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Mais elles ne lui font point reprochées : & la douceur incomparable du pafteur fait préfque autant d'impreflion fur fa brebis, que l'évidence de fa réfurrection, attestée par les plaies mêmes qui ont causé fa mort. 8. Cette union de la croix de JE S U SCHRIST avec fa gloire, & avec la fouve raine puiffance où il eft entré en prenant place à la droite de fon Pere, doit nous perfuader pleinement qu'il eft tel dans le ciel qu'il a été fur la terre: qu'il eft tel pour nous dans fa gloire qu'il a été fur la croix : qu'il nous porte dans fes mains & dans fon cœur, comme il nous y portoit lorsqu'il a été bleffé & mis à mort pour nous; & que notre fouvenir lui eft auffi préfent que fes plaies lui font préfentes à lui-même, & par lui à fon Pere.

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CHAF. V.

cc Luc. 24 for

9. Mais pour rendre notre efpérance en lui ferme & immuable, fuivons-fe jufqu'au moment où il quitte la terre pour s'élever dans le ciel. Examinons fes derniers fentimens. Soyons témoins de fa derniere action. « Il mena, dit l'Evangile, jufqu'à Béthanie, jufqu'à la montagne des Óli- « ves, fes difciples : & levant les mains, il « les benit, & en les beniffant, fe sépara « d'eux, & fut enlevé au ciel «. C'est ainfi que finit l'Evangile. JESUS-CHRIST benit fes difciples, & dans eux benit tous ceux qui le feroient jufquà la fin des fiecles. Ce fut en les beniffant qu'il les quitta. Ce fut en les beniffant qu'il monta au ciel; & qu'il alla s'affeoir à la droite de fon Pere.

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C'eft ainfi que celui en qui toutes les nations doivent être benies, a quitté la terre.. Peut-on douter qu'il ne continue ce qu'il a fait en fe séparant de nous; & pouvons

'CHAP. VI. nous regarder autrement JESUS-CHRIST que comme préparé à nous benir, & comme nous ayant été donné par fon Pere pour nous benir: felon cette parole de faint Pierre vobis Deus fufcitans Filium fuum mifit eum benedicentem vobis. » C'est pour » vous que Dieu a reffufcité fon Fils; & il » vous l'a envoié pour vous benir.

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10. Voilà les fondemens & les motifs de notre efpérance en JESUS-CHRIST. Ils ont été traités avec un peu d'étendue, (quoique par rapport à la dignité du fujet ce ne foit qu'un leger effai) parce que c'eft très-inutilement qu'on parle de JESUS-CHRIST & du myftere de fa croix, fi on ne lui eft pas uni; & que le lien qui nous attache à lui eft une vive espérance, dont la foi eft la ra cine, & dont l'amour eft le fruit.

CHAP, VII,

CHAPITRE VII.

JESUS-CHRIST crucifié eft la plus grande preuve de l'amour que Dien a pour nous, & le motif le plus preffant pour nous porter à l'aimer.

ARTICLE PREMIER.

JESUS-CHRIST crucifié eft la plus grande preuve de l'amour que Dieu a pour nous.

§. I. Il y a prefque dans tous les hommes un fond d'incrédulité d'hésitation, qui les fait douter fi Dieu les aime, & qui les empêche eux-mêmes de l'aimer; en quoi pourtant confifte toute la Religion.

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Il y a une fi prodigicufe inégalité en

tre Dieu & l'homme, une fi grande difproportion entre nos idées & les fentimens de Dieu à notre égard, que les perfonnes qui connoiffent peur la religion, & qui n'y font pas affez affermies, ne fçauroient fe perfuader que Dieu nous aime af fez

pour vouloir être aimé de nous. Il eft, difent-elles la plénitude même, la félicité même, le bien effentiel & infini. De quelle utilité lui fommes-nous ? Que pouvonsnous ajouter à fon bonheur ? En quoi, &

CHAP. VII. fous quels rapports ferions-nous l'objet de fon amour? Sa fainteté met encore plus de différence entre lui & nous, que fes autres attributs. Nous fommes injuftes, & conçus dans l'injuftice. Qu'y a t-il d'aimable en nous; Qui d'entre les hommes nous aimeroit, fi nous en étions bien connus ? Avec toute l'inclination que nous avons à nous cacher tous nos défauts, ou à les excufer nous nous fomines infupportables à nousmêmes. Et que fommes-nous donc aux yeux

de Dieu ?

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2. D'autres vont plus loin ; &, comme ils ont obfcurci par des paffions l'idée de leur premiere grandeur, dont ils ne confervent que des reftes fans en connoître l'ufage; ils fe méprifent à l'excès, & ils ne peuvent croire que Dieu, s'il penfe à eux, puiffe faire autre chofe que de les meprifer. Comme ils ne l'aiment point, ils ne fçauroient fe perfuader qu'ils en foient aimés ni qu'il foit attentif à la difpofition de leur corur. Les bienfaits dont ils font comblés, les richeffes de la nature, le fpectacle de l'univers, la ftructure admirable des orga nes de leur corps, les foins généraux & particuliers de la providence, ne leur paroiffent que les fuites d'un ordre une fois établi, & qui marquent feulement en Dieu un foin général de fes créatures, & une bonté femblable à celle des Princes qui gouvernent avec fageffe leurs états, mais qui ne defcendent point jufqu'à aimer leurs fujets, ni à s'attacher à aucun d'eux en par

ticulier.

3. Ces racines fecrettes d'incrédulité qui ont infecté tous les hommes, & qui prefque jamais ne font entierement arra,

chées du cœur des fidéles, rendent la foi CHAP. VII. plus lente & plus engourdie. Elles arrêtent l'activité de l'efpérance, & elles font un venin préfent contre la charité, qui tire fa force & fa vie de la perfuafion que Dieus nous aime, & qu'il veut être aimé de nous. Car il n'eft plus poffible d'aimer, fi l'on fe croit rejetté, fi l'on aime fans fruit & fans: efpérance, fi l'on aime fans avoir la confolation de plaire par cet amour. On peut admirer la grandeur de Dieu, le louer de fes dons, lui rendre graces de fes foins: mais on ne l'adorera point comme Dieu, qu'en l'adorant comme fouverain bien ; & l'on ne l'adorera point parfaitement fous ce rapport, qu'en l'aimant, qu'en lui foumettant toute fa volonté, qu'en tournant vers luis tous fes defirs. Ainfi tout le fond de la pié-té & de la religion dépend de l'amour, & l'amour lui-même dépend abfolument d'une vive perfuafion de celui que Dieu a pour nous. Il faut donc avant tout pofer cet im-mobile fondement: autrement il n'y a point d'édifice, ou l'édifice périt..

§. II. Si l'homme avoit eu le choix des prodi ges pour le convaincre de l'amour que Dieu a pour lui, il n'auroit jamais pensé à luidemander l'incarnation de fon propre Fils, encore moins fa mort au milieu des douleurs

des ignominies; & cela pour épargnerdes efclaves rebelles.

1. S'IL étoit queftion de prouver la reli gion à un infidéle, qui ne crût ni l'incar nation du Fils de Dieu, ni fa mort, il fau droit le conduire à la croiance de nos myf teres par une liaifon de principes & de ye

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