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culture des terres abandonnée aux efclaves, eft un art méprifé : ces cultivateurs malheureux, fans ceffe arrachés aux travaux champêtres par des maîtres inquiets, qui aiment mieux les employer à la guerre & aux expéditions maritimes, ont rarement le tems & jamais le courage de donner à leur terre de bons labours: le pays refte presque tout en friche: on ne lui fait pas produire le riz ou les grains néceffaires à la fubfiftance de fes Habi

tans.

Le Sagou.

L'arbre de fagou fupplée en partie an défaut des grains; cet arbre admirable est un présent de la nature, bien fart pour des hommes incapables de travail, il ne demande aucune culture; c'est un palmier qui croît naturellement dans les forêts à la hauteur d'environ vingt-cinq à trente pieds, il devient quelquefois fi gros qu'un homme a de la peine à l'em

braffer, il fe multiplie lui-même par fes graines & fes rejettons; fon écorce ligneuse a environ un pouce d'épaiffeur, & couvre une multitude de fibres allongées qui s'entrelaffent les unes dans les autres, enveloppant une maffe de farine gomeufe; dès que cet arbre eft mûr & prêt à donner fa fubftance, il l'annonce en fe couvrant à l'extrêmité de fes palmes d'une pouffiere blanche qui tranfpire au travers des pores de la feuille; alors le Malais l'abat par le pied, le coupe en plufieurs tronçons qu'il fend par quartier, il en tire la maffe de farine qui y eft renfermée, & qui eft adhérente aux fibres qui l'enveloppent; il délaye le tout dans l'eau commune, qu'il paffe enfuite au travers d'une chauffe de toile fine pour en féparer tous les fibres lorfque cette pâte a perdu une partie de fon humidité par l'évaporation, le Malais la jette dans des moules de terre de différentes for

mes, & l'y laiffe fécher & durcir : cette pâte eft une nourriture faine, elle fe conserve ainfi pendant plufieurs années.

Pour manger le fagou, les Indiens fe contentent de le délayer dans l'eau, quelquefois ils le font cuire, ils ont l'art de féparer la fleur de cette farine, & de la réduire en petits grains de la forme à-peu-près des grains de riz; ce fagou ainfi préparé eft préféré à l'autre pour les vieillards & pour les infirmes, il eft un excellent remede pour les poitrinaires: lorfqu'il eft cuit dans l'eau pure ou dans le bouillon, il fe réduit en une gelée blanche très agréable au goût.

Quoique le palmier fagoufere fe trouve naturellement dans les forêts, néanmoins les Chefs Malais en font des plantations confidérables, & c'est-là une de leurs principales ressources pour fe nourrir. On en trouve préfentement à Paris, & l'ufage en eft auffi fain qu'agréable.

Les Malais auroient de quoi former les plus beaux vergers du monde,s'ils fe donnoient la peine de raffembler des plants de tous les excellens fruits que la nature leur a donnés : on trouve leurs arbres fruitiers plantés çà & là autour de leurs maisons, & disperfés dans leurs terres fans ordre.

Les Habitans de la grande Isle de Java font un peu plus agriculteurs que les autres Malais, depuis qu'ils font fou mis aux Hollandois. Ces Négocians Scuverains ont profité des défordres occafionnés par leurs loix féodales, pour les mettre tous fous le joug, en détruifant avec art la puiffance des Rois, par ceile de leurs vaffaux, puis celle des vaffaux, par des fecours donnés à propos aux Rois à demi terraffés. Aujourd'hui les Javanois commencent à revenir de l'inquiétude que leur caufoient leurs Loix qu'ils ont prefque perdues, ils cultivent

avec fuccès le riz, le caffé, l'indigo & la canne à fucre, ils élevent dans la partie orientale de l'Isle & dans celle de Madur & de Solor qui en font voisines, des troupeaux de buffles d'une groffeur monftrueuse, dont la viande eft très bonne, & qui font d'un grand fervice pour le labourage; ils y ont auffi des troupeaux nombreux de bœufs de la plus belle & de la plus grande efpece.

Camboye.

Les terres de Camboye & de Tiompfa, voifines des Malais, ne font pas moins favorisées de la nature, elles ont été cultivées & couvertes d'Habitans, on y voit encore les traces des fillons & les ruines des édifices; celles de l'ancienne Ville Capitale font des monumens d'une architecture folide.

Mais les gueres étrangeres & les diffenfions civiles ont anéanti ces Peuples,

on

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