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le gardien & le défenfeur de la

liberté.

Les Romains, après l'établiffement D. H. 1. 2. du fénat tirèrent de nouveau de

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chaque curie dix hommes de cheval; on les nomma Celeres, foit du nom de leur chef appelé Celer, ou par rapport à leur viteffe, & parce qu'ils fembloient voler, pour exécuter les ordres qu'on leur donnoit. Romulus en compofa fa garde; ils combattoient également à pied & à cheval, dit Denis d'Halicarnaffe, felon les occafions & la difpofition du terrain où ils fe trouvoient; ce qui revient affez à cette espèce de milice que nous appelons Dragons. L'état leur fourniffoit un cheval, d'où ils furent appelés chevaliers, & ils étoient diftingués par un anneau d'or. Mais dans la fuite, quand leur nombre fut augmenté, cette fonction militaire fut changée en un fimple titre d'honneur, & ces chevaliers ne furent pas plus attachés à la guerre que les autres citoyens. On les vit au contraire se charger, fous le nom de Publicains de recueillir les tributs, & tenir à ferme les revenus de la république : efpèce de corps qui, quoique plé

Tome I.

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béien, ne laiffoit pas de former comme un ordre féparé entre les patriciens & le peuple.

De tous les peuples du monde, le plus fier de fon origine, & le plus jaloux de fa liberté, a été le peuple Romain. Ce dernier ordre, quoique formé pour la plupart de pâtres & d'efclaves, voulut avoir part dans le gouvernement comme le premier. C'étoit lui qui autorifoit les lois qui avoient été rédigées par le roi & le fénat; & il donnoit lui-même, dans fes affemblées, les ordres qu'il vouloit exécuter. Tout ce qui concernoit la D. H. 1. 2. guerre & la paix, la création des magiftrats, l'élection même du fouverain, dépendoit de fes fuffrages. Le fénat s'étoit feulement réfervé le pouvoir d'approuver ou de rejeter fes projets, qui, fans ce tempérament & le concours de fes lumières, euffent été fouvent trop précipités & trop tumultueux.

Telle étoit la conftitution fondamentale de cet état, qui n'étoit ni purement monarchique, ni auffi entièrement républicain. Le roi, le fénat & le peuple étoient, pour ainfi dire, dans une dépendance récipro& il réfultoit de cette mutuelle

que;

dépendance, un équilibre d'autorité qui modéroit celle du prince, & qui affuroit en même temps le pouvoir du fénat & la liberté du peuple.

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Romulus, pour prévenir les divifions que la jaloufie, fi naturelle aux hommes, pouvoient faire naître entre les citoyens d'une même république, dont les uns venoient d'être élevés au rang de fénateurs, & les autres étoient reftés dans l'ordre du peuple tâcha de les attacher les uns aux autres par des liaisons & des bienfaits réciproques. Il fut permis à ces plé- D. H. 1. 2. béiens de fe choifir dans le corps du fénat, des Patrons, qui étoient obligés de les affifter de leurs confeils & de leur crédit ; & chaque particulier, fous le nom de Client, s'attachoit de fon côté aux intérêts de fon patron. Si ce fénateur n'étoit pas riche, fes clients contribuoient à la dot de fes filles, au paiement de fes dettes, ou de fa rançon en cas qu'il eût été fait prifonnier de guerre ; & ils n'euffent ofé lui refufer leurs fuffrages s'il briguoit quelque magiftrature. Il étoit également défendu au patron & au client de fe préfenter en juftice pour fervir de témoin l'un contre l'autre. Ces offices réciproques & ces obliga

tions mutuelles furent eftimés fi faints, que ceux qui les violoient paffoient pour infâmes, & il étoit même permis de les tuer comme des facrilèges.

Un tempérament fi fage dans le gouvernement, attiroit de tous côtés de nouveaux citoyens dans Rome : Romulus en faifoit autant de foldats, & déjà cet état commençoit à fe rendre redoutable à fes voifins. 11 ne manquoit aux Romains que des femmes, pour en affurer la durée.. Romulus envoya des députés pour en demander aux Sabins & aux nations voifines, & pour leur propofer de faire une étroite alliance avec Rome. Les Sabins occupoient cette contrée de l'Italie qui eft fituée entre le Tibre, Teveron & les Apennins. Ils habitoient de petites villes & différentes bourgades, dont les unes. étoient gouvernées par des princes & d'autres par de fimples magiftrats, & en forme de république. Mais, quoique leur gouvernement particulier fût différent, ils s'étoient unis par une espèce de ligue & de communauté qui ne formoit qu'un seul état de tous les peuples de cette nation. Ces peuples étoient les plus belliqueux de l'Italie, & les plus voi

fins de Rome. Comme le nouvel établiffement de Romulus leur étoit devenu fufpect, ils rejetèrent la propofition des Romains : quelques-uns ajoutèrent la raillerie au refus, & ils demandèrent à ces envoyés, pourquoi leur prince n'ouvroit pas un afyle en faveur des femmes fugitives, & des Tit. L. I.. efclaves de ce fexe, comme il avoit c. 9. fait pour les hommes ; que ce feroit le moyen de former des mariages, où de part & d'autre on n'auroit rien à fe reprocher.

Romulus n'apprit qu'avec un vif reffentiment une réponse fi piquante; il réfolut de s'en venger, & d'enlever les filles de fes voifins. Il communiqua fon deffein aux principaux du fénat ; & comme la plupart avoient été élevés dans le brigandage, & dans la maxime d'emporter tout par la force, ils ne donnèrent que des louanges à un projet proportionné à leur audace. Il ne fut queftion que de choifir les moyens les plus propres pour le faire réuffir; Romulus n'en trouva point de meilleur que de célébrer à Rome des jeux folennels en l'honneur de Neptune chevalier. La religion entroit toujours dans ces fêtes, qui étoient précédées

D. H. 1. ..

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