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LE P. TIMOTHÉE.

Je n'en mets qu'une, Mademoiselle. J'y confens fi fon Eminence l'approuve.

DONNA

1

VIOLANTA.

Ce qu'il approuvera certainement. Venez, suivez-moi, Léonor.

DONNA LEONO R.

Tout-à-l'heure, tout-à-l'heure. Diego, rappelle-toi nos faintes promeffes. Je vais prier pour toi, avec tant de ferveur ! Nous fommes tous les deux enchaînés. Mais un Ange célefte viendra brifer nos fers. (Violanta & les Domefliques emmenent Léonor malgré sa résistance.)

DIEGO.

Oui, console toi. Bientôt, bientôt nous nous reverrons dans le fein du bonheur.

DONNA LEONOR en fortant.

Me dit-il quelque chofe, Violanta ?

DONNA VIOLANTA.

Il dit que vous vous confoliez, ma chere amie. (Elles fortent.)

SCENE VIII.

LE P. TIMOTHÉE, DIEGO ET

LES ALGUAZILS,

LE P, TIMOTHÉE avec ironie.

C'EST

'EST une très-belle fille, Diego. Vous auriez fait là une fort jolie prife. N'eft-il pas vrai?

DIEGO.

Ordonnez qu'on m'emmene. Pourquoi me retenez-vous encore ici?

LE P.
P. TIMO THÉ É.

Et de plus, elle eft riche. Tout cela valoit bien la peine d'un enlevement.

DIEGO.

Je vous méprise trop pour vous répondre.

LE P. TIMOTH É É.

Vous avez tort. Les gens d'efprit ne méprisent jamais un ennemi puiffant.

DIEGO.

Vous êtes donc mon ennemi ?

LE P. TIMOTH É E.

Non pas de votre perfonne, mais de vos crimes.

DIEGO.

Vous n'êtes pas un fcélérat de la trempe commune ainfi vous avez tort d'employer le langage des hypocrites ordinaires.

LE P. TIMOTHÉE.

Je vois que tous les deux nous croyons nous connoître parfaitement. Vous me regardez comme un hypocrite. Je fais bien que le Juge n'a pas befoin de fe juftifier aux yeux de fon prifonnier. Cependant, puifque nous en fommes fur ce point là, j'en appelle au témoignage de tous ceux qui me connoiffent, aux loix de mon ordre, à má conduite irréprochable, à ma bonne renommée, & enfin à la confiance de mes Supérieurs, qui pourroient bien donner l'emploi dont ils m'ont chargé, à un homme qui n'en feroit pas digne; mais qui fe garderoient bien de lui en laiffer long-temps l'exercice, s'il n'étoit qu'un hypocrite qui les eut trompés. Je fuis fi éloigné d'être l'ennemi de votre perfonne, que vous ne me verrez jamais par la fuite vous reprocher vos discours injurieux; ce qui feul feroit déjà un

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affez grand crime. Mais auffi, je l'avoue, je

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ne fuis pas votre ami, par la raison seule que j'ai fu vous connoître. Vous allez entendre ce que je pense de vous ; & vous pourrez du moins vous avouer à vous même, que je ne dois pas agir autrement que je ne fais. Je crois bien cependant, que vous ne ferez pas cet aveu à quelqu'autre.

DIEGO.

Dites, faites ce que vous voudrez, & furtout, finiffez.

LE P. TIMOTHÉ E.

Vous n'êtes point comme je l'avois cru d'a bord, un jeune homme léger, imprudent, qui fe laiffe quelquefois égarer par fes fens. Non; vous n'étes rien de tout cela. Mais ce que je craignois depuis long-temps, fans ofer reveler mes foupçons; vous n'êtes qu'un impofteur, un fourbe adroit, & d'autant plus dangereux, que vous favez mieux qu'un autre l'art de féduire.

Miférable!

DIEGO.

LE P. TIMOTHÉ É

Oui, vous n'êtes qu'un de ces vagabonds

inconnus qui fe font une fortune brillante dans

tous les pays où ils rencontrent des gens fans expérience, & des jeunes filles trop crédules. A la vérité, ces fortes d'avanturiers reçoivent, tôt ou tard la récompenfe qui leur eft due; mais jusqu'à ce moment, qui arrive toujours trop tard, ils ruinent des familles entieres, & les couvrent fouvent d'un éternel opprobre..

DIEGO.

Lâche hypocrite.

LE P. TIMOTHÉ E.

Pour un homme tel que vous, il n'est pas difficile de furprendre le cœur d'une jeune fille qui n'a pas la moindre défiance. Une figure paflable; un air un peu languiffant; une action noble en apparence, que l'on a faite avec une modeftie impofante; tantôt un filence refpectueux, & tantôt un pompeux étalage de beaux principes & de la morale la plus pure, & tous ces autres petits maneges que vous connoiffez fi bien pour votre âge; n'en étoit-ce pas trop pour en imposer à l'innocence ingénue? Mais pour moi, mon cher Diego, je pénetre au fond des cœurs. Le mafque tombe, & l'homme fe montre enfin tel qu'il eft. Comment un étranger, fans nom, a-t-il ofé feulement concevoir la penfée d'être le rival d'un Chevalier Sampajo ?

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