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comme ils le font, par des facrifices d'animaux, ni par les cultes depuis inventés, ce n'eft point un fait attesté par » nous feuls, mais un témoignage que nous rendent les Payens eux-mêmes.

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Je pourrois joindre ici l'autorité des Auteurs profanes, qui ont été de même avis; mais je me contente, 1°. du témoignage de Diodore de Sicile, (1) qui dit que: Les pre- (1) Liv. I." > miers hommes frappés de la beauté de l'Univers, de l'éclat » & de l'ordre qui y brillent de toutes parts, ne douterent point qu'il n'y eût quelque Divinité qui y préfidât; & ils » adorerent le Soleil & la Lune, fous les noms d'Ofiris & d'Ifis. Par où ce fçavant Auteur fait entendre que le culte des Aftres fut le premier objet de l'Idolâtrie., & que ce fut en Egypte qu'elle commença.

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2o. De celui de Platon, fi toutefois il eft l'Auteur du Dialogue intitulé, Epinomis, où il eft dit : Les premiers hommes qui habiterent la Grece, felon ma conjecture, ne reconnoffoient point: dautres Dieux, que ceux qui font encore aujourd'hui les Dieux des Barbares, fçavoir le Soleil, la Lune, la Terre, les Aftres & le» Ciel. Je pourrois ajouter que c'eft auffi le fentiment de Sanchoniathon, comme on l'a vû dans le fragment que j'en ai: raporté.

Mais rien ne prouve tant l'antiquité de cette efpece d'I dolâtrie, que le foin que prenoit Moyfe de la profcrire : Prenez garde, difoit-il aux Ifraëlites, qu'élevant vos yeux au Ciel, & y voyant le Soleil & la Lune, & tous les Aftres, vous ne tombiez dans l'illufion & dans l'erreur » & que vous ne rendiez un culte d'adoration à des créatures que le Seigneur. votre Dieu a faites pour le fervice de› > toutes les Nations qui font fous le Ciel: Ne fortè eleves ocu-✨ los tuos in Cœlos, & videns Solem, & Lunam, & Stellas...

$(6) impulfus adores atque colas ea. (2) Surquoi R. Levi Ben! ** (2) Deuter. Gerfon remarque, que Moyfe parle du Soleil avant les au-ic. 4. v. 10. tres Aftres, parce que fa beauté & fon utilité font plus propres à féduire, que celle de la Lune & des Etoiles..

Comme c'étoit après la fortie d'Egypte, & pendant que() le Peuple Juif étoit dans le Defert, que Dieu dicta ce Précepte de la Lol aux Juifs, if y a tour lieu de croire que

(1) Job. 31. 7.26. 27. &c.

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c'étoit pour leur faire oublier les fuperftitions Egyptiennes fur ce fujet, & les empêcher de fe laiffer furprendre à celles des autres Peuples, parmi lefquels ils alloient bien-tôt se trouver; car ce culte étoit dès-lors repandu partout, comme nous le ferons voir dans un moment: & c'est pour cela que Job pour marquer fon innocence, dit : « Si j'ai regardé le Ŝo» leil dans fon éclat, & la Lune lorfqu'elle étoit la plus claire; fi mon cœur a reffenti une fecrette joye, & fi j'ai porté ma main à la bouche pour la baifer; ce qui eft le comble de l'iniquité, & le renoncement du Dieu très» haut: Si vidi Solem cùm fulgeret, & Lunam incedentem clarè, & lætatum eft in abfcondito cor meum, quæ eft iniquitas maxima, & negatio contra Deum altiffimum. (1)

Surquoi il eft bon de faire ici quatre remarques. La pre miere, que c'étoit donc là l'Idolâtrie de fon fiécle, & en même temps la feule; car certainement s'il y en avoit eu d'autres, il s'en feroit également juftifié.

La feconde, qu'adorer le Soleil, c'étoit abfolument le reconnoître pour le fouverain Dieu, fans en reconnoître d'autre, abnegaffem Deum dejuper; ou, comme dit la Vulgate, negatio contra Deum altiffimum.

La troifiéme, que nous apprenons par ce paffage, nonfeulement l'antiquité du culte du Soleil, puifque Job vivoit avant Moyfe, (a) mais auffi qu'on reconnoiffoit la divinité de cet Aftre en portant fa main à sa bouche; & cette coutume fe pratiquoit même à l'égard des autres Dieux, comme nous l'apprennent plufieurs Auteurs. Minucius Felix fe mocquoit de Cecilius, qui baifoit fa main en paffant devant la Statue de Serapis Cæcilius fimulachro Serapidis denotato, ut vulgus fuperftitiofus folet, manum ori admovens, ofculum labiis impref(2) Dial. fit. (2) Apulée au contraire reproche à un impie, qu'il n'aLat. Octavius. voit aucun refpect pour les Dieux, & qu'il paffoit devant leurs Temples fans porter fa main à fa bouche pour les faluer : Nulli Deo ad hoc avi fupplicavit, nullum Templum frequentavit: Si Fanum aliquod prætereat, nefas habet adorandi gratia (3) Apul. manum labiis admovere. (3)

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(a) "C'eft le fentiment de Bede. Voyez là-deffus les Interpretes; car il n'eft pas Réceffaire d'entrer ici dans cette difcution.

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La quatrième enfin, que c'étoit dans la vûe de reconnoître la divinité du Soleil, que les Payens pour prier, fe tournoient vers le lever de cet Aftre, & que leurs Temples étoient tous dirigés du côté de l'Orient, pendant que les Juifs, pour ne pas les imiter, avoient toujours leur Sanctuaire du côté de l'Occident. Les premiers Chrétiens avoient auffi accoutumé de tourner leurs Eglifes vers le Levant, non pour adorer l'Aftre qui nous éclaire, mais pour rendre leurs hommages au Soleil de Juftice, qui repand la lumiere fur l'efprit, & échauffe par fa grace le coeur de ceux qui l'adorent. (a)

Les Auteurs ne s'accordent pas fur le lieu où a commencé le culte du Soleil: il y en a qui prétendent que c'eft en Chaldée, fondés fur ce que cet ancien Peuple s'eft addonué de tout temps à l'Aftronomie, & qu'il avoit le premier obfervé le mouvement des Aftres; comme s'il falloit pour admirer le Soleil & connoître fes vertus, des Obfervations

aftronomiques, & qu'il ne fuffit pas d'ouvrir les yeux, pour être frappé de fon éclat & de fa beauté. Il y a bien plus d'apparence que c'eft dans l'Egypte, que j'ai prouvé, il y a un moment, avoir été le berceau de l'Idolâtrie, que l'on commença à adorer le Soleil fous le nom d'Ofiris.

De l'Epgypte le culte du Soleil fe repandit dans les pays voifins, ou pour mieux dire, dans tout le monde, puifque cet Aftre a été la Divinité de toutes les Nations, même les plus barbares. Je n'entreprends pas de prouver ici en détail une verité fi connue; je ne dirois rien qu'on ne puiffe lire dans Voffius, dans le Pere Thomaffin, qui n'a fait que le copier, & dans plufieurs autres. Il fuffit de dire que les Ammonites l'adorerent fous le nom de Moloch, à qui ils facrifioient des enfans; les Pheniciens, fous celui d'Adonis, ou de Thammus; les Chaldéens, fous ceux de Belus, ou de Baal, ou de Baal-Semen, qui veut dire, le Seigneur du Ciel; les Arabes leurs voisins, qui au rapport de Strabon (1) & de Stephanus, (2) lui offroient chaque jour de l'encens & d'autres parfums, l'appelloient Adonée. Les Moabites, Beelphegor;

(a) Voyez faint Clement d'Alexandrie, Strom. 70. contra Valent. Chapitre

(1) Liv. 10.

(2) Liv. 91

fur tout cela

Idol, liv. 2.

les Perfes, Mithras. Il étoit nommé Afabinus par les Ethiopiens; Liber ou Dionyfius, par les Indiens; Apollon, ou Phoe(1) Voyez bus par les Grecs & les Romains. (1) Enfin d'autres l'appelVoffius, de loient Hercule, Belenus, &c. En un mot, il n'y eut point de Peuple qui ne rendît un culte fuperftitieux à cet Aftre. Cefar nous l'apprend en particulier des 'anciens Germains, qui au rapport de cet Auteur, n'avoient d'autres Dieux que ceux dont ils recevoient quelque bien, comme le Soleil, le Feu, & la Lune: Deorum numero eos folùm ducunt, quorum opibus apertè juvantur, Solem, Vulcanum, & Lunam. Herodote en dit autant des Maffagetes, qui felon cet Historien, lui facrifioient des chevaux, pour marquer par la legereté de (2) Herod. Cet animal, la rapidité du cours du Soleil. (2) Enfin tous les kv. 1. ch.226. Voyageurs, même les plus modernes, difent la même chose de prefque tous les Peuples, dont ils nous ont laiffé des Rela tions, fur-tout des Peruviens & des Mexiquains. Si nous en croyons un Auteur qui a donné un fçavant Ouvrage fur les (3) Le Pere moeurs des Sauvages, (3) il n'y a dans le vafte continent de Laffiteau, l'Amerique aucun Peuple connu, qui n'adore le Soleil. Les Yncas même du Perou, & aujourd'hui leurs defcendans, ainsī que les Natchez de la Louifiane, femblables aux anciens Rois ou Heros, qui fe vantoient d'être les fils de Jupiter ou d'Hercule, fe difent les enfans du Soleil, comme nous l'avons déja remarqué en parlant de leur Theogonie. Les Juifs euxmêmes fe laifferent aller quelquefois à cette fuperftition, puif que l'Ecriture nous enfeigne que Jofías tua les chevaux & brûla les chariots qu'on avoit confacrés au Soleil: Et abolevit equos quos dederant Reges Juda..... Et currus Solis combussit 4) 4. Reg. igni. (4)

Mœurs des
Sauv. I. I.

#31.

(s) Hift. d'Ethiop

P.

Dans l'Obelifque que Sixte V. fit élever auprès de faint Jean de Latran, qui eft celui là-même dont Hermapion avoit traduit en Grec les caracteres Egyptiens qui y étoient repréfentés, & dont Ammian Marcellin nous a confervé quelque fragment, le Soleil eft appellé le Maître du Ciel, le Créateur du monde le Mars, le Dieu de la Guerre. Les Ethiopiens non-feulement reconnoiffoient le même Aftre pour leur Divinité, comme nous l'avons déja dit, mais leurs Princes fe vantoient auffi d'en defcendre, puifque Heliodore (5) fait ainfi

,

ainfi parler Chariclée; Soleil, auteur de l'origine de mes Ancêtres. Rhameffes, Roi d'Egypte prend la même qualité dans l'Obelifque dont je viens de parler. Semiramis la porte auffi, fur quelques monumens dont les Anciens ont parlé. Adad & Benadad, noms dont le premier fignifie le Soleil, & le fecond, fils du Soleil, étoient des noms communs aux Rois de Syrie, ainfi que le remarque Marsham. Les Rois de Perfe prenoient de femblables qualités, ainfi que plufieurs autres Princes de l'Orient. Æëtes Roi de Colchide fe glorifioit de descendre du même Aftre, ainsi que Medée, Pasiphaé, & plusieurs autres, dont je n'ai pas deffein de donner une lifte complette, ni de parler de toutes les villes qui portoient fon nom, ou qui lui étoient confacrées. J'en ay affez dit pour faire connoître l'univerfalité de fon culte.

On peut même affurer en general qu'on ne trouve aucun Peuple, dont la Religion nous eft connuë, ni dans nôtre continent, ni dans celui de l'Amerique, fi on excepte quelques habitans de la Zone torride, qui brûlés par les rayons de cet Aftre le maudiffent fans ceffe, qui ne lui ait rendu un culte religieux.

I. C. 7.

Perfonne n'ignore que Macrobe (1) avoit entrepris de prou- (1) Sat. L. ver que tous les Dieux du Paganisme pouvoient fe réduire au Soleil. Cet Auteur donne aux Poëtes la gloire d'avoir fouvent fuivi-les fentimens des Philofophes, fur-tout dans la réunion qu'ils ont faite de toutes les Divinités au Soleil, qui étant le dominateur des autres Aftres, dont les influences agissent fur ce bas monde, doit être par conféquent l'auteur de l'univers. Il entre enfuite dans le détail de tous les Dieux qui peuvent fe réduire au Soleil, & il y trouve non feulement tous ceux que nous avons nommés, mais encore Cœlus, Saturne, Jupiter, Mars, Apollon, Mercure, Ammon, Bacchus, Serapis, Adonis, Efculape, Hercule, Atys, Pan, & plufieurs autres.

Če même Auteur, & Voffius après lui, réduifent à la Lune prefque toutes les Divinités du fexe feminin, comme Cerès, Diane, Lucine, Venus, Uranie, la Déeffe de Syrie, Cybele, Ifis, Vefta, Aftarte, Junon, Minerve, Libitine Proferpine, Hecate, & plufieurs autres, qui n'étoient for

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