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mi, ne abjicias ; nec deficias cùm ab eo corriperis. Quem enim diligit Dominus corripit, &quafi pater in filio complacet fibi. Cette confolation eft certainement très-grande: mais combien devient-elle plus fenfible, quand cette même Sageffe, qui fe contentoit autrefois de parler aux perfonnes affligées, fe montre à elles au milieu des douleurs & des opprobres; quand elle reçoit fur elle-même le châtiment qui nous étoit dû; quand c'est elle qui fe foumet, non à des verges paternelles, mais à une cruelle flagellation; quand elle confent à n'entrer dans fon propre Royaume qu'à des conditions plus dures que celles des enfans rebelles que la charité du pere corrige par de falutaires châtimens, afin de les rétablir dans les biens qu'ils avoient perdus ?

§. III. Il eft dit que la Sageffe defcendit avec Jofeph dans la prifoni & elle promet au jufte d'être avec lui dans la tribulation. Mais la confolation eft toute autre, quand on voit que cette Sageffe a bien voulu prendre fur elle éprouver toutes nos peines. Alors chacun dans fes afflictions partioulieres s'adreffe à elle avec bien plus de confiance, lui repréfente la foibleffe comme Job.

CHAP. III.

1. IL eft dit que lorfque le chafte Jofeph fut mis dans les fers en punition de fa vertu, la Sageffe defcendit avec lui dans la profonde prifon où l'on l'avoit enfermé, & qu'elle fe rendit comme captive avec lui: Defcendit cum illo in foveam, & in vinculis Sap. 10. 13. non dereliquit illum. Mais quoique ces expreffions foient infiniment tendres & con

CHAP. III. folantes, c'eft tout autre chofe de voir la Sagefle en perfonne porter réellement nos liens; être menée captive devant tous les Tribunaux; deshonorée dans le confeil des Juifs par des foufflets & par un indigue bandeau; traitée de folie par Herode & par fa cour, punie par le fupplice des esclaves dans le Prétoire ; mife en parallele, non avec Jofeph & les autres juftes, mais avec deux criminels publics; & mourant dans le fein de l'ignominie.

Pfal. 90. 13.

2. Elle nous promettoit, cette divine Sageffe, d'être avec nous dans l'affliction, de nous y proteger, de nous en délivrer. Cum ipfo jum in tribulatione: eripiam eum & glorificabo eum. Mais nous n'aurions jamais pû concevoir qu'elle fût capable de partager réellement avec nous nos fouffrances pour les adoucir, & pour nous en délivrer, fi elle ne s'étoit pas mife dans le même état que le nôtre, & fi elle n'avoit pas uni dans le fien toutes les efpeces de douleurs qui font partagées & divisées entre ceux qui lui font fidéles. Il n'y en a aucun qui ne foit confolé en fe fouvenant que fon Seigneur & fon Dieu a éprouvé tout ce qu'il fouffre, & qui ne trouve dans les épines qui lui percent la tête, dans les cloux qui lui percent les pieds, dans la dure fituation qui le tient étendu fur la croix, dans les outrages qui lui font faits par toutes fortes de perfonnes, un adouciffement à fes peines, un ra fraîchiffement dans fes plus preffantes douleurs, une paix,& un repos dans les tortu res les plus violentes.

3. Il n'y en a aucun qui ne tire de fon a gonie, & de fa défaillance au milieu d'unc fueur de fang, une nouvelle force & wa

nouveau courage pour se soumettre aux CHAP. 117. volontés de Dieu, quoique contraires aux inclinations naturelles. Il n'y en a aucun qui ne fonde fon efpérance fur l'abandon extérieur dont JESUS-CHRIST lui-même fe plaint à fon Pere: & les plus foibles, malgré leurs craintes & leurs foiblesses fentent au fond de leur cœur une fecrete afsûrance que leur patience n'eft pas rejettée, parce que celui qui eft la force des Martyrs n'a pas dédaigné de s'abbaiffer jusqu'aux plus foibles de fes brebis, pour sanctifier leurs craintes en les foumettant à l'obéiffance, parce qu'il eft prêt à excufer la répugnance naturelle & les gémiffemens d'une victime tremblante, quand d'ailleurs elle confent à être facrifiée'; & parce qu'il sçait par lui-même combien l'épreuve de la douleur, quand elle eft extrême, eft au-deffus de la nature.

4. Il eft permis alors à un homme, soumis à la vérité, mais craignant de ne l'être pas affez, ou de ne l'être pas toujours, de repréfentet à Dieu qu'il trouve fa main bien pefante, & de lui dire avec Job: Quelle eft Job. 11, 1 donc ma force, Seigneur, pour pouvoir vous répondre que ma patience ne s'affoiblira pas ? Vos épreuves n'ont point de fin: mais ma patience eft très-bornée. Je n'ai pas la dureté & l'infenfibilité des pierres, & ma chair n'eft point de bronze. Il lui eft encore plus permis de s'adreffer à JESUS-CHRIST pour lui faire des plaintes dont l'humilité eft le principe, & de lui dire: Vous fçavez par l'effai que vous en avez fait, ô mon Sauweur, que ma chair n'est pas infenfible qu'elle eft brûlée & déchirée par la douleur, qu'elle y fuccombe, fi elle n'eft puissamment

CHAP. III. foutenue. J'appelle à mon fecours, non-feu lement votre charité & votre compaffion mais votre expérience, & votre propre fentiment. Vous êtes revétu de la même

chair que moi : vous avez fouffert ce que je fouffre. Aidez-moi, comme faifant partie de vous-même, & recevez-moi dans vos plaies, afin que j'y trouve la confolation & le rafraîchiflement que vous m'avez mérités: Nec fortitudo lapidum, fortitudo mea, nec caro mea anea est.

§. IV. Les fouffrances de JESUS-CHRIST nous fournissent une grande confolation dans les calamités publiques qui ne font que temporelles, & qu'on ne peut comparer à ce que le Fils de Dieu a enduré.

1. C'EST ainfi que les forts & les foibles trouvent une confolation toujours Heb. 6. 18. préfente & toujours réelle, fortiffimum folatium, dans leurs afflictions particulieres, en penfant à JESUS crucifié, quand cette penfée eft l'effet d'une foi vive, foutenue par la reconnoiffance & par l'amour. Mais ce n'eft pas dans les feules afflictions particulieres & perfonnelles que le fouvenir des fouffrances & de la croix de JESUSCHRIST eft une fource de confolation & de paix c'eft auffi dans les malheurs blics & généraux, fur-tout quand ils ne font que temporels, & qu'on en peut fai re un faint ufage par une patience chrétienne. Car dans les afflictions de ce genre, quoiqu'elles foient grandes, & qu'el les méritent de la compaffion & des larmes, que peut-on y comparer avec JESUSCHRIST COuvert d'opprobres, & mis en

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croix par fes propres créatures? Lorfque CHAP-III Rome, capitale de l'univers, fut prife & pillée par les Goths, la confternation fut univerfelle, & le récit des défordres caufés dans cette grande ville attendrit tous les peuples qui faifoient partie de l'empire Romain. L'Afrique fut émue comme les autres provinces; & S. Auguftin, qui joignoit à un excellent naturel des entrailles que donne la charité, en fut vivement touché. Mais dans un difcours qu'il fit fur ce grand & terrible événement, voici comme il confole fon peuple, & comme il fe confole lui-même. » JESUS-CHRIST, dit-il, le Roi des Rois, & le Seigneur « S. Aug. ferm des Seigneurs, a été pris, lié, flagellé, ce de urbis exciexpofé à toutes les efpeces d'outrages & cc dio, ". 9. d'infultes. Il a été fufpendu au bois : il «e y a été cloué il y eft mort. Mettez en « parallele JESUS-CHRIST avec Rome. « Mettez dans la balance JESUS-CHRIST, " avec toute la terre. Comparez à JESUSCHRIST le ciel & la terre. Que font tous ce tes les créatures, en comparaifon du « Créateur? Et peut-on même les lui com- ce parer? Cependant lui-même a été comp- «e té pour rien, & il a été traité comme un c homme de néant, par ceux qui l'ont fait «< fouffrir. » Appende cum Chrifto Romam z appende cum Chrifto totam terram i appende cum Chrifto cælum & terram. Nihil creatum cum Creatore penfatur. Et tamen à perfequen tibus deputatus eft nihil.

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2. C'est par de femblables vûes qu'il faut fe foutenir & fe confoler dans des événemens qui paroiffent ébranler les provinces entieres & les états, & qui répandent une confternation generale. Car dans ces

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