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De fa puiffance immortelle,

Tout parle, tout nous inftruit ;
Le jour au jour la revéle,
La nuit l'annonce à la nuit.

L'univers à fa présence
Semble fortir du néant.

Et dans un autre endroit:

Ode de M.Rouf Liv. I. Ode 2.

Mais le Seigneur fe leve, il parle & fa me- Ibid.

nace.

Convertit votre audace

En un morne fommeil,

La juftice paroit de feux étincelante
Et la terre tremblante

S'arrête à fon aspect!

Il a dit avec Horace:

Le ciel dans une nuit profonde,
Se plait à nous cacher fes loix,
Les Rois font les maîtres du monde,
Les Dieux font les maîtres des Rois..

Il n'eft pas moins grand, lorfqu'il marche fans guide.

Qde 6,

Liv. II. Ode 2.

Liv. II. Eft-ce donc le malheur des hommes,
Ode 6. Qui fait la vertu des grands Rois ?

Ibid. Ode 3.

Images des Dieux fur la terre,

Eft-ce par des

coups

de tonnerre

Que leur grandeur doit éclater?

Le bonheur peut avoir fon terme,
Mais la fageffe eft toujours ferme,
Et les deftins toujours legers.

Et dans une autre Ode, il parle ainfi de l'homme avide de richeffes:

Pour appaifer fa foif ardente
La terre en trésors abondante,
Feroit germer l'or fous fes pas:
Il brule d'un feu fans rémede,
Moins riche de ce qu'il poffede,
Que pauvre de ce qu'il n'a pas.

Ces exemples font fuffifans pour juger de la nobleffe des idées de ce Poëte & de la véhémence de fon style.

39. La hardieffe des pensées

"

eft une fuite naturelle de l'élévation des fentimens. Une grande ame éprouve ce que les autres n'éprouvent point, & ce qu'elle peut avoir de commun avec eux pour le fonds, elle le penfe d'une maniere bien fupérieure. Elle envifage les objets par des faces inconnues aux yeux vulgaires, elle embraffe des rapports imperceptibles, elle franchit la diftance qui fe trouve entre deux idées, & les rapproche fans fe mettre en peine d'aller pefamment & comme par degrés de l'une à l'autre. Les Images, les Métaphores, les Defcriptions courtes & vives, les Apoftrophes, les Antithéfes qui roulent fur les chofes; en un mot, toutes les grandes Figures font du reffort de l'Ode. On peut s'en convaincre par la Lecture de celles de M. Rouffeau. Les morceaux que l'on va lire & qui ui font remarquables par la force des penfées, ont pour Auteur un difciple de ce grand Maitre ; ils font partie d'une Ode contre l'a

mour.

Ode manufcrite

contre

l'amour par M. le c...

Souvent tu flétris la mémoire,

Des Princes, des plus grands Guerriers
Et dans le fein de la victoire,
Tu vas profaner leurs lauriers.

Hé quoi! le fils même d'Alcmene
Plongé dans un honteux repos !
Il dompta les monftres fans peine,
Amour, tu domptas le Héros.
Un enfant triompe d'Hercule!
A l'emploi le plus ridicule,
Il facrifia fes vertus!

Cruel enfant ta main fatale,
Préparant les charmes d'Omphale,
Vengeoit les monftres abbatus.

Mais non, dans le fiécle où nous fommes

On cherit ton joug odieux.

Les Dieux font adorés des hommes,
L'amour eft adoré des Dieux, &c.

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Je m'abftiens d'en citer davantage pour abréger, & de faire des réflexions que le goût des Lecteurs ne manquera pas de leur fuggé

rer.

4°. A la nobleffe des idées, il

faut joindre le choix, la jufteffe & la hauteur des expreffions, c'eft à la Poëfie Lirique fur tout qu'il convient d'en déployer toute la pompe & la magnificence; ce qui peut fe faire en deux manieres, par le choix & la propriété des termes fubftantifs qui ne repréfentent que des idées fimples & primitives, & par l'application des noms adjectifs qui fervent à exprimer les idées acceffoires ou complexes. Les Epithétes bien choifies abrégent le difcours & multiplient le fens. Mais fi l'on doit fe faire une loi de la

précision, ce n'est pas à dire pour cela qu'on puiffe hazarder des termes extraordinaires & bourfouflés, ni négliger la clarté, comme faifoient Ronfard & du Bartas, fous prétexte d'imiter Pindare, auquel les Grecs même ont reproché fes expreffions emphatiques & obfcures. L'abondance inutile des mots n'est pas un moindre défaut, elle énerve & fait languir les pensées, il faut marcher avec prudence entre ces deux excès. Les exem

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