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is parlent fans ceffe d'honneur, de bravoure, & dans le vrai, ils paffent chez ceux qui les fréquentent, pour le Peuple le plus traitre & le plus féroce qu'il y ait fur la terre ; & ce qui paroîtra fort fingulier, c'eft qu'ils parlent la langue la plus douce de l'Afie. Ce que le Chevalier de Forbin a dit de la férocité des Macaffars eft exactement vrai, & convient également à tous les Peuples Malais. Plus attachés aux Loix insensées de leur prétendu honneur qu'à celles de la juftice & de l'humanité, on voit toujours parmi eux le fort attaquer le foible; leurs traités de paix & d'amitié ne durent jamais au-delà de l'intérêt qui les leur a fait faire ; ils font toujours armés & toujours en guerre entr'eux, ou occupés à piller leurs voisins.

Cette férocité que les Malais qualifient de bravoure, eft fi connue des Compagnies Européennes qui font établies aux Indes, que toutes fe font ac

cordées à faire un reglement qui défend aux Capitaines de leurs vaiffeaux qui vont dans les Isles Malaires de prendre à bord aucun Matelot de cette Nation, ou tout au plus dans un extrême befoin d'en prendre plus de deux ou trois: on a vu quelquefois de ces hommes féroces embarqués imprudemment en très petit nombre, attaquer dans le moment qu'on y penfoit le moins, un vaisseau, le poignard à la main, & tuer beaucoup d'hommes avant qu'on pût s'en rendre maîtres on a vu des bateaux Malais, armés de vingt-cinq à trente hommes, aborder hardiment des vaiffeaux Européens de quarante canons, pour s'en em parer & maffacrer avec le poignard une partie de l'équipage: l'Hiftoire Malaife est pleine de traits femblables, qui tous annoncent la férocité la plus téméraire.

Le Malais qui n'eft pas ferf eft toujours armé, il rougiroit de fortir de fa maifon fans fon poignard qu'il nomme

criffe; l'induftrie de la Nation s'eft furpaffée dans la fabrication de cet inftrument deftructeur.

Comme il paffe fa vie dans l'inquiétude & dans l'agitation, il ne fauroit s'accommoder d'un habillement ample & large tel qu'on en voit chez tous les autres Afiatiques; les habits du Malais font juftes au corps & chargés d'une multitude de boutons qui les ferrent de toutes parts: on rapporte ces petites observations pour prouver que dans les climats les plus différents, les mêmes Loix donnent des mœurs, des usages & des préjugés femblables : leur effet eft le même relativement à l'agriculture.

Les terres poffédées par les Malais font en général de très bonne qualité, la nature femble avoir pris plaifir d'y placer fes plus excellentes productions, on y voit tous les fruits délicieux de l'Afie, & une multitude d'autres fruits agréables qui font particuliers à ces Isles.

Les Campagnes font couvertes de bois odoriférans, tels que le bois d'aigle ou d'aloës, le fantal & le caffia odorata, efpece de canelle: on y refpire un air embaumé par une multitude de fleurs agréables qui fe fuccedent toute l'année, dont l'odeur fuave pénétre jusqu'à l'ame, & infpire la volupté la plus féduifante; il n'eft point de voyageur qui en se promenant dans les Campagnes de Malacca, ne fe fente invité à fixer fon féjour dans un lieu fi plein d'agrémens, dont la nature feule a fait tous les frais.

Les Isles Malaires produisent beaucoup de bois de teinture, fur-tout du fapan, qui eft le même que le bois de Bréfil: on y trouve plufieurs mines d'or, que les Habitans de Malaca & de Sumatra nomment Ophirs, & dont quelquesunes, fur-tout celles que renferme la Côte Orientale de Celebes & Isles adjacentes, font plus riches que toutes

celles du Pérou & du Bréfil: on y connoît des mines de cuivre naturellement mêlées d'or, que les Habitans nomment tombaga, des mines très abondantes de calin ou d'étain fin, dans les Isles de Sumatra & de Banca; enfin une mine de diamant, à Succadana dans le fud-eft de Borneo Ces Isles poffedent exclufivement le rotin, le fagou, le camphre & les aromates précieux que nous connoiffons fous le nom d'épiceries fines.

La mer d'accord avec la terre, leur fournit la pêche la plus abondante, & de plus l'ambre gris, les perles & les nids d'oifeaux fi recherchés en Chine, formés dans les rochers avec le frai de poiffon, par de petites hirondelles de mer, nourriture pleine de fubftance que les Chinois ont payé long-tems au poids de l'or, & achetent encore à un prix exceffif.

Au milieu de tous ces dons de la nature, le Malais est misérable; parceque la

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