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té.

Divifion

autre chofe que ce qu'ils font. Mais voyons toujours ces Prédéceffeurs de l'Anti-Baillet, voyons fi vous pourrés nous faire fentir cette grande différence que vous prétendés mettre entre eux & les quatre anciens dont vous venés de nous faire l'histoire.

6. M

R. de Rintail changeant auffi-tôt

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compaffion qu'il ne pouvoit nous diffimuler que la plupart de ces Anti Modernes & Prédéceffeurs de l'Anti-Baillet avoient eu le malheur de naître dans l'Hérésie, c'est-à-dire dans des Sociétés féparées de notre Communion; qu'il en avoit auffi apperçu quelques-uns parmi les Catholiques, mais qu'il n'affuroit pas que ceux d'entre eux qui avoient pris des maniéres fatiriques, même contre la perfonne des Hérétiques, n'euffent pas deshonoré l'Eglife. Il ajouta que les moins raisonnables á fon fens, étoient ceux qui fous le nom odieux d'Anti avoient prétendu traiter les matiéres de Religion qui demandent d'être maniées avec toute la fageffe, & tout le refpect poffible.

Je pris occafion de cette penfée, pour lui demander s'il y avoit du deffein dans fon Recueil, & s'il y avoit fait entrer quelque divifion pour donner de l'ordre, ou de la méthode à la lifte de ses Anti.

Il me répondit que ceux qui pourroient trouver du deffein dans fon Recueil en la maniére que je l'entendois, feroient plus ingénieux que lui; que fon intention avoit été fimplement de faire un Catalogue plus ou moins raisonné, felon que les fujets lui avoient paru plus ou moins importans. Pour la méthode qu'il y avoit gardée, il nous dit qu'il n'avoit pas crû devoir s'asfujettir à l'ordre des tems, parce qu'il ne s'agiffoit que d'Ecrivains modernes des deux derniers fiécles, & que plufieurs a voient vécu dans les mêmes tems.

Il s'étoit contenté d'une efpéce de dide ce Trai- vifion que je veux vous rapporter ici avant que de finir la rélation de ce premier Entretien, afin de n'être pas obligé de la répéter à la tête du fecond dont je vous rendrai bon compte au premier jour. Il avoit partagé fon Recueil, ou fon Catalogue raisonné en deux principales parties. La premiére comprenoit les Anti que l'on trouve à la tête des Ouvrages de Théolo

gie, & la feconde étoit pour ceux qui regardent les Sciences humaines.

La premiére partie fe trouvoit encore divifée en divers chapitres affés inégaux entre eux fuivant le nombre des Anti qu'ils contenoient: Le 1. Chapitre étoit destiné aux Anti des Proteftans en général contre les Catholiques; le 2. à ceux des Protestans en particulier contre eux-mêmes, & Calviniftes; le 3. à ceux des Luthériens contre les Luthériens leurs confréres; le 4. à ceux des Calviniftes contre les Luthériens; le 5. à ceux des Calviniftes contre d'autres Calviniftes; le 6. à ceux des Proteftans en général contre les Sociniens & contre les Juifs; le 7. à ceux des Catholiques contre les Proteftans; le 8. à ceux de quelques Catholiques entre eux: mais ce dernier Chapitre étoit fi peu de chofe, que Mr. de Rintail vouloit que nous le comptaffions pour rien.

La feconde partie du Recueil qui étoit pour les Sciences humaines, avoit auffi fes Chapitres différens. Le 1. contenoit les Anti dans le Droit & la Politique; le 2. dans la Philofophie & les Mathématiques; le 3. dans la Médecine; le 4. dans l'Hiftoire facrée & profane; le 5. dans les belles Lettres.

Voilà, Monfieur, quelle étoit la divifion des Anti qu'il appelloit perfonnels, & qu'il nous faifoit confidérer comme des Piéces fatiriques & injurieufes au moins dans leur Titre. Il avoit fait un autre cahier pour les Anti réels qui ne regardent que les chofes fans en vouloir aux perfonnes: il n'en défapprouvoit pas le Titre, & nous difoit que la plupart des Anti perfonnels auroient eu plus de jufteffe, s'ils n'avoient été que réels. Il nous en a promis la lecture & de mon côté je vous en promets au moins un abrégé en fon tems.

Mr. de Rintail avoit donc pris déja le cahier fur lequel il avoit à nous entretenir touchant les Anti des Proteftans contre les Catholiques, & il commençoit à nous faire faire quelques réfléxions générales fur les Anti-Becans, & les Anti-Bellarmins qui fe rencontroient les premiers fur fa feuille, lorfque nous vîmes entrer chés lui une compagnie qui lui fit remettre le cahier dans le tiroir de fa table. C'étoient le P. Briet, & le P. de Billy accompagnés

C 2

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SATIR. PERSONN. I. ENTRET. ANTI EN GENER.

pagnés de l'Abbé Nitarde Bellay. Le premier en qualité de parent, & les deux autres comme alliés de Mr. de Rintail ne devoient pas être du nombre des Fâcheux dont la préfence tait fufpendre la liberté des Entretiens, & qui troublent ce que la familiarité peut avoir d'agrément dans une Compagnie. Mais nonobftant leur privilége, Mr. de Rintail nous fit affés connoître qu'il ne les avoit pas choifis pour être fes Auditeurs dans la

lecture de fes Anti. Les deux Peres & Mr. l'Abbé fembloient n'être venus que pour complimenter Mr. de Saint Yon fur le fuccès d'une nouvelle expédition de Mr. le Marquis de Valbeil fon Pere, & pour apprendre des nouvelles d'Angleterre. Mr. de Brillat s'étarit levé & moi avec lui, nous prîmes congé de Mr. de Saint Yon qui nous fomma de revenir, & Mr. de Rintail nous dit adieu tout bas pour trois jours.

Je fuis, Monfieur, votre, &c.
Alb. Lain de VERTON..

SATY

21

SATYRES

7.

PERSONNELLES,

SECOND ENTRETIEN,

Où commence l'Hiftoire des Prédéceffeurs de l'Anti-Baillet.

Entre Meffieurs de Saint Yon, de Rintail, de Brillat, Terlaine
& de Verton.

JA

Envoyé à Mr. de la Cour d'Oronne.

ANTI des Modernes.

PREMIERE PARTIE.

ANTI qui se trouvent à la tête des Ouvrages de Théologie.

A confidéré, Monfieur, la fatisfaction que vous m'avés témoignée de la Rélatfon que je vous ai envoyée de notre premiére conversation avec Mr. de Rintail comme un engagement honnête à vous envoyer encore celle de la feconde, & à vous faire efpérer celles des fuivantes, fi vous continués d'en être content.

Au bout des trois jours marqués par Mr. de Rintail, je fus chés Mr. de Brillat que je trouvai levé de table & tout prêt de me venir prendre fi je ne l'avois prévenu. Il avoit donné à diner à Mr. Terlaine d'Alby qui, foit par conjecture, foit par l'entretien qu'il avoit eu à table, s'étoit douté que Mr. de Brillat devoit donner l'aprèsmidi à Mr. de Rintail qu'il avoit vô depuis notre premiére vifite. Il nous furprit lorfqu'il nous fit connoître qu'il favoit le fujet de l'Entretien que nous devions avoir avec Mr. de Rintail,& voyant

que nous ne le preffions pas de fe joindre à nous pour aller à l'Hotel de Valbeil, il fe pria lui-même en nous affurant qu'il ne gâteroit rien, & que tout nouvellement converti qu'il étoit il ne feroit point fcandalifé de ce qu'il nous entendroit dire des Proteftans.

Nous trouvâmes Mr. de Rintail feul, & comme je favois que Mr. de Saint Yon étoit dans fes éxercices, je menai ma compagnie pour le faluer. Dès qu'il nous eût apperçu, il finit avec fon Maître de Mathématiques, & il remercia pour ce jour-là son Maître à danfer en notre con fidération. 11 nous fit remonter enfuite dans le Cabinet de Mr. de Rintail qui avoit déja le cahier en main. Chacun prit fon fiége, Mr. de Rintail s'adreflant à Mr. Terlaine, lui dit. Nous allons mettre à l'épreuve les reftes de l'affection que vous pourriés avoir confervés pour vos anciens confréres.

C 3

Sont

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Sont-ce des Satires que vous allés débiter contre eux, lui répondit Mr. Terlaine? Non, repartit Mr. de Rintail, ce font des Satires qu'ils ont faites contre les Catholiques; & je fai que les honnêtes gens de votre caractére ne font point pour ceux qui font fouffrir, mais pour ceux qui fouffrent les injures. Je prévois que vous aurés à fouffrir vous-même, fi je vous remets devant les yeux les marques qui nous font restées de leurs emportemens

contre nous.

Il n'eft pas extraordinaire à de nouveaux Convertis, reprit Mr. Terlaine, de conferver encore après leur conversion des reftes de leurs premiéres habitudes. Conftantin & Clovis ne te dépouillérent pas aifément de certaines inclinations qu'ils avoient eues dans leur Paganifine. Mais par la grace de Dieu je ne me trouve point obligé de changer d'inclination pour le point dont vous allés nous entretenir. Avant la grace que Dieu m'a faite de me reftituer à fon Eglife je vivois dans la Société des Prétendus Réformés, fans approuver les excès de leur plume, & je n'avois même guéres de commerce qu'avec les plus modérés & les plus éclairés de leur Communion. En tout cas, je puis vous répondre pour éviter les longs raifonnemens que Terlaine Catholique a renoncé fincérement aux interêts de Terlaine Protestant.

Et moi, je fuis perfuadé, dit Mr. de Brillat, qu'il n'y a point de Proteftant, fût-ce Mr. Jurieu, qui ne fût très-content de la modération & de la briéveté de Mr. Rintail, s'il étoit préfent à la lecture qu'il va nous faire de fes Anti.

Je fuis ravi, reprit Mr. de Rintail, que vous ayés mis en jeu ma briéveté avec ma modération. Je ne vous dédirai pas, & vous allés voir que mon Recueil eft moins un Commentaire Hiftorique qu'un fimple Catalogue des Prédécesseurs de l'AntiBaillet.

CHAPITRE I. ANTI des Proteftans contre les Catholiques, ou

ANTI-Catholiques Proteftans.

ANTI-BECAN.

E premier que je trouve non pas

Anti-Be

celui de mon cahier, eft l'Anti- Becan, dont il eft fait mention dans les Indices can. des Livres défendus par l'Inquifition Espagnole & Romaine.

Vous débutés, dit Mr. Terlaine, par un endroit qui n'est pas capable d'augmenter de beaucoup l'averfion que les Catholiques François pourroient avoir pour l'Anti-Becan. Ils n'ont pas coutume de s'effrayer au mot d'Inquifition, & j'ai connu tel Auteur en France qui fouhai toit de voir fon Ouvrage dans l'Index, afin que cet honneur pût lui donuer du cours & de la réputation.

Ha! Monfieur, dis-je à Mr. Terlaine, vous m'avouerés que voilà déja un petit trait des impreffions que vous pouvés avoir reçûës autrefois parmi vos Meffieurs de la Religion prétendue Réformée. Car enfin fans la glofe que vous venés de donner à la pensée de Mr. de Rintail, je n'y aurois apperçû autre chofe qu'une citation fort indifférente des Livres de l'Index, que l'on peut ce me femble alléguer avec auffi peu de conféquence que nous ferions des Auteurs fujets à révifion.

Ne conteftés pas, Meffieurs, reprit Mr. de Rintail, fur l'autorité des Cenfeurs de Rome ou de Madrid. Elle nous eft ici fort inutile. Ils n'ont cenfuré qu'un Anti-Becan, parce qu'ils n'en ont pas connu davantage. Ils n'en ont marqué ni l'Auteur, ni le pays, ni l'âge, ni le fujet; de forte que de tous les Anti-Becan qui fe font élevés dans la République des Lettres, nous n'en pourrions pas convaincre un feul en particulier d'avoir été mis dans leur Index.

Vous me furprenés, dit Mr. de Brillat, avec votre multitude d'Anti-Becans. Ii faut que cette race d'Anti foit bien feconde pour en produire tant de chaque efpéce différente.

Je ne vous en rapporterai que trois de l'efpéce dont nous parlons maintenant, répartit Mr. de Rintail, parce que les autres me font inconnus. De ces trois Anti-Becans il y en a deux qui doivent leur naiffance à des Luthériens, & un qui doit la fienne à un Calviniste.

§. I.

dans l'ordre des tems, mais dans nommé Jean-Mathias Mayfart qui le fit

pa.

Anti-Be

8.

can

can.

Anti-Be- paroître à Leipfick en deux tomes in-8. l'an 1627. Ce Mayfart étoit actuellement Régent du Collége de Coburg lorfqu'il fit fon Anti-Becan. Il n'avoit alors que trente- fept ans, mais il y avoit près de trois ans qu'il s'étoit fait paffer Docteur en Théologie Luthérienne dans l'Univerfité d'léne. C'est une circonfiance que je vous rapporte, afin que vous l'excufiés de s'être mêlé d'écrire fur des matiéres Théologiques lorfqu'il ne paffoit encore que pour un Humaniste. Depuis ce temslà il fut Profeffeur en Théologie dans la Ville d'Erphord ou Erfurt qui eft la principale de Turinge. Après il parvint aux premiers honneurs de la Profeffion, je veux dire à la dignité d'Ancien ou Senieur du Miniftere & à celle de Pafteur des Prédicateurs parmi les Luthériens, & il mourut en 1642. âgé de 52. ans.

Voilà, dit Mr. de Brillat, le portrait d'un homme affés heureux qui a fait for tune parmi les gens de fa forte; mais je voudrois celui d'un homme habile dans fa profeffion.

Je ne vous confeille pas, lui répondit Mr. Terlaine, de preffer Mr. de Rintail fur l'habileté de Mayfart après ce que j'ai vû de lui lorfque je m'appliquois à la lecture de toutes fortes de Proteftans. Cet Auteur a perdu prefque toute mon eftime depuis que je fuis tombé fur fon Sufcitabulum proponens abjurda abfurdorum abfurdiffima.

Mais au moins, repartit Mr. de Brillat, que prétendoit Mayfart dans fon Anti-Becan? A qui en vouloit-il?

Mayfart, dit Mr. de Rintail, en vou loit à un célébre Théologien de l'Eglife Romaine. Vous favés que Becan Jéfuite du Brabant qui a profeffé la Théologie avec fuccès en diverfes Villes de l'Allemagne, & qui fut enfuite Confeffeur de l'Empereur Ferdinand II. avoit compofé un Manuel des Controverfes qui fut jugé très-utile pour ramener les Proteftans à l'Eglife, & qui eft effectivement l'un des meilleurs Ouvrages de ce Pere. Les Pasteurs & Docteurs Luthériens qui trou voient à redire de jour en jour au nombre de leurs Ouailles crurent qu'ils devoient s'en prendre au Manuel des Controverfes de Martin Becan, & ils employé

1. On en vit une édition houvelle en 1625.

rent tout ce qu'ils avoient d'induftrie & Anti-Bede capacité pour repouffer cet Adverfaire, can, Ehinger, Hannekin & plufieurs autres firent voler divers Libelles: mais personne ne fe montra plus animé que notre Mayfart, qui voulut faire de fon Anti-Becanus un rempart à l'Hérésie.

§. II.

Le fecond ANTI-BECAN Luthérien, continua Mr. de Rintail, a pour Auteur up autre Allemand nommé Gilles Hunnius, dont j'aurai encore occafion de vous parler dans la fuite de mon Recueil. Je me contente de vous dire ici que fon Ouvrage parut in-4. dans une des principales Villes de la Saxe (1) plufieurs an-* nées avant celui de Mayfart; & que s'il falloit juger de ces Ouvrages par la répu tation de leurs Auteurs, celui de Hunnius devroit être un peu moins mauvais que celui de Mayfart.

§. III.

Le troifiéme ANTI-BECAN eft celui de Jean Crocius Calvinifte, ou fi vous voulés, Luthérien-Calvinifte du Landgraviat de Heffe qui a fait grand bruit en Allemagne par fes Ecrits, & qui a eu encore plus d'affaires à démêler avec les Proteftans qu'avec les Catholiques, divers points de Théologie, & fur la conciliation de la Confeffion de Genéve avec celle d'Ausbourg.

Ce Crocius dont je vous entretiendrai encore ailleurs, avoit commencé de bonne heure à plaider contre le P. Becan. Il y avoit déja vingt-trois ans qu'il avoit publié contre lui fon Enneade de Differtations Théologiques à Francfort, lorsqu'en 1643. il s'avifa de faire imprimer fon AntiBecan in-4. dans la Ville de Caffel.

Tous ces Anti-Becans, dit Mr. de Brillat, font-ils demeurés fans replique? Oui, lui répondit Mr. de Rintail, au moins de la part du Pere Becan qui étoit mort avant que ceux de Mayfart & de Crocius euffent paru dans le monde; & je fuis perfuadé qu'il n'auroit eu que du mépris pour eux, s'il eût vécu affés long-tems pour les voir naître, ou qu'il les auroit traité

avec

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