que fous le regne fuivant, c'eft-à-dire, du temps d'Amenon En quoi on blâmoit Polyhiftor, d'avoir introduit après Berofe, fon Oannès à la premiere année; c'est-à-dire, vraisemblablement, au commencement de cette même Monarchie. Le même Apollodore parle d'un quatrième Annedotus, qui étoit auffi forti de la mer, fous le regne de Daonus; & Abydene nomme quatre perfonnes qui vinrent alors par mer, pour enfeigner plus en détail ce qu'Oannès n'avoit appris aux Chaldéens, que d'une maniere abbregée; il nomme ces quatre Docteurs, Euhedochus, Eneugamus, Eneubalus, & Anembotus. Telle étoit la Tradition des Chaldéens fur l'origine du monde, dans laquelle il paroît qu'on fuppofe les Dieux antérieurs à la formation du monde. On voit qu'il n'y est nullement parlé de leur naiffance, comme dans celle des Pheniciens & des autres Peuples dont je parlerai dans le chapitre fuivant. Quoiqu'il en foit, voici les dix premieres genera tions, fuivant l'opinion des Chaldéens, & la durée de leurs regnes par Sares (a). (a) Les Anciens divifoient le temps en Sares, en Neres, & en Sofes. Le Sare fuivant Syncelle, marquoit trois mille fix cens ans ; le Nere, fix cens, & le Sofe, foixante; ce qui donnoit à la durée des premiers regnes, un nombre infini d'années', chaque Roi ayant regné plufieurs Sares, mais lorsqu'on ne regarde les Sares que comme des années de jours, le calcul de ces anciens Auteurs fe rapporte affez exactement aux années données par Moyfe aux premiers Patriarches. Voyez fur cela Scaliger, Petau, & les autres Chronographes, & en particulier l'Hiftoire univerfelle donnée par une Societé d'Anglois. Il n'eft pas douteux que comme Alorus dans le fyftême 'des Chaldéens, eft inconteftablement Adam, Xixutrus ne foit Noé. Auffi racontent-ils que ce fut de fon temps qu'arriva le Deluge; en quoi, pour le dire en paffant, les Auteurs Chaldéens font plus fidelles que Sanconiathon, dont je parlerai dans la fuite, lequel rapportant les dix premieres generations du monde naiffant, & les dix qui les fuivirent, par une prévarication inexcufable ne fait aucune mention de ce celebre évenement. Voici ce qu'en rapportent les Auteurs que je viens de citer (1). Cronus ou Saturne étant apparu en fonge à Xixutrus, l'avertit que le quinziéme du mois Doefius le genre humain feroit détruit par un Deluge, & lui ordonna de mettre par écrit l'origine, l'histoire, & la fin de toutes chofes ; & de cacher fous terre fes Mémoires, dans la Ville du foleil, nommée Sippara; de conftruire enfuite un Vaiffeau, d'y mettre les provisions neceffaires, & d'y entrer, lui, fes parens & fes amis, & d'y enfermer les oifeaux & les animaux à quatre pieds. Xixutrus exécuta ponctuellement fes ordres & fit un Navire qui avoit deux ftades de largeur, & cinq de longueur; & il n'y fut pas plûtôt entré que la terre fut inondée. Quelque temps après voyant les eaux diminuées, il lâcha quelques oifeaux, qui ne trouvant ni nourriture, ni lieu où fe repofer, retournerent au Vaiffeau. Quelques jours après il en lâcha d'autres, qui revinrent avec un peu de boue aux pattes. La troifiéme fois qu'il les laiffa envoler, ils ne parurent plus; ce qui lui fit juger que la terre commençoit à être fuffifamment découverte. Il fit alors une ouverture au Vaiffeau, & voyant qu'il s'étoit arrêté sur une montagne, il en sortit avec sa femme, fa fille, & le Pilote; & ayant adoré la Terre, élevé un Autel & facrifié aux Dieux, lui & ceux qui l'avoient accompagné difparurent. Ceux qui étoient demeurés dans le Vaisseau ne les voyant point revenir, fortirent & les chercherent vainement : feulement une voix fe fit entendre, & leur annonça que la pieté de Xixutrus lui avoit merité d'être enlevé dans le ciel, & d'être mis au nombre des Dieux, avec ceux qui l'accompagnoient. La même voix, (1) Voyez Syncel. loc. cit. Evang. L. 1. les exhorta à être religieux, & à fe transporter à Babylone, après avoir déterré à Sippara les Memoires qui y avoient été déposés. La voix ayant ceffé de fe faire entendre, ils allerent rebâtir la Ville qu'on vient de nommer, & quelques autres. CHAPITRE II. Theogonie des Pheniciens. ANCONIATHON, Prêtre de Beryte, qui vivoit à ce la Cofmogonie, & fur la Theogonie des Pheniciens. Eufebe (1) Prep. qui nous a confervé un long Fragment de ce Traité (1), rapporte en faveur de cet Auteur un paffage qui ne doit pas être fufpect, puifqu'il eft tiré de Porphyre, le plus grand ennemi que les Chrétiens ayent jamais eu. Cet Auteur raconte que Sanconiathon avoit écrit fur les Juifs, des chofes trèsveritables; qu'il étoit conforme à leurs Ecrivains, & qu'il avoit appris plufieurs des circonftances qu'il rapporte, de Jerombaal, Prêtre de Jevo; qu'il avoit dedié fon Ouvrage à Abibaïl Roi de Phenicie que non feulement ce Prince, mais ceux qui avoient ordre d'examiner les Livres, étoient convenus de la verité de l'Hiftoire de cet Auteur..... Enfin qu'il avoit tiré ce qu'il avançoit, partie des Actes des villes particulieres, & partie des Archives qui fe confervoient avec foin dans les Temples. Eufebe. Ibid. Le temps nous a enlevé l'Ouvrage de cet ancien Auteur; il fubfiftoit encore dans les premiers fiecles du Chriftianisme puifque c'eft vers ce temps-là, c'eft-à-dire vers le regne des Antonins, que Philon de Byblos le traduifit en Grec, & le (2) Voyez divifa en neuf Livres (2). Dans les Préfaces qu'il y avoit ajoûtées, il difoit, » que Sanconiathon, homme fçavant & de grande experience, fouhaitant avec paffion de connoître les Hiftoires de tous les Peuples, & les connoître dès leur » origine, avoit fait une perquifition exacte des Ecrits de Taaut, perfuadé que comme il avoit inventé les Lettres, il étoit auffi le premier des Hiftoriens. C'étoit donc dans les Ouvrages de ce chef des Sçavans, du celebre Mercure, que l'auteur Phenicien avoit puifé le fond de fon Hiftoire. Après cela il blâme les Grecs d'avoir tourné en froides allegories, ou en explications phyfiques, des faits très-réels; & de ce qu'ayant voulu allegorifer l'hiftoire des Dieux, ils l'avoient entierement renversée, en introduisant à la place de la verité, des idées chimeriques, & des myfteres qui n'avoient pas plus de réalité. Cette traduction, quoique vifiblement interpolée par Philon, & accommodée aux idées des Grecs de fon temps, comme il paroît par ce qui nous en eft refté, ne fubfifte plus préfentement; mais Eusebe nous en a confervé un long fragment, & c'est tout ce que nous en avons. Malheureusement encore, car il eft bon de donner une idée nette & exacte de ce fragment; outre qu'il eft interpolé par Philon, ainsi qu'on vient de le dire, Eufebe en le rapportant, au lieu de l'avoir copié tel qu'il étoit, y a mêlé, comme on jugera aifément en le lifant avec attention, non feulement les reflexions du Traducteur Grec, mais auffi les fiennes propres ; ce qui diminue beaucoup l'autorité de ce précieux refte des antiquités Pheniciennes : n'étant pas toûjours aifé de diftinguer ce qui eft de Sanconiathon, d'avec ce qui n'eft que de Philon ou d'Eufebe. Il est bien clair, par exemple, que lorfqu'il eft parlé des Grecs, comme quand il dit que, trompés par des mots équivoques, ils ont pris une chofe pour une autre; ou lorfqu'en parlant de Thot ou Thaut, on ajoûte que c'eft le même que les Grecs nomment Hermès; il eft clair, dis-je, que ces reflexions font de Philon ou d'Eufebe; car, fi Sanconiathon eft auffi ancien qu'on le prétend, les Grecs n'étoient guere connus des Pheniciens du temps de cet Auteur; ou du moins leur Religion, qu'ils avoient reçue des -Pheniciens eux-mêmes par les Colonies qui étoient venues s'établir parmi eux, n'étoit pas encore changée au point qu'elle l'étoit du temps d'Hefiode & d'Homere, qui n'ont vêcu que plus de quatre cens ans après San coniathon. Quoiqu'il en foit, voici le fragment, qui peut être divifé en trois parties. Ceux qui en voudront voir la traduction entiere, n'ont qu'à lire les Reflexions de M. Fourmont fur-les |