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la noirceur de leur ame, à ce qui leur manque de vertus: cependant il tomba dans fes propres filets, s'étant attiré mal-adroitement la haîne de Nabuchodonofor, & en ayant été la victime avec les propres Etats.

Il en fut de même du Roi des Moabites fon voifin, qui eut l'imprudence d'entrer dans une ligue contre le Roi de Babylone & qui en fut également écrafé. ( Jer. XXV. XXVII).

JEHO JAKIM.

JEHOJAKIM, fils aîné de Jofias, régnoit alors à Jérufalem: il avoit été élevé fur le Trône par Nechao, Roi d'Egypte, qui avoit défait fon Pere, détrôné un de fes Freres, & qui lui avoit impofé un tribut annuel de cent talens d'argent & d'un talent d'or. C'étoit un Prince feroce & tyrannique: il fuppofoit des crimes à ceux qui avoient le malheur d'être riches, & les faifoit mettre à mort pour s'emparer de leurs biens: rien ne pouvoit fuffire à fes folles dépenfes : d'ailleurs fes revenus étoient prodigieufement diminués, par l'affoibliffement de les Etats, qui n'étoient plus qu'une ombre de l'ancien Empire de David & de Salomon, & par le tribut confidérable qu'il étoit obligé de payer à l'Egypte. Il s'irritoit contre ceux qui vouloient le faire rentrer en lui-même; fur-tout contre Jérémie, qui lui dénonçoit la ruine entiere de fon Etat, s'il ne fe corrigeoir; & fur-tout s'il comptoit fur la protection de l'Egypte. En effet, il étoit impoffible qu'un Prince auffi incapable du Trône, pût le foutetenir long-tems au milieu des prétentions réciproques de deux Monarques auffi puiffans que ceux de l'Egypte & de Babylone.

NECHA 0.

NECHAO régnoit en Egypte : il étoit fils du célebre Pfammétique, qui le premier ouvrit ce Royaume aux Etrangers, fur-tour aux Grecs. Ce Prince avoit de grandes vues: il avoit effayé de joindre le Nil à la Mer Rouge, par un Canal; mais il fut obligé de renoncer à cette entreprise, après y avoir perdu, dit-on, cent vingt mille hommes. Il entreprit de créer une Marine, pour enlever le Commerce aux Phéniciens, & pour devenir puissant par Terre & par Mer: dans cette vue, il couvrit de Galères la Mer Méditerranée & la Mer-Rouge: il fit faire par des Phéniciens le tour de l'Afrique, voyage où ils employerent trois ans. Il eût été véritablement grand, s'il n'avoit pas eu un concurrent plus heureux : à cet égard, il fit une faute irréparable, & qui enDiffert. Tom. I.

E

traîna les malheurs de l'Egypte. Au lieu de foutenir le Roi d'Affyrie contre les Medes & les Babyloniens, il le laiffa détruire, & fe contenta d'avoir part à fa dépouille, en pouffant fes conquêtes jufques fur l'Euphrate, où il fe rendit maître de Carkemis, après avoir défait en bataille rangée, Jofias Roi de Juda, qui mourut peu de tems après des fuites d'une bleffure.

La puiffance réunie des Medes & des Babyloniens, n'étant plus contrebalancée par aucune autre, l'Egypte dénuée de tout Allié, fut hors d'état de réfifter à ce torrent impétueux: elle étoit d'ailleurs de plus en plus affoiblie par fes querelles, avec l'Ethiopie avec qui elle ne favoit pas vivre en paix, & qu'elle étoit cependant hors d'état de conquérir. Ainfi s'avançoit à grands pas, & par une témérité fans égale, la ruine de l'ancienne, de l'étonnante, de la floriflante Egypte.

ARTICLE V I.

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NABU-CHOD DON-OSOR, dont le nom fe prononce auffi d'une maniere plus rapprochée de l'Oriental, Nebu-cad-don-affar, étoit fils de NABO-POL-ASSAR qui régna fur les Babyloniens pendant vingt-un ans, & qui vers la fin de fa vie avoit détruit l'Empire des Affyriens, conjointement avec Cyaxare, Roi des Medes.

Nabuchodonofor étoit le XVe Roi de Babylone, depuis le grand NABONASSAR qui avoit fondé ou reftauré cet Etat, & qui eft à la tête du Canon Chronologique de PTOLOMÉE.

Cet illufire Aftronome ayant befoin d'appuyer fes obfervations d'une fuite incontestable de Rois, remonta jusques à Nabon-Affar, Prince dont l'éclat avoit effacé la gloire de ses Prédéceffeurs, & qui sembloit avoir amené un nouvel ordre de chofes. Et, ce qui eft très-remarquable, c'eft que ce nouvel ordre tombe fur le milieu du VIII fiècle avant J. C. dans ce fiècle, où à peuprès au même instant, le Monde entier change de face, où il fe fait dans les efprits une explosion fingulière d'Orient en Occident, où les Grecs établiffent les Olympiades, où Rome eft fondée, où la face de l'Afie change, où les Chinois eux-mêmes prennent un nouvel effor.

dans

Ainfi le Règne de notre Héros tombe en-deça des tems inconnus une époque fure & brillante, où l'Hiftoire fe dégage de toute fable, de toute obfcurité, où elle s'appuie de Monumens auffi précieux qu'inconteftables,

Lorsqu'il monta fur le Trêne, on comptoit déjà 140 ans depuis l'avenement de Nabonaffar à la Couronne : & on comptoit la 605 ou la 604, année avant l'Ere Chrétienne: le VII fiècle étoit donc prêt à expirer, & il s'eft écoulé depuis ce tems-là près de 2400 ans.

20. DU NOM DE NABUCHODONOSOR.

Ce nom est formé de la réunion de plufieurs mots, de ceux de Nabo, chod, don, afar, ou ezar, qui tous reviennent fans ceffe dans les noms de la plupart des Princes d'Affyrie & de Babylone: on doit donc les regarder comme autant d'épithètes ou de titres d'honneur: & il ne fera peut-être pas difficile d'en retrouver la fignification: il est d'ailleurs très-agréable de favoir la valeur des mots qu'on a fans ceffe fous les yeux.

Tous ceux-ci tiennent à la Langue Primitive. NABO, NEBO, défigne le Ciel, tout ce qui eft haut, élevé, fublime: il tient au mot Nabab des Indiens. CHOD, GOD, GAD a toujours défigné la bonté, le bon, le très-bon, Dieu même.

DON, ADON, toujours la domination, le Maître, le Seigneur.

Asar, Assar, ESAR, OSOR, fignifie le haut, le puiffant; il tient à SER; SIRE, peut-être même à OSIRIS, le Seigneur de toutes chofes chez les Eyptiens.

Ces mots font combinés avec d'autres : par exemple, avec celui de

POL, PUL, PHUL, PHAL, qui défigne le Soleil & qui fe retrouve dans le POLLUX, & le PUL-cher des Latins.

On peut donc rendre ces noms à-peu-près de cette maniere:
Nabu-chod-don-ofor, le Seigneur du Ciel, très-grand & très-bon : ou fi

on veut l'expliquer de la gauche à la droite, le très-haut, très bon &
très-grand Seigneur.

Nabo pol-affar, le Soleil, Roi des Cieux, ou le Roi fublime & radieux, Nabon-affar, le fublime Seigneur.

Affar-adon, le Seigneur très-grand.

Belt-afar, le Seigneur rayonnant, plein de gloire.

Tiglat-phal-afar, le Seigneur radieux & rapide comme la flèche.

Ces noms paroiffent ridicules & oppofés à nos ufages; une fuite néceffaire du fafte exceffif des Princes de l'Orient, qui, dans leur orgueil infolent, s'appelloient les Freres du Soleil & de la Lune, les Fils du Ciel, les Rois des Rois; mais pour les confidérer fous leur véritable point de vue, il faut fe transporter aux tems anciens, & confulter le génie des Nations fur qui régnoient ces Princes.

Ces Nations le formoient toujours la plus haute idée de leurs Monarques * elles les regardoient comme établis par la Divinité même, comme l'eniblême du Ciel, du Soleil, de la Lune, de tout ce qu'il y avoit de plus lumineux. D'ailleurs, dans leur Langue primordiale, elles furent obligées de prendre des objets phyfiques pour exprimer des idées métaphyfiques; & quels mots pouvoit-on mieux choifir pour peindre les idées de royauté, de domination, que ceux qui défignoient déjà le Ciel, le Soleil, la Lune, la Lumiere, les Flambeaux Conducteurs ? Enfin, ces titres devenoient pour les Princes autaat de leçons qui leur faifoient fentir combien ils feroient indignes de leur rang, fi leurs actions ne répondoient pas à leurs titres.

30. PREMIERS EXPLOITS DE NABUCHODONOSOR.

Les premiers Exploits de Nabuchodonofor eurent pour objet d'enlever à Nechao, Roi d'Egypte, les Etats que ce Prince avoit envahis fur les Affyriens tandis que Nabo-pol-affar fon Pere, & Cyaxare, étoient occupés au Siége de Ninive. Cette expédition, qu'on attribue à Nabuchodonofor du vivant même de fon Pere que des infirmités mettoient hors d'état de conduire les Armées, est une preuve fans réplique que Ninive n'étoit plus: il eft doncftres-étonnant qu'on ait fait un renverfement pareil, & qu'on ait cru que cette premiere campagne précéda la ruine de Ninive. Les conquêtes de Nechao fur les Affyriens ne furent occafionnées que par celles mêmes des Babyloniens & des Medes fur ce Peuple, & ce ne fut que comme Vainqueurs de Ninive que les Rois de Babylone eurent des droits fur les Peuples du Midi, & qu'ils purent attaquer le Roi d'Egypte avec quelqu'ombre de juftice. D'ailleurs, avant la conquête de Ninive, les Princes de Babylone étoient hors d'état d'attaquer les Peuples du Midi, Sujets de cette Puiffance, & ils en auroient été néceffairement accablés.

Nabuchodonofor marcha d'abord contre Carkemis fur l'Euphrate, qu'on croit être le même que Kir- Keffe, & qui, par la Conquête qu'en avoit fait Nechao, ouvroit aux Egyptiens la porte de la Méfopotamie, & en faifoit un voifin redoutable.

Après en avoir fait le Siége & s'en être rendu maître, il traverfe en Conquérant la Syrie & la Cale-Syrie, attaque Scythopolis & la prend, forme enfuite le Siége de Jerufalem dont le Roi étoit Tributaire de l'Egypte; il s'en rend maître le 9 de Novembre, pille la Ville & le Temple, impofe un tribut au Roi, & revient promptement à Babylone, pour prendre poffeffions

du Trône, devenu vacant par la mort de fon Pere. Il y arrive en triomphe, après une campagne des plus glorieufes, chargé de butin, & fuivi d'une foule de prifonniers, fur-tout de l'élite de la Judée, & de jeunes gens des meilleures Familles, même de la Famille Royale,entre lefquels fe diftinguoit DANIEL. Cette expédition arriva la premiere année de fon regne: Daniel le dit expreffement; mais ici il s'eft gliffé une faute dans fon texte, qui exige une note particuliere.

4o. Faute gliffée dans le Texte où Daniel donne la date de ces évenemens.

On fait dire à Daniel que ces événemens arriverent la premiere année du Roi Cyrus, & tout de fuite cependant il parle de la feconde année de Nabuchodonofor. C'est une erreur manifefte; on a cherché à la corriger; mais par d'autres fautes le Copifte qui a tranfcrit le beau manufcrit Hébreu, no. 12. in-folio de la Bibliotheque du Roi, ne fachant comment les corriger, a fupprimé entiérement le verfet: c'eft couper le nœud gordien, & non l'expliquer. D'autres font dire à Daniel qu'il vécut jufqu'à la premiere année de Cyrus ; d'autres, qu'il demeura à Babylone jufqu'à cette premiere année : ce n'eft rien de tout cela. Otez le nom de Cyrus, qui a été inféré mal-à-propos dans le texte, & tout va de fuite. C'est la premiere année de Nabuchodonofor que Daniel fus transporté à Babylone, & dès la fuivante il eut la vifion du Chap. II.

5o. SECONDE EXPEDITIO N.

Au bout de trois années de vaffellage, Jehojakim, Roi de Jérufalem, fe révolta contre les Babyloniens leur Roi détacha contre lui une armée de Syriens, de Chaldéens, d'Ammonites, de Moabites. Ceux-ci ravagerent la Contrée, tuerent Jehojakim dans un combat, la troifieme année de la guerre, & ils fe retirerent avec nombre de prifonniers.

Son fils Jéchonias lui fuccéda : il n'avoit que dix-huit ans, & étoit dépourvu des qualités néceffaires pour fe foutenir dans un tems auffi critique; on en fait d'ailleurs un portrait auffi odieux que de fon pere. Il n'eut pas le tems de jouir de fon élévation déjà le Roi de Babylone étoit en route pour fe venger du Midi: Jéchonias, fa Mere, toute fa Cour, allerent au-devant de Jui pour le fléchir; mais, comme le leur avoit prédit Jérémie, ils le trouverent inexorable. Il les fit tous partir pour Babylone, pilla la Ville, le Temple, le

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