Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Saturne, & ce qu'il y a de veritable fur le regne d'un Prince que les Grecs ont regardé comme fi heureux, qu'ils en ont fait le fiecle d'or.

Après quelques autres chofes, l'Auteur continue ainfi (a). » Aftarté la Grande, Jupiter Demaroon, & Adod le Roi » des Dieux, regnoient dans le pays, fuivant les confeils de > Chronos ou Saturne. Aftarté pour marque de fa Royauté, » mit fur fa tête celle d'un taureau. Parcourant la terre, elle trouva un aftre tombé du ciel (b); elle le prit & le confacra dans Tyr, l'Ifle fainte. Aftarté, fuivant les Pheniciens, » eft Aphrodite ou Venus. Chronos faifant auffi fon tour de → la terre donna à Athene fa fille, le Royaume de l'Attique.

[ocr errors]
[ocr errors]

29

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

Cependant la pefte & la famine s'étant fait fentir, Chronos > offre à fon pere Uranus, fon fils Sadic, & fe circoncit, → ordonnant à tous les foldats de fon armée d'en faire autant. Quelque temps après, un fils qu'il avoit eu de Rhea, appellé Mouth, fut mis au rang des Dieux. Le nom que les Grecs donnent à ce fils, peut fe rendre en Grec par το Θάνατος ou Pluton. Chronos après cela donna deux de fes » villes, fçavoir, Byblos à la Déesse Baaltis ou Dioné, Beryt » à Neptune & aux Cabires, aux Agrotès ou Laboureurs, » & aux Pêcheurs, c'est-à-dire, aux Dieux appellés Amis. Mais avant ces chofes le Dieu Taaut fit auffi le portrait des autres Dieux, de Saturne ou Chronos, de Dagon, &c. » pour en former les caracteres facrés des Lettres. Pour figne de Royauté, il donna à Chronos quatre yeux, deux devant & deux derriere. De ces quatre yeux, deux fe fer> moient pendant que les deux autres veilloient (1). De mê> me fur fes épaules il mettoit quatre ailes, dont deux étoient → étenduës, les deux autres demeurant dans un état de repos; étoit le Saturfon idée étant de faire entendre, par les yeux, que Chronos ne des Latins. couché veilloit, & qu'éveillé il demeuroit couché & se repofoit; par les ailes, que fe repofant il ne ceffoit pas de voler, & qu'avec ce mouvement il demeuroit tranquille. Aux autres Dieux il ne donnoit que deux ailes, une fur chaque épaule, pour montrer que leur vol étoit feulement

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

(a) Ce dernier article paroît fort mêlé des reflexions de Philon.
b) Un Aigle, comme on le dira dans les remarques fur ce Fragment.

(1) Voila

l'origine de

Janus qui

» pour accompagner Chronos. Il avoit même ajouté au portrait de Chronos deux autres ailes au haut de la tête; une » pour marquer la fuperiorité de fon efprit dans l'art de re»gner, l'autre pour defigner la delicateffe de fes sensations. Chronos étant allé dans le pays du midi, donna toute l'Egypte au Dieu Taaut, pour en former un Royaume, qui lui appartînt en propre.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

Après avoir traduit ce Fragment, Philon de Byblos ajoute, que cette hiftoire avoit été laiffée aux defcendans de Sydik, & que le fils de Thabion, c'eft-à-dire, Sanchoniathon luimême, après l'avoir enveloppée, & y avoir mêlé quelques idées physiques fur l'origine du monde, en avoit tranfmis le fyfteme aux Prophetes des Orgies.

[ocr errors]
[ocr errors]

Les Grecs, dit encore le même Traducteur, qui par » la beauté de leur genie l'ont emporté fur toutes les autres Nations, fe font approprié toutes les anciennes Hiftoires les ont ornées & exagerées, n'ayant cherché qu'à divertir → par leurs recits; & dès-là, ils ont infiniment changé ces > mêmes Hiftoires. C'eft de là qu'Hefiode & les autres Poëtes Cycliques ont forgé des Theogonies, des Gigantomachies, des Titanomachies, & d'autres morceaux par lesquels > ils ont comme étouffé la verité. Nos oreilles accoutumées → dès l'enfance à leurs fictions, prévenuës d'opinions accreditées depuis plufieurs fiecles, confervent comme un depôt facré la vanité de ces fables. Et parce que le temps a donné infenfiblement à ces contes frivoles, la force de s'emparer de nos efprits, ils en font tellement en poffeffion, qu'il eft très-difficile de les rejetter. Il est même arrivé > là que la verité, lorfqu'on la decouvre aux hommes, paroît avoir l'air du menfonge, pendant que les narrations fabuleufes, quelqu'infenfées qu'elles foient, paffent pour les faits les plus authentiques,»

[ocr errors]

R

20

par

Tel eft le Fragment de Sanchoniathon. Comme j'aurai occafion dans la fuite de cet Ouvrage, de parler de tous les perfonnages dont l'Auteur fait mention, je ne joindrai ici que peu de reflexions.

1o. Les Auteurs font fort partagés fur l'authenticité de ce morceau ; & s'il y en a quelques-uns qui ayent foutenu qu'il

eft veritablement de l'Auteur Phenicien, quoiqu'interpolé par Philon fon Traducteur, & mêlé de plufieurs reflexions qui ne font pas de Sanchoniathon, le plus grand nombre l'a toujours regardé comme un ouvrage fuppofé. Le celebre Cumberland & M. Fourmont l'aîné, font les deux qui en ont foutenu la verité avec le plus de force & d'érudition. On peut voir dans ce dernier fur tout (1), l'hiftoire des fentimens des Sçavans sur ce fujet, & les raifons qu'il a eues de les réfuter.

(1) Refl.

crit. fur les an

ciens Peuples.

2o. Il n'eft pas douteux que Sanchoniathon n'ait pris les idées de fa Theogonie dans des traditions très-anciennes, L. I. mais déja corrompues chez les Pheniciens, par les fictions qu'on y avoit mêlées mais il est évident en même temps, que l'Auteur dans le deffein d'accrediter l'Idolatrie, n'a parlé pour les Genealogies d'avant le Deluge, que de la branche de Cain, fans faire aucune mention de celle de Seth.

3o. L'Auteur eft plus clair & moins interpolé pour ces dix premieres Genealogies, dont nous avons donné la Table, que pour celles qui ont fuivi le Deluge, fur lefquelles on trouve plus de confufion, & moins de liaison ; quoiqu'on voye bien qu'il a voulu les conduire jufqu'à la famille d'Abraham & à quelques-uns de fes defcendans (2).

J

(2) Voyez

la Table qu'en

a donnée M.

1. p. 86.

4°. Il paroît que le but de l'Auteur, après celui du crédit qu'il vouloit donner à l'Idolatrie, a été de faire connoître les Fourmont, L inventeurs des arts; en quoi il eft quelquefois d'accord avec Moyfe; & en même temps l'hiftoire des Apotheofes, ne manquant jamais d'indiquer ceux qui par des inventions utiles, avoient été mis au rang des Dieux, & honorés d'un culte public.

D'où il fuit, 5°. qu'ayant donné peu ou point de part au fouverain Etre, dans la formation du monde, fa Cofmogonie eft un atheisme (3); & par une contradiction des plus groffie-(3) V. Eures, fa Theogonie eft une imagination extravagante.

febe loc. cit.. Cumberland

mont.

6o. Dans les deffeins que nous venons de donner à cet & M. FourAuteur, & qu'il est évident qu'il a eu, il n'a dû faire aucune mention du Deluge, qu'il avoit fans doute connu aussi bien que les Chaldéens & les Egyptiens qui en ont parlé.

7°. Quand il ne feroit pas auffi évident qu'il l'eft, que c'eft dans cette Hiftoire Phenicienne que les Grecs ont puifé leur

» pour accompagner Chronos. Il avoit même ajouté au portrait de Chronos deux autres ailes au haut de la tête; une » pour marquer la fuperiorité de fon efprit dans l'art de rel'autre pour defigner la delicateffe de fes fenfations. » Chronos étant allé dans le pays du midi, donna toute l'Egypte au Dieu Taaut, pour en former un Royaume, qui lui appartînt en propre.

» gner,

[ocr errors]

Après avoir traduit ce Fragment, Philon de Byblos ajoute, que cette hiftoire avoit été laiffée aux defcendans de Sydik, & que le fils de Thabion, c'est-à-dire, Sanchoniathon luimême, après l'avoir enveloppée, & y avoir mêlé quelques idées phyfiques fur l'origine du monde, en avoit tranfmis le fyfteme aux Prophetes des Orgies.

» Les Grecs, dit encore le même Traducteur, qui par » la beauté de leur genie l'ont emporté fur toutes les autres » Nations, fe font approprié toutes les anciennes Hiftoires les ont ornées & exagérées, n'ayant cherché qu'à divertir → par leurs recits; & dès-là, ils ont infiniment changé ces » mêmes Hiftoires. C'eft de là qu'Hefiode & les autres Poë»tes Cycliques ont forgé des Theogonies, des Gigantoma

D

[ocr errors]

R

[ocr errors]

chies, des Titanomachies, & d'autres morceaux par lefquels R ils ont comme étouffé la verité. Nos oreilles accoutumées » dès l'enfance à leurs fictions, prévenuës d'opinions accreditées depuis plufieurs fecles, confervent comme un depôt facré la vanité de ces fables. Et parce que le temps a donné insensiblement à ces contes frivoles, la force de s'emparer de nos efprits, ils en font tellement en poffeffion, qu'il eft très-difficile de les rejetter. Il eft même arrivé par là que la verité, lorfqu'on la decouvre aux hommes, paroît avoir l'air du menfonge, pendant que les narrations fabuleufes, quelqu'infenfées qu'elles foient, paffent pour les faits les plus authentiques,»

R

[ocr errors]

≈ là

[ocr errors]

Tel eft le Fragment de Sanchoniathon. Comme j'aurai occafion dans la fuite de cet Ouvrage, de parler de tous les perfonnages dont l'Auteur fait mention, je ne joindrai ici que peu de reflexions.

1o. Les Auteurs font fort partagés fur l'authenticité de ce morceau; & s'il y en a quelques-uns qui ayent foutenu qu'il

eft veritablement de l'Auteur Phenicien, quoiqu'interpolé par Philon fon Traducteur, & mêlé de plufieurs reflexions qui ne font pas de Sanchoniathon, le plus grand nombre l'a toujours regardé comme un ouvrage fuppofé. Le celebre Cumberland & M. Fourmont l'aîné, font les deux qui en ont foutenu la verité avec le plus de force & d'érudition. On peut voir dans ce dernier fur tout (1), l'hiftoire des fentimens des Sçavans fur ce fujet, & les raifons qu'il a eues de les réfuter.

(1) Reff.

ciens Peuples.

2o. Il n'est pas douteux que Sanchoniathon n'ait pris les crit. fur les anidées de fa Theogonie dans des traditions très-anciennes, L. I. mais déja corrompues chez les Pheniciens, par les fictions qu'on y avoit mêlées mais il eft évident en même temps, que l'Auteur dans le deffein d'accrediter l'Idolatrie, n'a parlé pour les Genealogies d'avant le Deluge, que de la branche de Caïn, fans faire aucune mention de celle de Seth.

3°. L'Auteur eft plus clair & moins interpolé pour ces dix premieres Genealogies, dont nous avons donné la Table, que pour celles qui ont fuivi le Deluge, fur lefquelles on trouve plus de confulion, & moins de liaifon; quoiqu'on voye bien qu'il a voulu les conduire jufqu'à la famille d'Abraham, & à quelques-uns de fes defcendans (2).

(z) Voyez la Table qu'en

a donnée M.

I. p. 86.

4°. Il paroît que le but de l'Auteur, après celui du crédit qu'il vouloit donner à l'Idolatrie, a été de faire connoître les Fourmont, L. inventeurs des arts; en quoi il eft quelquefois d'accord avec Moyfe; & en même temps l'hiftoire des Apotheoses, ne manquant jamais d'indiquer ceux qui par des inventions utiles, avoient été mis au rang des Dieux, & honorés d'un culte public.

D'où il fuit, 5°. qu'ayant donné peu ou point de part au fouverain Etre, dans la formation du monde, fa Cofmogonie eft un atheisme (3); & par une contradiction des plus groffieres, fa Theogonie eft une imagination extravagante.

6o. Dans les deffeins que nous venons de donner à cet Auteur, & qu'il eft évident qu'il a eu, il n'a dû faire aucune mention du Deluge, qu'il avoit fans doute connu aussi bien que les Chaldéens & les Egyptiens qui en ont parlé.

7°. Quand il ne feroit pas auffi évident qu'il l'eft, que c'est dans cette Hiftoire Phenicienne que les Grecs ont puifé leur

(3) V. Eu

febe loc. cit.. Cumberland

&

M. Four

mont.

« AnteriorContinuar »