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Petrarque. fer en lui cette liberté, il ne leur eft pas fi aifé de la juftifier, puifque quelque grand que foit le droit des Maîtres, il ne s'eft jamais étendu jufqu'à la licence de pécher capitalement contre les régles effentielles de leur Art. C'est ce que l'on a remar qué dans ce Poëme de Petrarque, où il y a conftamment d'autres fautes que celles de la quantité & des omiffions hiftoriques: & le Pere Rapin appelle énormes celles où il est tombé, pour n'avoir fuivi d'autre guide que fon génie & fon caprice (11). Ainfi Paul Manuce (12) n'a point eu trop mauvaise raifon de dire que Petrarque n'étoit pas un fort bon Poëte Latin.

Ce n'eft pas qu'il n'eût beaucoup lû & fort bien étudié Virgile, puifque la lecture qu'il en faifoit penfa lui faire des affaires à Rome, lorfqu'un Cardinal, grand Canonifte d'ailleurs, l'ayant accufé de Magie devant le Pape Innocent VI. ne crût point devoir apporter d'autres preuves de ce crime que parce qu'il lifoit Virgile (13). Mais s'il n'a pû fuivre cet excellent modéle, c'est plûtôt la faute du fiécle où il vivoit, que celle du Génie que la Nature lui avoit donné. C'est au moins un expédient honnête que Voffius nous propofe pour excufer un homme d'un fi grand mérite, qui, au jugement de ce Critique, n'auroit pas pris tant de peine pour faire fon Poëme de l'Afrique, s'il avoit fû que Silius Italicus que l'on a déterré depuis fon tems avoit traité le même fujet. Car quelques défauts que l'on ait remarqués dans ce que j'ai rapporté de l'Ouvrage de cet ancien Poëte, on peut dire avec le même Voffius, que celui de Petrarque eft fort peu de chofe auprès de l'autre (14).

Mais il y a une grande différence à mettre entre les vers Italiens de Petrarque & les Latins dont je viens de parler. L'ex

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cellence de ceux-là lui a fait donner un fetraque. rang auffi élevé fur les autres Poëtes de fa langue vulgaire, que la médiocrité de ceuxci l'a mis au deffous des bons Poëtes des fiécles floriflans de la Latinité. Paul Jove Evêque Italien, louë extraordinairement fes Poëties Italiennes, & particuliérement fes piéces de galanteries & de fes amours (15), il en recommande fur tout la pureté, la candeur, la douceur & la noblefle, & s'il en étoit crû fur fa parole, Petrarque feroit tout à la fois le premier & le dernier des bons Poëtes Italiens, & il auroit défefperé ou du moins détourné toutes les perfonnes de bon sens d'écrire après lui. Mais Paul Jove étoit venu trop tôt dans le monde pour parler de la forte, car s'il a voulu comprendre dans ce jugement le Bembe & l'Ariofte, on peut du moins en excepter le Taffe, le Cavalier Marin, le Guarini & d'autres venus depuis lui, qui n'ont pas crû devoir s'épouventer de la menace de Paul Jove, & qui ont mieux aimé s'expofer à perdre le bon fens que de ne pas fatisfaire leurs inclinations comme avoit fait Petrarque.

Les autres Critiques Italiens n'ont pas été fi outrés dans les éloges de Petrarque. Jean de la Cafe Archevêque de Benevent s'eft contenté de dire (16) qu'il eft comparable aux meilleurs Poëtes d'entre les Grecs & les Latins; que fes vers ont beaucoup de douceur & de dignité; qu'ils font remplis de beautés que l'excellence de fon génie & la connoiffance de l'Art y ont produites; & qu'ils ont la force de toucher les cœurs & de charmer les efprits, avec tant d'efficace & d'agrémens qu'il ne fe peut trouver rien de plus tendre parmi les Poëtes Grecs de l'Anti quité.

Jacques-Philippe Tomafini Evêque de Citta Nova en lítrie, parmi divers éloges dont

12. Paul. Manutius Commentar, in Epiftol. 2. libri 1. Ciceronis ad Quintum fratrem.

13. Papyr. Maffon. Vit. Fetrarch, pag. 124. tom. 2. elogior.

14. Gerard. Joh. Voffius de Hiftor. Latin. lib. I. cap. 29. pag. 157. ubi de Silii Italici Hannibale feu bello Punico.

15. Paul. Jovius Nocer. Epifcop. Elogio quinto. 16. Johan. Cafa in Vita Cardinal, Bembi pag. 141 edition, Battesian, in-4

Petrarque. dont il a fait nn Traité entier fous le titre de Petrarque reffufcité, dit (1) que fes vers font très-bien remplis, fans chevilles & fans mots inutiles, qu'ils font fort nets, fort bien travaillés, & qu'ils font même très-bien proportionnés au génie & à la capacité de tout le monde, en quoi fans doute il n'eft point d'accord avee plufieurs autres Critiques. Il ajoute que l'éclat des Sentences que Petrarque employe dans fes Poëties, la force de fes expreflions, & la variété furprenante des chofes qu'il y traite font des effets merveilleux dans l'efprit du Lecteur & lui donnent un plaifir fingu

lier.

Paul Manuce temoigne (2) que c'eft le plus élégant de tous les Poëtes qui ont écrit en Italien. C'eft un jugement qu'il faut expliquer comme celui de Paul Jove, parce qu'on pourroit dire que la vérité de ce fentiment n'a fubfifté que jufqu'au tems auquel ce Critique écrivoit. Ce qui n'empêche pourtant pas que Petrarque ne doive paffer pour le Pere de la Poëfie Italienne & le Maître des Poëtes du Pays, au préjudice même de Dante qui avoit été fon Maître (3).

Il ne l'a peut-être pas moins été de ceux qui ont voulu écrire en cette Langue avec pureté & politelle, puifque, felon Mesfieurs du Port-Royal, la nobleffe & la beauté de ses vers l'ont toujours fait confidérer comme un des principaux Maîtres de la Langue (4). Et s'il n'a pas été fi éxact que Dante dans la proprieté des mots, il l'a pasfé de beaucoup par les expreffions relevées & hardies dont il a enrichi fes Ouvrages.

Au refte Petrarque s'eft trouvé prefque le feul qui ait bien voulu préférer fes vers Latins à fes Italiens (5). Il eftimoit par

1. Jacob. Philipp. Tomafini in Petrarcha redivivo. & apud Hanckium.

2. Manutius ut fuprà in Comment. ad Epift. Ciceron. Ep. 2. J. 1. ad Q. fr.

3. Rofteau, Sentim. fur quelques livres qu'il a lâs. 4. L'Auteur anon. de la Grammaire Italienne de Port R. Préface pag. s.

5. Petrarcha ipfe lib. 13. Rerum fenilium Epiftol. ad Pandulph. Malateft. 10.

Pap. Maff. in Vit. Petrarch. p. 98. & feqq. P. Manut. in Ep. Cicer. ad familiar, ut fup. Olaus Borrichius Differt. 3. de Poëtis Latin. recent. pag. 91.

6. Exemple pour nos Abbés qui font réimprimer

éxemple fon Afrique beaucoup plus que fes Petrarque. Chants ou fes Chansons qu'il avoit coutume d'appeller de petites niaiferies. Papire Maffon dit, que la Poftérité n'a point voulu fuivre fon avis en ce point, & qu'elle s'elt toujours déclarée en faveur de fes Chanfons contre fon Afrique. Il eft vifible que Maffon a raifon, fi on a égard à la maniére d'écrire & à toutes les circonstances qui regardent la Langue & l'Art Poëtique. Mais Petrarque avoit des vûës plus relevées dans le jugement qu'il faifoit de fes Ouvrages, & il avoit grande raifon de fon côté de préférer le férieux à la bagatelle. Toute imparfaite & toute irréguliére qu'eft fon Afrique, quelque bas & quelque impur qu'en foit le ftyle, cet Ouvrage n'est point capable de lui produire devant les hommes fages, & moins encore devant Dieu une confufion pareille à celle dont fes Piéces galantes lui ont couvert la face depuis fon changement de vie-jufqu'à la fin de fes jours (6),

Il ne fongeoit pas moins à fa propre réputation qu'à fon falut éternel, lorsqu'il se mit en devoir de fupprimer & de jetter au feu ces monumens de fon premier libertinage, mais il n'en pût venir à bout (7), parce que la faute qu'il avoit faite de les rendre publics étoit irréparable par la multiplication des copies qui s'étoient repandues dans le monde.

Plût à Dieu que les Poëtes d'aujourd'hui qui fe difent Chrétiens, foit Laïcs foit Eccléfiaftiques, vouluffent au moins imiter Petrarque dans de pareils efforts, & qu'ils nous donnaffent fujet de croire qu'il ne tient pas à eux que leurs vers scandaleux ne fullent fupprimés, par des témoignages auffi publics que ceux de Petrarque. C'eft une juftice que doivent au moins à

I'E

leurs Poëfies galantes fur la fin de leurs jours. 7. Fr. Petrarch. Epiftol. ad Johan. Boccatium lib. 5. Rerum fenilium Epiftola 3.

Et Maff. in Vita Petrarch. pag. 100. 101. &c. 8. Idem Petrarch. Epiftol. familiar. lib. 8. Epift. ad Olympium, &c.

Et Pap. Maffon pag. 86. tom. 2. elogior.

9. Epiftol. ad Pandulph. Malateftam lib. 13. fenilium Rer. ut fuprà.

Et Maffon. pag. 98. & feq. ut fupra. Rofteau dit au fujet de fon ftyle & de fes expreffions, qu'il a quelquefois befoin d'Interprétes, &c. qu'il y a des Sonnets très-difficiles à entendre, même aux plus habiles. Claud. Verderius cenfion. in omnes Au&o

r'Eglife ceux d'entre eux qui mangent fon perque. bien & celui des Pauvres de Jesus-Christ en qualité de Bénéficiers ou de Penfionnaires fur Bénéfices. Et c'est par une charité bien furprenante & bien forcée fans doute que l'Epoufe de Jefus-Chrift ait été obligée depuis quelques fiécles de faire l'aumône à des Poëtes lafcifs ou galants, & de leur donner du pain comme elle fait à fes Miniftres & à fes Pauvres.

Petrarque ne s'eft pas contenté de détester devant Dieu & devant les hommes les Poëfies galantes qu'il appelle les folies de la jeuneffe, & d'en faire une longue & fincére pénitence, comme il l'a témoigné publiquement (8); il a voulu encore contribuer à les rabaiffer & à en diminuer le prix devant ceux même qui les eftiment fi fort. Car il a tâché de leur faire croire que fon ftyle n'étoit pas beau, qu'il étoit trop rude, & qu'il avoit trop peu de gravité; que la précipitation dans laquelle il avoit compofé fes vers en fa jeuneffe, en ne fuivant ordinairement que l'impétuofité de fon naturel, ne lui avoit pas permis de les polir (9).

On peut dire qu'il a été affés bien fecondé dans ces modeftes deffeins, par divers Critiques qui ne fe font pas bornés fimplement à la cenfure de fon ftyle; mais qui fe font étudiés à rabaiffer fa qualité de Poëte, ou à la lui difputer même entiérement. Le Pere Rapin témoignant d'ailleurs qu'il écrit fort purement en fa Langue, prétend (10) qu'il a l'air trop vafte pour mériter le nom de Poëte Héroïque.

Mais c'est encore peu de chofe en comparaison de ce qu'a dit Alexandre Taffoni contre toutes fes Poëfies Italiennes. Ce nouveau Critique qui étoit auffi Poëte Ita lien, n'a eu aucun égard au refpect que

res pag. 70. ait: Ternariis quaternos rhytmos inconcinnè ac minus apte interdum mifcet.

10. René Rapin, Reflexions particul, fur la Poëtiq. Reflex. xvI. feconde partie.

11. Jean Nicius Erythraus Pinacothec. 1. pag. 186. & 187. in Alexand. Taffono. & 188. 189. &c, in Nicol. Villano.

12. q. Le Taffoni ne blâme pas dans Pétrarque fi généralement toutes chofes, qu'il n'y trouve en divers endroits de grandes beautés. C'eft ce que Baillet auroit pû aifément reconnoitre, fi, au lieu de s'en tenir à Nicius Erythræus, il eût confulté le livre-même du Taffoni.

13. T. Ménage fe trompe lorfque p. 245.du tom. Tom. IV.

toute l'Italie a toujours témoigné pour ce- Petrarque, lui qu'elle a contidéré & qu'elle confidére encore, à ce que prétend le Vittorio Rosfi (11,) comme le Prince de tous les Poëtes Lyriques qui euffent jamais paru, non pas feulement parmi les Italiens, mais encore parmi les Grecs & tous les Latins de l'ancienne Rome.

Taffoni a donc fait fur Petrarque des Remarques dans lefquelles il le traite avec une féverité inéxorable. Il n'y a prefque pas une locution ni un mot dans toutes les Oeuvres Poëtiques auquel il veuille faire grace. Il y reprend généralement toutes chofes (12). Il prétend que tout eft plein d'abfurdités, & de défauts inexcufables. Il tâche d'y tourner tout en ridicule, & de détruire entiérement fa réputation; quoiqu'elle foit univerfelle & profondément affermie dans les efprits de ceux qui ont la Petrarque ou qui en ont ouï parler. Mais tous ces excès n'ont pas manqué de faire perdre créance à Taffoni, & ils n'ont fervi qu'à relever encore davantage le mérite de Petrarque, parce qu'on s'eft perfuadě que ce Critique employoit tous ses talens à cenfurer les plus grands Poëtes de l'Antiquité, qu'il avoit entre autres chofes pris la peine de recueillir jufqu'à cinq cens endroits d'Homere qu'il prétendoit faire pasfer pour impertinens & ridicules.

Taffoni n'en demeura point-là, mais voyant qu'un nommé Jofeph Aromatarius (13) avoit entrepris la défenfe de Petrarque, il revint à la charge & il le pouffa fort vivement. Il ne fut pas le feul de fon tems qui écrivit pour détruire Petrarque. Nicolas Villani fe déclara auffi fon adverfaire, fuivant la résolution qu'il avoit prise de faire la guerre à tous les Poëtes Italiens, comme il avoit déja fait à Dante, à l'Áriofte & au Taffe.

JE

1. de fon Anti-Baillet ch. 67. il dit que Jofeph de gli Aromatarii écrivit fous le nom de Crefcenzio Pepe contre le Tafloni: ce fut le Taffoni qui fous ce nom de Crefcenzio Pepe repondit à l'Aromatari. Celui-ci étant revenu à la charge, fous le nom de Falcidio Melampodio, on prétend que le Taffoni fous le nom de Girolamo Nomifenti lui oppofa la Réplique intitulée La Tenda reffa; & que l'Aromatari ne le rendant point, y fit une Réponse, non imprimée, i aigre qu'il auroit fallu pour y répliquer, fe fervir plûtôt du poignard que de la plume. Ce font les termes du Crefcimbeni, qui ayant d'abord douté que la Tenda Roffa fût du Taffoni, a depuis reconnu qu'elle en étoit véritablement.

B

Fetrarque.

Bocace.

Je n'ai pas crû devoir rapporter cette foule d'éloges que l'on trouve dans un grand nombre d'Ecrivains de toutes fortes de Profeffions au fujet de Petrarque, parce qu'ils regardent plûtôt ce qu'il a fait pour la perfection de fa Langue en général que fa Poëfie en particulier.

* Triomfi del Petrarca, con Commento del Bernardo da Monte Illicinio da Siena in-fol. Venetia 1488. Sonetti e Can

zoni di Petrarcha, con la interpretatione del Poëta Franc. Philelpho, ibidem in-fol. 1486. Con l'Efpofitione di M. Gio. Andrea Gefvaldo in-4. Venet. 1581.

Sonetti Canzoni, e Triomfi di M. Francesco Petrarca con la fpofitione di Bern. Daniello da Lucca in-4. in Vinegia 1549. Le Rime, fpofte per Lodovico Caftelvetro in-4. 1582. Con l'Efpofitione d'AlesSandro Velutello in-4. Venet. 1573.

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1220.

I

L femble qu'il y ait affés peu de chofes à dire ici de Bocace, après ce que j'en ai rapporté au Recueil des Critiques Graminairiens, où j'ai crû pouvoir le placer parmi les Restaurateurs des belles Lettres dans l'Italie en qualité de Philologue.

A dire le vrai, on ne l'a jamais confidéré comme un grand Poëte; car outre qu'il a fait fort peu de Poëfies, c'eft que, au jugement de Salviati (3) fa Profe eft beaucoup plus belle, plus éxacte, & plus naturelle que fes Vers. Paul Jove rappor te (4) qu'on difoit communément de fon tems que Petrarque ne réuffiffoit pas bien

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en Profe & que Bocace ne faifoit rien qui Bocace. ‹ vaille en Vers.

On doit reconnoître avec le Pere Rapin (s) qu'il écrit fort purement en fa Langue; mais on peut croire avec lui qu'il a l'air trop trivial & trop familier pour mériter le nom de Poëte Héroïque. Ce même Auteur dit ailleurs, que Bocace a l'esprit affés jufte dans fes Poëties; mais qu'il eft fans étenduë (6). Il l'accufe auffi d'avoir fait paroître trop de vanité & de parler fans ceffe de lui-même (7), ce qui ne regarde pas moins fa Profe que fes Vers

fans doute.

Papyre Maffon dit (8) qu'il a fait fon Poëme Bucolique à l'imitation de celui de Petrarque (9).

* Ameto Comedia della Nimfe Fiorentine con la dechiaratione di Franc. Sansovino in8 Venet. 1545. - Ejufdem Ecloga XVI. in-8. Bafil. 1546.

ALAIN CHARTIER

Normand, Poëte François, Secretaire des Rois Charles VI. & Charles VII né l'an 1386. mort vers l'an 1458. où finit fon Hiftoire.

Et de quelques-uns de nos anciens Poëtes François qui ont paru avant lui, & avec quelque diftinction.

§. I.

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6. Le même, premiére partie des Reflex. gener. Réflex. 2.

7. Le même, feconde partie, Reflex. xxxix. furla Poëtiq. &c.

8. Papyr. Maff. Vit. Boccacii pag. 118. 219. tom. 2. Elogior.

9. 9. Les Bucoliques de Petrarque & de Bocace font en vers Latins. Pétrarque a fait douze Eglogues, Bocace lèze.

1. Vincent Bellovacenf, lib, 29. Spéculi Hiftor. cap.

Melinand, nand de Froimond que l'Ordre de Cifteaux met au nombre de fes Saints, & dont la Fête eft marquée au troifiéme jour de Fevrier dans le Ménologe de cet Ordre. C'étoit un des plus grands hommes de fon tems pour la connoillance des faintes Ecritures & de l'Hiftoire; mais il étoit encore excellent Poëte, fi on a égard au fiécle où il vivoit. Mr. Loifel a publié un refte de les Poëties Françoiles [in-8. 1594.] par lefquelles il paroît qu'il avoit l'efprit fort beau, qu'il n'étoit pas un fimple Verfificateur, comme la plupart des autres Poetes du moyen âge, qu'il avoit du feu, de l'imagination & de l'invention, & qu'il ne lui manquoit que l'ufage d'une Langue plus parfaite que n'étoit alors la nôtre (10). Il eft loué par tous ceux qui ont eu occafion de parler de lui, foit parmi les Ecrivains Eccléfiaftiques, foit parmi ceux de Cisteaux en particulier. Mais on ne peut pas nier qu'il n'ait été un peu fatirique & hardi pour un Moine, & que fon fel ne fût un peu acre & picquant, fur tout lorsqu'il vouloit reprendre les défordres de fon tems, & particuliérement ceux de la Cour de Rome (11). Nous parlerons de lui plus amplement parmi les Hiftoriens, & au Recueil des Auteurs déguisés.

Guiet,

Il étoit auffi Poëte Latin, comme le remarque la Croix du Maine, qui le fait natif de Beauvais (12).

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Monde, fans que j'aie encore pû voir un Guiot. éxemplaire des Imprimés (13).

Le Président Fauchet dit qu'on lui a donné le nom de Bible, parce que, comme difoit l'Auteur-même, ce Livre ne contient que des Vérités (14): mais qu'au refte c'est une fanglante Satire dans laquelle il reprend les vices de tout le Monde de quelque état qu'on pût être, fans épargner les Grands & les Princes plus que les Petits. Il ajoute que ce Guiot a été homme de grande expérience & qu'il a vécu long-tems.

§. 3.

CHRESTIEN DE TROYES; HUON DE MERI;HUON DE VILLENEU VE; GACE'S BRULE', qui aidoit THIBAUT Roi de Navarre dans la compofition de fes Vers; BLONDIAUX DE NESLE, JACQUES DE CHISON; EUSTACE LI PEINTRE, &c.

Nt été les moins mauvais d'entre nos

anciens Rimeurs & faifeurs de Romans, mais comme je ne les crois pas imprimés il eft inutile de s'y arrêter. Il fuffit de dire que Fauchet eftime particuliérement Gacès Brulé, Blondiaux de Nesle, & les deux derniers, mais qu'il fait peu de cas de Huon de Meri, Auteur du Roman fatirique de l'Antechrift.

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12. Franç. de la Croix du Maine Biblioth. Frang. pag. 161. 162.

4. La Croix du Maine dit bien qu'Helinand a fait plufieurs livres tant Latins que François, outre fes vers François de la Mort, & fes Chroniques, mais il ne dit point qu'il fût Poëte Latin.

13. 4. Il n'y en a jamais eu.

14. Claud. Fauchet des anciens Poëtes & Rimeurs François livre 2. fol. sss.

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