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VI. Theonas

& Abra

ham.

Coll. Ext.

f. I..

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vů, dit-il, en l'abbé Moïfe, en Paphnuce & les deux Macaires. Ils étoient infatiables du repos de la folitude,&de leur part ne defiroient aucune focieté humaine: toutefois quand on les alloit vifiter, ils fouffroient la multitude & les foibleffes de leurs freres avec une patience inébranlable: comme s'ils n'euflent fait que les fervir toute leur vie. Caffien & Germain virent enfuite l'abbé Theonas, & apprirent l'occafion de fa conversion. Ses parens l'avoient marié trés-jeune, pour éviter la débauche. Aprés qu'il eut vêcu cinq ans avec fa femme, un jour il alla, felon la coûtume, avec les autres habitans, porter au monaftere voifin les dixmes ou les prémices de fesfruits. Ils furent reçûs par un vieillard nommé Jean,que l'on avoit choifi pour cette fonction, à caufe de fon merite ; & qui pour recompenfe de leur charité, leur fit une inftruction fur leur devoir de donner à Dieu les dixies & les prémices, afin qu'elles fuffent emploiees aux befoins des pauvres ; & fur l'excel5.67 lence de la perfection evangelique au-deffus de l'obligation de la loi.Theonas touché de cette exhortation, refolut de quitter fa femme pour em braffer la vie monaftique; & n'aïant pû lui perfuader d'en faire autant, il ne laiffa pas d'exe cater fon deflein, & la quitta malgré elle. Ce que Caffien ne propofe pas, comme un exemple à imiter; mais comme une conduite extraordinaire, que Dieu avoit autorisée, en donnant en. fuite à Theonas le don de miracles. Il avança tel. lement dans la vertu, qu'aprés la mort d'Elie, fucceffeur de Jean, il fut élû d'un commun confentement pour la même charge de recevoir & diftribuer les aumônes, que l'on nommoit en grec la diaconie, & qu'ils eftimoient trésimportante.

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L'abbé Theonas étant venu voir Caffien & Ger. main dans leur cellule; & s'étant affis à terre avec eux, comme c'étoit le tems pascal, ils lui deman

derent:

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c. 24.

derent:Pourquoi chez vous obferve-t-on fi exacte. ment de ne point fléchir du tout les genoux dans l'oraifon pendant ces cinquante jours ;. & de ne point jeûner jufques à none? Car nous ne voions point qu'on le pratique fi regulierement dans les monafteres de Syrie. Theonas répondit: Le jeûne c. 12. 136 eft de foi une chofe indifferente, qui par confe&. quent peutêtre obfervée ou non, felon les occafions.Il eftde tradition apostolique de celebrer en joïe,non feulement les quarante jours où JESUSCHRIST parut aprés fa refurrection,mais encore les dix jours que les difciples pafferent en retraite jufques à la defcente du Saint-Efprit; & afin que ce relâchement ne nous faffe pas perdre le fruit de l'abftinence du carême, nous ne le faifons confi. c. 23 fter qu'à avancer un peul'heure de nôtre repas: c'eft-à-dire de le prendre à fexte au lieu de none, fans rien changer en la qualité ni en la quantité de la nourriture; ainfi ils ne mangeoient toûjours que douze onces de pain par jour. Germain demanda pourquoi le carême n'étoit que de fix femaines, ou de fept en quelques païs? puisque ni l'un ni l'autre nombre ne font quarante jours, en ôtant le famedi,& le dimanche où l'on ne jeûnoit point; mais feulement trente-fix jours. Theonas c. 25 répondit: Ces trente-fix jours font la dixme de toute l'année, qui eft de trois cens foixante-cinq jours; & ce qui fait la diverfité, c'est que ceux qui ne jeûnent que fix femaines, jeûnent le famedi.. On n'a pas laiflé de nommer tout ce tems carême c. 28.. ou quarantaine, peutêtre à caufe des quarante jours: du jeûne de Moife,d'Elie & de JESUS-CHRIST même Les parfaits ne s'aftreignent pas à cet. te loi, & ne renferment pas leur jeune à des bornes fi étroites: les anciens jeûnoient toute l'année; & cette loi du carême n'a été introduite qu'en faveur des foibles: afin qu'ils don- c. 3.ɔa naffent à Dieu au moins la dixme de l'année. On voit ici combien Caffien, & ceux dont il rap porte

c. 27%.

C. 29.

Coll. xx11. porte les difcours,étoient perfuadés de l'antiquité

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& de l'utilité du carême. L'abbé Theonas les enRom. V tretint enfuite des illufions nocturnes & de cette

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parole de faint Paul: Je ne fais pas le bien que je veux, mais je fais le mal que je ne veux pas ; leur montrant que les Saints mêmes ne font pas exempts de peche, ni parfaits en cette vie.

Caffien&Germain aprés avoir demeuré quelque tems en Egypte, furent violemment tentes de rétourner en leur pais, auprés de leurs parens, qui étant riches & pieux,ne les détourneroient point de leur bon deilein, & leur fourniroient abondamment les neceffités de la vie. Ils efperoient même en convertir d'autres par leur exemple & leurs inftructions. Enfin ils fe figuroient que dans le voisinage des terres de leurs ancêtres, ils trouveroient de belles forêts & des folitudes agréables &fertiles. Ils communiquerent ces pensées à l'ab bé Abraham,qui en prit fujet de les entretenir de la mortification, & leur dit: Ces pensées fi foibles marquent, que vous n'avez pas encore renoncé au monde ni mortifié vous defirs. Nous aurions pû chercher auffi les mêmes foulagemens.Nos parens nous nourriroient volontiers; & quand ils nous manqueroient, les riches de ce monde nous fourniroient avec joïe tous nos befoins. Nous pouvions mettre nos cellules fur le bord du Nil, & nous épargner la peine d'aller querir de l'eau à quatre milles. Nous aurions auffi trouvé dans ce païs des deferts agréables, avec des arbres fruitiers & des jardins. Mais nous avons preferé à tout ces deferts tristes & fecs, & ces fables falés & fteriles. Ceux qui tendent à la perfection, doivent chercher des lieux où rien ne lesinvite à fortir de leur cellule, pour travailler au grand air, qui diffipe & fait évaporer l'efprit en diverfes pensées. Il infifte fur la neceffité du travail des mains, pour ne point vivre aux dépens d'autrui, & ne dépendre de perfonne.

Aprés

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Aprés que Germain & Caffien eurent demeuré VII. fept ans en Egypte, ils retournerent à leur mo- Caffien naftere de Bethleem, où ils furent trés bien re- Scetis. çûs ; & avec la permiffion de leurs anciens, ils Coll.xu revinrent pour visiter le fameux defert de Scetis; “ *. & y virent entre autres fept illuftres folitaires, Moïfe, Paphnuce, Daniel, Serapion, Theodore,Seréne & Ifaac. L'abbé Moïfe avoit été dans coll. 1. c. fa jeunefle auprés de S. Antoine; & comme il lui Coll.11.0.2. demandoient quelque inftruction, il fe fit beau- Col. 1. c.r.. coup prier, ne voulant parler de la perfection chrétienne qu'à ceux qui la defiroient ardemment, & non pas à ceux à qui elle étoit indifferente: pour ne pas tomber lui-même dans la vanité ou l'indifcretion. Enfin fe laiflant toucher à leurs prieres & à leurs larmes, il leur parla du but de la vie monaftique, qui eft d'acquerir la pureté de cœur, pour arriver à la vie éternelle. Le len- c. ş.. demain il les entretint de la difcretion, ou plûtôt du difcernement des efprits & de la prudence qui regle toutes les autres vertus : dont il confirma la neceffité par plufieurs exemples.

Coll. Tite

C. X.

Ils eurent auffi une conference avec l'abbé Paphnuce furnommé Bubale ou Bufle; à caufe de fon grand an our pour la folitude; qui lui faifoit fuir la compagnie même des autres anachoretes.Il éto. it prêtre du defert de Scetis,&alors âgé de plus de quatre-vingt-dix ans. Toutefois il n'avoit jamais voulu quitter la cellule qu'il avoit commencé d'habiter en fa jeuneffe, quoi qu'éloignée de l'églife de cinq milles, qui font prés de deux lieuës. Il n laiffoit pas d'y aller tous les famedis & les dimanches; & n'en revenoit pas à vuide, mais les épau les chargéesd'un grand vafe,qui contenoit fa provifiond'eau pour toute la femaine;&dans ce grand âge,il ne voulut jamais fouffrir que lesjeunes gens le foulageaffent de ce travail. Il entretint les deux ". ". amisdes trois fortes de renonciations neceflaires à un folitaire: aux richeffles & aux biens exterieurs,

ne

c.

1.

C. 2.

6. 7.

Coll. 7

à fes paffions,à fes penfées, pour oublier toutes les Coll.IV. c. chofes temporelles. Daniel étoit principalement recommandable par fon humilité. Paphnuce le fit ordonner diacre, le preferant à plufieurs autres plus âgés,& même enfuite il le fit élever au facerdoce: mais Daniel ne voulut jamais en faire de fonction en fa prefence, & continua de lui fervir de diacre, tout prêtre qu'il étoit. Paphnuce le dettinoit pour fon fuccefleur; mais il fut fruftré de fon efperance, & Daniel mourut devant lui. Gall.v. 17. Il entretint les deux amis de la caufe des fechereffes fpirituelles, & du combat de la chair & de l'efprit.Serapion qui excelloit principalement dans la difcretion,leur parla des huit vices principaux, c'est-à-dire des fources de tous les pechés : la goumandife, l'incontinence, l'avarice, la colere, la triftefle, l'ennui, la vanité & l'orgueil. Cell.VE... Il y avoit un monaftere en Paleftine prés de The cué vers la mer morte & les deferts d'Arabie, où de trés-faints moines habitoient depuis trés-longtems. Ils furent tués dans une incurfion fubite de Sarafins. Les évêques du pais avec tout le peuple Arabe, enleverent leurs corps, & les enterrerent avec les reliques des martyrs. Il s'aflembla une multitude infinie de peuple des deux villes voisines, qui difputoient leurs reliques jufqu'au combat & aux épées, les uns fe fondant fur le voifinage de leur demeure, les autres fur le lieu de leur origine: l'églife les honore comme martyrs le Martyr vingt-huitréme de Mai.Caffien & quelques autres fcandalifés de cet évenement, comme indigne de la bonté de Dieu, allerent confulter Theodore, qui demeuroit aux Celles, entre Nitrie & Scetis:& il les entretint à cette occasion sur la c. 3. c. nature du mal&l'utilité des fouffrances.Serene re. commandable par fa pureté angelique, leur parla. de la mobilité de l'ame,& du pouvoir des demons Coll. VII. fur elle. Il rapporte comme un fait certain, que les premiers folitaires qui habiterent ces deferts,

Rom.

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étoient

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