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aucun inftant de notre vie; & que depuis le CHAP. VIN, premier, jufqu'au dernier qui fe termine à la mort, tout eft au Seigneur. Nul ne vit, nul ne meurt pour foi. Il n'y a aucun intervalle qui foit excepté. Nous fommes achetés en naiffant, nous le fommes en mourant. Il n'y a aucun moment où nous puiffions dire que nous fommes à nous. Il n'y en a aucun que J. C. ne fe foit acquis. Dans tous, notre gloire confifte à dire avec vérité : Domini fumus.

8. Obfervez enfin quelle confolation faint Paul prépare aux mourans, en les affurant que c'est pour le Seigneur qu'ils meurent: Domino morimur; qu'ils ont à lui d'une maniere particuliere dans cet état qui paroît fi humiliant ; & qui fans J. C. ne feroit pour nous qu'un honteux fupplice, & le commencement d'un autre qui feroit éternel: Sive morimur, Domini fumus; que leur moit eft plus à lui qu'à eux; que c'eft en fon nom qu'ils meurent; que c'eft fa mort qu'ils imitent, qu'ils repréfentent, qu'ils continuent; & que c'eft principalement à ce dernier facrifice qu'il attache & qu'il unit le mérite du fien: Sive morimur Domino morimur: five morimur, Domini fumus.

CHAP. VIII.

§. IV. Rien de ce que nous avons n'eft à nous nous sommes donc obligés d'en faire ufage pour la gloire de Dieu, à qui tout appartient. Cette obligation s'étend aux actions les plus indifférentes & les plus naturelles il n'en eft aucune qui ne doive être rapportée à Dieu au nom de JESUSCHRIST qui nous a rachetés.

1. C'EST une fuite naturelle des grandes vérités qui viennent d'être établies; que nous fommes morts, puis qu'un feul est mort pour tous; que nous ne fommes point à nous, puifque nous avons été achetés d'un grand prix ; & qu'aucun de nous ne vit & ne meurt pour foi-même, mais pour J. C. qui eft mort & reffufcité, pour acquérir un droit nouveau fur notre vie & fur notre mort: c'est, dis-je, une fuite naturelle de ces importantes vérités, que toutes nos actions font à J. C. même celles qui paroiflent ou légeres ou indifférentes. Saint Paul qui nous a inftruits de ces vérités, en a tiré lui-même cette conséquence; & il nous a appris à en faire l'applica tion à toutes les chofes qui dépendent ou de l'efprit ou du corps, ou de l'un & de l'autre. « Vous n'êtes point à vous-mêmes, dit.il, car vous êtes achetés d'un grand prix. Voila le principe & voici la conséquence: Glorifiez donc & portez » Dieu dans votre corps, & dans votre efprit, puifque l'un & l'autre font à Dieu. N'ufez de vous que comme d'un bien qui eft à Dieu, & dont il ne vous accorde l'ufage que pour fa gloire. Que votre corps foit fon autel & fon temple. Que votre ef

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prit en foit le Prêtre, & en même tems la CHAP. VIII. victime. Que tout foit en vous confacré à fon culte. Que tout lui foit dédié. Et qu'il foit vifible que comme l'Arche d'alliance, Vous êtes fon thrône & fa gloire ; qu'il repofe fur votre efprit, comme fur les Chêrubins qui couvroient l'Arche; & que votre corps lui fert de marche-pied, comme il eft dit que l'Arche lui en fervoit dans le fan&tuaire: Glorificate & portate Deum in cor pore veftro, & in fpiritu veftro,qua funt Dei.

2. Mais peut-être trouvera-t-on ces expreffions trop générales, & même trop auguftes, pour les abaisser jufqu'à des actions indifférentes ou purement naturelles. Il n'y en a point qui méritent mieux ce nom, que l'action de boire & de manger : & néanmoins c'eft par rapport à cette action que faint Paul établit cette grande maxime : que nul de nous ne vit ou ne meurt pour foi-même. Il s'agifloit de terminer une queftion qui divifoit les fideles, dont les uns s'abftenoient de quelques viandes, & les autres ufoient de toutes indifférenment. Saint Paul ne condamne ni les uns ni les autres, pourvû que l'abftinence & l'ufage des uns & des autres fe terminent à l'action de graces & à la gloire de Dieu : » Celuri qui mange de tout, dit l'Apôtre, le fait « Rom. 14. 6. pour plaire au Seigneur, & il en rend gra- « ces à Dieu : & celui qui ne mange pas de « tout, le fait auffi pour plaire au Seigneur, « & il rend auffi graces à Dieu. Voilà, ditil, l'effentiel : l'un mange pour le Seigneur Domino manducat : & l'autre qui ne mange pas, s'abstient pour le Seigneur, Domine non manducat. C'eft de cette vûe que dépend la bonté ou de l'ufage, ou de l'abstinence.

CHAP. VIII. Avec une telle fin, deux actions qui paroiffent oppofées, ont la même rectitude & le même mérite. Mais fans cette fin l'un & l'autre font défectueuses, & font dignes de cenfure parce qu'aucun de nous ne vit & ne meurt pour foi, & que nous fommes au Seigneur pendant la vie, & jufqu'à la

mort.

ou

3. Qui auroit cru que faint Paul auroit pris une fi légere occafion, pour établir une vérité d'une fi grande conséquence? Et qu'à propos de manger, de ne pas manger, il fe foit élevé jufqu'à ce fublime principes que nous ne vivons, & que nous ne mouron's point pour nous-mêmes, mais pour celui qui eft mort & reffufcité, pour acquérir un empire fouverain fur les morts & fur les vivans? Mais d'un côté nulle occafion n'eft légere, felon l'Apôtre; puifque tout doit être faint dans un Chrétien, & que par conséquent tout y eft important. Et d'un autre côté ce n'eft point une occafion particuliere qui détermine faint Paul à établir la maxime générale, que nous ne fommes point à nous, & que ce n'eft point pour nous que nous devons vivre & mourir: mais c'est l'évidence & la certitude de cette grande maxime, qui fert de régle à faint Paul & à nous, pour décider de la bonté de nos actions, & de celles même qui font naturelles & indifférentes.

4. On dira peut-être que la queftion qui divifoit les fideles par rapport à l'abstinence, ou à l'ufage de certaines viandes, avoit une liaison néceffaire avec la Religion, puifque ceux qui fuivoient des pratiques différentes, avoient également le deflein

que

de l'obferverd'une maniere plus pure; & CHAP. VIII. qu'ainfi la régle établie par faint Paul ne convient point aux actions naturelles où la Religion n'a poiut de part. Mais une telle réponse n'a rien de folide, & elle eft directement contraire à la pensée de l'Apôtre, qui veut que toutes les actions de notre vie foient acquifes à J. C. puifque notre vie elle-même n'eft point à nous, & que nous fommes achetés par le prix de son fang. C'eft pour cela qu'il écrit aux Corinthiens en termes généraux : » Soit que vous mangiez, foit que vous buviez, & quelchofe que vous faffiez, faites tout pour la gloire de Dieu. Il termine toutes les queftions, & il prévient tous les doutes, en ajoûtant: quelqu chofe que vous faffiez. Il ne laiffe aucun lieu à aucune espece de diftinction. Ce qui eft naturel, indifférent, léger, eft confacré par l'Apôtre à la Religion & à la piété. Tout doit être fait pour Dieu, & dans le deffein de lui plaire. Tout eft à lui, comme nous fommes nous-mêmes à lui. Les fruits & le champ lui appartiennent; & toutes nos actions libres doivent lui être rapportées par le même principe, & en vertu de la même obligation qui nous ont dû convaincre, que nous ne fommes plus à nous

5. S'il étoit poffible, après une décision fi genérale & en même tems fi précife, qu'il y eût encore quelque incertitude dans l'étenduë de ce devoir, elle devroit être pleinement diffipée par ces paroles de faint Paul aux Coloffiens, qui certainement font dites à tous les fideles: » Quoique vous faf-> fiez, leur dit-il, ou en parlant ou Coloff. 3. 17. agiflant, faites tout au nom du Seigneur

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