tout la Philofophie confifte à écouter la raifon & à fe rendre à la vérité.

Ce qui réfulte de ces réflexions, Monfieur le Vicomte, c'eft qu'il n'y a pas de manière plus anti-philofophique de raifonner, que de donner pour raison de fon incrédulité, les obfcurités & les profondeurs de la Foi, & de prétendre qu'un Philofophe perd fon caractère, & se ravale au niveau des efprits vulgaires, dès qu'il met des mystères & des miracles au nombre de fes certitudes. La raifon dira toujours: Il faut croire les mystères & les miracles, s'ils font VRAIS. Ainfi elle nous repouffera toujours malgré nous vers le côté lumineux de la Religion, où toute intelligence fe trouve blée du poids augufte & vénérable des preuves qui en établissent la vérité.

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Je n'entrerai point dans ce vafte fujèt; il n'est pas de mon deffein, parce que ce n'eft pas-là le point fur lequel il faille fe préffer de vous ouvrir les yeux. Vous tenez moins que vous ne croyez à la fecte

philofophique. Ce qui vous manque pour lui rendre la justice qui lui est dûe, c'est de la bien connoître. Votre eftime pour quelques individus, vous a jufqu'ici aveuglé fur l'efpèce. Vous n'avez vu dans les Ecrivains de l'Incrédulité, que des hommes plus réfolus & plus rapides dans leur marche, que les Philofophcs ordinaires; & d'après quelques vues eftimables qu'ils nous ont présentées fur la Morale, fur la Politique, fur la Légiflation, vous avez cru que leurs fyftêmes irréligieux étoient auffi autant de branches du vrai favoir, & que la Foi n'avoit été mise au rebut, qu'au même titre que toutes les opinions furannées, & comme une myfticité bonne pour le peuple fuperftitieux & ignorant. Une connoiffance plus approfondie de la Religion, auroit fuffi pour vous garantir de cette féduction, & pour vous rendre infiniment fufpects, tous ceux qui ont ofé en entreprendre le décri. Mais ne cherchons point hors de l'Incrédulité même, la rai

fon de nous défier de fes dogmes. Ce que je vous dirai dans la fuite, ne tendra qu'à vous la dévoiler dans fon vrai jour, & à vous éclairer fur la malignité de fa fource, & la perversité de fon efprit & de fon caractère,

TROISIEME DISCOURS.

Perverfité de Porigine & des vues de l'Incrédulité.

S'IL

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'IL n'y avoit que de la vertu fur la terre, Monfieur le Vicomte, & que l'amour de la vérité & de la sagesse fût l'unique paffion de ceux qui l'habitent, rien ne feroit plus étonnant & plus inexplicable, que l'idée qui eft venue à certains efprits, d'attaquer avec fureur une Religion qu'ils avoient trouvée établie fur les plus anciens & les plus inébranlables fondemens, & qui avoit été l'objèt du refpect & de l'adoration de tous les âges.

Comment, en effet, l'Homme, cet être qui fe trouve fi fupérieur à tout ce qu'il voit dans l'univers, & qui fe fent fi vivement & fi invinciblement porté à tout faire fervir à l'aggrandissement, à la félicité, au repos & à la perpétuité de fa

chancelante & fugitive existence, auroitil jamais pu avoir la pensée, & concevoir le deffein de s'armer de toutes les forces de fon raisonnement, pour la ruine d'une Religion qui eft le feul ordre de chofes où s'accompliffe ce vœu immense de fon cœur, & hors de laquelle fa tendance la plus irrésistible & la plus chère, devient la plus infupportable de toutes les abfurdités? Une Religion qui s'offre à lui fous un afpect de grandeur & de majesté, capable de transporter toute intelligence faite pour contempler les grands fpectacles; une Religion qui contente le cœur le plus vafte; qui comble toute fa capacité de défirer & de jouir, par la richeffe de la perfpective qu'elle lui présente, par la folidité, l'abondance & l'élévation de l'efprit qu'elle lui communique; qui ravit fon entendement par la fublimité & la profonde fageffe de la doctrine qu'elle lui apporte; qui remplit fa raison d'une lumière toute divine, fur la gloire de fon origine & de sa destinée; qui lui apprend, pour le rendre fupérieur à tous