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T'amour dont je fuis capable par fa grace, & qu'après avoir porté l'image de fes fouffrances & de fa mort, je ferai par l'efficace de fa réfurrection affranchi des foibleffes de cette vic, & en état de l'aimer, à proportion, auffi pleinement que j'en fuis aimé: fi quo modo comprehendam, in quo comprehenfus fum à Chrifto Jesu.

4. Qui nous donnera, Seigneur, des fenLimens femblables à ceux de votre Apôtre ? Qui nous donnera comme à lui un defir ardent de vous aimer, une fainte foif qui nous faffe courir après vous, & qui nous porte à vous chercher fans relâche? Ou plûtôt, Seigneur, qui nous procurera le bien ineftimable de vous poffeder dans le fecret intime de notre cœur, & de trouver à vos pieds, ou même dans votre fein, fi vous nous en donnez la confiance & la liberté, le repos que nous avons cherché inutilement hors de vous? Peut-il être permis à des pécheurs d'efperer une fi douce confolation? Et fi leurs péchés leur font toujours préfens, la profonde trifteffe dont ce fouvenir eft accompagné, peut-elle s'allier avec une joie si pure? Confentez, Seigneur, que nous oubliïons des iniquités que vous avez vousmême oubliées, & que vous avez lavées dans votre fang. Procurez nous cet oubli, au moins pour des momens, par une yvresse paffagere; & fouffrez alors que nous ne penfions qu'à votre amour, & à vous témoigner le nôtre à la maniere de votre S.

*C'est ce que dit faint Paul immediate nent auparavant: Ad cognofcendum illum, & virtutem refurrectionis ejus, & focietatem paffionum illius:

configuratus morti ejus, fi
quo modo occurram ad re-
furrectionem, quæ eft ex
mortuis fequor autem fi
quo modo, &c. Philipp.

3. 10. II.

CHAP. VII

CHAP. VII. Apôtre, en vous faisissant & en vous prenant comme vous nous avez pris. Quis mihi dabit acquiefcere in te? Quis mihi dabit ut venias in cor meum, & inebries illud, & oblivifcar mala mea, & unum bonum amplectar te ¿

S. Aug. 1. 1.
Conf. c. 5. 1.

5. Tout le fruit que vous avez esperé de vos fouffrances & de votre mort,tout ce que vous avez voulu en nous aimant jufqu'à cet excès, que d'expirer pour nous fur une croix, a été que nous vous aimaffions. Vous nous demandez notre amour pour toute récompenfe du vôtre. Vous ne vous contentez pas de nous y exhorter, vous nous en faites une loi, & vous ajoutez au commandement de grandes & de terribles menaces. Eh! Seigneur, le plus grand malheur qui pût nous arriver, ne feroit-ce pas celui de ne vous point aimer Pourrions-nous être plus févérement punis que par la défense de le faire? Notre gloire, auffi-bien que notre bonheur, ne confiftent-ils pas à n'aimer que vous ? Et étoit-il néceffaire de nous rendre attentifs à un fi preffant interêt par la crainte de vous offenfer ? quel befoin avez-vous de nous & de notre amour, pour convertir en une indifpenfable néceffité, ce qui eft une grace & un honheur dont nous fommes indignes? Que ne marquez-vous point par un tel précepte, & par les ménaces dont vous l'accompagnez ? Et peut-il y avoir une preuve plus touchante de votre amour pour nous, que d'exiger que nous vous aimions, & que de nous égaler ainfi à vous en quelque forte, en voulant que de part d'autre l'amour foit mutuel, & même égal, autant qu'il eft poflible? Quid miAug. Conf. I hi es? quid tibi fum ipfe, ut amari te jubeas à me : & nifi faciam, irafcaris mihi, & mi

B. C. 5. N. 1.

&

neris

neris ingentes miferias? Parva-ne ipfa res eft, CHAP. VII. Ji non amem te? Dic mihi per miferationes tuas, quid fis mihi.

6. Vous êtes mon Sauveur : & c'est parce que vous l'êtes, que vous me commandez de vous aimer: car c'eft l'amour de moi-même & des faux biens qui m'a perdu. Vous ne me délivrez par la charité que vous avez pour moi, qu'en m'attachant à vous par un amour pur & fincere. Sans vous, je fuis injufte & misérable. Il faut que vous m'infpiriez votre amour, pour me juftifier & pour ine tirer de la misére. Dites-moi donc que vous êtes mon Sauveur, & par l'efficace de Cette parole produisez én moi votre amour. Dites-inoi d'une voix forte, & qui pénétre mon cœur, que vous m'avez fauvé en mourant pour moi. Excitez mon amour par cette intime confiance. Donnez-moi des aîles pour aller après vous. Laiffez-vous atteindre, en vous arrêtant pour me recevoir; & fouffrez alors que je vous embraffe avec une joie qui furmonte la crainte, ou plûtôt qui a change en refpect, en adoration, en action de graces, en faififfement: Dic anime Aug. ibida mea: falus tua ego fum. Sic dic, ut audiam. Ecce aures cordis mei ante te Domine: aperi eas, dic anima mea : falus tua ego fum. Curram poft vocem hanc, & apprehendam te.

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CHAPITRE VIII.

Caracteres de l'amour que nous devons à Dieu qui nous a donné fon Fils, & à JESUS-CHRIST qui s'est livré pour nous.

L CARACTERE.

De notre amour pour JESUS-CHRIST.
Il doit être fans réferve.

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Our ce qui a été dit dans les deux chapitres précédens, à dît nous convaincre non-feulement du devoir indifpenfable d'aimer Dicu qui nous a donné fon Fils, & d'aimer J. C. qui s'eft livré pour nous, mais de les aimer fans bornes & fans mefure, & de tâcher de répondre à une cha rité infinie par une reconnoiffance qui épuife nos pensées & nos fentimens. Seroit-il jufte en effet que le Pere nous cût tout donRam. 8. 31. nič, en nous donnant fon Fils: Quomodo non etiam cum illo omnia nobis donavit? & que nous eutlions à fon égard quelques réCerves? Seroit-il jufte que le Fils fe fût livré an amour exceflif: Dilexit me, ' par tradidit fe not pfum pro me : & que nous héfitaffions un moment à nous livrer entierement à lui, & à lui faire un facrifice général de tout ce que nous avons, & de tout ce

Gal. 2. 20.

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que nous fommes, par un amour fouverain, CHAP-VIH. & ennemi de tout partage & de tout mélange?

S. I. Nous devons à Dieu un amour fans partage & fans bornes, par le titre de notre création, par la loi naturelle.

que

1. UN tel amour nous étoit déja commandé par la loi naturelle, & par le premier précepte du Décalogue, qui n'a fait rendre extérieure & publique cette premiere loi, que la dépravation de l'homme avoit obfcurcie. Nous devions à Dieu tout ce que nous en avions reçu ; le cœur, les pensées, les puiffances & les forces de l'ame, l'ame elle-même, & le fond de fon être & de fon activité. Il étoit néceffairement notre fin, puifqu'il étoit notre principe. Rien n'étoit a nous, puifque nous n'avions pu nous rien donner. Nous ne pouvions être ni notre regle, ni notre juftice, ni notre bonheur; & fa premiere loi de notre être, la premiere condition fous laquelle nous l'avions reçu, notre premier devoir fondé dans notre propre befoin, aufi-bien que dans notre inftitution primitive, nous obligeoient indif penfablement à n'aimer que Dieu comme notre fin, & à lui rapporter l'usage de nous. mêmes & de toutes les creatures.

2. Ce titre fondamental de notre être & de notre vie, eft indépendant de nous. Il nous reproche nos déreglemens; il en découvre l'injuftice: mais il fubfifte au milieu de nos dépravations. Le cœur lui demeure affujetti, lors même qu'il veut s'y fouftrairc. Aucun amour injufte ne lui peut être permis: & comme il eft lui-même le premier

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