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» mettre au lit. En lifant la lettre de » fon épouse, Philippe parut un peu »ému, fit une courte réponse, ne >> donna aucun ordre, & fe coucha. » Ce qui s'étoit paffé ne tranfpira à » la Cour de Guadalaxara que le len » demain, fur les dix heures du ma» tin. On peut imaginer quel fut l'é» tonnement général. Perfonne n'o» foit parler. Tout le monde, pour » juger des fentiments du Roi, atten> doit la nouvelle de ce que fa réponse » à la Reine auroit produit. Elle ar» riva fort tranquille la veille de Noël. » Philippe la reçut comme s'il ne s'é» toit rien paffé, la conduifit à la » chapelle, où le mariage fut célébré » de nouveau, de-là dans la chambre, » où ils fe mirent au lit à fix heures » du foir, & fe releverent pour la » Meffe de minuit. Le jour de Noël, » le Roi déclara qu'il n'y auroit au>> cun changement dans la Maifon de » la Reine, ce qui tranquillifa tout » le monde; & de ce moment il ne » fut non plus queftion à la Cour de » la Princeffe des Urfins, que fi elle » n'y eût jamais été connue. En don»nant à fes neveux la permiffion

1714-151

1714-15.

Lettre

Madame

non, t. 7,

» d'aller la joindre, Philippe les char » gea d'une lettre, par laquelle, fans » lui marquer aucun regret fur la ma»niere défagréable dont la volonté » de la Reine s'étoit exécutée, il di» foit feulement qu'il n'avoit pu fe » refufer au defir de fon époufe, & » que fes pensions feroient exacte»ment payées'

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Ce fut là toute la confolation! de Mainte qu'elle apporta à Saint-Jean-de-Luz, le 14 Janvier 1715.,, J'y fuis, écrit7. 189. elle à Madame de Maintenon, dans® une petite maison fur le bord de la ,,mer. Je la vois fouvent agitée & ,, quelquefois calme: voilà les Cours,

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voilà ce que j'ai vu, voilà ce qui „, eft arrivé, voilà ce qui excitera votre " généreufe compaffion". Mais fi Madame de Maintenon, comme ancienne amie, en eut quelque pitié, elle ne put faire adopter fes fentiments par Louis XIV. Il eft même vraisemblable que la difgrace de Madame des Urfins vint de la Cour de France peut-être imaginée & conduite par Alberoni, qui avoit tout à craindre de la Camerera major, s'il étoit vrai qu'il eût brufqué le mariage malgré

fa défenfe. Il aura excité le reffentiment de Louis XIV, qu'il aura trouvé 1714-15¿ difpofé à punir Madame des Urfins de l'empire exclufif qu'elle prenoit fur fon petit-fils, de la hardieffe qu'elle avoit eue de ne lui communiquer, fur l'alliance de Parme, que les chofes dont l'étroite bienféance ne lui permettoit pas de faire myltere, & de ce que l'ambition de devenir Souveraine lui avoit fait for mer des demandes inconfidérées, & fufciter, de la part de l'Espagne, des obftacles à la paix de Raftadt, qui penfa manquer par fon opiniâtreté à vouloir obtenir une Principauté. Pour ces raisons, auxquelles le grandpere a pu ajouter la néceffité d'éloigner cette intrigante de Philippe, s'il defiroit la paix dans fon nouveau mariage, il aura exigé le facrifice de la Favorite, & la Princeffe de Parme fe fera volontiers prêtée à être l'inftrument de la difgrace d'une femme qui, après avoir voulu lui mettre la Couronne d'Espagne fur la tête, s'étoit efforcée de la lui ôter.

Il faut néanmoins convenir qu'il Mémoires y eut bien de la dureté dans la ma

de Noail ·les, t. 4,

p. 285.

niere, & que le Roi d'Espagne, fi 1714-15 les Rois font obligés à la reconnoiffance, auroit dû commander plus d'égard pour une perfonne à laquelle il avoit des obligations effentielles. Madame des Urfins avoit le talent des affaires avec celui de l'intrigue, de l'élévation dans les fentiments avec des petiteffes de vanité, beau» coup de zele pour fes Maîtres avec » la jaloufie de la faveur; moins

دو

de vertus & d'agréments que Ma» dame de Maintenon, mais plus de » force d'efprit & de caractere. Si » elle fit des fautes, elle rendit auffi » de grands fervices, car elle fut le » confeil & le foutien d'une jeune

Reine fans expérience, qui fe fit » adorer de fes peuples, qui anima » le Roi dans les circonftances les » plus orageufes, & le rendit fupé»rieur à toutes les tempêtes. Elle fut » intrigante, altiere, ambitieuse. » Combien de Miniftres célebres l'ont » été de même ? Mais fon courage » & fa réfolution au milieu des pé»rils extrêmes du Monarque, con» tribuerent beaucoup à le maintenir » fur le Trône ”.

de Mainte

de Noail

Louis XIV ne voulut pas qu'elle fe fixât en France. Ce fut alors que 1714-15. Pon fut à qui étoit definé le fuperbe, Lettres Chanteloup. Elle l'abandonna à d'Au non, t. 7 bigny qui l'avoit fait bâtir (1), & fe p. 192. retira à Rome, où le Pape avoit d'a- Mémoires bord fait difficulté de la recevoir. Elle les, t. 47 y prolongea fa carriere jufqu'à un âge P. 285. très-avancé, menant une vie obfcure, mon, t. 3. exactement payée de fes penfions, p. 225. les feuls débris de fa grandeur paffée. Ainfi finit le fonge un peu long de fa faveur.

Saint-Si

Ducheffe

Celui de la vie qui venoit d'être Déforfi court pour tant de Princes, s'a- dres de la brégea auffi pour Charles, Duc de de Berri. Berri, qui mourut comme la feue Saint SiReine d'Efpagne, fa belle-foeur, au mon, 1.2, mois de Mai de l'année 1714, à P.59, 156. l'âge de vingt-huit ans. Il laiffa une veuve de vingt-deux, dont il avoit beaucoup fouffert ; & quand la mort l'enleva, il étoit prêt à prier fon grand-pere de l'en délivrer: cepen

(1) D'Aubigny y vécut en grand Seigneur, & le laiffa, après fa mort, à une fille unique qui époufa le Marquis d'Armentieres.

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