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Talifmans gravés fur des pierres, ou écrits fur du parchepas deffein de m'étendre sur ce fujet, qui a été traité par plusieurs Auteurs (a).

min : mais

Je n'ai

Si l'on pouvoit ajouter foi aux Rabbins, il faudroit convenir que la maniere de faire les Teraphims étoit également impie & cruelle, puifqu'ils difent que quand on vouloit fondre une de ces figures, on tuoit un homme, & après lui avoir coupé la tête, on l'embaumoit & on l'enfermoir dans le fond d'une muraille. On mettoit fous fa langue un lame d'or, fur laquelle étoit écrit le nom de quelque Dieu; & ces mêmes Auteurs ajoutent que quand on vouloit la faire parler, on allumoit des cierges devant elle, & on fe profternoit, & qu'alors elle rendoit fes Oracles. Mais en quoi reffemblent ces fortes de Teraphims, à ceux que Rachel deroba à fon pere Laban? enfin, de quelle maniere les Teraphims repondoient ils à ceux qui les confultoient, puifqu'il eft für par le paffage du Prophete Zacharie que nous venons de rapporter, qu'ils rendoient des Oracles? On doit fe rappeller ici ce qui a été dit fur les differentes manieres dont les Oracles faifoient connoître leurs reponses (1), & il y a apparence que c'étoit de quel (1) Liv. 4 qu'une de ces manieres que les Teraphims inftruifoient ceux qui les confultoient; car je ne fuis pas du fentiment du Cardinal Bellarmin, qui étoit perfuadé que ces Idoles prenoient une voix humaine pour annoncer l'avenir. Il eft vrai qu'on trouve dans la Fable, & même dans l'Hiftoire, qu'il est arrivé quelquefois que des Statues ayent parlé. On dit en effet que dans le temps qu'on faccagea la ville de Veies, on interrogea une Statue de Junon, pour fçavoir fi elle vouloit venir à Rome, & qu'elle repondit, je le veux ; que celle de la Fortune qui fut confacrée aux femmes, & fur-tout à la mere de Coriolan, avoit prononcé ces paroles, ritè me dicaftis, il ne manque rien à ma dédicace ; que celle de Cybele qu'Attalus avoit refusée aux Romains, déclara qu'elle vouloit être tranf portée à Rome, ainfi que le raconte Ovide:

Mira canam; longo tremuit cum murmure tellus,

Et fic eft adytis dicta locuta fuis :

(a) Voyez Scaliger. Gaffarel, Selden, &c.

Dddd ij

P. 327.

(1) Faft. L. 4.

v. 265.

de

Ipfa peti volui, ne fit mora, mitte volentem ;

Dignus Roma locus, quò Deus omnis cat (1).

Mais la plupart de ces faits font reconnus comme fabuleux
par ceux mêmes qui les rapportent : en effet Tite Live traite
pure fiction le premier des exemples que je viens de rap-
porter. Plutarque, dans la Vie de Coriolan, détruit
par de
judicieufes reflexions l'article de la Fortune des femmes, qu'on
difoit avoir parlé; & on ne peut tirer aucune induction de
celui qui eft rapporté par Ovide, puifqu'il dit feulement que
la voix qui fe fit entendre, pour dire que la Déeffe approu-
voit fon transport à Rome, fortit du fond du Temple; ce
qui ne prouve pas que la Statue elle-même l'eût formée. Le
temoignage du Prophete que j'ai cité fembleroit favoriser
l'opinion que je combats, puifqu'il dit nettement que les Te-
raphims avoient parlé ; mais pourvû que l'on convienne qu'ils
reveloient l'avenir de quelque maniere que ce fuft, ce passage
aura toujours toute fa force.

L'Auteur de l'Hiftoire Critique des Cultes anciens, croit que dans chaque maison où il Y avoit des Teraphims, on les plaçoit aux deux extrêmités d'un Cenotaphe, à peu près comme les Cherubins étoient pofés fur les deux bouts de l'Arche d'Alliance, & que c'étoit près de cette efpece de tombeau qu'on fe profternoit, & qu'on offroit des Sacrifices & des prieres à ces Idoles; mais où a-t'il appris cette circonftance? Les Teraphims étoient connus long-temps avant la conftruction de l'Arche & du Tabernacle, puifqu'il en eft parlé dans l'hiftoire de Jacob & de Laban, anterieurs de quelques fiecles à Moyfe: & il ne fert de rien à cet Auteur de dire que les Idoles honorées dès les temps les plus reculés, ne devinrent des Oracles qu'après l'entrée des Ifraëlites dans la terre promife; car fur quelle autorité peut-on appuyer cette opinion finguliere?

Concluons de ce que nous venons de dire, que les Teraphims tiroient leur origine de Chaldée, & qu'ils étoient d'une grande antiquité. Qu'il y en avoit de bois & de metal (a);

(a) Cette circonftance eft rapportée dans le Livre des Juges à l'occafion des Teraphims de Micha.

que les Payens les confultoient, pour en apprendre l'avenir: que ces figures étoient d'une forme humaine, puifque l'Ecriture Sainte rapporte que Michol en mit une dans le lit de David, pour faire croire qu'il dormoit encore: autrement il auroit été ridicule de mettre dans le lit de ce Prince toute autre figure que celle d'un homme, pour pouvoir tromper les Gar des; car il falloit bien qu'ils cruffent voir de loin quelque chofe qui reffemblât à un homme qui dort. J'ai eu raifon auffi de conclure de cette hiftoire, qu'il devoit y avoir des Teraphims d'une grandeur approchante de la taille ordinaire de t'homme. En effet s'ils n'avoient été que de petits marmoufets, les Gardes de David n'auroient pas pû y être trompés: enfin que quelquefois le terme de Teraphim fe prend dans l'Ecriture en bonne part; comme dans le Prophete Osée (1), (1) C. 3. v. 4. où il femble qu'on les regardoit comme des Oracles, & qu'on nommoit de ce nom l'image de la verité, que portoit le Grand-Prêtre lorfqu'il confultoit le Seigneur: Quia dies multos fedebunt filii Ifraël fine Rege & fine Principe, & fine Sacrificio, & fine Altari, & fine Ephod, & fine Teraphim ; fans Autel, fans Ephod, & fans Teraphim. On peut remarquer d'abord que ce Paffage eft fort obfcur, comme toute la Prophetie d'Ofée. Car enfin, fi les Teraphims étoient des Idoles des Payens, eft-ce une menace aux Juifs, de leur prédire qu'ils feront long-temps fans en avoir?

(2) In Ofe

Les Interpretes, embarraffés d'un endroit fi difficile, l'expliquent differemment, ainsi qu'on peut le voir dans leurs Commentaires; mais S. Jerome (2), fur l'autorité de la ver- C. 3.v. 4. fion des Septante, femble l'avoir ramené à fon veritable fens. L'Ephod étoit l'habit de ceremonie du Grand-Prêtre, avec les pierres du Rational, & le Urim & Tummim, par le moyen defquels il rendoit des Oracles à ceux qui le confultoient; & comme les Septante ont entendu par le mot de Teraphim, cet Oracle du Seigneur, & par l'Ephod, le Sacerdoce, il eft clair que le Prophete a voulu prédire aux Ifraëlites, que s'ils continuoient d'être prévaricateurs de la Loi de Dieu, il arriveroit un jour qu'ils feroient fans Sacrifice, fans Autel, fans Sacerdoce & fans Oracle. Mais il faut convenir en même temps avec le même S. Docteur, que hors Dddd iij

cet endroit du Prophete Ofée, le mot de Teraphim est toujours pris dans l'Ecriture Sainte en mauvaise part; & que s'il fignifie dans le paffage que nous venons de rapporter l'Urim & le Tummim du Grand-Prêtre, il n'eft employé par-tout ailleurs que pour marquer de vaines Idoles, objet de la veneration des Payens (a).

Il paroît par ce que nous venons dire que les Teraphims étoient des Dieux particuliers, femblables à ceux qu'on a nommés depuis Lares ou Penates, & que chacun en avoit dans fa maifon pour fa confervation & pour celle de fa famille. S'ils avoient été des Dieux publics, Laban n'auroit pas dit pourquoi avez vous derobé mes Dieux? Et il n'auroit pas été le feul à poursuivre Jacob; tout le Peuple intereffé à ce vol, l'auroit secondé. L'exemple de Nabuchodonofor prouve qu'on les portoit dans les voyages & dans les expeditions militaires, puifque ce fut en chemin qu'il les confulta. Enfin, on peut prouver la même verité par celui de Micha qui avoit des Teraphims dans fa maison pour les interroger dans le befoin. Mais étoient-ils des Dieux naturels, tels que les Aftres, ou des Dieux animés, c'eft-à-dire, les Ames des ancêtres ? C'eft ce qu'on ne fçauroit decider. Quelques Sçavans font perfuadés qu'ils étoient des Dieux animés; & l'Auteur de Hiftoire Critique des Dogmes & des Cultes, en eft fi convaincu, qu'il prétend que les Teraphims de Laban étoient Noé & Sem mais fur quelles preuves peut-on établir une pareille prétention? Sur ce fondement le même Auteur eft obligé de dire qu'il n'y avoit dans chaque maison que deux Teraphims, pour reprefenter ces deux Patriarches; mais comme l'Ecriture parle de ces Dieux fans en specifier le nombre, je ne crois pas qu'on puiffe le reftraindre à deux feulement. On fçait du moins que fi les Dieux Penates tirent leur origine de ces anciens Teraphims, comme il eft très-vraisemblable, il étoit libre à chacun d'en avoir autant qu'il en vouloit.

(a) L'exemple de Micha eft peut-être une exception à la Regle établie par faint Jerôme. Car on croit communément qu'il avoit fait fes Teraphims pour confulter le vrai Dieu; & que s'il étoit prévaricateur, il n'étoit pas idolâtre.

qu'on n'adorât qu'elle dans tous fes Etats, elle tomba dans de grandes calamités, qui lui ayant fait faire de fages reflexions, elle commanda à fes Sujets d'honorer Junon au lieu d'elle;

& que c'eft pour cela qu'elle fait figne de la main qu'on ne doit rendre un culte religieux qu'à la Déeffe qui eft dans le Temple. Il ne faut pas oublier au refte, que Voffius croit qu'il y a eu trois Semiramis; 1 femme de Ninus, la fille de Belochus, & une autre : & que ce qui a porté tant de confusion dans cette Hiftoire, c'eft qu'on les a confondues dans la fuite.

Syria.

J'ai dit que de fçavans hommes étoient perfuadés que Derceto ou Atergatis étoit la même qu'Aftarté; & voici les raifons fur lesquelles ils fe fondent. Stabon (1) parlant des chan- (1) De Dea gemens qui font arrivés dans les noms, obferve que d'Atergatis ou Atergata, on a fait Athera, & que cette Déeffe eft la même que celle que Ctefias appelle Derceto: or Ctefias ayant demeuré long-temps en Perfe, devoit connoître les Dieux de la Syrie. Artemidore affûre que les Syriens mangent du poiffon, à l'exception de ceux qui adorent Aftarté; ce qui prouve que cet Auteur confond cette Déeffe avec Derceto, , puifqu'il dit des adorateurs d'Aftarté, ce qui ne conviendroit qu'à ceux de Derceto, fi l'une étoit differente de l'autre. L'Auteur du fecond Livre des Machabées femble supposer ce que je dis ici, puifque parlant d'Aftaroth-Carnaïn, il dit qu'il y avoit dans cette ville un Temple d'Atergata. Pline paroît être du même fentiment, lorfqu'il dit qu'on croyoit qu'Atergatis étoit la même Déeffe que les Grecs nommoient Derceto: ibi prodigiofa Atergatis, Græcis autem Derceto dicta, videtur (2). Enfin Selden, qui a traité à fond l'Hiftoire de (2) Liv. 16, ces Divinités de Syrie, ajoute encore de nouvelles preuves à celles que je viens de rapporter, comme on peut le voir dans fon Ouvrage. Cet Auteur prouve auffi que la fable de Derceto, ou Atergatis, eft la même que celle de Dagon, Dieu des Philiftins, qui étoit reprefenté fous la figure d'un poiffon, puifque felon lui (3), le nom d'Atergatis, eft com- (3) Synt, 2ẻ pofé d'Adir-dagon, grand poisson, ou poiffon magnifique. S. Je-C 3. rôme femble favorifer l'opinion du fçavant Anglois, lorsqu'il dit que Dagon fignifie pifcis mæroris, poiffon de deuil où de trifteffe: mais pour ce dernier article, je prefere le fentiment Cccc ij

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