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tyrs, en y multipliant les miracles: & que CHAP. IV. le peuple, amateur de ces merveilles, a reçû fans difcernement ces fictions qui deshonorent en même-tems J. C. & fes Martyrs, en ôtant à la grace de J. C. les preuves de fa puiffance fur les volontés, & aux Martyrs la gloire & le mérite d'une patience invin

cible.

3. Il est arrivé quelquefois que Dieu, felon fes deffeins, a fait éclater fa puiflance d'une maniere publique pour proteger fes, Martyrs. Mais le grand nombre de ceux qui étoient éffraiés par le feul fpectacle du fupplice, ou qui fuccomboient aux premieres épreuves, ou qui étoient enfin furmontés par la durée des tourmens, eft un témoi¬ gnage de ce qu'il en coûtoit aux Martyrs pour perfévérer jusqu'à la mort, & de la force que J. C. leur infpiroit pour demeurer fermes & inébranlables au milieu des plus longues, des plus vives, & des plus infupportables douleurs.

§. V. La force de la grace de JESUS-CHRIST n'empêchoit pas les Martyrs de fentir de la. trifteffe, de l'ennui, de l'accablement. Ces vérités doivent confoler les foibles, & faire trembler les forts, qui ne peuvent continuer de l'étre, que par l'humilité & la priere, Exemple de faint Pierre.

I. IL ne faut pas même penfer que cette force, quoique réelle & trés-puiffante, empêchât les Martyrs de fentir leur foibleffe, & par une fuite neceffaire de fentir de la trifteffe, de l'ennui, & même de l'accablement dans de certaines occafions. S. Paul

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2.

Cor. 1.8.

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CHAP. IV. qui défiroit avec tant d'ardeur de fouffrie pour JESUS CHRIST & qui mettoit toute fa gloire dans fa croix, avoue aux Corinthiens que les maux dont il avoit été accablé en Afie, avoient été au-dèffus de fes forces. Je fuis bien aife, leur dit-il, que » vous fçachiez l'afflicton qui nous eft fürvenue en Afie, qui a été telle,, que la pefanteur des maux dont nous nous fommes trouvé accablés, a été exceffive, & audeffus de nos forces, jufqu'à nous rendre même la vie ennuieufe. Supra modum gravati fumus, fupra virtutem, ita ut taderet nos etiam vivere. L'humilité qui eft infé-. parablé de la vérité, éclate dans ces paroles. Un homme moins fincere fe gardéroit bien de parler ainfi à fes difciples. Mais S. Paul veut que les Corinthiens fóient. inftruits de fes difpofitions fecrettes, & que fes maux lui ont paru exceffifs, qu'ils ont été au-deffus de fes forces, & qu'ils lui ont rendu la vie ennuienfe. Et pourquoi veut il qu'ils en foient inftruits? afin qu'ils ne fe faffent pas une fauffe idée du courage chré-tien, de la grace de J.C. qui en eft le principe; qu'ils ne croient pas que la patience, lors même qu'elle eft réelle, & digne d'un Apôtre, exclue toujours le fentiment de fa foibleffe, & celui du poids qui l'accable; qu'ils ne diffimulent pas ce fen. timent par l'affectation d'un courage étran ger, dont l'orgueil foit la fource ; & qu'ils apprennent que la perfévérance dans les épreuves eft accordée à l'humilité, à l'aveu de fon infirmité, à l'inftance dans la priere qui attend & qui demande un puiffant fecours à J. G. Nous avons reçû,

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continue faint Paul, dans nous-mêmes CHAP. IV. une réponse de mort :>> (c'eft-a-dire, nous n'avons trouvé dans nous aucuneforce ni aucune reffource: nous avons éprouvé que le fonds de la vie & du courage n'étoir point en nous," afin que nous ne mif- ce fions point notre confiance en nous, mais ce en Dieu qui reffufcite les morts: Ut non fimus fidentes in nobis, fed in Deo qui fufcia

tat mortuos.

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9.

2. Le même Apôtre, dans la mêine Epi 2. Cor. 1 v. tre aux Corinthiens, parle de fes perfé cutions & de fes fouffrances en général d'une maniere très-capable de nous inftruire: de la vraie patience & du véritable effet de: la grace de J. C. dans ceux qui fouffrent pour lui.« Nous fommes preffès, dit-il, «e par toutes fortes d'afflictions, mais au ce milieu des détreffes nous ne sommes pas ce refferrés dans le fond du cœur: Nous nous trouvons dans des difficultés infurmonta-c bles, mais nous n'y fuccombons pas néán--moins. Nous fommes perfécutés, mais ce non pas abandonnés. Nous fommes abbat tus, mais non entierement perdus. « Ces états que S. Paul regarde comme différens,, & qui le font en effet, paroiffent bien voifins à notre foibleffe, & le paroiffent enco re davantage à l'orgueil. Car où eft la dif-férence entre ces deux états - Ette abs batu, & n'être pas entierement perdu: être dans des difficultés infurmontables F

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refponfum mortis habui-

mus: Nous nous
condamnions à mouriry:** *
Mais la version que j'ai í
fuivie et plus conforme
au déflein de faint Paur.

CHAP. IV. & n'en être pas vaincu? Aporiamur,fed non deflit imur: dejicimur, fed non perimus, Nous voudrions que l'intervalle entre le danger & la perfévérance fût plus grand; que le courage fût hautement & pleinement fupérieur; & que non-feulement on ne fût pas entierement renversé, mais qu'on ne fût ni abbattu, ni même ébranlé. Mais la fageffe de Dieu eft bien différente de nos penfees. La grace de J. C. nous foutient, mais ne nous cache pas le fonds de notre foibleffe. Elle nous infpire le courage, mais en nous faifant fentir qu'il vient d'elle & non pas de nous. Nous portons » ce tréfor dans des vafes de terre, dit faint » Paul, afin qu'il foit évident que la force toute-puiffante qui eft en nous, vient de Dieu, & non pas de nous.. Habemus thefaurum iftum in vafis fictilibus, ut fublimitas fit virtutis Dei, & non ex nobis.

2. Cor. 4.7.

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3. Les foibles qui avouent leur foibleffe, & qui défirent d'avoir plus de force & plus de courage, font confolés par les vérités que faint Paul vient de nous enfeigner. Car ils ne pouvoient croire que les grands hommes fuffent quelquefois fi voifins de leur état; & l'idée qu'ils s'étoient formée de leur conftance & de leur fermeté dans les épreuves & dans les maux qui les environnent, leur ôtoit l'efpérance d'arriver jamais jus qu'à une patience fi héroïque. Mais quand Is fçavent que cette patience eft compatible avec le fentiment de l'infirmité humaine, & que la grace de J. C. quoique trèspuiffante, ne change pas entierement la nature des vafes de terre où elle habite, ils ne défefperent pas d'arriver par dégrés à une femblable vertu; & en apprenant que

la force des plus forts vient de Dieu feul, CHAP. IVA & non pas d'eux, ils s'occupent moins de leur foibleffe, dont le remede eft entre les mais de Dieu, qui écoute les prieres, des humbles.

4. Mais ces mêmes vérités qui confolent les foibles, apprennent à ceux qui font forts combien ils doivent trembler en confiderant combien ils font fragiles par euxmêmes, & avec quelle attention ils doivent demander l'infpiration continuelle & perfévérante d'une force qui leur eft toujours étrangere, lors même qu'ils en font remplis, parce qu'ils n'en font pas le princi-` pe. Ils doivent toujours fe fouvenir de S. Pierre, plein d'ardeur & de zele, mais qui eft trompé par la préfence d'un fentiment qui lui cache fa foibleffe, qui s'endort au lieu de veiller & de prier avec J. C. & qui s'expofe à la tentation fans s'y être prépa ré par aucun des moyens légitimes. C'eft fur l'exemple de J. C. qui eft la force. même, qu'ils doivent fe regler, s'humilier & fe profterner avec lui; demander avec lui que le calice paffe; l'accepter quand la néceffité les y contraint; fouffrir en filence tout ce qui leur arrive; prier fans ceffe, & même avec larmes, afin que la perfévérance. leurfoit accordée;& febien perfuader qu'ils ne conferveront la grace de J. C. que par des moyens femblables à ceux qu'il a emploiés pour la leur mériter: n'étant pas jufte que ce qui a été le prix de fon fang, de fes opprobres, & de fes inftantes prieres, foit accordé à des perfonnes qui fe contentent de la juftice de leur caufe & de la gloire de fouffrir pour elle, fans travailler à fe comferver cet honneur par une humilité

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