c. 83. firis & de Serapis, & il est aifé de voir que celles du premier, avec lequel on prétend le confondre, font auffi differentes que (1) Hift. L. 4. le font leurs noms. Enfin ce que raconte Tacite (1), doit entierement decider la queftion. Serapis, dit cet Hiftorien, apparut en fonge à Ptolemée (a), fous la figure d'un jeune homme d'une extrême beauté, & lui ordonna d'envoyer fes plus fidelles amis à Sinope, ville du Pont, où il étoit honoré, & d'en rapporter fa Statue. Ptolemée ayant communiqué cette vifion, deputa une celebre Ambaffade à Sinope, & on en rapporta la Statue de ce Dieu d'où il eft aifé de conclure qu'il étoit inconnu en Egypte avant cet événement. L'illuftre M. Cuper ne s'eft point rendu à ces raisons, & a foutenu que Serapis étoit un des grands Dieux d'Egypte, où il avoit été honoré long-temps avant les Ptolemées. Les preuves de fes adverfaires ne l'ont point ébranlé, & celle qu'ils tirent de la relation de Tacite, lui paroît foible; car pour qu'elle eût quelque force, il faudroit prouver que c'étoit Serapis qui étoit honoré à Sinope; ce qui eft faux : c'étoit Pluton qu'on honoroit dans cette ville, & ce ne fut qu'après que fa Statue fut portée en Egypte, qu'on lui donna le nom de Serapis. » Lorfque ce Dieu fut arrivé en Egypte, dit l'Hifto rien que je viens de nommer, Timothée, Maître des Ceremonies, & Manethon Sebennite, voyant fa Statue, & remarquant le Cerbere & un Dragon, jugerent que c'étoit Dis, ou Pluton, & perfuaderent à Ptolemée qu'il étoit le (2) De Ifid. » même que Serapis ». Plutarque dit la même chofe (2): ∞ & Ofir. Il ne portoit pas ce nom quand il vint en Egypte ; mais quand il fut arrivé à Alexandrie, il prit celui que les Egyp» tiens donnoient à Pluton, qui étoit Serapis 2 1. Lorfque Paufanias (3) rapporte que les Alexandrins reçurent de Ptolemée le culte de Serapis, il dit en même temps qu'il y avoit deja à Alexandrie un Temple très-magnifique de ce Dieu; & un autre moins grand, mais très-ancien, dans la ville de Memphis. Tacite lui-même, en difant que Ptolemée, après la tranflation dont nous venons de parler, fit conftruire en l'honneur de Serapis un Temple fuperbe, dans le lieu (3) In Att. 30 D (a) Tacite ne dit point quel fut le Ptolemée qui eut cette vifion; mais Macrobe que c'étoit le fils de Lagus. dit nommé nommé Racotis, affûre auffi qu'il y en avoit un autre, mais plus petit, qui étoit confacré au même Dieu, & à Ifis; ce qui prouve, non que Serapis ne fut honoré en Egypte qu'au temps de l'Ambaffade de Sinope, mais feulement que le culte de ce Dieu, peut-être negligé depuis long-temps, y fut rétabli avec folemnité. Comme M. Cuper ne s'eft point fait ces deux objections, dont l'une eft tirée du filence d'Herodote, l'autre de la Table Ifiaque, je vais y repondre pour lui. 1°. Quoiqu'il foit vrai que cet Hiftorien ait deftiné fon fecond Livre à l'Hiftoire de la Religion des Egyptiens, on ne peut pas affûrer qu'il n'a oublié aucun de leurs Dieux. D'ailleurs ayant parlé au long d'Ofiris, qui étoit peut-être le même que Serapis, il n'a pas cru qu'il fût neceffaire de rien dire de particulier de ce dernier. 2o. On peut penser la même chofe de la Table Ifiaque : quoiqu'on y trouve un grand nombre de Dieux Egyptiens, je ne crois pas qu'on puiffe affûrer qu'ils y foient tous, encore moins qu'on puiffe les y diftinguer toujours par leurs fymboles particuliers. La preuve qu'on tire de la diverfité des representations, eft encore moins concluante. Les Egyptiens varioient beaucoup au fujet des figures de leurs Dieux, & des fymboles qu'ils y joignoient. Souvent même les figures étoient chargées d'un grand nombre d'attributs qui ne pouvoient pas convenir à une feule Divinité : c'étoient ce que l'on appelle des figures Panthées, qui reprefentoient plufieurs Dieux, ainfi qu'on peut s'en convaincre à l'inspection de quelques-unes de celles d'Ifis, d'Harpocrate, & de plufieurs autres. que M. Cuper refute enfuite le fentiment de Macrobe, qui dit les Egyptiens furent forcés par les Ptolemées de recevoir le culte de Serapis, venu de Sinope; car il faudroit prouver que ce Dieu portoit ce nom dans cette ville du Pont; ce qui eft faux, comme on l'a prouvé. Il est donc très-probable, quoiqu'en difent plufieurs fçavans Antiquaires, que Serapis étoit un Dieu Egyptien, connu & honoré par ce Peuple long-temps avant les Ptolemées: J'ajoute qu'il étoit le même que Pluton ; & quand les temoignages de Tacite & de Plutarque que nous avons rapportés, Tome I. Qqq ne feroient pas auffi concluants qu'ils le font, une des plus le Nous avons dans les Antiquaires plufieurs autres figures toujours reconnoiffables pour être celles de Serapis, par boiffeau, ou une espece de bonnet qu'il portoit fur la tête. Quelquefois il eft joint avec Isis, & reprefenté comme un jeune homme, & alors il eft pris pour Ofiris ou pour le Soleil; fouvent comme un vieillard barbu & fort reffemblant à Jupiter, dont il portoit auffi le nom; du moins depuis le temps que les Grecs furent maîtres de l'Egypte. ARTICLE I I. Orus. ORUS, felon Herodote (1), étoit fils d'Ofiris & d'Ifis, & le dernier des Dieux qui regnerent en Egypte. Ce fut après avoir tué Typhon qu'il monta fur Thrône. Diodore, qui a (2) L. 22. fuivi en cela Herodote (2), raconte que les Titans l'ayant fait mourir, fa mere, qui poffedoit les fecrets les plus rares de la Medecine, celui même de rendre immortel, ayant trouvé fon corps dans le Nil où les Titans l'avoient jetté, lui rendit la vie, & lui procura l'immortalité. Enfuite elle lui apprit la Medecine, & l'art de la Divination. Avec ces talens, continue Diodore, Orus fe rendit celebre, & combla l'univers de fes bienfaits. (1) Liv. z. C. 144. Nous avons déja rapporté dans l'hiftoire de Typhon de quelle maniere Orus, par le confeil d'Ifis, vengea la mort de fon pere en ôtant la vie à ce Tyran, qu'il fit perir dans la baffe Egypte ; c'eft-là tout ce qu'on fçait de ce dernier Dieu d'Egypte, après lequel les Demi-Dieux commencerent à regner. On ne s'étend pas ici fur le prodigieux nombre d'années que les Egyptiens donnoient aux regnes de leurs Dieux, qui, (3) Loc. cit. ainfi que le rapporte Diodore (3), enfermoient un efpace de vingt-trois mille ans, depuis le regne du Soleil jufqu'au temps (a) Cette figure eft gravée à la page 298. du Tome II. de l'Antiquisé expliquée. où Alexandre fit la conquête des Indes. Car foit qu'on prenne ces années pour des années Lunaires, ou feulement pour les Saifons, chaque année en comprenant quatre, le nombre de vingt- trois mille ans eft toujours vifiblement fabuleux, & Diodore fait de vains efforts pour excufer en cela les Egyp tiens. Les Grecs prétendoient, comme le dit l'Auteur que je viens de citer, que leur Apollon étoit le même que l'Orus XX des Egyptiens. Apollon étoit en effet, comme Orus, habile dans la Medecine & dans l'art de prédire l'avenir, & ce Dieu étoit parmi eux le Soleil, comme Orus l'étoit en Egypte. Ainfi on le trouve fouvent nommé dans les Anciens, Orus Apollo. Il feroit inutile de m'objecter que c'étoit Ofiris qui en Egypte representoit le Soleil, puifqu'il eft aifé de repondre que cet Aftre, le premier & le plus grand des Dieux, portoit plufieurs noms, non feulement dans les differens pays où il étoit honoré, mais fouvent auffi dans le même. On objecteroit aussi vainement, que les fymboles d'Ofiris étoient differens de ceux d'Orus; car on fçait que la Mythologie Egyptienne confond des Dieux très-differens entr'eux, & que quelquefois elle les diftingue par des attributs particuliers. Il eft conftant, par exemple, ainfi que le foutiennent les plus fçavans Antiquaires, qu'Harpocrate, dont nous parlerons dans l'Article fuivant, reprefentoit le Soleil chez les Egyptiens auffi bien qu'Ofiris & Orus, quoique les figures fous lesquelles on reprefentoit ces Dieux ne fe reffemblaffent nullement. la Quoiqu'il en foit, Orus fe trouve dans la Table Ifiaque, fous la figure d'un enfant emmaillotté, & couvert depuis les pieds jufqu'à la tête d'un habit bigarré en lofanges. Il tient avec fes deux mains un bâton, dont le bout eft terminé par tête d'un oiseau, & un fouet (a), femblable à celui qu'on voit dans quelques figures d'Ofiris. Dans un Manuscript de M. de Peirefc, confervé dans la Bibliotheque de S. Victor, le même Orus fe voit fur une figure groupée entre Ifis & Ofiris: il y eft representé comme un jeune enfant, vétu d'une tunique. Quoique la tête d'Ofiris manque, celle d'Ifis y eft recon (a) Ce fouet qu'on remarque fouvent dans les figures qui reprefentent Ofiris, Orus, & Harpocrate, étoit le fymbole du Dieu du Soleil. Q qq ij noiffable à sa coëffure, fur laquelle eft la feuille de Lotus en Croiffant. Obfervons avant que de finir cet Article, que dans toutes les figures qui nous reftent d'Orus, il est toujours reprefenté comme un enfant, pour nous marquer fans doute qu'il étoit encore fort jeune, lorfque Typhon fit mourir fon pere, & qu'lfis fa mere fut obligée de differer la punition du Tyran, jufqu'à ce que fon fils fût en état de fervir sa vengeance. ARTICLE III Harpocrate. A l'infpection des figures d'Harpocrate que le temps nous a confervées en affez grand nombre, on juge aisément qu'il étoit le Dieu du filence, puifque dans toutes, fon attitude eft de porter le doigt fur la bouche; les Egyptiens, dont la Theologie étoit extrêmement myfterieuse, voulant marquer par-là qu'il falloit honorer les Dieux dans un filence refpectueux; (1) De If. & ou, comme dit Plutarque (1), que les hommes qui connoiffoient ces Dieux, n'en devoient pas parler temerairement. Il (2) Apud y avoit même, au rapport de Varron (2), une Loi, qui défenAug. de Civ. doit fous peine de la vie de dire que Serapis eût été un hom Ofr. Dei, 18. C. 5. me mortel : & comme dans les Temples d'Ifis & de Serapis il y avoit une Idole, c'est-à-dire, un Harpocrate qui mettoit le doigt fur la bouche, le même Varron difoit qu'il étoit-là pour recommander le filence fur cet article. (3) Voyez Oር Les Anciens conviennent qu'Harpocrate étoit fils d'Isis (3), Plat. De If. & & que fa mere l'ayant perdu dans le temps qu'il étoit encore fort jeune, elle prit la refolution de le chercher par mer & par terre, jufqu'à ce qu'elle l'eût trouvé. On affûre que ce fut en cette occafion qu'elle inventa les voiles des Navires, au lieu des rames dont on fe fervoit auparavant ; c'eft ce que (4) Var 1. s. nous apprend Hygin (a). Caffiodore dit la même chofe (4), & femble avoir copié Hygin; avec cette difference, qu'au lieu d'Harpocrate il met Harpocras: voilà, pour le dire en paffant, ce qui fit donner à cette Déeffe l'épithete de Pela 6. 17. (a) Velificia primum invenit Ifis : nam dum invenit Harpocratem filium fuum, rate velificavit. Fab. ult. |