré-
déric III. arrivee en 1493. Elles ne virent le jour
qu'en 1514. Publicum modo accipiunt, dit Jaques Spié-
gel qui les publia, Emiliani Cimbriaci Nenia, jam-
pridem flutei pertafa. Les Elégies, Epigrammes &
autres pieces que Sabellic dans fon Dialogue de re-
paratione Latina Lingua a dit qu'on lifoit de lui, ne
couroient qu'en manufcrit, ce qui a donné lieu à
Gyraldus de dire que les gens qui les gardoient, s'i-
maginant que c'étoit quelque chofe de
rare, ne vou
loient point, par cette raifon, en faire part au pu
blic. C'eft le fens que je donne à ces paroles: a
inique hujus hominis fcripta ab invidis dicuntur fupprimi.
Cimbriacus, fuivant toutes les apparences, n'a point
paffé le 15. fiecle. Son nom derive ce femble des
Cimbres a pu le faire paffer pour Alemand. Gyral-
dus l'a même nommé Cimbricus, mais Sabellic dans
ces mots que j'ai cites de luf,

Cupidufque buc plectra require
Cenomani multum febria Cimbriaci.

Pa

touag

Le Man fur tout le corps. Cependant ils n'en ont point paru tous également fatisfaits, & Pierre Lucius entre les autres n'a pû s'empêcher de donner des marques publiques de la colere & de l'indignation où il étoit de voir la témérité de ces profanes, qui avoient eu la hardielle de comparer le Poëte Païen au Poëte Chrétien, & pour dire plus, à un Poëte Religieux, tel que le Spagnolo, qui pour cette raison seule méritoit d'avoir la ftatue beaucoup plus élevée que celle de Virgile (7).

A dire le vrai, Lucius auroit eu grande raifon de fe plaindre de la plaifante injure qu'il croyoit faite au Mantouan, fi les ftatues & les couronnes du Laurier Poëtique étoient des récompenfes établies pour des Chrétiens, & fi les habitans de Mantouë avoient eu deffein par cet acte d'amour & de reconnoiffance de récompenfer fon Chriftianifme ou fes vertus Monaftiques. Mais les habitans du Parnaffe croyent être bien mieux fondés en raifons, lorfqu'ils prétendent que c'eft leur Virgile qui fouffre l'injure dans un parallele d'autant plus grotesque, que ces deux Auteurs n'ont cu rien de femblable que le furnom de Mantouan. De forte que s'ils trouvent la plainte du Carme Lucius un peu rifible, ils traiteroient auffi volontiers de ridicule la conduite de ceux qui ont donné lieu au parallele.

Jufqu'ici nous n'avons fait que nous divertir de notre Poëte dans le deffein de

paroit y avoir fait une allufion Italienne de fobrio à imbriaco.

1. Au&tor Dialog. de Lat. Ling. reparat, apud Obert. Gifan. pag. 404. & ex eo G. M. Konig. Biblioth, V. & N. pag. 192.

De ces trois citations il n'y a que la premiére qui ferve, puifque les deux autres ne font que la répéter. C'est au refte une grande négligence de citer Gifanius p. 404. comme s'il n'avoit fait qu'un livre, ou que toutes fes Oeuvres fuffent imprimées de fuite dans un feul volume.

2. 4. Parce que fes ancêtres, à ce qu'il dit dans l'Epithalame de Ptolomée Spagnolo fon frére, étoient originaires d'Espagne.

3. ¶. Paul Jove n'a rien affecté là-deffus. Il a dit naturellement ce qu'il en favoit, & j'ai fait voir pag. 273. du Ménagiana tom. 1. qu'en difant que Baptifte Mantuan étoit batard, il avoit dit la vérité. 4. Mantuan lui-même ayant dit dans l'abregé de fa vie,

Itius accepi lucis primordia, quintus In folio Pari cum Nicolans erat

donner lieu au Lecteur de méditer fur l'in- Le Manduftrie que peut avoir un Poëte Régulier, touan. pour favoir allier les devoirs de la Vie Monaftique avec les paffe-tems de la Poëtie. Il faut voir maintenant une partie des jugemens qu'on a faits de fes vers.

On doit confidérer la Mufe du Mantouan comme la vie, qui a paffé par divers âges. Le Giraldi témoigne (8), que les vers que cet homme a faits dans fa jeuneffe font aflés paffables; mais que la chaleur de fon imagination s'étant ralentie depuis, la vivacité s'eft diffipée avec les premiers feux de cet âge floritant. On ne lui trouve plus de force ni de vigueur, ni même de génie, fa veine eft toute refroidie, elle eft lâche, elle eft languillante, & lorsqu'elle fait quelques efforts, vous diriés un ruiffeau tout bourbeux, qui regorge & fe répand par caprice, & qui fort prefque toujours de fon lit, ne pouvant fe contenir dans fes bords.

Effectivement il n'eft pas poffible de lire long-tems les vers que le Mantouan a faits, lorfqu'il étoit un peu avancé fur l'âge, fans tomber dans le dégoût & dans l'impatience; & comme dans la fleur de fon âge il étoit déja dépourvû d'une bonne partie de ce fens que nous appellons commun, comme il avoit dès lors plus de complaifance pour fes propres productions que de docilité, les perfonnes expérimentées n'ont point paru furprifes de le voir fans folidité de jugement, & fans aucun

goût

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Le Mantouan.

goût pour les bonnes chofes, dès que fes feux fe font éteints, & qu'il s'eft trouvé deftitué de ce brillant qui cachoit les défauts de fa jeunesfe, ou qui les déroboit du moins à la vue de ceux qui en étoient é blouïs.

Avec cette notion du Mantouan l'on doit être affés préparé, ce me femble, à entendre dire à Scaliger (1) qu'il n'a qu'une molleffe efféminée, qui ett une véritable langueur; qu'il n'a ni régle, ni mefure, ni confiftance, ni agrémens, & qu'il ne s'efl point diftingué de la Populace des Verfificateurs. Il avoue néanmoins qu'il ne manquoit pas de génie, mais que l'Art & le jugement lui manquoient. C'est ce qui le portoit à répandre fur le papier tout ce que l'abondance de fon cerveau lui faifoit pouffer dehors, fans choix, fans discernement, fans méthode.

Mais quoique le Mantouan n'ait rien de cette délicatelle des maniéres, qui étant jointe à la politeffe des expreffions, forme cette rare qualité qu'on appelle Urbanité, fes vers ne laiflent pas d'avoir leur prix, & felon le même Critique, il paffera au moins pour un Poëte de Village, & il pourra plaire & produire même quelque utilité aux efprits ruftiques, & aux perfonnes fimples, aufquelles fa Mufe eft plus proportionnée.

Je ne fai fi c'eft en la perfonne de ces derniers qu'Erafme écrivoit à Wimphelinge, lorfqu'il témoignoit ettimer fi fort les Vers du Mantouan. J'aime mieux me perfuader qu'il ne fongeoit alors qu'à rabaiffer

1. Jul. Cæf. Scalig. Hypercrit. feu lib. 6. Poët. cap. Pag 788.

2. Defid. Erafm. Epift. ad Jacob. Wimpheling. & ex co G. M. Konigius in Biblioth. Vet. & Nov. pag.

504.

3. Paul. Jov. Elog. numero 61. pag. 141. 142. edit. in-12.

4. Ce Poëme qui eft fort long, commencé le 5. Février & fini le zo. Septembre de la même année, ne couta que fept mois quinze jours de tems à fon Auteur.

5. 4. Paul Jove dit néanmoins que Confalve fut très content de Cantalice, & le recompenfa magnifiquement. Il donne feulement à entendre que Mantuan qui en reprit de traiter le même fujet n'eut pas beaucoup de peine à remporter l'avantage fur un pa

reil concurrent.

6. De Clavigui de fainte Honorine, du difcernement & de l'ulage qu'on doit faire des livres fufpects, chap. 3. pag. 30%

Marulle dont nous avons parlé plus haut, Le Manou à faire voir que le Mantouan n'eft Louan. pas entiérement le dernier des Poetes, puis qu'il croyoit un feul de fes hémistiches préférable à tout ce que ce Grec avoit fait de Vers Latins (2).

Paul Jove prétend (3) que ce qui a gâté le talent que le Mantouan avoit pour la Poetie n'étoit autre chofe qu'une paffion infatiable d'apprendre l'Hebreu, jointe à l'ambition de paroître favant dans toutes les autres connoiffances. De forte que fongeant à acquerir ou à foutenir cette réputation, il n'a pê donner à la Poëfie toute l'application que demande cet Art, & qu'il n'a pu arriver à fes fins pour n'avoir pas voulu fe borner.

Il a eu encore le malheur de paroître dans un fiécle & dans un pays où l'on ne faifoit plus beaucoup d'honneur aux médiocres Poëtes. Mais ayant trouvé un aus

méchant Verfificateur que lui, qui ne laiffoit pas d'être en grande confidération auprès du grand Capitaine Gonfalve Viceroi de Naples, il profita de l'avantage qu'il avoit fur lui, & de la difgrace qui arriva chés les connoilleurs à la Gonsalvie (4), c'est-à-dire, aux quatre livres du Poeme que cet Auteur appellé Baptifte de Cantalice avoit fait à l'honneur de Gonfalve. En effet Paul Jove remarque que le mauvais fuccès de cet Ouvrage fit qu'on tourna les yeux fur le Mantouan, & qu'il fe mit en crédit aux dépens de Cantalicio (5). Cette bonne fortune fubfifta pour le Mantouan jufqu'à ce que ces deux concurrens furent

ar

7. ¶. Ce n'eft pas contre les abus de l'Eglife que Mantuan a déclamé, c'eft contre les abus des Ecclefiaftiques. Voyés Bayle au mot Sixte IV. Lettre (AA).

8. Touchant la fable de la Papeffe Jeanne. 9. Index libb. prohibit, expurgat. Anton. Sotomay. claffe fecunda lit. B.

10. . Il n'y a pas de Ville qu'on appelle la vicille Ragufe. On dit fimplement.Ragufe, l'Archevêque de Ragufe. Mais l'Archevêche d'Epidaure que Paul Jove dit avoir été donné par Leon X. à Mulurus n'etoit pas l'Archevêche de Ragufe qui eft l'’Epidaure en Dalmatie, mais l'Archevêche de Malva lia qui eft l'Epidaure dans la Morée. C'est ce que Bayle au n.ot Mujurus a fort bien prouvé par le pasfage d'une Lettre de Bombafius du 6. Decembre 1517.

à Erafme.

11. 4. Cette prétendue Epigramme est une pièce de deux cens Vers Grecs élégiaques, traduits en autant de Latins par Zenobius Acciaiolus, Voffius,

que

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