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Conservatoire de la splendeur des vierges, qui était sous sa conduite, et y continua, avec trois compagnons qui lui étaient restés, les mêmes exercices qu'il pratiquait avant ses disgrâces, qu'il continua à supporter avec tant de conformité à la volonté de Dieu, et avec une si grande soumission aux ordres de sa Providence, qu'il mérita d'être consolé par l'augmentation de sa communauté, dans laquelle plusieurs sujets d'un mérite distingué demandèrent à être reçus, du nombre desquels étaient le P. Antoine de Collellis, qui, après en avoir fait un des principaux ornements, mourut en odeur de sainteté et dont on imprima la Vie en 1663. Cette vie privée que le P. Caraffa menait dans cette nouvelle maison ne l'empêcha pas de travailler au salut du prochain car, outre qu'il fonda encore un inonastère pour les jeunes filles qui, à cause de leur pauvreté, couraient risque de perdre leur virginité, il s'app'iqua à la conversion des infidèles (qui se trouvaient pour lors plus de vingt mille dans Naples, où ils avaient été menés en esclavage); sans parler de ses charitables soins pour les catéchumènes, dont il fut fait supérieur, non plus que de sa vigilance pour la conduite du séminaire de Naples, dont ayant été fait recteur, il entreprit la réforme, en lui donnant de nouveaux règlements remplis de sagesse et de piété.

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Après avoir ainsi réglé ces maisons, dont on lui avait donné la conduite, et pourvu à l'entretien de celles que sa charité l'avait porté d'établir pour servir de refuge aux pécheresses publiques qui voulaient se convertir, ou aux vierges que la pauvreté pouvait conduire au libertinage, il travailla à l'affermissement de sa congrégation, dont il voulut que la première maison fût dans un lieu solitaire, our servir de noviciat et de retraite aux missionnaires. C'est pourquoi il la fit bâtir à un mille de Naples, au milicu des montagnes, et lui donna le nom de Notre-Dame des-Morts. Il en fonda une autre au diocèse de Caserte, sous le nom de Notre-Dame-du-Mont-Agréable ou del Monte Decoro, à cause qu'elle est située dans une belle solitude. Il en fonda aussi deux autres dans la ville de Naples, l'une sous le titre de Saint-Georges-le-Majeur, et l'autre sous celui de Saint-Nicolas, dont les églises étaient anciennes, mais qui ont été rebâties depuis de fond en comble. I alla ensuite à Rome pour avoir l'approbation de son institut et des règles qu'il avait dressées. Paul V, qui gouvernait pour lors l'Eglise, et qui connaissait sa vertu, donna de grandes louanges à son zèle, et commit la congrégation des régulier pour examiner les règles qu'il avait dressées. Ce pape étant mort quelques jours après, Grégoire XV, qui lui succéda, approuva cet institut sous le titre de Congrégation des Ouvriers-Pieux, et donna pour et effet un bref en 1621. L'intention du fondateur était de donner à sa congrégation ile titre de Doctrine chrétienne, mais les cardinaux que Paul V avait commis pour examiner l'institut et les règlements du P. Caraffa, voyant les differents exercices de

piété et les œuvres de charité des prêtres de cette congrégation, lai ôtèrent le titre de Doctrine chrétienne, et lui donnèrent celui des Ouvriers-Pieux.

Le P. Caraffa, ayant obtenu à Rome ce qu'il souhaitait, s'en retourna à Naples où l'estime que l'on avait de la sainteté de sa vie lui attira des honneurs et des respects si opposés à son humilité, qu'il quittà cette ville pour se retirer dans la maison de NotreDame-du-Mont-Agréable, qui en était éloignée de dix-huit milles, où il passa le reste de ses jours dans des mortifications et des austérités continuelles, auxquelles il joignait un travail et un zèle infatigable pour le salut du prochain. Son humilité était admirable, sa pauvreté extrême, sa patience, sa douceur et sa charité sans pareilles; son esprit était continuellement élevé vers Dieu, dont les grandeurs le ravissaient souvent en extases, dans lesquelles il recevait de si grandes faveurs, qu'on le vit un jour entouré d'une lumière semblable à celle du soleil, Dieu voulant faire connaître par là la sainteté de son serviteur, aussi bien que par le don de prophétie et des miracles qu'il lui avait accordé. Enfin, étant accablé sous le poids de ses fatigues et de ses pénitences, il tomba malade l'an 1653; on le porta à Naples dans sa maison de Saint-Georges, où Dieu voulut encore éprouver sa palience par les grands maux qu'il endura pendant près de deux mois, après lesquels il mourut, le huit septembre, élant âgé de soixante et douze ans, trente et un ans après la fondation de sa congrégation.

Après la mort de ce saint fondateur, sa congrégation fut encore confirmée par le pape Urbain VIII; mais elle n'a pas fait d'autres progrès que celui de l'acquisition de l'ancienne église de Sainte-Balbine, sur le mont Aventin, dans Rome, par la cession que lui en fit le chapitre de Saint-Pierre en 1689. Ces Ouvriers-Pieux prétendent que la cause du peu de progrès qu'ils ont fait vient de ce que, pendant la peste qui affligea la ville de Naples l'an 1653, leurs confrères s'étant offerts au cardinal Filomarini, alors archevêque de cette ville, pour assister les pestiférés, ils moururent tous, à l'exception de deux prêtres et trois clercs.

Ces Ouvriers-Pieux ne font point de vœux ; ils sont gouvernés par un général et quatre consulteurs, qui exercent leurs offices pendant trois ans, après lesquels ils peuvent être encore continués dans le chapitre général, qui se tient tous les ans. Les maisons élisent leurs supérieurs particuliers, qu'i s nomment Recteurs. Quoiqu'ils ne fassent point de vœux, ils vivent néanmoins à la manière des religieux les plus austères; car ils ne portent point de linge et couchent sur des paillasses sans draps. Iis font profession d'une exacte pauvreté; ils ne doivent rien avoir enfermé sous la clef. Une table, un siége et quelques images de papier fout tout Tornement de leur chambre. Ils reconnaissent plusieurs fois la semaine leurs fautes devant leurs supérieurs. Outre le carème de

l'Eglise universelle, ils ont encore celui de l'avent et un autre à la Pentecôte. Ils jeûnent aussi tous les vendredis et samedis de l'année et les veilles des fêtes de NotreSeigneur et de la sainte Vierge. Deux fois la semaine ils prennent la discipline. Tous les jours ils font en commun une heure d'oraison mentale, demi-heure le matin et autant le soir. Tous les ans ils font les exercices spirituels. Ils se lèvent à deux heures après minuit pour dire Malines, et, outre l'office du bréviaire romain, ils doivent dire

PACOME RELIGIEUX de Saint- ). Des religieux de Saint-Pacôme, avec la Vie de saini Pacôme, abbé, premier instituteur des congrégations religieuses.

Saint Antoine a bien, à la vérité, donné quelque perfection à la vie cénobitique; mais l'on doit donner à saint Pacôme la gloire de l'avoir affermie, par l'union de plusieurs monastères, qui, quoique gouvernés par des supérieurs particuliers, étaient néanmoins tous soumis à un abbé ou supérieur général; c'est ce qui a formé la première congrégation religieuse.

Il naquit dans la haute Thébaïde vers l'an 292; son père et sa mère étaient des païens qui l'élevèrent dans leur superstition; mais dès son enfance il témoigna lant d'opposition à l'idolâtrie, qu'ayant goûté du vin offert aux Idoles, il le rejeta à l'heure même; et un jour que ses parents l'avaient mené à certains sacrifices qu'on faisait aux faux dieux pour consulter leurs oracles, il donna tant de frayeur aux démons, qu'ils ne voulurent jamais parler devant lui: de quoi les sacrificateurs étonnés et irrités, s'écrièrent qu'il fallait chasser cet ennemi de leurs dieux.

A l'âge de vingt ans il fut pris pour être enrôlé dans l'armée de l'empereur Maximin qui se préparait à faire la guerre à Constantin et à Licinius. On l'embarqua sur un vaisseau avec plusieurs autres, et le soir ils arrivèrent dans une ville, dont les habitants touchés de compassion de la plupart de ces soldats, qui étaient des jeunes gens qu'on menait à la guerre contre leur gré, leur donnèrent tous les secours dont ils avaient besoin. Pacôme demanda qui étaient ces gens si charitables? On lui répondit que c'était des chréliens. Il demanda ce que voulait dire ce nom, et quel Dicu ils adoraient. On lui dit qu'ils n'en reconnaissaient point d'autres que celui qui a fait le ciel et la terre, et son Fils unique Jésus-Christ en qui ils croyaient, et qu'ils espéraient une récompense en l'autre vie pour les biens qu'ils leur faisaient. Pacôme, touché de ce discours, se retira à l'écart, et élevant les yeux et les mains au ciel, il promit à Dieu de le servir parfaitement et de s'attacher à lui tout le reste de sa vie, s'il lui donnait une connaissance de sa divinité. Il continua son voyage, et aussitôt qu'il res(1) Voy., à la fin du vol., n° 9.

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sentait quelque mouvement déréglé de la na. ture corrompue, il avait recours à la prière.

La guerre étant finie et les soldats ayant été congédiés, il retourna en Thébaïde. It alla à l'église d'un bourg nommé Chénobosque, où il fut fait catéchumène, et peu de temps après il reçut le baptême. Ayant ensuite appris qu'un vieillard nommé Palémon, servait Dieu dans le désert, il alla le trouver à l'heure même, et frappa à la porte de sa cellule; le vieillard l'entr'ouvrit et ayant su qu'il voulait être solitaire, il lui dit d'un ton sévère que la vie monastique n'était pas une chose facile; que plusieurs l'avaient embrassée, mais n'avaient pas persévéré; qu'il no pouvait pas être reçu dans son monastère, à moins qu'il n'eût fait quelque pénitence dans un autre ; mais qu'il considérất qu'il ne mangeait que du pain et du sel, et qu'il n'usait jamais d'huile, qu'il ne buvait point de vin, qu'il veillait la moitié de la nuit, qu'il l'employait à méditer l'Ecriture sainte, à psalmodier, et qu'il la passait même quelquefois sans dormir. Ccs paroles firent trembler Pacôme; toutefois il s'engagea à tout avec lant de foi que Palémon lui ouvrit la porte et lui donna l'habit monastique, ce qui arriva au plus tard l'an 314.

Il demeura quelque temps avec ce saint vieillard, travaillant à filer du poil et à en faire des cilices pour avoir de quoi nourrir les pauvres; mais s'étant avancé assez loin dans un canton nommé Tabenne, comme il était en prière, il entendit une voix qui lui dit Demeure ici, Pacôme, et fais y un mo¬ nastère; car plusieurs te viendront trouver, et tu les conduiras selon la règle que je te donnerai. Aussitôt un ange lui apparut et lui donna une table où était écrite cette règle, qui y fut observée depuis.

Il communiqua cette vision à saint Palé ! mon, qui le fortifia dans ce dessein, et lui conseilla d'exécuter l'œuvre que Dieu lui ordonnait d'entreprendre. Il fut même avec lui jusqu'à Tabenne, et ils y demeurèrent quelque temps dans une petite maison qu'ils y bâtirent ensemble. Palémon retourna ensuite dans son ermitage, où il mourut dans une heureuse vieillesse. Saint Pacôme l'ayant élé visiter, il l'assista jusqu'à la mort et lui donna la sépulture.

Pacôme étant retourné à Tabenne, Jean

son frère, qui s'était fait chrétien, l'y vint trouver. Ils vécurent ensemble dans une trèsgrande austérité. Ils donnaient aux pauvres le fruit de leur travail sans rien réserver pour le lendemain. Ils ne changeaient d'habits que pour la nécessité de les laver. Pacôme portait continuellement un cilice, et ne dormait que debout dans sa cellule sans s'appuyer contre la muraille. Jean étant mort, il demeura quelque temps seul et souffrit quantité de tentations et d'illusions du démon. Ccpendant il bâtissait un monastère assez spacieux pour recevoir cette grande multitude de moines, suivant la promesse qu'il avait reçue du ciel. Enfin, le temps étant venu qu'elle devait s'accomplir, un ange lui appaFut une seconde fois pour l'en avertir. Il commença à recevoir ceux qui se présentaient a lui pour embrasser l'état monastique. Il eut bientôt jusqu'à cent disciples, dont les Trois premiers furen! Psentaèse, Sur et Ploïs. Les plus distingués ensuite furent Pécuse, Corneille, Paul, un autre Pacôme, et Jean. Il les conduisit suivant la règle que l'ange lui avait apportée du ciel. Il était permis à chacun de manger et de jeûner selon ses forces, et on mesurait le travail à proportion. Als logeaient trois à trois, en différentes cellules; mais la cuisine et le réfectoire étaient en commun. Leurs habits consistaient en une tunique de gros lin faite en forme de sac, nommée lebionne; elle n'avait point de manches, allait jusqu'aux genoux, et était serrec d'une ceinfure (1). Ils avaient par-dessus une peau blanche corroyée, d'un cuir de chèvre qu'ils appelaient melottes, quoique ce nom apparfienne plutôt à une peau de mouton. Elle couvrait les épaules depuis le cou, descendait par derrière jusqu'au bas des cuisses, et leur lêle était couverte d'un capuce de laine de la manière que les enfants de ces quartiers-là Je portaient. Il était fort petit et sans pol, D'allait que jusqu'au baut des épaules, et etait garni de petites croix. Ils avaient cet Jabit lant de nuit que de jour; mais venant à la communion, ils étaient la melotte et la ceinture, ne gardant que la tunique. Pendant Je repas ils se couvraient la tête de leurs caJuces pour ne se point voir les uns les auires, et observaient le silence. Les hôtes ne mangeaient point à la communauté, et les novices étaient éprouvés pendant trois ans.

Saint Pacôme animait ses religieux à l'observance de la règle plus par ses exemples que par ses paroles. Tout le monastère était divisé en vingt-quatre troupes, don' chacune portait le nom d'une des lettres de l'alphabet grec, avec un rapport secret de ceux qui la compo aient. Les plus simples, par exemple, étaient rangés sous l'iota, les plus dili iles à conduire sons le ri, afin que l'abbé pût aisément s'informer de l'état de chacun dans une si grande multitude, en interrogeaat les supérieurs par ce langage mystérieux qui 'était connu que des plus spirituels. Enfin, ange qui parlait à saint Pacôme, lui ordonna de fure douze oraisons le jour, douze le soir,

45 Voy., à la fin du vo'., no 10 et 10 bis.

et douze la nuit. Il trouvait que c'était peu; mais l'ange lui répondit que c'était afin que les faibles les pussent accomplir sans peine el que les plus parfaits n'avaient pas besoin de cette loi, parce qu'ils ne cessaient de prier dans leurs cellules.

Ses disciples augmentant de jour en jour, il bâtit un second monastère à Baum ou Proų, qui n'était pas éloigné de celui de Tabenne, quoiqu'il fut dans un autre diocèse. Ensuite Eponyme, abbé de Chenobosque, et les religieux de Monchose, s'étant offerts à lui avec leurs monastères, il es reçut et établit parmi eux son observance. A ces quatre monastères, il en joignit encore trois autres; savoir, celui de Tismène, ou de Mène, près la ville de Panos, celui de Tase ou de Thèbes, et celui de Pachum ou Chuum aux environs de Lasophe. Tous ces monastères joints ensemble formèrent une congrégation parfaite, qui avait son abbé ou supérieur général, el mène son économe ou procureur pour l'administration du temporel. On y faisait la visite tous les ans on assemblait un chapitre gé néral où on faisait élection des officiers; eile monastère de Baum, qui était le plus considérable, fut regardé comme le chef de l'ordre. Ce fut la première congrégation religieuse qu'on a appelée de Tabenne, à cause du premier monastère qui fut bâti en ce lieu. Saint Pacôme en fonda aussi un pour des filles. L'occasion en vint de sa propre sœur qui, étant venue pour le voir, et n'ayant pu oblenir cette consolation (car il ne parlait jamais aux femmes), suivit le conseil qu'il lui donna par le portier du monastère, de travailler à se consacrer elle-même tout entière à Dieu. Il lui fit donc bâtir une cellule dans un lieu appelé Men, un peu éloigné du monastère de Tabenne, où elle se vit bientôt mère de ¡lusieurs filles qui suivirent son exemple. Palla le dit qu'elles étaient au nombre de quatre cents vers l'an 420. Saint Théodore, successeur de saint Facôme, en fonda un autre auprès de Pabau, en un lieu nommé Bechré. Personne n'allait les visiter sans permission particulière, hormis le prêtre et le diacie destinés pour les servir, qui n'y allaient même que les dimanches. Les religieux qui avaient quelques parentes parmi ces saintes religieuses obtenaient la permission de les aler voir accompagnés de quelqu'un des plus anciens et des plus spirituels. His voyaient d'abord la supérieur, et puis leurs parentes en présence de la sup rieure et des principales de la maison, sans lui faire ni en recevoir aucun présent, et sans manger en ce lieu. Les religieux allaient faire leurs bâtiments et les assister dans leurs autres besoins, con uits par quelqu'un des plus sages et des plus graves; mais jamais ils ne buvaient ou ne mangeaient chez elles, revenant toujours à leur monastère à l'heure du repas. Leur supé i ur leur envoyait du lin et de la laine dont elles faisaient, suivant l'ordre du grand écono.ne, les étoffes nécessaires pour elles et pour les religieux; et quand quelqu'une était morte,

on apportait le corps jusqu'à un certain endroit où les religieux, en chantant, venaient te prendre, et l'allaient enterrer sur la montagne où était leur cimetière.

Vanus, évêque de Panos, ayant écrit à saint Pacôme pour le prier de venir fonder des monastères auprès de sa ville, il lui accorda sa demande. En y allant, il visita couX qui étaient sous sa conduite; et quand il fut arrivé à Panos avec ses moines, l'évêque le reçut avec un très-grand respect, et lui donna thes places pour bâtir ses monastères. Notre saint y travailla avec joie; mais comme on élevait un mur de clôture, quelques personnes malintentionnées venaient la nuit abattre ce que l'on avait construit pendant le jour. Le saint exhortait ses disciples à le Souffrir avec patience; mais Dieu en fit jus tice. Ces méchants s'étant assemblés pour continuer leur crime, furent brûlés par un ange, et consumés, en sorte qu'ils ne parurent plus. Le bâtiment étant achevé, saint Pacôme y laissa des moines auxquels il donna un supérieur, et demeura dans ce monastère un temps assez considérable pour y mieux établir la discipline régulière, à cause qu'il n'était pas éloigné de la ville. Il retourna enSuite à Tabenne, où Dieu voulant enfin consommer ses travaux, il tomba malade avant la fête de Pâques. Deux jours avant que de mourir, il fit assembler tous ses frères; et, après leur avoir donné quelques instructions pour leur conduite, il leur nomma Petronne, l'un d'entre eux, comme le plus digne pour lui succéder, et il mourut le quatorzième jour de mai de l'an 348.

Il eut près de neuf mille moines sous sa conduite, dont le nombre augmenta encore après sa mort. Mais dans la suite cet ordre s'est entièrement aboli, les religieux de saint Pacôme et presque tous les autres d'Orient ayant embrassé la règle de saint Basile, ou s'étant rangés parmi ceux qui regardent saint Antoine pour leur patriarche. Il y a néanmoins de l'apparence que l'ordre de saint Pacôme subsistait encore avec éclat vers le milieu du x siècle, puisque Anselme, évêque d'Havelberg, dont nous avons déjà parlé, dit avoir vu à Constantinople, dans le monastère de Philanthropos, cinq cents moines de l'ordre de Saint-Pacôme.

Rosweide, Vit. PP. Bolland, Act. SS. 14 Maii. De Tillem. Mém. pour l'hist. ecclés., tom. VII et VIII. Fleury, Hist. ecclés., tom. Ill et IV.

PAIX (BÉNÉDICTINES RÉFORMÉES DE
NOTRE-DAME de la).

Des religieuses Bénédictines Réformées de Notre-Dame de la Paix à Douai, avec la Vie de la Révérende Mère Florence de Verguigneul, leur réformatric..

Le monastère de Notre-Dame de la Paix à Douai, d'où plusieurs autres monastères de Flandre on tiré leur origine, est redevable de son établissement à la Mère Florence de Verguigneul, autant recommandable par l'éclat de ses vertus que par la noblesse de son sang. Elle était fille de François de Vergui

gneul et de Gertrude de Daure, tous deux issus des plus nobles et plus anciennes familles d'Artois. Elle naquit le 24 janvier 1559, el reçut sur les fonts de baptême le nom de Florence. Dès les premières années de sa vie elle donna des marques de la sainteté à laquelle elle devait un jour arriver, et cela par la fidélité qu'elle avait à correspondre à la bonne éducation qu'elle recevait de ses parents, qui n'oubliaient rien pour l'élever dans la pratique des vertus et dans les exercices convenables à une personne de son sexe et de sa qualité.

Son père, lui voyant de si heureuses dispositions pour le bien, se trouvant apparemment chargé d'une grosse famille, jela les yeux sur elle pour, en soulageant sa famille, eu faire un sacrifice au Seigneur. C'est pourquoi il pria l'abbesse des chanoinesses de Monstier-sur-Sambre, qui était sa parente, de lui donner la première place vacante dans son chapitre; ce qui lui ayant été accordé, il y conduisit la jeune Florence, qui n'y fut pas plutôt reçue, qu'elle s'attira le cœur de toules celles qui la pratiquaient, tant par sa complaisance pour tout le monde que par son amour pour les pauvres, par sa charité pour les malades et pour les affligés, dont elle préférait la compagnie à tout ce qui a coutume de faire plaisir aux jeunes personnes de son âge.

Des vertus si peu communes dans une jeune novice qui pouvait déjà servir de modèle aux plus anciennes chanoinesses de ce chapitre, lui gagnèrent tellement l'estime et l'amitié de son abbesse, qu'elle l'aurait faite sa coadjutrice, si Dieu qui la destinait à un geure de vie plus parfait n'en eût disposé autrement en la retirant de son abbaye (qui était trop exposée aux fureurs de la guerro qui affligeait la Flandre), pour la faire re-.. tourner chez ses parents, dont il se servit pour l'exécution des grands desseins qu'il avait sur sa servante car comme son père é ait un gentilhomme fort réglé et fort jaloux de l'honneur de sa maison, le soin qu'il eut que ses filles ne fréquentassent aucune compagnie qui ne leur fût profitable pour la vertu, fit que Florence méprisa peu à peu les vanités du monde et s'attacha tellement aux exercices de la piété, qu'elle commença à changer le goût qu'elle avait pour les visites. et pour les conversations en celui de la lecture des livres spirituels et de l'oraison mentale. Jusque-là cette sainte fille n'avait encore eu aucun dessein de quitter son état de chanonesse; mais un tremblement de terre qui arriva en 1580, et qui mit la terreur dans les esprits les plus intrépides, fit une telle impression sur son cœur, qu'elle prit la résolution de quitter le monde et de se faire religieuse, commençant dès lors à accoutumer son corps à la pénitence la plus rigou-i reuse, afin de trouver le joug du Seigneur plus léger et plus supportable, lorsqu'elle serait obligée à le porter par les vœux de la religion; en quoi elle fut traversée par le démon, qui, prévoyant les fruits que devaient produire les exemples d'une vertu si con

sommée, lui représentait les douceurs dont elle jouirait, si elle retournait à Monstier, où elle était aimé de l'abbosse et de toutes les chanoinesses, et les rigueurs de la vie qu'elle se proposait d'embrasser; mais l'amour de Dieu l'emporta toujours sur les attaques du démon, qui ne servirent qu'à la fortifier dans sa résolution, et à augmenter tellement son zèle et sa ferveur, que, ne pouvant plus cacher ce qui se passait dans son cœur, elle le déclara á sa sœur, qui, charmée des transports d'amour dont Florence était embrasée, se détermina à la suivre dans sa résolution, et le lui promit.

Après que Florence cut passé deux ans dans cel esprit de piété et de dévotion, son désir augmentant de jour en jour, elle prit enfin la résolution de déclarer son dessein et celui de sa sœur à son père, qui, les aimant tendrement, ne voulut pas s'opposer à leur désir, mais ne voulut aussi leur donner son consentement qu'après les avoir éprouvées en toutes manières: ce qui n'ayant pas été capable d'ébranler leur constance, ce pieux gentilhomme leur permit d'entrer dans la célèbre abbaye de Flines, où elles furent reçues sur la fin de septembre de l'an 1583. Il serait trop long de rapporter tous les exemples de vertus que ces nouvelles épouses de Jésus-Christ donnèrent pendant leur noviciat, qui dura deux ans, à cause de la grande jeunesse de la sœur de Florence, qui était sa cadete de neuf ans, n'en ayant que quatorze lorsqu'elle entra dans l'abbaye de Flines, dont l'abbesse ne les reçut qu'à condition qu'elles feraient profession ensembl; ce qu'elles firent le 15 de juin de l'an 1585.

Lorsque Florence se vit engagée par ses vœux à travailler avec plus de zèle et de forveur à la perfection de son âme, elle commença par éloigner de son esprit et de son cœur le reste des affections qu'elle pouvait avoir pour les choses de la terre, se privant des choses mêmes les plus licites : ce qui lui altira beaucoup de murmures de la part de sa sœur et des autres religieuses, dont tous les discours ne furent pas capables de lui faire rica diminuer de ses pratiques de pénitence et de mortification, auxquelles elle aurait bien souhaité attirer toutes les religieuses de sa maison, en leur faisant embrasser l'étroite observance : ce qui était d'autant plus difficile, que les guerres avaient introduit beaucoup de libertés dans son monastère, où, de cent religieuses qui en composaient la communauté, il n'y en avait que fort peu qui fussent disposées à la réforme, à laquelle elle se contentait d'exciter les autres par ses pratiques de pénitence, ne mangeant que fort peu, dormant encore moins, Travaillant beaucoup, et priant continuellement avec tant de ferveur et tant de larmes, qu'elle mérita enfin d'être consolée par la sainte Vierge, qui, dans une de ses oraisons, l'encouragea à entreprendre la réforme, en lui disant: Que crains-tu, fille de peu de foi? mon Fils est tout puissant; je prends cette affaire en ma protection, et le réponds qu'elle

arritera.

Ces paroles, qu'elle assura avoir entendues de la bouche de la sainte Vierge, firent une telle impression sur son cœur, qu'elle eu conçut une sainte hardiesse pour exciter ses sœurs à la pratique des vertus et à l'observance parfaite de la règle. Il y en eut quatre qui suivirent ses conseils, et se résolurent de mettre la main à l'œuvre sitôt qu'el'es en trouveraient l'occasion. L'abbé de Clairvaux é ant venu faire sa visite dans leur monastère sur la fin de l'anuée 1599, elles lui communiquèrent leur dessein, qu'il approuva, leur conseillant de chercher un bienfaiteur qui leur donnât une maison, et leur assignât quelques rentes pour pouvoir subsister: co qui leur réussit par le moyen du P. Thomas, Jésuite, qui en parla à un de ses amis, qu'il connaissait en état de leur faire ce plaisir. A peine ce serviteur de Dieu, qui s'appelait Créancier, eut-il écouté la proposition du P. Thomas, qu'il quitta la ville de Bapaume, où il était greffier, et vint s'établir à Douai, où il travailla fortement à l'érection d'un nouveau monastère, après avoir excité une jeune veuve fort dévote et fort riche à l'aider dans l'exécution de ce pieux dessein, qui toucha tellement le cœur de cette sainte femme, qu'après avoir pris les mesures nécessaires pour s'assurer du consentement de son père et de sa mère, qui vivaient encore, elle promit à M. Créancier d'acheter une maison à ses dépens.

Après que M. Créancier eut fait savoir une si bonne nouvelle à madame Florence, il travailla à obtenir les permissions de leurs Altesses Albert et Isabelle d'Autriche, et celle de l'évêque d'Arras : ce qui lui fut accordé après beaucoup de voyages qu'il filJut faire pour ce'a, aussi bien que le consentement des supérieurs de l'ordre de Citeaux, qu'il obtint fort difficilement.

Outre les religieuses que la Mère Florence avait gagnées pour la réforme, et qui étaient encore avec elles dans l'abbaye de Flines, en attendant l'érection du nouveau monastère, cette jeune veuve, dont nous venons de parler, assemblait une autre communauté de jennes demoiselles, qui attendaient aussi avec beaucoup d'impatience le moment de se consacrer à Dieu dans ce nouveau monastère, que l'on commença à bâtir dans un endroit de la ville le plus reculé : ce qui était conforme aux inclinations de la Mère Fiorence et de ses filles, qui auraient souhaitė être dans un désert éloigné de tout commerce du monde. Pendant que l'on travaillait à la construction des bâtiments nécessaires cette nouvelle communauté, toutes ces sainles filles s'exerçaient dans les exercices de la piété et dans la pratique des observances dont elles devaient faire profession. Lorsque ces mêmes bâtiments furent plus avancés, on songea à faire l'élection d'une supérieure. Toutes les postulantes s'étant assemblées pour cet effet chez M. Créancier, par ordre de l'évêque d'Arras, qui avait envoyé pour ce sujet son archidiacre à Douai, et les religieuses de Flines ayant envoyé leurs suffraesar écrit, le sort tomba sur Mme Cous

à

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