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CHAP. III.

2. Il a fallu rapporter tout ce difcours de faint Paul, fans l'interrompre, afin de faire mieux fentir la liaifon & la dépendance de fes raifonnemens fondés fur les Ecritures, & fur l'intelligence que le faint Efprit lui en avoit donnée. Mais je ne m'attache maintenant qu'à deux points: le premier. que les Galates qui étoient du nombre des Gentils, & par conféquent tous les autres étoient fous la malédiction de la loi, avant qu'ils cruffent en J. C. puifqu'il avoit fallu que J. C. les rachetât de cette malédiction, en fe rendant lui-même malédiction pour eux, afin qu'ils fuffent bénis avec Abraham; & qu'il eft manifefte par conféquent que les malédictions portées par la loi s'étendoient à tous les peuples, fans diftinction de Juif & de Gentil: parce qu'autrement J. C. ne fe feroit rendu malédiction que pour en racheter les Juifs, & que les Gentils auroient pû être admis à la bénédi tion d'Abraham, fans être déchargés par J. C. de la malédiction qui les accabloit.

3. Le fecond point que je confidere dans les paroles de faint Paul, que j'ai rapportées, eft que cet Apôtre regarde comme fujet à la malédiction portée par la loi, quiconque ofe promettre de l'accomplir par fes propres forces, & fans invoquer par la foi en J. C. la grace & l'infufion du faint Efprit dont il a befoin. La loi par elle-même n'avertit perfonne de ce befoin. Elle fe contente de commander, & de dire que l'on lui obéit, on vivra : & par conféquent de menacer de mort, fi l'on ne lui obéit pas. Elle ne rend pas l'homme préfomtueuxz mais elle ne Kavertit pas qu'il l'eft. Elle le Laiffe dans les difpofitions où elle le trou

ve; & en lui offrant la vie & la mort, l'exhorte à choisir la vie.

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elle

Je prens au- «

CHAP. III.

jourd'hui à témoin le ciel & la terre, di- « Deut. 30.19. foit Moife au peuple d'Ifraël, que je vous «< ai laillé le choix de la vie ou de la mort, « de la bénédiction ou de la malédiction. << Choififfez donc la vie. » C'est ainsi que la loi parle; & il n'y a que l'orgueil qui foit trompé par ce langage. Mais la foi s'explique autrement. Elle cherche la vie hors de fhomme, & hors du commandement qu'on lui fait. Elle invoque le fecours dont elle a befoin. Elle ne l'efpere que de Dieu, & par les mérites du Médiateur qui nous a reconciliés à lui, & qui nous communique l'efprit de grace & de vie : Justus ex fide

vivit.

4. Il importe peu que la loi naturelle foit publiée de nouveau, & qu'on s'y foûmette avec une préfomption auffi marquée que celle du peuple Juif. Le point effentiel, eft que cette loi foit commune à tous les hom mes, & que prefque tous aient la préfomption de croire qu'ils l'obferveront par leurs propres forces. Cette difpofition rend égaux tous ceux en qui elle fe trouve, & les foûmet tous à la malédiction qu'on ne peut éviter que par la grace, qui n'eft accordée qu'à la foi en J. C. parce que fans elle on n'accomplit point la loi, & qu'il eft écrit que celui qui n'obferve pas tout ce qui eft preferit dans la loi, eft maudit. La grace à la vérité ne faifoit pas le caractere propre de la loi; mais elle n'étoit point refufée à ceux qui vivoient fous la loi, dans l'efpérance du Meffie Libérateur.

5. Quelques perfonnes qui n'ont pas afLez pénétré le fond de la doctrine de faint

Deut.27.26.

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CHAP. III. Paul, croient que ces paroles: Tous ceux qui s'appuient fur les œuvres de la loi, » font dans la malédiction; puisqu'il est écrit: Malédiction fur tous ceux qui n'obfervent pas tout ce qui eft écrit dans le livre de la loi: ne doivent s'entendre que de l'accompliffement éxact & univerfel de toute la loi, & non de plufieurs commandemens qui ne font point au-deffus des forces naturelles. Et ces perfonnes fe fondent fur ces termes rigoureux & précis : » Qui n'obfervent pas tout ce qui eft preferit: Maledictus omnis qui non permanferit IN OMNIBUS qua fcripta funt in libro legis, ut faciat ea. Mais en premier lieu ces deux mots, in omnibus, ne font point dans l'ori ginal: ce que je n'obferve pas pour affoiblir la verfion que faint Paul a fuivie, mais pour montrer qu'elle a un autre fens que celui qu'on veut lui donner. Car Moïfe, & faint Paul qui le cite, ne prétendent pas qu'on fera coupable & fujet à la malédiction, dans le feul cas où l'on n'auroit pas accompli toute la loi : mais qu'on le fera dès qu'on aura manqué à obferver un seul de fes commandemens. Il n'y a aucun Légiflateur qui n'éxige que chaque point de la loi qu'il établit, foit éxactement obfervé. Il regarde comme criminel, & comme fujet à la peine portée par la loi, quiconque manque à l'un de ces chefs : & quand il dit que quiconque n'obfervera pas tout ce qui eft écrit dans la loi, fera puni, il est évident qu'il ne limite pas la punition au feul cas, où elle ne feroit pas pleinement & parfaitement obfervée, mais qu'il l'étend à tous les violemens particuliers. Il en eft de même de la malédiction qui eft encourue,non

feulement lorfque la loi n'eft pas obfervée CHAP III. dans fon tout, mais lorsqu'on prétend l'accomplir par fes feules forces; parce que dès lors on ne l'accomplit point du tout, n'y aiant que lagrace qui donne le moien de l'accomplir, foit en tout, foit en partie.

6. En fecond lieu, fi l'on peut accomplir la loi dans plufieurs de fes points, fans avoir la grace & la foi au Médiateur; & fi l'on n'eft fujet à la malédiction, que parce qu'on n'obferve pas la loi dans toute fon étendue, il n'eft pas poffible de faire une régle générale qui foit commune à tous les Juifs & à tous les Gentils fans exception, & qui les foûmette tous à unc inévitable malédiction Car d'où fçait-on qu'il n'y en a aucun parmi les Juifs, & dans toutes les autres nations, qui ait o bfervé tous les points de la loi naturelle ? Si plufieurs ont eu affez de force pour en obferver plufieurs, pourquoi n'en auroient-ils pas eu affez pour les obferver tous? Une vertu fert de dégré pour une autre. Un vice véritablement guéri, prépare à la guérison d'un autre. Une paffion vaincue, eft une difpofition pour en vaincre d'autres. Il eft plus aifé de continuer à marcher, que de commencer à le faire. Il y a moins loin d'une bonne action à une bonne action, que du crime à la vertu. Si l'on a pû ce qui eft plus difficile, pourquoi ne pourroit-on pas ce qui eft plus aifé? Il y aura donc, felon ces fuppofitions, des Juifs & des Gentils qui auront obfervé toute la loi, & qui auront évité la malédiction qui n'eft attachée qu'à l'accompliffement imparfait de la loi. Il ne fera donc pas vrai que J. C. les ait rachetés de la malédiction de la loi, ni qu'il se soit

CHAP. III. rendu lui-même malédiction pour eux. It

fera donc mort pour eux fans néceffité: ou
plûtôt ils n'auront point été lavés dans le
fang, puifqu'ils n'en avoient pas befoin.
Ils feront bénis fans lui. Ils le feront au-
trement qu'Abraham, dont ils n'auront,
pas la foi; & ils compoferont un ordre à
part entre les juftes, dont les uns auront
été délivrés de la malédiction par JESUS-
CHRIST, & les autres auront évité la ma-
lédiction & n'auront pas eu besoin d'en
être rachetés.

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7. En troifiéme lieu, faint Paul oppofe la loi à la foi, en ce que la loi n'avertit point l'homme de fon impuiffance pour l'accomplir; au lieu que la foi le porte à s'adreffer à Dieu par JE S U S-CHRIST pour obtenir le fecours dont il a befoin; & c'eft précisément dans cette différence, que l'Apôtre fait confifter la malédiction inévitable, quand on n'écoute & qu'on ne voit que la foi: & la bénédiction promise à Abraham, quand on a la même foi que Gall. 3.9 ce Pere des fidéles: » Ceux qui s'appuient fur la foi, dit faint Paul, font bénis

» avec le fidéle Abraham: car tous ceux

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qui s'appuient fur les œuvres de la loi, » font dans la malédiction. » Voilà l'oppofition clairement marquée. Ceux qui s'ap puient fur la foi font bénis: ceux au contraire qui s'appuient fur les œuvres de la loi, font maudits. Mais queft-ce que s'apuier fur la foi ? N'eft-ce pas attendre le fecours de Dieu & le demander ? Et queft-ce que s'appuier fur les œuvres de la loi, finon se contenter du commandement & du devoir preferit par la loi, fans croire avoir besoin d'autre chofe que de fa liberté pour l'accom

plir?

T

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