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CHAP. III, & de fon cœur avec une entiere fécurité; & excepté un petit nombre, humilié fous la main de Dieu, & inftruit par lui de cette terrible cérémonie, tous les autres foufcrivirent fans peine& avec une pleine liberté, la cédule qui fe tourna contre eux dans le moment même où ils la foufcrivirent: ils furent tous frapés d'un anathême invifible, dont ils éprouverent l'effet fans le connoître. Ils ne fentirent pas qu'ils s'étoient liés, & ils continuerent à fe croire libres. Ils s'imaginerent que la malédiction étoit auffi peu férieufe de la part de Dieu, que l'acceptation qu'ils en avoient faite & ils ne fçurent pas que la cédule fouferite de leur inain, & fi folemnellement ratifiée, étoit entre les mains d'un Dieu éternel & immuable; & qu'il n'y avoit que le fang de fon Fils revêtu de notre chair, & cloüé pour nous à la croix, qui pût l'effacer.

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§. IV. Les Juifs ont encouru par leur défobéiffance à la loi du Décalogue feule ment, les malédictions aufquelles ils s'étoient foumis. La loi du Décalogue eft la loi naturelle c'est pour cela que les Gentils auffi orgueilleux que les Juifs, ont encousu les mêmes malédictions.

1. MAIS il fe préfente fur cela une grande difficulté, dont l'éclairciffement geut beaucoup contribuer à l'intelligence des Ecritures. Cette difficulté confifte en ce que faint Paul en écrivant aux Colloffiens, qui étoient du nombre des Gentils convertis à la foi, & qui n'avoient rien de commun avec les Juifs, à qui la Loi avoit été

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donnée; paroît confondre les Gentils avec CHAP. 111. les Juifs, & les regarder comme également foumis aux malédictions & aux anathêmes, que la loi prononçoit contre les prévaricateurs, quoique ces malédictions Teur fuffent inconnues, & qu'ils n'y eusfent jamais confenti. Ils n'avoient point été appellés à l'affemblée, où elles furent lues par les Levites, & ratifiées par les dou-ze tribus. Ils n'avoient point foufcrit à la loi, ni à fes imprécations. Elle n'étoit point à leur égard une cédule fouferite de leur main, qui leur fût contraire & qui fe tournât en témoignage contre eux : & la maxime de faint Paul: Que toutes les сс paroles de la loi s'adreffent à ceux qui font c fous la loice, limite aux feuls Juifs les malédictions que la loi prononce contre eux :: Scimus, dit cet Apôtre, quoniam quacum-que lex loquitur, iis qui in lege funt, loquitur. A quoi il faut joindre une autre maxi-me du même Apôtre: Que tous ceux qui cc Rom 2126ent péché fans avoir reçu la loi, périront auffi fans être jugés par la loi ; & que «. tous ceux qui ont péché, étant foumis es a la lei, feront condamnés par la loi :.e Quicumque fine lege peccaverunt, fine lege peribunt:& quicumque in lege peccaverunt,. per legem judicabuntur. Ce qui marque ce femble très clairement, que les Gentils: n'étoient point compris dans les anathêmesportés par la loi, puifque ce n'étoit pas fur la loi, ni par comparaifon avec elle qu'ils devoient être jugés : ainfi l'on de-mande comment les Colloffiens, & tous les Gentils avec eux, peuvent dire après faint Paul Que JESUS-CHRISTA" effacé la cédule écrite de notre main ce

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CHAP. III.

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qui nous étoit contraire par fes décrets,& qu'il l'a entierement abolic, en l'attashant à fa croix.

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2. L'éclairciffement de cette difficulté qui certainement eft très-férieufe, dépend de quelques obfervations; dont la premiere eft que Dieu n'éxigea du peuple d'Ifraël, lorfqu'il voulut faire alliance avec lui, qu'une feule condition, qui étoit de lui obéir; & que fur la réponse du peuple, qu'il lui obéiroit, Dieu fe contenta du fimple Décalogue, qui ne contient que la foi naturelle, dont il fut un renouvellement extérieur & public. Moïse en fait luimême la remarque dans le Deuteronome & fes paroles méritent une très-grande attention: Hac verba, dit-il, après avoir rapporté une feconde fois le Décalogue, locutus eft Dominus ad omnem multitudinem veftram in monte de medio ignis & nubis voce magná, nihil addens amplius. Ainfi dans cette alliance, où il ne s'agiffoit que d'un devoir effentiel qui eft celui d'obéir à Dieu; & de la lo naturelle, qui eft la loi commune & indifpenfable de tous les hom-mes; toutes les nations étoient dans un fens très-véritable, comprises dans l'alliance que le peuple d'Ifraël contractoit avec Dieu

3. Seconde obfervation. Quoique Dien pour punir la défobéiffance de ce peuple, en le retenant néanmoins à fon fervice, l'air chargé de beaucoup d'obfervances arbitraires, & très-différentes de la loi naDeut. 27. 5. turelle; il affecta de ne faire tomber les malédictions que fur le violement de la loi naturelle, & il n'y comprir point d'autres loix. Il n'y mêla ni les facrifices, ni les sé

rémonies propres aux Juifs; & il les bor- CHAP. III. na au Décalogue qui avoit été (a) gra vé fur les pierres d'un autel ruftique & fans art, abfolument différent de celui du Tabernacle. Ces malédictions n'étoient donc pas particulieres aux Juifs, & elles tomboient néceffairement fur tous ceux qui violoient la loi naturelle, felon cette parole importante de S. Paul, qui aura toujours fon exécution: Tribulatio & angu Rom. 2.9, 104 ftia in omnem animam hominis operantis ma lum. Judai primùm & Graci: gloria autem & honor, & pax omni operanti bonum, Judao primùm & Graco. L'affliction & le défefpoir accableront tout homme qui fait le mal, le Juif premierement, & puis le Gentil; & la gloire, l'honneur & la paix feront le de tout hom❤ partage me qui fait le bien; du Juif premierement, & puis du Gentil. Dans ce peu de paroles faint Paul comprend toutes les bénédictions promifes aux obfervateurs de la loi naturelle, qui eft la feule qui foit commune aux Juifs & aux Gentils.; & toutes les malédictions prononcées contre ceux qui en font les prévaricateurs. Et il est vi

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composé: furtout fi l'on
confidere ce que dit Moï
fe, qu'elle devoit être
écrite en caracteres capa-
bles d'être lûs de tout le
monde Scribes fuper lapi-
des omnia verba legis hu
jus planè & lucidè: ce qui
rend nettement l'expref
fion du texte original
baer beteb, declarando be-
n

CHAP. III. fible qu'il étend les malédictions à tous les Gentils, comme il les admet aux bé-nédictions, s'ils font obéiffans & fideles.

4. Troifiéme obfervation. Le deffein de Dieu en promettant au peuple d'Ifraël de contracter alliance avec lui, à condition qu'il s'engageroit à obéir à fes volontés,. étoit de l'engager véritablement à lui obéir, comme ils le devoient; & n'y obéif fant pas, de manifefter la préfömption fe-crette de ce peuple, qui fans avoir recours à Dieu, fe croyoit capable de faire tout le bien dont Dieu lui donneroit la connoiffance. Or il est évident que ce n'étoit pas le feul peuple d'Ifraël que Dieu avoit en vûë dans le deffein qu'il avoit de décou vrir l'orgueil de l'homme, de le convain-tre de fa corruption & de fon impuiffance par rapport à la juftice; & de lui apprendre qu'aucune alliance avec Dieu ne pou voit fe terminer autrement qu'à la malédiction, fi l'homme promettoit l'obéiffance comme dépendante de lui, & com-me fon propre bien, au lieu qu'elle devoit être une grace.

5. Tous les hommes étoient par rapport à ces vérités dans le même aveuglement: que les Juifs. Ils étoient tous auffi préfomptueux; ils fe croïoient tous capables de parvenir à la juftice par leurs propres forces; ils avoient tous la même idée de leur liberté. Il n'y avoit rien dont ils fe cruffent plus les maîtres, que de leur cœur & de leur volonté. Le confentement au bien, l'amour de la vertu, l'observance. d'un devoir connu, ne dépendoit que. d'eux, felon leurs préjugés. On fçait avec

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