chini. fçavant Prelat Italien, qui dans fon Hiftoire Univerfelle, dont nous n'avons que le premier volume (1), dit que par les diffe- (1) M. Bianfens Dieux, d'Homere par exemple, on doit entendre les Rois de chaque pays, ou le pays lui-même où ils avoient regné que Jupiter eft Sefoftris & fes Succeffeurs; Junon, la Syrie; Neptune, l'Afie mineure: Apollon, Babylone; Diane, les Amazones; Mars, l'Armenie; Mercure, la Phenicie; Ve nus, l'Ifle de Chipre ; Minerve, l'Egypte, &c. On doit confulter fur cela Perizovius, qui n'a pas de peine à refuter ce fçavant Auteur. CHAPITRE IV. Des Enfans des Dieux. OMME il n'y a rien de plus obfcur dans l'Hiftoire fabuleufe, que ce qui regarde les Enfans des Dieux, il eft à propos de bien éclaircir ce point. Herodote diftingue, comme nous l'avons dit, trois Claffes de Dieux. Il y en avoit huit dans la premiere; douze dans la feconde ; & ceux de la troifiéme avoient été engendrés par les autres, comme Bacchus, &c. Suivant cette diftinction, il eft clair qu'on doit regarder comme les Enfans des Dieux, tous ceux qui n'étoient ni de la premiere, ni de la feconde Claffe; mais il eft für de plus qu'on donnoit fouvent le nom d'Enfans des Dieux, 1o. à plufieurs Perfonnages Poëtiques, comme quand on dit 'Acheron étoit fils de Cerès; les Nymphes, filles d'Achelous; l'Amour, fils de la Pauvreté, & une infinité d'autres. 2o. La plupart des Princes, qui ont été mis au rang des Dieux, en reconnoiffoient quelqu'un d'eux pour pere ou pour Ancêtre, comme nous le dirons dans un moment. que 3o. Ceux qui étoient nés des commerces des Prêtres avec les femmes qu'ils fubornoient dans les Temples. Celui de Belus à Babylone, dont parle Herodote, n'étoit pas le feul où on avoit coutume d'introduire chaque nuit une des plus belles femmes de la ville. On en faifoit autant, fuivant le même Hiftorien, à Thebes en Egypte, à Patare dans la Lycie, & fans doute encore ailleurs. Ainfi abufoient des Prêtres fce lerats, de la crédulité du peuple, faisant paffer les enfans qui naiffoient de ce commerce inceftueux, pour les enfans des Dieux. 4°. Ceux qui furent les imitateurs des belles actions des Dieux, & qui excellerent dans les mêmes Arts, passerent pour leurs fils, comme Efculape, Orphée, Linus, & quel ques autres. 5°. Ceux qu'on trouvoit expofés dans les Temples ou dans les Bois Sacrés : ainfi Ericthonius paffa pour être fils de Minerve & de Vulcain, comme S. Auguftin l'a remarqué. 6o.. Ceux qui fe rendoient fameux fur la mer, étoient regar dés comme les enfans de Neptune. 7°. Ceux dont le caractere reffembloit à celui de quelque Dieu, paffoient pour leurs fils. Etoit-on éloquent ? on avoit Apollon pour pere: fin ou rufé? on paffoit pour fils de Mercure. Ainfi on a dit que Chione, fille de Dedalion, avoit été maîtreffe d'Apollon & de Mercure, parce qu'elle. eur deux enfans, dont l'un (c'étoit Philamon) étoit éloquent; & l'autre, qui s'appelloit. Autolycus, un habile filou. De même, ceux qui étoient braves, reconnoiffoient Mars pour leur pere, comme Enomaüs, Terée, Romulus, &c. On doit dire à peu près la même chofe de ceux que les Poëtes difoient être fils ou des Fleuves, ou des Montagnes, comme Daphné, fille du fleuve Penée; Enone, du Cebrene, Aventinus, Tyberinus, Inachus, & tant d'autres: ce qu'on doit entendre, ainsi que Lactance l'explique, des enfans de ceux qui ont porté le nom de ces Fleuves, ou de ces Montagnes. 8°. Ceux dont l'origine étoit obfcure étoient reputés enfans de la Terre, comme Tagès, ce celebre Etrurien, qui fut regardé comme l'inventeur de la Divination Etrufque, & des ceremonies religieufes pratiquées dans les Augures. Les Geants dans l'Hiftoire fabuleufe, étoient auffi regardés pour la même raifon comme les enfans de la Terre. 9°. Quand quelque Prince avoit interêt de cacher un commerce fcandaleux, on ne manquoit pas de donner un Dieu pour pere à l'enfant qui en naiffoit. Ainfi Prœtus étant entré dans la tour où, Acrife Roi d'Argos, effrayé de la prédiction. d'un Oracle, avoit enfermé fa fille Danaé, on publia que Jupiter s'étoit métamorphofé en pluie d'or ; pour feduire cette Princeffe, & Perfée paffa pour être le fils de ce Dieu. De même Amulius ayant trouvé le fecret de s'introduire dans Ja prifon où Numitor avort fait enfermer Rhea Sylvia fa fille, on fit paffer pour enfans de Mars, Romulus & Remus, nés du commerce de ce Prince avec fa niece. L'Amant fecret d'Alcmene fut pris pour Jupiter, & Hercule fut toujours regardé comme le fils de ce Dieu. Enée fut redevable de fa qualité de fils de Venus, tant vantée par les Romains, au foin que prit fon pere Anchife de publier qu'il l'avoit eu de cette Déeffe, dans les forêts du mont Ida. On doit penser la même chose de Caftor & de Pollux, fils de Leda; ainsi que d'une infinité d'autres, qu'il feroit trop long de nommer. Olympias fit tous fes efforts pour perfuader que Jupiter étoit le pere d'Alexandre fon fils, mais au temps où vivoit cette Princeffe, on n'étoit plus fi crédule, & cette défaite ne fit pas taire la medifance. 2 10°. Enfin, prefque tous les Heros de l'Antiquité avoient du moins des Dieux pour ancêtres, & ils paffoient pour en être les fils ou les petits-fils, car pour peu qu'on fuive leurs Genealogies, elles fe terminent ordinairement à quelque Dieu. ...་ le Voila ce que j'avois à dire fur la Nature des Dieux que Paganisme avoit introduits; comme ils n'étoient pas tous égaux, on les divifoit en plufieurs Claffes, c'est ce qui fera la matiere du Chapitre suivant. (1) Liv. 2. ch, 145. CHAPITRE V. Divifion des Dieux du Paganisme en plufieurs Claffes. OMME le nombre des Dieux adorés Co les Payens étoit les divifer en plufieurs Claffes; c'eft ce qu'ont fait les Mythologues anciens & modernes, lorfqu'il a été queftion de reduire en une espece de Syftême fuivi, une Theologie auffi mons trueuse que l'étoit celle du Paganisme. D Herodote (1) diftingue, d'après les Egyptiens, trois fortes de Claffes de Dieux; voici comme il s'exprime à l'occasion d'Hercule. Parmi les Grecs, dit-il, Hercule, & Pan, font » les derniers des Dieux, VENTATOI TŴY fe; mais chez les Egyptiens, Pan eft un Dieu très-ancien, & du nombre de » huit qui font les premiers de tous: Hercule eft dans la Claffe » des feconds, qui font au nombre de douze; & Bacchus » dans celle des troifiémes, qui ont été engendrés des douze grands Dieux ». Il eft fâcheux que cet Auteur ne nous ait pas appris les noms des Dieux qui compofoient ces trois Claffes; nous aurions une connoiffance exacte de la Mythologie Egyptienne. Les Sçavans, pour fuppléer à ce défaut, ont partagé les Dieux en plufieurs Claffes. On les divifoit en Grands Dieux, Dii majorum Gentium, ou Dieux du Confeil, Dii Confuentes ou Confulentes; & en Dieux des moindres Nations, minorum Gentium. Les premiers étoient les Grands Dieux, reconnus par-tour, furtout dans la Grece & dans l'Italie. Les feconds étoient ceux qui avoient été ajou tés & affociés aux anciens; & ils étoient particuliers à certains Peuples. Tel étoit le Quirinus des Romains, le Semo-Sancus des Etruriens, &c. Les Grecs reconnoiffoient douze de ces Grands Dieux, dont Ennius nous a confervé les noms ; Junon, Vesta, Minerve, Cerès, Diane, Venus, Mars, Mercure, Jupiter, Neptune, Vulcain, & Apollon. : Juno, Vefta, Minerva, Ceres, Diana, Venus, Mars, Chacun de ces Dieux prefidoit à un mois de l'année; Junon 2. Les Romains y en joignirent huit autres ; c'étoient les Dieux choisis, Selecti, Janus, Saturne, le Genie, le Soleil, la Lune, Pluton, Bacchus, & l'ancienne Vefta, ou la Terre. Ces Dieux, à l'exclufion des autres, avoient le privilege d'être representés en or, en argent & en yvoire : ce qui doit s'entendre des derniers temps; car dans les commencemens, comme nous l'avons déja remarqué, on n'employoit aux figures des Dieux que du bois, ou quelque pierre informe. Potius lignea, dit Pline (2), aut fictilia Deorum fimulachra, in (2) Liv. 34. delubris dedicata, ufque ad devicłam Afiam, unde irrepfit luxu ria. 3. Enfuite venoient les Dieux Semones, ou Semi-homines, ou Semi-Dii, qu'on ne croyoit pas affez grands pour habiter dans le ciel, mais qui meritoient quelque chofe de plus que la terre; comme Priape, Hyppone, Vertumne, & en particulier tous les Heros. 4. Il y avoit des Dieux communs, qui étoient ceux qui favorifoient tous les partis; comme Mars, Bellone, la Victoire, la Fortune; où qui étoient adorés dans tous les lieux & parmi toutes les Nations; comme Vefta, ou la grande-mere des Dieux; & c'est ainsi que ceux là étoient differens des Dieux Topiques, qui n'étoient adorés qu'en certains lieux (a), comme Aftarte dans la Syrie, Derceto & Semiramis chez les Affyriens, Quirinus à Rome, Faunus parmi les Latins, Tagès chez les Tofcans, & Sancus parmi les Sabins. Ainsi adoroient encore les Egyptiens Ifis & Ofiris, les Maures Juba, les Carthaginois Uranus, les Siciliens A dramus, les (4) Ce mot vient du grec róz☞. τόπω. 1 |