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Les dents qui paroiffent au-devant de La bouche, & qu'on nomme incifives, ont cela de particulier, qu'à la machoire d'enhaut, elles font plus longues & plus larges, qu'à celle d'enbas, & que· directement fous le nez, elles le font encore davantage. Surquoi j'avertis que fi l'on n'a pas foin de faire obferver cette circonftance, quand on veut rempla cer ces fortes de dents, l'artifice peutfacilement fe découvrir; or c'eft un inconvénient qu'il faut éviter, on ne se fait pas mettre des dents, pour que la chofe fe reconnoiffe: & ce que rappor tent quelques Auteurs qui écrivent que dans l'Ifle de Java, les hommes & les femmes fe font arracher tout exprès les dents, pour en mettre d'or ou d'argent à la place, paroît une fable affez mal imaginée.

*

L'on parle d'un moyen de remplacer des dents, par des dents naturelles, tour comme l'on remplace une plante par une autre qu'on enleve de terre, & que l'on fubftitue dans le lieu de la premiere. Mais il n'en eft pas ici des dents commerdes plantes quoique les unes & les autres croiffent & végetent de la même maniere, & meritent en cela le nom commun

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de plantes. On enfoüit en terre, une jeune tige fraîchement arrachée. Cette tige, quoique dépoüillée de fa racine comme il arrive fouvent alors, reprend en peu de temps.. Mais il n'en va pas. ainfi de la dent; il y faut bien d'autres façons ; & fi ces façons ne rendent pas. impratiquable la tranfplantation dont il s'agit , elles la rendent, du moins, fi difficile, qu'elles ne doivent gueres donner envie à perfonne d'en faire l'expé rience fur foi-même.. C'est de quoi on pourra juger par l'expofé fuivant.

cas

1o, Pour mettre une dent naturelle en La place d'une autre, qui ne fçauroit être confervée; car ce n'eft que dans ce. fans doute, qu'on peut propofer l'opération, il faut arracher dès le moment dans une bouche étrangere, la dent qu'on veut fubftituer, & la choifir bonne, faine, de la même longueur, de la même groffeur, de la même lar geur, & de la même efpece, que celle que l'on veut remplacer.

20. Cette parfaite reffemblance ne fe trouve prefque jamais que dans les dents incifives.

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3Il faut que le nerf de la dent, & ce qui peut refter de fa racine, foient bien vifs.i

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4o Que

4°. Que la perfonne dans la bouche de qui l'on prend la dent à tranfporter, foit une jeune perfonne de douze à quinze ans, extrémement faine, & de même fexe que celle fur qui on veut faire la: tranfplantation..

fo. Il faut commencer par arracher la mauvaise dent, & dès l'inftant qu'on l'a ôtée arracher à l'autre perfonne, la dent faine, puis fans délai,, l'infinuer dans la place de la mauvaise.

6. La dent étant placée, la lier aux dents voifines avec un fil d'or de ducat

7°. La laiffer en cet état, trente jours. au moins, & pendant ce temps-là, ne point eflayer de s'en fervir pour manger.

Quelques-uns prétendent que les dents ainfi tranfplantées, durent très- longtemps, & il fe trouve même des Opé rateurs qui affurent en avoir remifes de puis plus de trente ans, lefquelles tiene nent encore. Mais fi les arbres tranfplans tés ne réüffiffent pas tous, que ne doit on pas craindre ici en mettant une dent; quoique très-faine, dans un lieu, d'où l'on vient d'en tirer une mauvaife, qui peut avoir laiffé en fa place, un levain capable de détruire tout le principe de vie que peut renfermer celle-là? Enco re fi avant que d'inferer la bonne dent,

on:

on avoit le temps de bien laver l'endroit où on la veut mettre, pourroit-il y avoir quelque efpérance; mais on n'a peint cé temps-là Il faut, fi l'on veut réüffir, la tranfplanter dès qu'on a arraché la mauvaife, & ne pas différer d'un moment.

Dans une fi conftante incertitude du fuccès, comment pouvoir fe réfoudre à demeurer des trente jours dans une gêne auffi grande que celle où il faut alors demeurer ?

De plus, n'y a-t-il pas de la cruauté à faire arracher ainfi de la bouche d'un jeune homme, ou d'une jeune fille de douze à quinze ans, des dents bien faines, & des plus apparentes? je dis des plus apparentes; car, comme nous l'avons remarqué, cette opération ne fe peut bien faire que fur les dents incifives qui font celles qui paroiffent le plus.

Il est temps de paffer au dernier article que nous nous fommes propofé dans cette Orthopédie, c'eft-à-dire, à ce qui concerne la langue & la voix, par rapport au parler.

De la Langue par rapport au parler.

Selon nôtre plan, il nous refte, pour terminer cette Orthopédie, à examiner

quel

quelques-uns des principaux vices qui concernent l'organe de la langue & de la voix par rapport au parler. Ces vices font entre autres, le mutifme, l'extintion de voix, une voix de femme dans un homme, & une voix d'homme dans une femme, le bégayement, le bredoüillement, la difficulté de prononcer certaines lettres & certaines fyllabes, la parole entrecoupée, ou courte haleine f'eft de quoi nous allons traiter,

Le Mutifme.

De tous les défauts du corps, il n'en eft gueres de plus affligeant que celui qui nous empêche d'exprimer nos penfées par la parole, & qui ne nous laiffe d'autre reflource pour y fuppléer, que la trifte néceffité des grimaces. Nous ve◄ nons tous au monde muets; mais ce n'eft pas de ce mutifme qu'il s'agit ici. Le mutisme proprement dit, & dont je par le, ne refpecte pas même l'âge le plus propre à l'articulation des fons, & où l'on a le plus de befoin du fecours de la parole. Il peut procéder de différentes caufes; ces caufes font entre autres, ou une mauvaife conformation de la lan gue,, ou une paralyfie de cet organe, ou:

une

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