3°. Oeil égaré, Rien ne contribue plus à rendre aux enfans, l'œil égaré, que de leur faire regarder à la fois, une grande foule d'ob jets en mouvement; tels, par exemple, qu'une multitude d'hommes qui fe fuivent les uns les autres, ou un nombre confidérable de gens qui danfent & qui fautent, comme il arrive fouvent à la campagne, dans certaines réjouiffances, où les nourrices portent leurs enfans, Cette multiplicité d'objets fur aucun def quels ils n'ont pas le temps de repofer la vûë, la leur égare fouvent, pour peu qu'ils y ayent de difpofition, & fait qu'ils ne peuvent plus rien regarder que d'une maniere égarée. Ce défaut croît enfuite avec l'âge, & c'eft ce qui eft caufe qu'on voit tous les jours tant de gens qui en vous parlant, & femblant avoir les yeux fur vous ne vous regardent néanmoins pas. Ils ont la vue ailleurs, & vous ne lçauriez dire où ils l'ont; ce qui eft une difformité d'autant plus facheufe, qu'une perfonne qui n'a pas la vûë arrêtée, passe pour l'ordinaire, quoique fouvent à tort, pour n'avoir pas ron plus, l'efprit arrêté, Ainfi Ainfi prenez y garde, peres & meres, & ne fouffrez jamais que les nourrices ou les févreufes de vos enfans les portent ou les menent dans de grandes foules, comme proceffions, & autres concours de monde. Une autre caufe encore qui égare quelquefois la vue des enfans, font ces jouets qu'on leur donne, & qu'on appelle des chaffes, où par le moyen d'une petite ma- . nivelle qu'ils tournent, ils voyent tout. d'un coup paroître diverfes figures qui fe fuivent les unes les autres comme Liévres, Renards, Loups avec un Chaffeur en queuë qui femble les pourfuivre; ils regardent attentivement ces petites figures fugitives, & à force de Tes faire paffer & repaffer devant leurs. yeux, ils fe troublent la vûë. Voilà à quoi l'on ne prend pas garde; & cependant il ne faut quelquefois que cela, pour rendre à certains enfans, la vûë égarée. Il n'y a rien de petit dans l'éducation des enfans, & tant pour le corps que pour l'efprit, tout y eft de conféquence. Au refte, ce n'eft pas toujours de regarder à la fois trop d'objets en mouvement, qui peut rendre la vûë d'un enfant égacée cette difformité vient fouvent auffi de tenir trop long-tems, & Tome II, trop K ttop fréquemment la vûë panchée fur certains objets qui exhalent une odeur ennemie des yeux, comme 1°, fur certaines couleurs fraichement broyées; d'où vient que beaucoup de Peintres ont la vûë mal assurée; 2o. fur des cadavres ouverts; d'où vient que plufieurs Anatomiftes qui font toujours occupés à dif féquer, ont auffi la vûë mal affurée. Je dis plufieurs; car tous les Anatomiftes, non plus que tous les Peintres, ne contractent pas ce défaut, & il y en a plufieurs des uns & des autres, qui ont la vûë très-pofée, ce qui eft dû à la bonne conftitution de leurs yeux. Mais tou jours la chofe eft vraye en général, & je connois, entre autres, un jeune Anatomifte, qui, pour s'être appliqué dès fes tendres années, à faire des diffections, & avoir toujours eu alors, comme il les a encore aujourd'hui, les yeux frappés d'une odeur cadavéreufe, eft devenu un. exemple de ce que j'avance ici, fans parler du teint blême & livide que cette o deur de cadavre lui a procurée, Peres &; meres; dont les enfans embraffent certaines profeffions qui peuvent quelquefois, nuire aux yeux, prenez bien garde s'ils at la vue propre à s'en accommoder |