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peuvent auffi-bien fuccéder comme ceux qui font au fiécle; » & après leur décès, tout s'en va à leurs amis. »

Il y a plufieurs réponses à ce prétendu moïen. 1°. Cet article donne visiblement aux chevaliers de Malte la qualité de religieux; puisqu'il dit que les religieux ne fuccédent point, excepté fes hofpitaliers. Or les hofpitaliers ne peuvent faire une exception à la régle générale qui ne concerne que les religieux, s'ils ne font religieux eux-mêmes.

2o. Cet article ne dit point que les chevaliers de Malte ont par leur inftitution, la capacité de fuccéder accordée aux citoïens par la loi civile: au contraire, il fuppofe néceffairement qu'ils en font privés par la nature de leurs vœux, ainfi que tous les autres effets civils; puifqu'il dit qu'ils ont été dispensés à cet effet par le Pape & par le Roi

de

3o. Enfin cet article dit qu'ils peuvent fuccéder comme ceux qui font au fiècle. Ils ne font donc pas au fiècle. Or il n'y a pas de doute qu'ils feroient parfaitement au fiécle, s'ils joignoient la vie civile à la vie naturelle.

D'ailleurs Brodeau fur Louet, lettre C, fomm. 8, n. 18, dit qu'il faut lire dans cet article, anciennement, au lieu d'aucunement. Il attefte même que fon manufcrit porte d'ancienneté. Il paroît que cet auteur a voulu faire penfer par cette obfervation, que cette prétendue capacité de fuccéder étoit un ancien ufage abrogé.

1.

C'est le fiftême de Loyfeau, traité des ordres, chapitre 3, nombre 64, qui dit que le droit françois a fouvent varié à l'égard des chevaliers de Malte. Il cite l'article du grand coutumier, & ajoûte, d'après Papon, que dans la fuite on les a admis à fuccéder feulement en ufufruit, & qu'enfin ils ont été privés de toutes fucceffions par une jurifprudence conf

tante.

Nous avons en effet des arrêts célébres qui l'ont ainfi jugé, & entre autres un du mois de Mars 1573, en forme de réglement, lequel eft rapporté par Ferriere fur l'article 337 de la coutume de Paris, & par un grand nombre d'arrêtiftes.

Brodeau, à l'endroit cité, ajoûte encore qu'il eft fait mention de ce privilege, qui donnoit droit aux chevaliers de Malte dé fuccéder, au procès-verbal de l'ancienne coutume de Paris rédigée en 1510, article 152 mais qu'il n'a jamais été vérifié en aucune cour fouveraine; & que c'eft avec raifon qu'on l'a rejetté comme préjudiciable à l'état, à la loi, à la police géné

rale du roïaume, à l'ordre & au repos des familles illuftres. Voici cependant ce que contient cet endroit du procès-verbal : de la coutume de Paris, fur le cinquante-deuxième article, qui eft conçû en ces termes : Religieux & religieufes profès ne fuccédent point à leurs parens, ni le monaftere pour eux. A cet article s'eft » oppofé le receveur du Temple à Paris (qui étoit fondé de la >> procuration de l'ordre de Malte) difant que lefdits du Temple ont privilege au contraire, proteftant que là où » ladite coutume auroit lieu, que ce ne peut nuire ni préju» dicier à leurdit privilege. Les gens d'églife, nobles, avocats, » praticiens & gens du tiers état, maintenant ladite coutume » être telle & toute notoire, en ladite prévôté & vicomté. » Sur quoi avons ordonné, par l'avis & opinion de ceux def» dits états, que ledit article, attendu l'ancien ufage d'icelui, » demeureroit pour coutume; & que lesdits religieux du Tem>>ple, qui s'oppofoient audit article, écriroient & produiroient » ce que bon leur fembleroit, qui feroit montré & communi>> qué au procureur du Roi pour y répondre, afin d'en faire » notre rapport en la cour. »

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Il ne paroît pas que ce procès ait été inftruit. On voit au reste qu'il s'en faut de beaucoup que ce privilege prétendu leur ait été confirmé ni accordé. Auffi n'en fut-il nullement question lors de la réformation de cette coutume.

Notre auteur ajoûte que ce privilege des chevaliers de Malte n'a jamais été vérifié en aucune cour fouveraine : mais on ne voit pas fur quel fondement il a pû avouer ce fait. Ainfi, foit que ce privilege ait exifté réellement, foit qu'il ait toujours été imaginaire, il faut s en tenir à la jurifprudence des arrêts, qui eft conftante & uniforme; & dire que ce feul effet civil, dont les chevaliers de Malte ont pû jouir depuis qu'il a été enlevé aux autres religieux', n'existe plus; & qu'ils font par conféquent morts civilement comme tous les autres religieux.

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Le second moïen des chevaliers de Malte qui eft celui fur lequel ils ont le plus fouvent infifté, pour foutenir qu'ils ne perdoient pas tous les effets civils, eft que leurs ftatuts ne leur défendent pas de rien pofféder abfolument; mais feulement de pofféder en propriété d'où ils concluoient qu'ils renonçoient à la vérité à rien pofféder en propriété ; mais non pas à fuccéder en ufufruit. Et, pour rendre ce moïen plus frappant, ils rapportoient deux arrêts qui les ont admis à fuccéder en ufufruit, quoiqu'ils fuffent même pourvûs de commanderies. Le premier

a été rendu au parlement de Dijon le 21 Février 1582; & le fecond au parlement de Provence le 2 Décembre 1609. Ces deux arrêts leur permettent même de difpofer des biens à eux échus à titre fucceffif au profit de telles perfonnes que bon leur femblera, excepté à des perfonnes de leur ordre; les biens dont ils n'auront pas difpofé revenant, après leur décès, à lèurs plus proches habiles à fuccéder.

Brodeau, qui rapporte ces deux arrêts, répond qu'aïant été prononcés dans des païs de droit écrit, ils ne doivent point tirer à conféquence au parlement de Paris. Mais cette réponse n'est pas fatisfaisante; puifqu'en païs de droit écrit, comme en païs coutumier, les religieux font réputés morts civilement & incapables de fuccéder, depuis l'édit de Châteaubriant, qui est

antérieur à ces deux arrêts.

Pour répondre folidement à ces arrêts, il faut donc trancher net, & dire qu'ils font contraires aux vrais principes. Pour le prouver, il fuffit d'obferver qu'ils donnent aux chevaliers de Malte la capacité de difpofer des biens à eux échus à titre fucceffif, quoique cette faculté leur ait été enlevée par le droit Romain même. Nov. 5, cap. 5, Auth. ingreffi cod. de facrofanet. Ecclef.

Il

Telle a toujours été la jurisprudence du parlement de Paris. y en a un arrêt du 16 Mars 1571, le Roi y féant, affisté de plufieurs princes du fang, cardinaux & feigneurs; par lequel un refcrit apoftolique, portant permiffion à un chevalier de Malte de tefter, a été déclaré abufif. Cet arrêt eft rapporté par Charondas en ses réponses, livre 7, réponse 196.

On pourroit dire qu'on n'a eu alors d'autre objet que de maintenir l'autorité du Roi contre les entreprises de la cour de Rome, qui avoit voulu s'attribuer un droit législatif dans le roïaume, en difpofant, ou donnant à quelqu'un la faculté de difpofer de biens qui font fous la manutention du magiftrat politique feul. Cependant cet arrêt ne laiffe pas de décider la queftion. En effet fi le chevalier de Malte contre lequel il a été rendu avoit eu la faculté de tefter, on auroit déclaré le refcrit du pape abufif: mais on auroit en même tems confirmé le teftament, non pas comme étant valable en vertu de l'autorité du pape; mais en vertu de la capacité civile du teftateur. Au refte y a une foule d'arrêts, dont nous aurons occafion de parler ailleurs, qui ont décidé la question in terminis.

Enfin on peut foutenir que, fi les chevaliers de Malte font,

comme ils en conviennent, incapables, fuivant leurs ftatuts,. de pofféder en propre, ils ne peuvent fuccéder en ufufruit; parceque ufusfructus pars dominii eft in multis cafibus. Ce font les termes de la loi 4, ff. de ufufructu. C'est le moïen fur lequel M. Bignon avocat général fonda fes conclufions dans la cause du chevalier d'Anglure, jugée par arrêt du 11 Janvier 1629. Il foutint que les chevaliers de Malte étoient exclus par leurs ftatuts de fuccéder même en ufufruit. En conféquence, fans avoir égard au teftament de la mere du chevalier d'Anglure, ni à la propriété qu'il avoit eue des biens de fon pere, il fut réduit à mille livres de penfion viagere pour tous droits de fucceffion paternelle & maternelle. Čet arrêt eft rapporté par Bardet, tome i, livre 3, chapitre 20.

Nous avons été obligés de nous arrêter ici à cette differtation, quoiqu'elle appartienne naturellement à l'endroit où nous parlerons de l'incapacité dans laquelle font les religieux en général de fuccéder; parceque cette prétendue faculté de fuccéder en ufufruit étoit une objection contre le principe que nous voulons établir, que , que les chevaliers de Malte font entiérement privés des effets civils, & qu'il étoit par conféquent nécessaire de détruire. Ce principe, déja rendu certain par ce que nous venons de dire, fera encore confirmé par le détail des incapacités des chevaliers de Malte, dont nous parlerons dans la fuite à mesure que l'occafion s'en préfentera.

Nous croïons devoir ajoûter ici que la profeffion des chevaliers de Malte doit, comme les autres, avoir deux qualités ef fentielles qui lui font communes avec celle des autres religieux.

La premiere eft qu'elle doit être faite à l'âge de seize ans. Brodeau fur Louet, lettre C, fomm. 8, dit que les anciens ftatuts de l'ordre avoient fixé cet âge à dix-huit ans, & que, par l'article 15 des nouveaux ftatuts, il a été réduit à feize ans fuivant le concile de Trente.

La feconde qualité eft d'être expreffe & folemnelle. C'est ce qu'on peut conclure de l'ordonnance de 1667, tit. 20, art. 17, qui, comme nous l'avons vû, ordonne que les grands-prieurs de l'ordre tiendront registre des profeffions des chevaliers François.

Nous devons encore ajoûter qu'elle doit auffi être précédée d'un noviciat ; lequel ne fe fait pas néanmoins comme celui des autres ordres religieux.

L'inftitut des chevaliers de Malte a principalement pour ob

jet d'être perpétuellement en guerre avec les infidelles, & de faire fans ceffe des efforts pour leur enlever les lieux faints dont ils font en poffeffion. C'eft pourquoi le noviciat de ceux qui fe deftinent à y être admis confifte à faire des courfes en mer pour attaquer les vaiffeaux des ennemis du nom Chrétien: c'est ce qu'on appelle faire des caravanes. Il paroît que cette formalité doit effentiellement précéder l'émiffion des vœux.

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Les Jéfuites furent inftitués en 1 534 par faint Ignace de Loïola, fous le nom de la compagnie de Jefus. Paul III en 1539 confirma de bouche ce nouvel établiffement, & l'année fuivante il l'autorifa par une bulle qui commence par ces mots : Regimini militantis Ecclefia, qui fut donnée le 27 Septembre 1540. Dans cette bulle, il avoit fixé le nombre des profès à foixante. C'étoit mettre des bornes bien étroites à la propagation de cette fociété. Il changea d'avis dans la suite, il revint fur fes pas & leva l'obftacle le 14 Mars 1543 par une autre bulle, qui commence : Injunctum nobis. Cet ordre a obtenu fucceffivement de grands privileges de différens papes. Le général eft perpétuel, & réfide à Rome dans la maifon profeffe. Il eft accompagné de quatre affiftans généraux, chacun defquels eft tiré d'un des quatre païs fuivans: Italie, France, Espagne & Allemagne. Dans les délibérations où il les appelle, ils ont voix confultative feulement, & non voix délibérative. Il décide feul & à fon gré.

Outre les novices, il y a dans leur ordre trois dégrés différens. Le premier eft celui de profès, le fecond celui de coadjuteurs formés, & le troifiéme d'écoliers approuvés.

Parmi les profès, il y en a de deux fortes : les uns font de quatre vœux, & les autres de trois vœux feulement.

Les vœux des profès en général font folemnels, & font ceux de chafteté, pauvreté & obéiffance, auquels ceux des quatre vœux en ajoûtent un, qui eft celui d'obéiffance au pape en ce qui concerne les miffions. Les uns & les autres, fous le vœu d'obéiffance, s'obligent d'avoir un foin particulier de l'éduca- . tion de la jeuneffe.

Les coadjuteurs font auffi de deux fortes. Les uns font fpirituels, les autres font temporels. Les uns & les autres font les

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