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CHAP. VIII. sés l'un à l'autre : & que l'oppofition qui », eft entr'eux, eft caufe que nous ne faifons pas tout ce que nous voudrions ». Mais ceux en qui l'Elprit de J.C. eft le maître,s'affligent de ce combat: ils foupirent en attendant une pleine victoire & une pleine libemé; & ils travaillent tous les jours à étendre & à affermir le régne de l'efprit, en enlevant à la concupifcence tout ce qu'ils peuvent lui ôter: au lieu que ceux en qui la concupifcence domine, nourriffent & entretiennent leurs foibleffes, craignent que l'efprit de Dieu ne s'affujettiffe tous leurs défirs, & compofent avec lui pour se ménager quelques réferves, ou leur amour pour une fauffe liberté puiffe refpirer pour des momens, felon l'expreffion de ceux dont nous rapportons les difficultés.

11. Si Dieu n'étoit pas la clémence même, il condamneroit séverement une telle duplicité: mais s'il la condamnoit ainsi dans tous les hommes il y en auroit peu qui arrivaffent à une véritable juftice. Car les commencemens font prefque toujours mêlés du défir de la fante, & de la crainte de guérir trop tôt. Le cœur flotte long-tems entre la vertu qui lui eft nouvelle, & le vice qui lui eft comme naturel ; & la patience de Dieu fouffre dans plufieurs ces hélitations qui font injure à faibonté; quoiqu'il les puniffe dans quelques-uns d'une maniere terrible, pour intimider ceux qui déliberent trop long-tems, & qui ne connoiffent pas le prix de la grace qui les invite. Mais il importe beaucoup d'obferver, que lors même que les pénitens font partagés par des volonté contraires, & qu'ils craignent de paffer fans intervalle du crime à la vertu,

ils font très-éloignés de vouloir juftifier leur CHAP. VII. lenteur à fe convertir, & plus éloignés encore de prétendre qu'ils fe convertiront en n'accordant à Dieu qu'une partie. Ils accufent leur péfanteur. Ils déplorent leur foibleffe, & ils ne fe confolent, que par l'efpérance d'être un jour pleinement foumis à I'Evangile. Ainfi, leurs difpofitions,toutes imparfaites qu'elles font alors, ont plus de droiture & de fincérité, que celles de plufieurs faux juftes, qui limitent les devoirs de la piété, qui la regardent comme gênante & comme importune; qui étudient des plans & des fyftêmes, pour lui fouftraire fans péché la plus grande partie de la vie, qui aiment mieux être philofophes queChrétiens; qui préferent même en bien des chofes, l'inattention & l'oubli d'un homme qui fuit mollement fes pensées, quand elles ne font pas clairement injuftes, à la pieufe vigilance d'un homme fidele; & qui paroiffent iSnorer abfolument, que nous ne fommes point à nous; mais à J. C. qui nous a acquis par fon fang, & qui eft mort & reffufcité pour avoir un droit nouveau & privilegié, s'il eft permis de parler ainfi, fur notre vie & fur notre mort.

§. XI. JESUS-CHRIST depuis le moment de fa naiffance jufqu'à celui de fa mort, n'a eu dans toutes les actions & fes fouffran ces, que notre falut pour objet nous ne devons pas le perdre de vûë dans toutes les nôtres.

1. MAIS pour confondre ces hommes réellement ennemis de la piété Chrétienne, 2. Tim. 54 quoiqu'ils en confervent les apparences; & pour animer ceux qui font foibles, fans être indociles; je n'ai befoin que de faire fou

CHAP. VIII. venir les uns & les autres, que J. C. depuis le premier moment de fon Incarnation, jus qu'à celui où il eft forti du tombeau, nous a toujours eu en vûë, qu'il n'a rien fait que pour nous, & qu'il n'a pas été un feul moment diftrait par rapport à notre falut. Car il faut au moins, qu'il y ait de notre part quelque proportion entre notre reconnoiffance & fon amour, & quelque efpece d'égalité entre ce qu'il a fait pour nous, & ce que nous devons faire pour lui. Or, quelle proportion & quelle égalité pouvons-nous mettre entre fon amour & le nôtre, entre fon attention & la nôtre, fi nous ne lui offrons qu'une partie, lorfqu'il donne tout; & fi nous exceptons beaucoup de chofes, quoiqu'il n'ait rien excepté ? Quelle vie feroit digne de la fienne, quand elle feroit très-longue & très-fainte?Que peuvent tous les Anges & tous les hommes ensemble quand on les compare à J. C Quelle reconnoiffance peut égaler le prix d'un moment de fes travaux & de fes fouffrances, quand elle feroit éternelle ? Quel facrifice peut être mis en parallele avec le fien ? Quel holocaufte fera jamais auffi plein & aufli par fait, que celui qu'il a offert pour nous fur la croix ! Quelle comparaifon peut-on faire entre le Fils unique de Dieu, & les pécheurs qu'il a trouvés aveugles & impénitens, & qu'il a reconciliés par fon fang? Convient-il à ces pécheurs de difputer avec leur Libérateur fur ce qu'ils doivent à fa charité? Croient ils avoir été achetés à trop bas prix ? Prétendent-ils le faire juftice, en reprenant des droits dont ils ne fe croient pas affez juftement dépouillés ? Se repentent-ils. d'avoir été rachétés, & d'avoir changé de maître? Préferent-ils le régne de la cupidité;

qui eft celui de Satan, au régne de la chari- CHAP. VIII. té, qui eft celui de J. C. Il faut bien que ces pensées ténebreufes & infpirées par le ferpent, aient trouvé quelque ouverture dans leur cœur ou dans leur efprit; puifqu elles les ont affoibiis, & qu'elles leur font regarder comme un joug accablant, l'obligation de ne vivre que pour J. C. & comme une dure néceffité de mourir à tout le refte.

2. Mais pour déraciner ces pensées, & pour établir au contraire le folide fondement de notre piété, & de notre reconnoiffance envers J.C.apprenons de lui pourquoi il s'eft fair homme, & comment il a vêcu depuis fon Incarnation jufqu'à fa mort. Je Jean. 6. 38. » fuis décendu du ciel, dit-il, non pour

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faire

ma volonté, mais pour faire la volonté » de celui qui m'a envoié. Or la volonté de mon pere qui m'a envoie, eft que je ne perde aucun de ceux qu'il ma donnés:mais » que je les reffufcite tous au dernier jour.« Dans ce peu de paroles, mais qui renferment tout, J. C.dit clairement qu'il ne s'eft incarné, que pour obéir & pour faire la volonté de fon pere; & que certe volonté de fon pete a pour objet notre falut; ainfi, c'est obéir qu'il s'eft fait homme, & c'est pour nous qu'il a toujours obéi. Rien n'eft plus précis. L'obéiffance de J.C. a été continuelle: elle a commencé à fon incarnation, & n'a fini qu'à fa mort : & c'est toujours nous qui avons été l'objet de cette obéiffance.

pour

39.

» 3. Le Fils de Dieu, dit faint Paul, en » entrant dans le monde, dit à fon Pere (ce Heb. 10. çi que le Prophéte avoit prévû long-tems. 7. 19. » avant fon incarnation qu'il lui diroit ;)

Vous n'avez point voulu d'hoftie ni d'on blation: mais vous m'avez formé un corps Vous n'avez point agréé les holocauftes

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CHAP. VIII. » pour le péché. Alors j'ai dit: me voici ; je » viens. felon qu'il eft écrit de moi dès le » commencement de l'écriture (autrement » à la tête du livre) pour faire, ô mon » Dieu, votre volonté. Après quoi l'Apôtre ajoûte aufli-tôt » Et c'eft cette volon» té de Dieu qui nous a fanctifiés par l'oblation du corps de J. C. qui a été faite une .fois C'eft encore la même chofe que ce que J. C. lui même nous avoit appris. Il eft venu pour tenir la place des facrifices & des holocauftes, qui ne pouvoient effacer nos péchés, ni nous reconcilier avec fon Pere. Il eft venu pour s'offrir lui-même comme une hoftie vivante, fainte, agréable à Dieu, telle qu'elle avoit été prédite dès le com• mencement de la Genefe. Il eft venu pour obéir dès le premier moment de la vie jufqu'au dernier, & pour accomplir la volon té de fon Pere. Mais quelle eft cette volonté c'eft celle, dit l'Apôtre, qui nous a fanctifiés. Ainfi, toute l'obéiffance de J. C. fe rapporte à notre fanctification & à notre. falut: & comme elle a commencé dès qu'il eft entré dans le monde, pour ne se terminer que par le facrifice de fa vie fur la croix:c'eft pour nous que J. C. a toujours obéi, comme c'eft pour nous qu'il s'eft incarné & qu'il eft mort: qui font les deux termes de fon obéiffance.

Genef. 3. 15.

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4. Ce que lui-même & fon Apôtre nous en ont dit, fuffiroit pour nous en convaincre mais il y a diverfes preuves dans l'Evangile qui nous font connoître, que toute la vie de J. C. n'a été qu'une obéiffance continuelle: & comme nous fommes déformais bien inftruits, que c'étoit pour notre falut qu'il obéiffoit ; nous ne pouvons douter, s'il a toujours obéi, que nous n'aions

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