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Egyptien commun aux Hébreux & aux Orientaux, & qui fervant de chiffres, font néceffaires pour tenir compte de l'enfemble de tant de contrées.

Chacun de ces Atous aura eu en même tems un ufage particulier. PluGieurs auront été relatifs aux principaux objets de la Géographie Céleste, fi on peut fe fervir de cette expreffion. Tels,

Le Soleil, la Lune, le Cancer, les Colonnes d'Hercule, les Tropiques ou leurs Chiens.

La Canicule, cette belle & brillante Portiere des Cieux.

L'Ourse céleste, fur laquelle s'appuient tous les Aftres en exécutant leurs révolutions autour d'elle, Conftellation admirable représentée par les fept Ta& qui femble publier en caractères de feu imprimés fur nos têtes & dans le Firmament, que notre Syftême folaire fut fondé comme les Sciences fur la Formule de fept, & peut-être même la maffe entiere de l'Univers.

IOS,

Tous les autres peuvent être confidérés relativement à la Géographie politique & morale, au vrai Gouvernement des Etats : & même au gouvernement de chaque homme en particulier.

Les quatre ATOUS relatifs à l'autorité civile & religieufe, font connoître l'importance pour un Etat de l'unité de Gouvernement, & de refpect pour les

Anciens.

Les quatre Vertus Cardinales montrent que les Etats ne peuvent le foutenir que par la bonté du Gouvernement, par l'excellence de l'inftruction, par la pratique des vertus dans ceux qui gouvernent & qui font gouvernés : Prudence à corriger les abus, Force pour maintenir la paix & l'union, Ternpérance dans les moyens, Juftice envers tous. Comment l'ignorance, la hauteur, l'avarice, la fottife dans les uns, engendrent dans les autres un mépris funefte: d'où réfultent les défordres qui ébranlent jufques dans leurs fondemens les Empires où on viole la Juftice, où on force tous les moyens, où l'on abuse de la force, & où on vit fans prévoyance. Défordres qui ont détruit tant de Familles dont le nom avoit retenti fi long-tems par toute la Terre, & qui avoient regné avec tant de gloire fur les Nations étonnées.

Ces vertus ne font pas moins néceffaires à chaque Individu. La Tempérance régle fes devoirs envers foi-même, fur-tout envers fon propre corps qu'il ne traite trop fouvent que comme un malheureux esclave, martyr de fes affections defordonnées.

La Juftice qui régle fes devoirs envers fon prochain & envers la Divinité elle-même à qui il doit tout.

La Force avec laquelle il fe foutient au milieu des ruines de l'Univers, il

fe rit des efforts vains & infenfés des paffions qui l'affiègent fans ceffe de leurs flots impétueux.

Enfin, la Prudence avec laquelle il attend patiemment le fuccès de fes foins, prêt à tout événement & semblable à un fin joueur qui ne risque jamais fon jeu & fait tirer parti de tout.

Le Roi triomphant devient alors l'emblême de celui qui au moyen de ces vertus a été fage envers lui-même, jufte envers autrui, fort contre les paffions, prévoyant à s'amaffer des reffources contre les tems d'adverfité.

Le Tems qui ufe tout avec une rapidité inconcevable, la Fortune qui fe joue de tout le Pâteleur qui efcamote tout, la Folie qui eft de tout, l'Avarice qui perd tout; le Diable qui fe fourre par-tout; la Mort qui engloutit tout, nombre feptenaire fingulier qui eft de tout pays, peut donner lieu à des obfervations non moins importantes & non moins variées.

Enfin, celui qui a tout à gagner & rien à perdre, le Roi véritablement triomphant, c'est le vrai Sage qui la lanterne en main eft fans ceffe attentif à fes démarches, ne fait aucune école, connoit tout ce qui eft bien pour en jouir, & apperçoit tout ce qui eft mal pour l'éviter.

Telle feroit ou à peu près l'explication géographico-politique-morale de cet antique Jeu : & telle doit être la fin de tous. Humanité, que vous feriez heureuse, i tous les jeux fe terminoient ainsi!

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M. BERTIN qui a rendu de fi grands fervices à la Littérature & aux Sciences, par les excellens Mémoires qu'il s'eft procurés, & qu'il a fait publier fur la Chine, nous a communiqué un Monument unique qui lui a été envoyé de cette vafte Contrée, & qu'on fait remonter aux premiers âges de cet Empire, puifque les Chinois le regardent comme une Inscription relative au defféche- ́ ment des eaux du Déluge par Yao.

Il est composé de caractères qui forment de grands compartimens en quarré-long,tous égaux, & précisément de la même grandeur que les Cartes du Jeu des Tarors.

Ces compartimens font diftribués en fix colonnes perpendiculaires, dont les cinq premieres renferment quatorze compartimens chacune, tandis tandis que la' fixiéme qui n'eft remplie qu'à moitié n'en contient que fept. Ce Monument eft donc compofé de foixante-dix-fept figures, ainfi que le

Jeu de Tarots : & il est formé d'après la même combinaison du nombre sept, puifque chaque colonne pleine eft de quatorze figures, & que celle qui ne l'eft qu'à demi, en contient fept.

Sans cela, on auroit pu arranger ces foixante-dix-sept compartimens de maniere à ne laiffer prefque point de vuide dans cette fixiéme colonne : on n'auroit eu qu'à faire chaque colonne de treize compartimens ; & la fixiéme en auroit eu douze.

Ce Monument eft donc parfaitement femblable, quant à la difpofition, au Jeu des Tarots, fi on les coloit fur un feul Tableau : les quatre couleurs feroient les quatre premieres colonnes à quatorze cartes chacune : & les atous au nombre de vingt-un, rempliroient la cinquième colonne, & précisément la moitié de la fixiéme.

Il feroit bien fingulier qu'un rapport pareil fût le simple effet du hasard : il eft donc très-apparent que l'un & l'autre de ces Monumens ont été formés d'après la même théorie, & fur l'attachement au nombre facré de fept ; ils ont donc l'air de n'être tous les deux qu'une application différente d'une feule & même formule, antérieure peut-être à l'existence des Chinois & des Egyptiens: peut-être même trouvera-t-on quelque chofe de pareil chez les Indiens ou chez les Peuples du Thibet placés entre ces deux anciennes Nations.

Nous avons été fort tentés de faire auffi graver ce Monument Chinois; mais la crainte de le mal figurer en le réduifant à un champ plus petit que l'o riginal, joint à l'impossibilité où nos moyens nous mettent de faire tout ce qu'exigeroit la perfection de notre ouvrage, nous a retenu.

N'omettons pas que les figures Chinoifes font en blanc fur un fond trèsmoir; ce qui les rend très-faillantes.

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Rapport de ce Jeu avec les Quadrilles ou Tournois.

Pendant un grand nombre de fiècles, la Noblesse montoit à cheval, & divifée en couleurs ou en factions, elle exécutoit entr'elle des combats feints ou Tournois parfaitement analogues à ce qu'on exécute dans les jeux de cartes, & fur-tout dans celui des Tarots, qui étoit un jeu militaire de même que celui des échecs, en même tems qu'il pouvoit être envisagé comme un jeu civil, en quoi il l'emportoit fur ce dernier.

Dans l'origine, les Chevaliers du Tournois étoient divifés en quatre, même en cinq bandes relatives aux quatre couleurs des Tarots & à la masse des

Atous. C'eft ainfi que le dernier divertiffement de ce genre qu'on ait vu en France, fut donné en 1662, par Louis XIV, entre les Tuileries & le Louvre, dans cette grande place qui en a confervé le nom de Carousel. Il étoit compofé de cinq Quadrilles. Le Roi étoit à la tête des Romains: fon Frere, Chef de la Maifon d'Orléans, à la tête des Perfans: le Prince de Condé commandoit les Turcs : le Duc d'Enguien fon fils, les Indiens: le Duc de Guise, les Américains. Trois Reines y affifterent fous un dais: la Reine-Mere, la Reine régnante, la Reine d'Angleterre veuve de Charles II. Le Comte de Sault, fils du Duc de Lefdiguieres, remporta le prix & le reçut des mains de la Reine-Mere.

Les Quadrilles étoient ordinairement compofés de 8 ou de 12 Cavaliers pour chaque couleur : ce qui, à 4 couleurs & à 8 par Quadrille, donne le nombre 32, qui forme celui des Cartes pour le Jeu de Piquet : & às couleurs, le nombre 40 qui eft celui des Cartes pour le Jeu de Quadrille.

ARTICLE VIII.

Jeux de Cartes Espagnols.

Lorsqu'on examine les Jeux de Cartes en ufage chez les Espagnols, on ne peut s'empêcher de reconnoître qu'ils font un diminutif des Tarots.

Leurs Jeux les plus diftingués font celui de l'Hombre qui se joue à trois: & le Quadrille qui fe joue à quatre & qui n'eft qu'une modification du Jeu de

l'Hombre.

Celui-ci fignifie le Jeu de l'Homme ou de la vie humaine; il a donc un nom qui correfpond parfaitement à celui du Tarot.

Il eft divisé en quatre couleurs qui portent les mêmes noms que dans les Tarots, tels que SPADILLE ou épée, BASTE ou bâton, qui font les deux couleurs noires; COPA ou Coupe, & DINERO Ou Denier, qui font les deux couleurs rouges.

Plufieurs de ces noms fe font tranfmis en France avec ce Jeu : ainsi l'as de pique eft appellé SPADILLE ou épée : l'as de trefle, BASTE, c'est-à-dire, bâton. L'as de cœur eft appellé PONTE, de l'Espagnol Punto, as, ou un point.

Ces Atous, qui font les plus forts, s'appellent MATADORS, ou les Affommeurs, les Triomphans qui ont détruit leurs ennemis.

Ce Jeu eft entierement formé fur les Tournois; la preuve en est frappante, puifque les couleurs en font appellées Palos ou pieux, les lances, les piques des Chevaliers.

Les Cartes elles-mêmes font appellées NAYPES, du mot Oriental NAP, qui fignifie prendre, tenir : mot-à-mot, les TENANS.

Ce font donc quatre ou cinq Quadrilles de Chevaliers qui fe battent en Tournois.

Ils font quarante, appellés NAYPES ou Tenans.

Quatre couleurs appellées Palos ou rangs de piques.

Les Vainqueurs font appellés Matadors ou Aflommeurs, ceux qui font venus à bout de défaire leurs ennemis.

Enfin les noms des quatre couleurs, celui même du Jeu, démontrent qu'il a été formé en entier fur le Jeu des Tarots; que les Cartes Espagnoles ne font qu'une imitation en petir du Jeu Egyptien.

ARTICLE VIII.

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D'après ces données, il n'eft perfonne qui ne s'apperçoive fans peine que les Cartes Françoises ne font elles-mêmes qu'une imitation des Cartes Epagnoles, & qu'elles font ainfi l'imitation d'une imitation, par conféquent une inftitution bien dégénérée, loin d'être une invention originale & premiere, comme l'ont cru mal à propos nos Savans qui n'avoient en cela aucun point de comparaison, feul moyen de découvrir les caufes & les rapports de tout.

On fuppofe ordinairement que les Cartes Françoifes furent inventées sous le Regne de Charles VI, & pour amufer ce Prince foible & infirme: mais ce que nous nous croyons en droit d'affirmer, c'eft qu'elles ne furent qu'une imitation des Jeux méridionaux,

Peut-être même ferions-nous en droit de fuppofer que les Cartes Françoises font plus anciennes que Charles VI, puifqu'on attribue dans DUCANGE (1) à S. BERNARD de Sienne, contemporain de Charles V, d'avoir condamné au feu, non-feulement les marques & les dez à jouer, mais même les Cartes Triomphales, ou du Jeu appellé la Triomphe.

On trouve dans le même Ducange les Statuts Criminels d'une Ville appellée SAONA, qui défend également les Jeux de Cartes.

n'a

Il faut que ces Statuts foient très-anciens, puifque dans cet Ouvrage on pu en indiquer le tems: cette Ville doit être celle de Savone,

(1) Au mot CHARTA.

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