Imágenes de páginas
PDF
EPUB

res, du génie, du courage même, & qui ne fe foûtient que par la bonne foi. Dans de preffans befoins nos Rois n'ont-ils pas trouvé des fecours infinis dans les bourses des Commerçans? Peut-on faire un plus noble ufage de fes richeffes, & en acquérir par des voies plus honnêtes?

A l'égard des charges de Finance, il y en a de différentes fortes. Je ne vois rien que d'honnête dans un homme qui reçoit les deniers publics, qui en rend un compte exact & fidele, & qui fe contente du falaire qui eft justement accordé à fes peines. Il eft vrai qu'il eft des emplois qui paroiffent odieux au Public mais ils le font moins dans leur principe, qu'ils ne le font devenus par la mauvaise conduite de quelques-uns de ceux qui les ont poffédés. Or, je pense qu'un homme de condition ne doit point les rechercher;

rechercher; il faut qu'il évite les chofes qui peuvent donner la moindre atteinte à la réputation : rien ne doit être plus cher aux ames bien nées, rien aussi n'eft plus facile à perdre. C'est une fleur délicate qui fe ternit en un inftant, & dont la fraîcheur & l'éclat ne reviennent jamais.

Si, comme je l'ai dit, on manque de difpofitions pour les états que la Nobleffe embraffe ordinairement, & que la nature détermine aux Arts libéraux, aux Sciences & aux Lettres, on peut les cultiver, pourvû qu'on emploie fes talens utilement pour la Société. La plus noble partie de l'homme eft fans contredit l'efprit. S'il eft élevé, s'il eft profond, & qu'il foit réglé par un coeur droit & généreux, c'eft le comble de la gloire. Eft-il rien qui faffe plus d'honneur, je ne dis pas à un homme feulement, mais à fon II. Part. Ee

fiecle, à fa Nation, & à l'humanité même; & qui doive plus élever certains hommes au-deffus des autres? Pourquoi donc la Nobleffe femblet'elle dédaigner les Arts, les Sciences & les Lettres ? La diffipation l'arrachera-t'elle toûjours aux chofes folides?

CHAPITRE VIII.

De l'Etat Militaire.

CE font ici quelques réflexions fur l'éducation de la jeuneffe que l'on destine à la guerre, & qui peuvent être utiles à ceux qui ont déjà pris ce parti. Je représenterai que ce n'eft point une profeffion d'ignorance: où il ne faille que du courage, comme le vulgaire fe l'imagine; mais au contraire une profeffion qui demande une grande étendue

de connoiffances, & des talens infinis, joints à une valeur guidée par la fageffe. J'entrerai dans le détail de l'étude que je crois néceffaire pour fe rendre éminent dans la fcience de la guerre.

Si quelquefois je parle du devoir des Officiers Généraux, & des Commandans des Corps, à Dieu ne plaife que je prétende leur donner des inftructions; je n'en parle que pour la jeuneffe qui afpire aux honneurs & aux dignités.

La profeffion des armes eft pref que la feule que la Nobleffe embraffe. Chaque profeffion fe croit toûjours au-dessus de toute autre ; le Militaire femble l'emporter en cet excès d'amour propre : il ne connoît pas d'autre moyen de rendre service à fa Patrie, dont il fe croit lui feul la base & l'appui.

La vanité, la coûtume & l'amour de la licence, font les motifs

les plus ordinaires qui conduifent au parti des armes. Les Parens font fouvent les premiers à infpirer à leurs enfans des fentimens de vanité, voulant leur donner du goût pour la gloire. Une coûtume impérieufe contraint à faire ce que les autres font. La licence paroît prefque à tous un attribut de l'état militaire. Une jeunesse mal élevée, dont l'efprit manque de lumiere & le coeur de fentimens, fe croit, je ne fai par quel privilége, affranchie des Loix divines & humaines.

Mais le véritable & le feul motif devroit être l'amour de la Patrie, & le defir de concourir au bien général, au péril de fa vie & de fes biens. Voilà quelle étoit la source de toutes les actions éclatantes des Athéniens, des Spartiates & des Ro

mains.

Le vulgaire penfe qu'il ne faut pour la guerre que du courage : il

« AnteriorContinuar »