Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Chronologiftes. Je fçai que les Sçavans s'entendent à demi mot, & que des confequences ils remontent facilement aux principes. Toutefois dans un ouvrage Systématique dont toute l'économie dépend du choix des faits, il peut arriver qu'on ne fe rencontre pas fi jufte avec l'Auteur, qui peut avoir d'ailleurs fa maniere particuliere de les envifager, de les expofer, & de les comparer. Ainfi tout reclame pour la neceffité de ne prononcer qu'avec une connoiffance éxacte fur les raifons qui ont pû entraîner un grand génie, à hazarder de nouvelles conjectures fur la Science des Tems. Une Analyse nue & abregée peut dérober à une vûe fine & perçante,la maniere de proceder qui paroît fimple & facile, parce que la route nouvelle où un efprit du premier ordre marche feul & fans compagnie, eft presque alors imperceptible ; il ne laiffe que des traces légères qui peuvent échaper aux plus fins Obfervateurs. Ce qui me donne lieu de penfer ainfi, eft qu'un Le Pere fçavant Adverfaire de M. Nevvton, & fi capable de le pénétrer, avoue qu'il a été obligé de percer les voiles, dont fe couvre l'Ecrivain Anglois; & d'intercepter fa penfée. C'est à l'impatience d'arracher à M. Nevyton, de

Souciet Je

fuite.

plus grands éclairciffemens, que j'attribue le reproche hardi que lui fait le même Auteur, de vouloir renouveller avec quelque nouveau Leibnitz, une fcene pareille à celle qu'ils ont donnée au fujet de la methode des infiniment petits. Il est trop équitable pour faire un crime à M. Nevvton, d'avoir voulu fe venger par une mystérieufe reticence, de l'impreffion prématurée d'un écrit qu'il n'avoit pas dessein de publier.

Tout le monde fçait comment cet abregé Chronologique a été rendu public. On noublia rien pour obtenir de M. Nevvton la permiffion de l'imprimer; on lui écrivit plufieurs fois à ce fujet, le célébre Anglois répondit enfin qu'il avoit autrefois communiqué à un ami un Index Chronologique qui devoit demeurer fecret, & que ne fçachant point fi ce manuscrit étoit fon ouvrage, il ne vouloit point se mêler de celui qui avoit été donné fous fon nom, ni donner aucun confentement à l'impreffion. Une réponse fi précife n'empêcha point le Libraire de publier la Traduction de cet écrit, & d'ajoûter des Obfervations, compofées par un membre illuftre de l'Académie des belles Lettres & des Inscriptions.

M. Nevvton fut piqué de ce procedé, il ne pût voir fans chagrin qu'on voulut étouffer prefque avant fa naiffance, cet enfant de fon loifir; la tendreffe paternelle se reveilla, il répondit aux Observations d'une maniere vive; l'on ne fent point dans cette réponse, ce flegme Stoïque qui fied fi bien à un Philofophe. J'écarte tout ce qu'il y a de perfonnel dans cette difpute, pour ne m'attacher qu'à ce qui regarde le fond du procès. M. Nevvton fe plaint que l'Obfervateur n'a pas bien pris fes idées fur les deux points principaux de fa Chronologie, qui regardent l'Epoque des Argonautes & l'évalution des Générations:,, Il s'imagine, dit M. Nevvton, », que je place l'Equinoxe du Printems, tel qu'il étoit au tems de l'Expedition des Ar„ gonautes, à la distance de quinze degrés de la premiere Etoile du Belier : Mais, ajoûte-t-il, je ne le place point où il dit : je le place dans le milieu de la Constellation, & ,, ce milieu n'eft pas éloigné de quinze degrés de la premiere Etoile du Belier. " II faut avouer qu'il y a dans cette réponse une affectation d'obscurité qui ne pouvoit fervir qu'à éxercer la fagacité de fon adverfaire. „ A l'égard des Générations, pourfuit M..

وو

[ocr errors]

وو

[ocr errors]

وو

وو

دو

"

دو

"

,,Nevvton, il dit que je les eftime l'une portant l'autre, fur le pied de dix-huit ou vingt années, ce qui eft une autre méprise. Je m'accorde avec les Anciens à compter trois Générations pour environ cent ans. "Il prétend que l'Obfervateur a attribué aux Générations, ce qu'il n'a dit que de la durée des regnes des Rois.

"

Il y a encore quelques points, où il trouve l'Obfervateur en défaut. M. Nevvton parlant de l'expulfion des Rois Pasteurs d'Egypte par les Thebains, remarque que ceux-ci établirent le culte de leurs Rois & de leurs Princes; l'Observateur transportant ce trait à la premiere antiquité de l'Idolatrie Egpytienne fait dire au Philofophe Anglois, qu'alors les Egyptiens avoient commencé à former leur Religion; ce que M. Nevvton n'a jamais avancé. Il reproche encore à fon Adverfaire d'avoir confondu le Cycle Caniculaire des Egyptiens, avec l'année Egyptienne des trois cens foixante & cinq jours. Voilà ce que M. Nevvton a trouvé de repréhenfible dans les Obfervations, qui font d'ailleurs écrites avec beaucoup de précision & de justesse & foutenues d'une grande Erudition. L'Auteur montre une vafte connoiffance de l'ancienne

Le Pere Souciet Je

fuite.

Aftronomie. Son habileté & fon fçavoir pro-
mettent au Public des Obfervations neuves
& intereffantes fur l'ouvrage entier. Je vou-
drois que
M. Nevvton en eût ufé plus poli-
ment envers un Auteur qui paroît penetré
de fentimens d'eftime pour fa personne &
pour les écrits.

Peu de tems après s'éleva contre Monsieur Nevvton un nouvel Adverfaire qui joint une profonde Erudition, à une grande politeffe. Zelateur éclairé de l'antiquité des tems, il a attaqué M. Nevvton avec les armes les plus tèrribles; Aftronomie ancienne & Moderne, raisonnemens Philofophiques, recherches Historiques, monumens fürs & décififs, refutation étendue de la réponse aux Obfervations, tout a été mis en œuvre pour porter des coups mortels au nouveau Systême Chronologique. Il faut l'avouer, M. Nevvton ne pouvoit jamais avoir d'Adverfaire plus redoutable; le fçavant Jefuite a le talent d'affaifonner de traits ingenieux les matieres les plus abstraites, & de jetter dans ses raisonnemens une force & une énergie qui faififfent un Lecteur attentif.

C'eft dans le fecond Tome duR ecueil de fes Differtations, que fe trouve la refutation du

« AnteriorContinuar »