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CHAT. IV. un filence, une priere, qui aient quelque conformité avec les difpofitions de J. €.

§. VI. La force que JESUS-CHRIST commuè nique à ceux qui jouffrent pour lui, éleve l'ame au-deffus de toutes les paffions capables: de l'affoiblir. Elle la prépare aux plus grands combats par le mépris des délices, du repos, des espérances du fiécle s ́par l'a-mour de la pauvreté, de l'obscurité, de la priere & par le détachement de tout ce qu'on aimoit légitimement..

I. CAR il ne faut pas s'imaginer que la force qu'il communique. à ceux qui Touffrent pour lui, foit femblable à une force. corporelle. & extérieure, qui agiffè indé-pendamment des difpofitions fecrettes du cœur. Cette force, eft une force fpirituel le, qui guérit l'ame, qui l'éleve au-deflus des paffions capables de l'amofir, qui l'at-tache à fés devoirs d'une maniere ferme & conftante. Cette force eft celle de la charité, c'est-à-dire, de l'amour de la juftice & de la fainteté, qui furmonte les douleurs, après avoir vaincu la volupté; & qui fé rend! maitreffe de la crainte & du fentiment des maux les plus preffans, après avoir triom-phé de tous les défirs & de tous les attraits de la cupidité.

2. La premiere victoire n'eft pas celle qu'on remporte par la patience, & le pre mier ennemi qu'on a à combattre, n'cft pas. la douleur. Il faut fe préparer à ce combat. par la haine des délices; par l'amour de la pauvreté; par une vie humble, & cachée autant qu'il eft poffible dans une falutaire: obfcurité; ; par la fuite du fiécle; par le me-

pris de fa fauffe gloire & de fes vaines pro- CHAP. IV meffes; par la mifericorde envers les pauvres; par une vie férieufe, remplie de devoirs & de faintes actions; par une pricre affidue & fervente. C'eft par où il faut com-mencer. Ipfa funt prima acies debellanda. S. Aug. fermò Primo vincenda funt delectationes, & poftea 335. dolores. Car on fera toujours foible, fi l'on aime quelque chofe que le monde puiffe nous ôter. On le craindra toujours, fi l'on en efpére quelque chofe. On cédera enfin à fes perfécutions, fi l'on n'eft pas au-deffus de fes promeffes, & de fes manieres féduifantes & flateufes. Quomodo poteft fuperare mundum favientem, qui non poteft fuperare blan dientem? Qui non contemn't quod pollicetur, quomodo fuperare poteft quod minatur ?

3. Il n'eft pas néceffaire qu'on tienne à beaucoup de chofes, ni qu'on ait de grandes efpérances, pour être affoibli dans une occafion importante & décifive. Il fuffit qu'on s'aime foi-même, qu'on aime fon repos, fa liberté, fon obfcurité même, où l'on eft tranquille, & où l'on efpéroit d'être à l'abri. Il fuffit de tenir à la vie, à fa fanté, à fes livres, à fes amis, à fon emploi, fouvent jufte & néceffaire. Il fuffit de défirer de ne pas déplaire & de n'être pas defapprouvé de vouloir conferver la paix avec tout le monde, de craindre d'être fingulier; & de s'engager dans un combat, dont la du rée & la fin font certaines. Il fuffit de retenir dans fon cœur quelque attachement qui donne prife au monde ou à l'ennemi de notre alut, & qui lui Terve comme de premier anneau de la chaîne qu'il nous prépare.

Ibide

CHAP. IV.

§. VII. C'est en quériffant notre cœur de fes paffions, que JESUS-CHRIST l'a rendu invincible à la séduction & à la terreur.

1.

J. C. attaché à la croix, a vaincu pour nous tout ce qui pouvoit nous affoiblir la féduction, coml'attrait & par par mne il a triomphé pour nous de tout ce qui pouvoit nous abbattre par la terreur & par la violence. Il a commencé par nous guérir, & enfuite il nous a rendu invincibles. Il nous a délivrés de l'amour de nous-mêmes, de la volupté, & du monde : & il a mis dans notre cœur une force capable de clouer à la croix & l'amour propre, & la volupté, & le monde, fans nous laiffer abbattre par la douleur, & fans céder à la furcur du fiécle, armé de tout ce qu'il a de plus terrible.

2. C'eft par fa croix qu'il a triomphé, non-feulement de nos ennemis extérieurs, mais de nous-mêmes, de nos paffions, de nos foibleffes, & de nos maladies. C'eft en nous rendant juftes, qu'il nous a rendu forts. C'eft par fon humilité qu'il a guéri notre orgueil, & qu'il nous a mérité la force de méprifer la gloire du monde, & fon mépris. C'est par fon dépouillement & fa nudité qu'il a guéri notre paffion pour les richeffes, & pour tous les biens temporels, & qu'il nous a obtenu la grace de les facrifier avec joie à notre devoir. C'est par fa patience & par fa charité qu'il a éteint en nous tout reffentiment, tout murmure, toutes plaintes contre ceux qui nous font quelque injure, & qu'il nous a mis en état de vaincre le mal par le bien, au lieu d'être vaincus par le mal. Et le remede dont il s'eft fervi

pour guérir tout ce qui s'oppofoit en nous CHAP. IV. à un amour fincere & ferme pour la justice eft d'une fi grande efficace, que quiconque fe fie pleinement à fa vertu eft certainement victorieux de toutes les paffions. Car, ainfi que le dit faint Auguftin, quel feroit l'excès de notre orgueil, fi l'humilité de J. C. ne le guériffoit pas ? Quelle feroit notre avarice, fi la pauvreté du Fils de Dieu n'en étoit pas le remede ? Quelle feroit notre impatience, & quelle feroit notre fenfibilité dans les injures & dans les mauvais traitemens, fi elles étoient incurables à la grace que la patience invincible de J. C. nous a méritée? Hac medicina hominum tania eft, quanta non poteft cogitari. Nam qua Superbia fanari poteft, fi humilitate Filii Dei non fanatur¿ Que avaritia fanari poteft, fi paupertate Filii Dei non fanatur? Qua iracundia fanari poteft, fi patientia Filii Dei non Sanatur?

§. VIII. Sageffe admirable de JESUSCHRIST dans le choix qu'il a fait de tout ce qui pouvoit guérir nos différentes maladies. Priere à JESUS-CHRIST pour lui demander qu'il nous communique cette force, en nous infpirant le mépris du monde, & qu'il devienne le remede de toutes nos bleffures.

I. QUAND on étudie férieufement J. C. crucifié, non comme un fimple fpectacle, ni comme un modéle purement extérieur, mais comme le Sauveur des hommes, qui a parfaitement connu leurs maladies, & qui a pris fur lui tout ce qui pouvoit en être le remede, on ne peut fe laffer d'admirer fa

S. Aug, lib. de Agone Chrifli.n. 12

CHAP. IV. fageffe & fa charité infinies dans le choix & ans l'acceptation de tout ce qui pouvoit nous guérir; dans le renoncement à tout ce qui nous rendoit malades; dans le difcernement & dans la préférence de tout ce qui devoit nous rendre la force & la fanté. Tous les hommes, en quelque état qu'on les fuppofe, trouvent en lui des remedes propres & perfonnels. Toutes les efpeces de vanité, de quelque prétexte qu'elles fe couvrent, y font découvertes & guéries. Tout amour pour le fuperflu, pour le merveilleux, pour an vain éclat, y eft condamné & réprimé. Toutes les vertus néceffaires, & tous les moyens de les acquérir, y paroiffent d'une maniere fenfible, & en même-tems féconde & puiffante. On voit en J. C. crucifié, ce qui nous a perdus, puifqu'il prend une rou re opposée. On y voit ce qui doit nous rétablir, puifqu'il l'accepte & le préfere. Mais on le voit comme dans fon Sauveur, ainfi que je l'ai dit, en fe l'appliquant, en y cherchant fa guérifon, en y trouvant fa fanté & S Aug. de la force. O medicinam omnibus confulentem, Agone Chrifti omnia tumentia comprimentem, omnia fuperfua refecantem, omnia neceffaria cuftodientem, omnia perdita reparantem, omnia depravata corrigentem!

28.12.

S. Leo ferm. 8. de paff. n. To

2. C'est ainfi, o mon Sauveur, que vous avez rendu votre croix, non-feulement la fource de la gloire & de l'immortalité, quoiqu'elle fût avant vous un fupplice honteux & cruel; mais que vous l'avez rendue la fource de la force, quoiqu'elle ne fût qu'un inftrument de foibleffe, & qu'elle eft deva nue par vous l'origine & le canal de toutes les graces & de toutes les benedictions. Crux tua omnium fons benedictionum, om

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