diffoute, s'il ne s'en trouve pas affez pour diffoudre le tout, d'où il fuit que cette combinaison se convertit fur le champ en petits cryftaux qui reffemblent prefque à un précipité. C'est ce qui a lieu fur tout, en verfant une quantité fuffifante d'acide vitriolique concentré fur des diffolutions faturées de tartre vitriolé, d'alun, de vitriol, de fublimé corrofif, ou d'autres fels Feu folubles, & dont les principes prochains ne peuvent être séparés par l'acide vitriolique. L'acide du fel décompose réellement le vitriol de mercure, il s'empare de la chaux métallique & l'entraîne au fond avec foi s'il ne trouve pas affez d'eau pour être tenu en diffolution. L'acide vitriolique concentré, verfé goutte à goutte dans une diffolution de fublimé corrofif, en précipite aussi à son tour une poudre blanche ; d'où quelques Auteurs ont conclu tout de fuite, qu'il y avoit ici une décompofition réciproque. Mais fi l'on examine ce dernier précipité, on trouvera que ce n'est autre chofe que du fublimé corrofif privé de fon eau de diffolution. L'alkali fixe végétal, principalement lorsqu'il eft cauftique & fec produit également les mêmes effets dans les mêmes circonstances; c'est-à-dire lorsqu'on le verfe fur des combinaisons dont les bafes ont autant ou plus d'affinité que lui pour les acides

C

auxquels elles font unies. Le tartre vitriolé, le nitre & quelques autres fels, peuvent être précipi

Les précipitations de cette espèce font rarement complettes, car en général il refte toujours quelque chofe de diffout dans la liqueur.

que

Enfin, ajoutons encore ici les phénomènes irréguliers qui dépendent d'une folubilité apparente. La liqueur des cailloux, comme tout le monde le fait, tient la terre filiceufe diffoute dans l'eau, par le moyen de l'alkali fixe : fi l'on verfe un acide dans cette liqueur, la terre filicée doit fe précipiter; c'est auffi ce qui arrive, à moins la liqueur des cailloux ne foit délayé d'environ vingt-quatre fois fon poids d'eau, ou même un peu plus; car alors elle ne fe trouble nullement quoique la quantité d'acide qu'on y a versée, foir plus que fuffifante pour faturer tout l'alkali. Ici la terre filiceufe paroît diffoute; mais la véritable raifon de cette diffolution apparente, eft que molécules font tellement divifées dans cette grande quantité d'eau, que le rapport de leurs furfaces à leur poids est affez augmenté pour qu'elles reftent fufpendues. Comme j'ai déjà expliqué plus au long cet effet (1), je ne crois

fes

( 1 ) Opufc. Vol. 2, pag. 36. Traduction Françoife, Tom. 2, pag. 38.

pas devoir m'y arrêter beaucoup ici ; j'ajouterai Teulement que les molécules filiceufes ne font pas même diffoutes par le fel neutre qui vient de fe former, puifqu'elles fe précipitent par l'ébullition (qui augmente d'ailleurs la folubilité), parce que la chaleur diminue la denfité de liqueur. Si quelqu'un objectoit que les autres terres devroient reter fufpendues par la même raison, il trouveroit, en examinant la chofe plus attentivement, 1°. que de toutes les terres primitives, aucune n'eft foluble dans les alkalis que la terre argilleufe; mais elle l'eft également dans les acides, de forte qu'un excès d'acide ou d'alkali ne peut avoir lieu, fans qu'il s'enfuive un vraie diffolution. 2°. Que la terre calcaire, féparée de ses menftrues acides, par l'alkali fixe cauftique fuffifamment délayé & verfé goutte à goutte dans fa diffolution, jufqu'à ce qu'elle change en bleu le papier teint par le fernambouc, ne fe montre pas fous forme de précipité vifible, pourvu que cette dissolution ait été auparavant étendue de cinquante fois fon volume d'eau diftillée. La liqueur refte claire, mais il fe forme peu-à-peu une pellicule à fa furface. La diffolution calcaire doit être rellement chargée, qu'elle contienne plus de chaux que n'en pourroit contenir un volumé égal d'eau de chaux la plus faturée; fans quoi l'on pourroit

dire que la terre calcaire n'est pas feulement fufpendue, mais réellement diffoute dans l'eau alkalifée. Si l'on verfe une feule goutte d'alkali aëré dans cette diffolution claire, quoique chargée d'alkali cauftique, il s'y forme à l'instant des nuages blancs, pourvu qu'on n'agite pas la liqueur; au lieu que fi on l'agite en verfant l'alkali aëré, elle ne fe trouble pas, parce que les mouvemens empêchent les molécules de fe réunir, à mefure qu'elles fe féparent. Voilà donc la terre calcaire vraiement fufpendue dans la liqueur, & toutes les objections que l'on pourroit faire détruites d'avance, à ce que j'efpère.

S. VIII.

Anomalies par la combinaifon de trois fubftances.

Telle eft la nature de quelques fubftances qu'elles peuvent fe réunir trois ensemble fans qu'aucune foit rejettée ; c'est-à-dire, la combinaifon de deux fubftances attire quelquefois tellement une quantité déterminée d'une troisième, ou même de plufieurs autres, qu'elles fe réuniffent toutes ensemble fi fortement, qu'on peut à peine les féparer enfuite par quelques moyens que ce foit. La voie sèche eft principalement expofée à cet inconvénient; car les terres mêlées

entre elles ou avec différens fels, fe fondent enfemble fans fe féparer; c'eft auffi ce qui arrive à la plupart des métaux. A la vérité A n'est pas attiré également par a & par b; mais Aa s'unit fortement à b, ou Ab avec a, ce qui n'empêche pas que a ne puisse avoir une affinité plus forte que b, quoique la nature particulière de cette combinaifon s'oppose à l'exclufion de l'un ou de l'autre. L'alkali volatil, l'acide marin & la chaux de mercure; l'alkali volatil, l'acide vitriolique & la magnésie; enfin, le fer, l'acide vitriolique & la magnésie, pour me borner à ces trois exemples, s'uniffent fi fortement dans des proportions déterminées, qu'il eft impoffible de les féparer par la cryftallisation, & niême très-difficile par tout

autre moyen.

Le même phénomène fe préfente quelquefois entre quatre fubftances: par exemple, entre le borax & le tartre, la magnéfie vitriolée & le fel commun, ce dernier & le gypse, & plufieurs autres. On pourroit également citer le foie de soufre produit au moyen du feu, par un mélange de tartre vitriolé & de charbon; car on conçoit que le phlogiftique fépare d'abord l'acide, & forme le foufre, qui eft diflout enfuite par l'alkali pour former l'hépar; mais on comprendroit difficilement