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phantine une maifon faite d'une feule pierre; que deux mille hommes, tous Pilotes & Marins, ne purent amener qu'en trois ans. Cette maison avoit de face vingt-une coudées, (1) fur quatorze de largeur, & huit de hauteur, & un pieds & de- » dans œuvre cinq coudées de haut, & dix-huit de long.

mi.

(1) Trente

ca. 14.

Cette maison n'entra jamais dans le Temple de Minerve, & fut laiffée à la porte, foit qu'Amafis fût piqué d'avoir vû l'Architecte qui la conduifoit fe plaindre par fes foupirs de la fatigue que lui avoit caufé cet Ouvrage, ou parce qu'un de ceux qui aidoit à la conduire fur le Nil, avoit été écrasé, ainfi que le dit le même Hiftorien.

Le Temple de Diane à Ephefe.

Ce Temple qui a paffé pour une des fept Merveilles du monde, étoit très-ancien ; mais il n'étoit pas d'abord auffi magnifique qu'il le devint dans la fuite, puifque, felon Pli(1) Liv. 36. ne, (1) toute l'Afie concourut pendant deux cent vingt ans, ou comme il le dit dans un autre endroit, durant quatre cens ans, à l'orner & à l'embellir. Pindare, dans une de fes Odes, dit que les Amazones l'avoient bâti lorfqu'elles allerent faire la guerre aux Atheniens & à Thesée ; mais Paufanias affûre que ce grand Poëte ne connoiffoit pas l'antiquité de ce Temple, puifque ces mêmes Amazones étoient venues des bords du Thermodon pour facrifier à la Diane d'Ephefe dans fon Temple, dont elles avoient connoiffance, parce que quelque temps auparavant, défaites par Hercule, & précedemment encore par Bacchus, elles s'y étoient refugiées comme dans un asyle.

Denys le Géographe nous apprend qu'il y en avoit encore un plus ancien, bâti par les mêmes Amazones, qui annonçoit bien la fimplicité des premiers temps, puifqu'il ne confiftoit que dans une niche creufée dans un orme, où étoit apparemment la ftatue de Diane. Celui dont je vais parler étoit moins ancien: voici la defcription que fait Pline de ce magnifique Ouvrage. Il fut bâti, dit-il, dans un lieu marécageux pour le garantir des tremblemens de terre, & des ouvertures qui s'y font quelquefois ; & afin que les fondemens d'un

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pefant édifice euffent de la folidité dans cette terre molle & détrempée par les eaux, on y mit du charbon pilé, &. par-deffus des peaux de mouton avec leur laine. Ce Temple, continue le même Auteur, avoit quatre cens ving-cinq pieds de long fur deux cens de large. Les cent vingt-fept colonnes qui foûtenoient l'édifice, avoient été données par autant de Rois, & avoient chacune foixante pieds de haut. De ces colonnes il y en avoit trente-fix de cifelées, & une de la main du célebre Scopas. L'Architecte qui conduifit ce grand Ouvrage, fut Cherfiphron, ou Ctesiphon; & c'est une merveille qu'on ait pû mettre en ufage des Architraves d'un fi grand poids. L'artifice dont fe fervit cet habile Ouvrier pour en venir à bout eft fingulier; il étendit fur le haut des colonnes de grands facs pleins de fable, puis laiffant couler doucement ce fable, les Architraves prirent infenfiblement leur affiette. Cherliphron eut encore plus de peine à pofer une pierre d'un bien plus grand poids, au-deffus de la porte du Temple: on croiroit que Pline avoit, faute de relation, imaginé de quelle maniere on avoit pû réuffir à placer cette maffe énorme; mais au lieu de cela il rapporte froidement une vifion de l'Architecte auquel Diane apparut, l'exhortant à prendre courage, & dit que le lendemain matin on vit la pierre defcendre d'elle-même & fe placer où elle devoit être : Atque ita poftridie apparuit, lapis, pondereque ipfo correctus videbatur. On pourra bien croire que le toit du Temple étoit fait de planches de cedre, comme le dit le même Auteur; mais je ne fçais fi on ajoûtera foi à ce qu'il dit de l'escalier par lequel on montoit jufqu'au faîte, qui étoit fait d'un feul cep de vigne. Cherfiphron, ni fon fils Metagene, n'acheverent pas un ouvrage fi grand & fi magnifique: d'autres Architectes y travaillerent, & ce ne fut qu'après un espace de 220. ans qu'il fut entierement fini.

Les richeffes de ce Temple devoient être immenfes, puifque tant de Rois avoient contribué à l'embellir, & qu'il n'y avoit rien de plus fameux en Afie que cet édifice, tant par la dévotion, que par le concours infini de monde qui abordoit à Ephefe. Ce que raconte S. Paul (1) de la fédition tramée (1) A&t. 19. par les Orfévres de cette ville, qui gagnoient leur vie à faire

de petites Statues d'argent de Diane, eft bien propre à nous prouver la célébrité du culte de cette Déeffe.

Il y a apparence au-refte, que la defcription que fait Pline, regarde le Temple qui fut brûlé par Eroftrate, de la maniere que chacun, fçait, Car celui qui fubfiftoit de fon temps avoit été conftruit par Cheiromocrate, le même qui bâtit la ville d'Alexandrie, & qui du Mont Athos vouloit faire une Statue d'Alexandre. Ce dernier Temple que Strabon avoit vû, étoit auffi beau & auffi riche que le premier, & on y voyoit des ouvrages des plus habiles Sculpteurs de la Grece. L'Autel étoit prefque tout de la main de Praxitele. Xenophon parle d'une Statue d'or maffif, dont Herodote qui avoit vifité, ce Temple ne dit rien. Strabon affure auffi que les Ephefiens, par reconnoiffance, avoient placé dans le même lieu une Statue d'or, en l'honneur d'Artemidore. Vitruve dit que ce Temple, d'ordre Ionique, étoit Dipterique, c'està-dire, qu'il regnoit tout à l'entour deux rangs de colonnes, en forme d'un double portique ; qu'il avoit 71. toises de longueur, fur plus de 36. de largeur, & qu'on y comptoir 127. colonnes de 60. pieds de haut,

Ce Temple étoit un afyle des plus celebres, qui, felon le dernier Auteur que je viens de citer, s'étendit à 125. pieds aux environs, Mithridate l'avoit borné à l'espace d'un trait de fleche. Marc-Antoine doubla cette étendue; mais Tibere pour éviter les abus qui fe commettoient à l'occasion de ces fortes de droits, abolit cet afyle.

Aujourd'hui on ne trouve plus d'un fi fuperbe édifice que quelques ruines, dont on peut voir la relation dans le voyage de Spon. Les Médailles nous représentent fouvent ce Temple, avec la figure de Diane; mais le frontifpice, à cause du peu d'efpace que laiffent ces fortes de Monumens, n'y eft chargé au plus que de huit colonnes, quelquefois de fix, de quatre, ou de deux feulement.

Temple de Jupiter Olympien.

La Grece avoit un fi grand nombre de Temples, de Chapelles & d'Autels, qu'on en trouvoit à chaque pas, dans les villes, dans les bourgades, & dans les campagnes. Pour

s'en convaincre il n'y a qu'à lire les Anciens, & fur-tout Paufanias, qui s'eft particulierement attaché à les décrire, & qui en parle prefque à chaque page de fon Voyage de la Grece.

Parmi tant de Temples, Vitruve en admiroit fur-tout qua tre, qui étoient bâtis de marbre, & enrichis de fi beaux ornemens, qu'ils faifoient l'admiration des plus habiles connoiffeurs, & étoient devenus la regle & le modele des bâtimens dans les trois ordres d'Architecture, le Dorien, l'Ionien, & le Corinthien. Le premier de ces beaux ouvrages étoit le Temple de Diane à Ephefe, dont on vient de voir la defcription. Le fecond celui d'Apollon dans la ville de Milet, l'un & l'autre d'ordre Ionique. Ce celebre Archi tecte mettoit dans le troifiéme rang le Temple d'Eléufis, bâti en l'honneur de Cerès & de Proferpine, qu'Ictinus fit d'ordre Dorique, d'une fi vafte étendue qu'il étoit capable de contenir trente mille perfonnes; car il s'en trouvoit du moins autant, & fouvent plus, à la célébration des Mysteres de ces deux Déeffes (1). D'abord, remarque Vitruve, ce Temple étoit fans colonnes au dehors, pour laiffer plus de place & de liberté aux cérémonies religieufes qui fe prati L. 9. p. 365. quoient dans les Sacrifices; mais Philon dans la fuite y ajoûta un Portique magnifique. Le quatrième étoit le Temple de Jupiter Olympien à Athenes, d'ordre Corinthien. Il avoit été commencé d'abord par les foins de Pififtrate; mais les troubles qui suivirent fa mort, laifferent pendant près de trois cens ans l'ouvrage imparfait, jufqu'à ce qu'enfin Antiochus Epiphane Roi de Syrie, fe chargea de faire la dépenfe néceffaire pour achever la Nef, qui étoit fort vafte, & pour les colonnes du Portique. Coffutius, Citoyen Romain, habile Architecte, fut choifi pour exécuter ce grand ouvrage; & il y réussit si bien, qu'il y eut peu d'édifices qui l'égalaffent en grandeur & en magnificence.

(1) Voyez Herod. L. 8. c. 65. & Strab.

Pour fuivre le deffein que je me fuis propofé, je choisis deux de ces Temples, celui de Jupiter Olympien, & celui d'Apollon à Delphes, qui étoient les deux plus magnifiques. Le premier, felon Paufanias (2), & la Statue de Jupiter (2) In Eliac. qu'on y admiroit, étoient le fruit des dépouilles que les

Eléens avoient remportées fur les Pifans & leurs Alliés, lorfqu'ils faccagerent la ville de Pife. Ce Temple, dont Libon originaire du pays avoit été l'Architecte, étoit d'ordre Dorique, & tout environné de colonnes par dehors, enforte que la place où il étoit bâti formoit un fuperbe Periftyle. On avoit employé à cet édifice des pierres du pays, mais qui étoient d'une naturé & d'une beauté finguliere. La hauteur de ce Temple, depuis le rez de chauffée jufqu'à fa couverture, étoit de foixante & huit pieds, fa largeur de quatre-vingt quinze, & fa longueur de deux cens trente. La couverture étoit non de tuiles, mais d'un beau marbre tiré du Mont Pentelique, & taillé en tuiles. Du milieu de la voute pendoit une Victoire de bronze doré, & au-deffous de cette Statue étoit un bouclier d'or, fur lequel on voyoit la tête de Meduse ; & aux deux extremités de la même voûte étoient auffi suspenduës deux chaudieres dorées. Par dehors, au-deffus des colonnes, regnoit autour du Temple un cordon, auquel étoient attachés vingt & un boucliers dorés, confacrés à Jupiter par Mummius, après le fac de Corinthe. Sur le fronton de devant étoit représenté avec un art infini, le combat de Pelops avec Enomaus, & Jupiter au milieu. Enomaüs & fa femme Sterope, une des filles d'Atlas, le char à quatre chevaux, & Myrtil l'Ecuyer de ce Prince, étoient à la droite du Dieu; Pelops, Hippodamie, & l'Ecuyer avec les chevaux, occupoient la gauche. Toutes ces figures étoient d'un Peonien, originaire de Thrace. Le fronton de derriere, ouvrage d'Alcamene, le meilleur Statuaire de fon temps, après Phidias, représentoit le combat des Centaures, & des Lapithes, à l'occafion des nôces de Pirithous. Une grande partie des travaux d'Hercule étoit fculptée dans l'interieur de cet édifice; & fur les portes qui étoient toutes d'airain, on remarquoit entre autres chofes, la chaffe du Sanglier d'Erymanthe, & les explois du même Hercule contre Diomede Roi de Thrace, contre Geryon, &c. Enfin, car on ne peut pas tout détailler, il y avoit deux rangs de colonnes qui foutenoient deux galeries fort exhauffées, fous lefquelles on paffoit pour arriver au Trône de Jupiter.

Ce Trône & la Statue du Dieu étoient le chef-d'oeuvre

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