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tres,

on a trouvé les opinions partagées: auquel cas on a cru qu'il étoit permis de prendre le parti. de la liberté.

On trouvera plus d'additions que de change mens ou de retranchemens pour les chofes ; parcequ'on a été moins averti de ce qu'on y reprenoit. Il eft vrai néanmoins que l'on a fû quelques opjections generales qu'on faifoit contre ce livre, aufquelles on n'a pas cru devoir s'arrêter; parcequ'on s'eft perfuadé que ceux mêmes qui les faifoient, feroient aifément fatisfaits lorfqu'on leur auroit représenté les raifons qu'on a eues en vûe dans les chofes qu'ils blàmoient. Et c'eft pourquoi il eft inutile de répondre ici aux principales de ces objections..

Il s'eft trouvé des perfonnes qui on été cho-quées du titre d'art de penfer, au lieu duquel ils vouloient qu'on mit, l'art de bien raisonner. Mais on les prie de confiderer que la Logique ayant pour but de donner des regles pour toutes les actions de l'efprit, & auffi-bien, pour les idées fimples, que pour les jugemens & pour les raifonnemens, il n'y avoit guéres d'autre mot qui enfermât toutes ces differentes actions, & certainement celui de penfée les comprend toutes; car les fimples idées font des penfées, les jugemens font des penfées, & les raifonnemens font des pensées. Il eft vrai que l'on eût pû dire, Part de bien penfer; mais cette addition n'étoit pas neceffaire, étant affez marquée par le mot d'art, qui fignifie de foi-même une méthode de bien faire quelque chofe, comme Ariftote même le remarque. Et c'eft pourquoi on fe con-rente de dire, l'art de peindre, l'art de compter, parcequ'on fuppofe qu'il ne faut point d'art pour

mal peindre, ni pour mal compter.

On a fait une objection beaucoup plus confiderable contre cette multitude de chofes tirées de differentes fciences que l'on trouve dans cette Logique, & parcequ'elle en attaque tout le deffein, & nous donne ainfi lieu de l'expliquer, il eft neceffaire de l'examiner avec plus de foin. A quoi bon, difent-ils, toute cette bigarure de Rhetorique, de Morale, de Phyfique, de Metaphyfique, de Géometrie ? Lorfque nous penfons trouver des préceptes de Logique, on nous transporte tout-d'un coup dans les plus hautes fciences fans s'être informé fi nous les avions apprifes. Ne devoit-on pas fuppofer au contraire, que fi nous avions déja toutes ces connoiffances, nous n'aurions pas befoin de cette Logique ? Et note il pas mieux valu nous en donner une toute fimple & toute nue, où les regles fuffent expliquées par des exemples tirés de chofes communes, que de les embarraffer de tant de matieres qui les étouffent

;

que

Mais ceux qui raifonnent de cette forte n'ont pas affez confideré qu'un livre ne fauroit guéres avoir de plus grand défaut que de n'être paslû, puifqu'il ne fert qu'à ceux qui le lifent. Et qu'ainfi, tout ce qui contribue à faire lire un livre, contribue auffi à le rendre utile. Or il eft certain fi on avoit fuivi leur penfée, & que l'on eût fait une Logique toute féche, avec les exemples ordinaires d'animal & de cheval quelque exacte & quelque méthodique qu'elleeût pû être, elle n'eût fait qu'augmenter le nombre de tant d'autres dont le monde eft plein,. & qui ne fe lifent point. Au-lieu que c'eft juftement cet amas de différentes chofes qui a don

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né quelque cours à celle-ci, & qui la fait lire avec un peu moins de chagrin qu'on ne fait les

autres.

Mais ce u'eft pas là néanmoins la principale vue qu'on a eue dans ce mélange; que d'attirer le monde à la lire, en la rendant plus divertiffante que ne le font les Logiques ordinaires. On prétend de plus avoir fuivi la voie la plus naturelle & la plus avantageufe de traiter cet Art, en remediant, autant qu'il se pouvoit, à un inconvenient qui en rend l'étude prefque inu

tile.

Car l'experience fait voir que de mille jeunes. hommes qui apprennent la Logique, il n'y en a pas dix qui en fachent quelque chofe fix mois après qu'ils ont achevé leurs cours. Or il femble que la veritable caufe de cet oubli ou de cette negligence fi commune, foit que toutes les matieres que l'on traite dans la Logique, étant d'elles-mêmes très-abftraites & très-éloignées de l'ufage, on les joint encore à des exemples peu agreables & dont on ne parle jamais ailTeurs; & ainfi l'efprit qui ne s'y attache qu'avec peine n'a rien qui l'y retienne attaché, & perd aifément toutes les idées. qu'il en avoit conçues; parcequ'elles ne font jamais renouvellées par la pratique.

De plus, comme ces exemples communs re font pas affez comprendre que cet Art puiffe. être appliqué à quelque chofe d'utile, ils s'accoûtument à renfermer la Logique dans la Logique, fans l'étendre plus loin; au-lieu qu'elle n'eft faite que pour fervir d'inftrumens aux autres fciences; de forte que comme ils n'en ont jamais vû de vrai ufage, ils ne la mettent auffi

jamais en ufage, & ils font bien aifes même de s'en décharger comme d'une connoiffance baff● &. inutile.

On a donc cru que le meilleur remede de cet inconvenient, étoit de ne pas tant féparer qu'or fait d'ordinaire, la Logique des autres fciences aufquelles elle eft deftinée, & de la joindre tellement par le moyen des exemples à des connoiffances folides, que l'on en vit en même temps les regles & la pratique: afin que l'on apprît à juger de ces fciences par la Logique, & que l'on retint la Logique par le moyen de ces fcien

ces

Ainfi tant s'en faut que cette diverfité puiffe étouffer les preceptes, que rien ne peut plus contribuer à les faire bien entendre, & à les faire mieux retenir, que cette diverfité, parcequ'ils font d'eux-mêmes trop fubtils pour faire impreffion fur l'efprit, fi on ne les attache à quelque chofe de plus agreable & de plus fenfible.

Pour rendre ce mélange plus utile, on n'a pas emprunté au hazard des exemples de ces fciences; mais on en a choifi les points les plus importans, & qui pouvoient le plus fervir de regles & de principes pour trouver la verité dans les autres. matieres que l'on n'a pas pû traiter.

On a confideré par exemple, en ce qui regar.. de la Rhetorique, que le fecours qu'on en pou-voit tirer pour trouver des penfées, des expreffions, & des embelliffemens, n'étoit pas fi confiderable.. L'efprit fournit affez de penfées, l'ufage donne les expreffions, & pour les figures&. les ornemens on n'en a toûjours que trop. Ainfi tout confifte prefque à s'eloigner de certaines mauvaises manieres d'écrire & de parler,.

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& fur tout d'un ftile artificiel & rhetoricien
compofé de penfées fauffes & hyperboliques,
de figures forcées qui eft le plus grand de
tous les vices. Or on trouvera peut-être au-
tant de chofes utiles dans cette Logique pour
connoître & pour éviter ces défauts, que dans
les livres qui en traitent expreffément. Le cha-
pitre dernier de la premiere partie
en fai-
fant voir la nature du ftile figuré, apprend en
même temps l'ufage que l'on en doit faire,
& découvre la vraie regle par laquelle on doit
difcerner les bonnes & les mauvaifes figures.
Celui où l'on traite des lieux en general peut
beaucoup fervir à retrancher l'abondance. fu-
perflue des penfees communes. L'article où l'on
parle des mauvais raifonnemens où l'éloquence
engage infenfiblement, en apprenant à ne pren-
dre jamais pour beau ce qui eft faux, pro-
pofe en paffant une des plus importantes re-
gles de la véritable Rhetorique, & qui peut
plus que tout autre former l'efprit à une
maniere d'écrire fimple, naturelle & judicieu-
fe. Enfin ce que l'on dit dans le même chapi-
tre, du foin que l'on doit avoir de n'irriter
point la malignité de ceux à qui on parle, don-
ne lieu d'éviter un très-grand nombre de défauts
d'autant plus dangereux, qu'ils font plus diffici-
les à remarquer.

Pour la Morale, le fujet principal que l'on traitoit, n'a pas permis qu'on en inferat beau! coup de chofes. Je croi néanmoins qu'on jugera que ce que l'on en voit dans le chapitre des fauffes idées des biens & des maux dans la premiere partie, & dans celui des mauvais raifonnemens que l'on commet dans la vie civi

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