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Où l'on voit encor plus aifément que les mots voulut, favoir, donna, rendoit, évitant, tenoit, offroit, meditant, démontra, &c. font des verbes actifs, parce qu'ils défignent une action faite par le fujet; & les verbes donnés, pris, réunis, expliqués, des verbes paffifs, parce qu'ils en marquent une reçue par le fujet.

On fera bien aife de favoir ce que c'eft que verbe pronominal, verbe réfléchi, verbe réciproque, & verbe imperfonnel.

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Avant le premier on met toujours deux pronoms perfonnels de la même perfonne pour le faire connoître le fecond marque une action qui rejaillit fur le fujet; le troifieme en défigne une faite par plufieurs fujets qui agiffent les uns fur les autres; le quatrieme enfin ne fe conjugue qu'à la troifieme perfonne du fingulier. Le Colin-Maillard, chanfon charmante fur un air affez connu, renferme dans le troifieme vers du fecond couplet, le verbe pronominal.

Tyrcis un jour, par amufette,
Au gré du fort & du hafard,
Couvroit les yeux à sa Lisette,
En jouant à Colin-Maillard :
Par ce bandeau, dit-il, follette,
A l'Amour vous reffemblez mieux;
Puis il prit un baifer ou deux
Au défaut de fa collerette;
C'eft fait minon, minette
Tu viendras
Quand tu voudras.

Life, impatiente & vive,
S'empreffe d'attraper Tyrcis ;
Cent fois il s'échappe, il s'efquive;

Près d'elle il folatre, il eft pris

} bis.

La belle en éclatant de rire,
A fon tour lui met le bandeau ;
Mais l'Amour, avec fon flambeau,
Guidoit Tyrcis & fut lui dire :

C'eft fait, minon, minette, &c.

Life à l'inftant, d'une cachette,

Fit choix à fa difcrétion ;
Tyrcis devinant fa retraite
La mit à contribution :

Sa main dans un tendre délire,
Cherche & s'égare fur fon sein.
Life veut fe défendre en vain;
Tous fes efforts femblent lui dire
C'est fait, minon, minette, &c.

Le moment étoit favorable,
Et Tyrcis fut en profiter:
Près d'un amant adroit, aimable,
Une belle a beau réfifter;
Quoiqu'elle oppose à sa défaite,
Et des foupirs, & des combats,
Son cœur à l'inftant dit tout bas,
Plein d'une ardeur tendre & fecrete:
C'eft fait, minon, minette, &c.

La refolution inutile, chanfon paftorale, fur l'air du vaudeville de la Rofiere de Salency, fera connoître le même verbe qui fe trouve dans le fecond, le quatrieme & le cinquieme couplet.

Un foir d'été, dans ce vallon,
J'apperçus le berger Sylvandre;
Il répétoit une chanson,

Et je pris plaifir à l'entendre ;

Il chantoit; amufez-vous; mais
Pour être heureux, n'aimez jamais,

Profitant de cette leçon,

Et piqué des rigueurs d'Ifmene,

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Paftoureaux, uniffez vos voix,
Chantez le Dieu de la tendreffe,
Célébrez fes aimables loix;

Mais point aux pieds de ma maîtreffe :
Ou bien chantez notre amour; mais
Gardez-vous de l'aimer jamais.

Les verbes mis, plaignent, font des verbes pronominaux, parce qu'ils font unis à deux pronoms perfonnels.

L'immortel M. de Fénélon joignoit au plus beaux & aux plus heureux dons du génie, les fentiments de l'ame la plus élevée, la plus fen

que pour

fe dé

fible & la plus vertueuse. Une réserve dont on doit favoir gré à ce grand homme, c'est dans les différentes chanfons qu'il a faites laffer, la vivacité de fon imagination n'a jamais Jaiffé échapper aucun trait contre la religion, aucun de ces transports qu'on appelle philofophiques, & aucune faillie licencieufe; le couplet qui fuit en eft une preuve authentique, & vient à l'appui du même précepte: il eft adreffé à Mad. de ***, que le plus beau ciel ne pouvoit ar→ racher à fon boudoir, lorfque la coëffeuse ne l'avoit pas mise en état de paroître à ces promenades d'apparat, qui font les plus cheres délices de nos jolies femmes.

Iris, vous comprendrez un jour
Le tort que vous vous faites?
Le mépris fuit de près l'amour
Qu'infpirent les coquettes.
Cherchez à vous faire eftimer
Plus qu'à vous rendre aimable;
Le faux honneur de tout charmer
Détruit le véritable.

Dans ce couplet qui eft fur l'air Philis demande fon portrait, le verbe faites eft verbe pronominal, parce que les deux pronoms perfonnels font mis également avant lui.

Les poéfies fugitives de M. de Moncrif font pleines d'efprit, de délicateffe & de fentiment, Ses romances portent avec elles l'empreinté de la fimplicité & de la naïveté, caracteres principaux de ce genre de poéfie. Alexandrine en eft une que ce poëte aimable avoit faite fur une dame qui avoit quitté le rouge à vingt-deux ans ;

elle eft fur l'air des folies d'Espagne, & fera connoître le verbe réfléchi, & le verbe réciproque.

Dame d'efprit, de corps qu'elle étoit belle!
Trop belle, hélas! de plus de la moitié!
Comment le ciel rassembla-t-il en elle
Ce qu'on envie, & ce qui fait pitié.

D'Alexandrine, hélas ! voilà l'image:
Pour l'offrir mieux à l'efprit, aux regards,
imaginez, dans un feut perfonnage,
Conti, Rohan, d'Aiguillon & Villars.

Alexandrine, objet tant admirable,
Trefor d'efprit, de talents & d'appas,
Vous aviez donc tout ce qui rend aimable,
Oui, tous les dons, & ne le faviez pas.

On me dira: voyez la belle hiftoire!
On eft charmant, on l'ignore! non, non ;
Au fond du cœur, ne voulant pas le croire,
La plus modefte en a quelque foupçon.

Non, celle-ci ne connoît, ne refpire
Rien que vertu : c'eft fa beauté, fon bien.
Comment fonger aux ardeurs qu'elle inspire!
Elle jugeoit tous les cœurs sur le sien.

Je vois encor, lorfqu'elle alloit au temple,
Les yeux s'ouvrir, & les cœurs fe troubler ;
Un feul moment, fi-tôt qu'on la contemple,
Adieu raifon, il n'en faut plus parler.

L'un fe difoit: moi, sa vertu m'enchante;
Non, fa beauté : c'eft un frêle ornement.
L'autre pensoit : que mon ame eft contente !
J'aime l'efprit, & le fien eft charmant.

O gens
de bien, c'est ainsi qu'on s'abuse !
Refpect, eflime & langage emprunté;

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