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continuel defir, qu'une goutte d'eau, plus CHAP. V. capable d'allumer fa foif que de l'éteindre. Demandez-leur enfin fi leur misere, au milieu des biens préfens, n'eft pas une preuve fenfible d'une grandeur prefque infinie qu'ils négligent, à laquelle ils ne peuvent renoncer, quoiqu'ils foient affez malheureux pour l'oublier, & affez injuftes pour mettre leur bonheur dans cet oubli.

5. Quelle différence entre ces hommes trompés qui courent, un bandeau fur les yeux, après des biens qui fuient devant eux & qui n'ont aucune folidité; & ces hommes fidéles & reconnoiflans, à qui JESUSCHRIST crucifié a appris quelle eft leur véritable dignité, & quel eft le remede à leur mifere; en qui il a éteint la foif des biens, qui ne peuvent qu'augmenter leur mifere, en enflammant la concupifcence qui eft la fource de leur injuftice; à qui il à montré en quoi confifte le véritable bonheur, & l'unique chemin pour y arriver; qu'il con, fole maintenant par la patience & par l'efpérance, & qu'il tient humiliés, mais tran quilles à fes pieds, après les avoir perfuadés, que toutes leurs anciennes agitations étoient inutiles, & qu'ils ne pouvoient trouver de repos, de fureré, de gloire, de bonheur, qu'en fe tenant unis à lui, qui eft l'auteur & le réparateur de leur véritable grandeur, & le feul qui puiffe les relever de leur baffeffe, & les délivrer de leur mifere.

CHAPITRE VI.

JESUS-CHRIST crucifié eft le fondement de notre espérance par rapport à la véritable juftice, & au véritable bonheur.

1.

Tour ce qui a été dit jufqu'ici prou

ve que notre Seigneur JESUS crucifié pour nous, eft le fondement de notre efpérance, & que c'eft de lui, & par lui, que nous devons attendre la justice & le bonheur, qui font les deux grands objets de l'efpérance chrétienne. Ceux qui ne font pas éclairés par la foi, ou qui ne fuivent pas fa lumiere, séparent ces deux chofes, en défirant le bonheur, fans défirer la juftice, qui eft le feul moyen d'y parvenir. Mais ces deux chofes font inséparablement unies. Sans la justice véritable, on fera toujours malheureux : & avec elle on ne le peut être. *sevoxwein »L'affliction & le défefpoir, dit faint Paul, accableront tout homme qui fait le mal » le Juif premierement, & puis le Gentil. » Et au contraire, l'honneur, la gloire & la paix feront le partage de tout hommie qui fait le bien, du Juif premierement, » & puis du Gentil. : La loi éternelle l'ordonne ainfi, & il ne faut efpérer aucune exception.

Rem. 2. 9.

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2. C'eft donc également par rapport à la juftice véritable & par rapport au veritable bonheur qui ne peut être qu'éternel, que je regarde en ce chapitreJ.C.comme le fonde

ment de notre efpérance, dont j'établirai les CHAP. VI. motifs, & dont je marquerai par une fuite néceffaire les grands caracteres & les effets.

§. 1. Les motifs de l'espérance font renfermés dans un paffage de faint Paul, qui les fonde fur la charité du Pere qui a livré son Fils pour nous, & fur celle du Fils qui a donné fa vie pour nous rendre la justice. JESUS-CHRIST fait encore dans le Ciel la fonction de victime de Prêtre.

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1. SAINT PAUL réunit, dans le huitiéme chapitre aux Romains, les principaux motifs de l'efpérance chrétienne, dont il fait voir que JESUS-CHRIST eft l'unique fondement. « Si Dieu, dit-il, eft pour nous, ce qui fera contre nous? S'il n'a pas épargné fon propre Fils, & s'il l'a livré à la mort « pour nous tous, que ne nous donnera-t-il « point après nous l'avoir donné »,? C'est Dieu que nous avons offensé: c'eft lui qui nous avoit exclus du ciel : c'eft fa juftice inéxorable, que nous devions fatisfaire, fans le pouvoir jamais c'eft lui feul que nous devions craindre. Et c'eft lui au contraire qui fe déclare pour nous, & qui prend en main notre défenfe. Quelle puiffance peut combattre la fienne.? Quelle malignité & quelle envie peuvent s'oppofer à la bonté ? Qui peut rendre fa miséricorde inutile, ou ca fufpendre l'effet ?

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Rom. 8. 3

34.

2. Mais quelle preuve avons nous de fa miséricorde & de fa bonté? Comment fa jultice & fa fainteté ont-elles été fatisfaites? Qui a pu révoquer fa malédiction prononcée contre nous? Comment des décrets immuables contre des pécheurs incapables

CHAP. VI. par eux-mêmes de pénitence & d'un amour fincere pour la justice, ont-ils été abolis? C'eft que Dieu n'a pas épargné pour nous fon propre Fils, & qu'il l'a livré à la mort pour nous tous. Etiam Filio fuo non pepercit. Il s'eft porté jufqu'à cet excès inoui, que de facrifier fon propre Fils, fon unique Fils, fon Fils égal à lui-même, pour nous fauver, fans que nous l'en priaffions, fans que nous le fçuffions, fans que nous fuf

fions ni moins rébelles, ni moins ingrats, ni moins impénitens. Il nous a mis en parallele avec lui, & il nous a préférés. Il a vû ce qu'il en devoit coûter à ce Fils unfquement aimé, & ce qu'il devoit lui en coûtter à lui-même en l'immolant pour nous : & nous lui avons été plus chers. Il avoit emploié tous les autres moyens pour nous rappeller à lui: bienfaits, châtimens, inftructions, miracles. Mais il lui reftoit un unique Fils, & il ne fe l'eft pas réservé.

3. Il l'a livré à la mort pour nous tous, & il a noié dans fon fang toutes nos iniquités. Il a mis fur ce Fils attaché au bois, nos malédictions & nos anathêmes, avec nos péchés. Il l'a chargé de tout ce que nous devions à fa juftice. Il a exigé de lui à la rigueur tout ce que fon inexorable fainteté eût éternellement & inutilement exigé de nous. Il l'a brisé comme s'il avoit été coupable, parce qu'il tenoit la place de ceux qui l'étoient. Il l'a raffafié des oppro bres dont nous étions dignes. Il a rempli le calice qu'il lui a fait boire, de tout le fiel & de toute l'amertume dont notre coupe devoit être inondée. Il n'a rien épargné ni pour les douleurs, ni pour les ignominies, de tout ce qui étoit dû à nos crimes,

Etiam proprio Filio fuo non pepercit, fed pro CAP. VI. nobis tradidit illum.

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4. Qui accufera[ déformais, ] continue l'Apôtre, les élus de Dieu ? « C'est Dieu même qui les juftifie; « & qui en les justifiant les rend des créatures nouvelles. Car il ne fe contente pas de les décharger de leurs crimes, & de leur accorder, comme les Princes de la terre, des lettres de grace ou d'abolition, qui leur procurent feulement l'impunité, fans les convertir: mais il leur donne un cœur nouveau, & un efprit nouveau. Il les purifie par fon amour. Et l'implacable calomniateur des Saints ne peut rien trouver en eux qui foit à lui, ni faire revivre des péchés effacés abfolument, ou faire obferver des taches autrefois auffi vifibles que le vermillon, mais dont la place eft devenue auffi pure & auffi blanche que la neige, felon cette parole du Prophéte: Si fuerint peccata veftra ut coccinum, quafi nix dealbabuntur; & fi fuerint rubra ut vermiculus, velut lana alba erunt..

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Qui ofera les condanner? JE* SUS-CHRIST eft celui qui eft mort; qui de plus eft reffufcité; qui, outre cela, « eft affis à la droite de Dieu; & qui même << parle & fait inftance pour nous. Tout eft ici d'une grande force & d'une grande énergie, & ce feroit un grand mal que de ne pas approfondir des paroles qui nous fourniflent tant de fujets d'efpérer.

Qui ofera condanner ceux dont JESUS

*Il faut joindre cette avec ce qui fuit, comme feconde queftion: Qui il paroît par le grec, & ofera les condamner ? non encore plus par le fens. avec ce qui précéde, mais

Ifai. 1.18

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