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ble, un Poëte n'en étoit pas moins excufable de ne les a voir envifagées qu'en beau &· de leur avoir rendu l'hommage qu'elles méritoient à cet égard. Ajoutez encore à cela que, la Poëfie devenoit par là un moyen fûr, pour exciter l'émulation, fi néceffaire dans la fociété. Que Sappho dans fes Poëfies ait diftillé la débauche; qu'Horace en plufieurs endroits, ait été fi licentieux que des Payens même auroient rougi de les expliquer; qu'Anacreon ne refpire que la molleffe & la volupté; que Catulle & Tibulle ayent écrit des infamies & des obfcénités: On ne prétend pas les difculper, on les condamne fans referve, on a leurs défauts en horreur. Mais des fautes de ces Artifans

en prendre occasion de prof crire un Art aimable & d'ail: leurs très utile; c'est à mon fens, fe tromper auffi groffiérement que fi l'on faifoit bru ler les tableaux de Rubens de le Sueur & de le Brun; parceque Carache & quelques au tres ont deshonoré leurs pinceaux en traçant des figures cyniques.

C'est donc la Poëfie en elle même, & précision faite des inclinations vicieufes de quelques-uns de ceux qui l'ont cultivée, qu'il faut examiner, pour juger de quelle utilité elle est réellement. Soit qu'elle ait chanté les Dieux, foit qu'elle ait célébré les Héros, que s'eftelle propofé? l'éloge de la vertu que les hommes adoroient dans les uns & admiroient

dans les autres. Pour la rendre plus aimable, elle s'eft appliqué à en rélever la beauté par les couleurs les plus vives, par les images les plus riantes, par les peintures les plus touchantes, à répandre tous les charmes & tous les agrémens poffibles dans fes maximes & dans fes inftructions, afin de les faire mieux goûter aux hommes. A ces traits on reconnoit aifément que le but de la véritable Poëfie, (Et par ces expreffions, j'entends la Poëfie fage & vertueufe) eft d'inftruire en amufant: utile dulci. Voilà fa devife, plaire eft le moyen, inftruire eft la fin. La fageffe eft fon terme, l'amusement n'eft qu'un véhicule imaginé pour ménager la foibleffe & prévenir le dégout. Que les

Détracteurs de la Poëfie dépouillent pour un moment, s'il eft poffible, leurs préjugés, & qu'ils l'envifagent de ce point de vûë qui n'eft nullement chimérique s'ils remontent à l'Antiquité, ils trouveront dans les ouvrages de Pindare,& dans la plupart de ceux d'Horace, des maximes excellentes fur l'amour de la juftice & de l'équité, fur celui de la Patrie fur le mépris des honneurs, des richeffes & même de la vie, fur l'égalité d'ame dans la bonne comme dans la mauvaise fortune abftraction faite des préjugés du tems & de l'éducation, ces deux liriques leur offriront une morale pure, des fentimens élévés, des principes folides, des idées nobles & vraïes, en un mot, une Phi

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les graces ont pa

lofophie que rée, fans l'amollir. Les Poëmes d'Homere & de Virgile, ref pirent-ils autre chofe que la vertu ? N'eft-il pas même étonnant qu'au milieu de la corruption des mœurs qu'autorifoit le Paganifme, ces deux grands Poëtes ayent pû préferver leur plume d'une contagion prefqu'univerfelle? Que d'inftructions morales & politiques, le premier enveloppe fous fes agréables fictions! que de bon fens & de fageffe dans les rians tableaux que l'autre crayonné! Combien de maximes excellentes dans l'Iliade & dans l'Odiffée qui peuvent fervir de principes pour former les moeurs & pour regler la conduite de la vie! Combien de fentences courtes & vives dans

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