la tranquilité des bons, elle reprime par la crainte du glaive l'audace des méchans, & la punit.

C'eft pourquoi rien n'empêche abso- §. 158. lument que les Sciences ne puiffent être enfeignées par des figures hieroglyphiques; puisqu'auffi bien elles ne font compofées en grande partie, que de définitions & de propofitions: & telle fut, comme tout le monde le fait affez, la méthode des Egyptiens, qui d'un côté pour ne pas laiffer périr les vérités trouvées, & de l'autre pour ne les pas proftituer au commun des homines, les confacrerent par des fignes, dont le mystère n'étoit devoilé qu'à ceux qui en étoient jugés digres.

N'est-ce pas encore de fignes hieroglyphiques que les Alchymiftes couvrent leur maniére d'écrire, ou d'enfeigner?

Je crois avoir affez fait, que d'indiquer ce que M. W. dit des hieroglyphes; nous ne le fuivrons pas dans ce qu'il ajoute des caractères primitifs ou dérivatifs qu'ils doivent avoir fuivant les différens caractères des chofes qu'ils fervent à exprimer, de crainte de tomber nous-mêmes dans des

Rapports de Ï'Imagi.

te.

hieroglyphes, & de donner ainfi, fans y penfer, l'exemple des figures qu'il veut expliquer.

D'O**O*%);:GED;ODIGO:

I

CHAPITRE VIII.

De la Mémoire, de l'Oubli, & du reffouvenir.

fi

LY A des rapports fi effentiels, & une liaison fi étroite, entre l'Imanation gination & la Mémoire, que ce que & de la nous avons déja dit de l'une, fervira Mémoi- beaucoup à éclaircir ce que nous avons à dire de l'autre. Elles font comme ces fœurs dont parle Ovide parfaitement femblables, que malgré quelque légère différence qui les diftingue, il eft aifé de voir qu'elles doivent être fœurs. Toutes deux ont les mêmes perfections & les mêmes défauts, & il ne faut pas s'en étonner, puisqu'elles marchent le plus fouvent enfemble; avec cette différence feulement, que l'Imagination fert de guide, & que la Mémoire ne fait que fuivre, forsqu'elle agit; je dis, lorsqu'el

qu'elle agit, car la Mémoire moins vive ne fuit pas l'Imagination dans toutes fes courfes vagabondes.

On n'aura pas au refte de peine à Leurs concevoir, après tout ce que nous a-différen vons dit de l'empreffement de celle-cices. à fe mettre à l'ouvrage, que dans tous ceux, que ces deux facultés font de concert, l'Imagination prenne fur elle la plus grande partie du travail, & ne laiffe prefque rien à faire à la Mémoire; mais tâchons de découvrir & de marquer plus précisément, jusqu'où va l'une,& où commence l'autre, les limites enfin, où elles font renfermées.

La Mé

ment

Nous retrouvons dans une maison 5.1737 une perfonne que nous avions vu ail- moire leurs, à la promenade, au fpectacle; confifte en la regardant, nous fommes con- princivaincus que nous l'avons vue en ef-palefet, & nous venons à la reconnoître dans la faifons attention à ce dernier mot, qui reconfait le caractère de la mémoire: maisnoiffanpour mieux developper ce qui a rapport à cette reconnoiffance examinons ce qui se passe en nous dans tous ces inftants.

,

Quelque fimple que paroiffe cette

ce.

Ce que

c'est que

cette re-reconnoiffance, elle renferme, ou fupconnoif- pofe, fi on l'aime mieux, ces trois fance. chofes, I. l'idée de cette perfonne,

§. 174.

15

avec celle de la maifon, où nous la voyons, voila l'idée des Sens; 2. l'idée de cette même perfonne avec celle du lieu, où nous l'avions vue' auparavant, voila l'idée de l'Imagination; & enfin la réflexion de l'Ame fur l'une & l'autre de ces deux circonftances.

Pour nous convaincre, que tout cela fe trouve en effet dans tout ce que nous venons de nommer reconnoiffance, il fuffit, dit M. W., que nous faffions feulement attention aux queftions, que l'on nous fait, ou que nous faifons nous-mêmes aux autres dans ces occafions de reconnoiffance.

Reprenons cette perfonne que nous reconnoiffons, & fuppofons, que l'on vienne, comme la chofe nous eft fans doute arrivée, nous demander, comment & d'où nous la reconnoiffons; ne répondrons-nous pas fimplement, que c'eft pour l'avoir vue à la promenade, au fpectacle, & pour l'avoir remar quée avec d'autant plus d'attention, que ne la connoiffant pas, nous étions en peine de favoir qui elle étoit? Car c'eft

définition s'éloigne de la notion que Pon a ordinairement de la Mémoire, pour prévenir les rumeurs, que pourroit caufer cette nouveauté, il croit devoir déclarer tout de fuite par une propofition ajoutée exprès,.

Que ce n'eft qu'à l'Imagination, & non à la Mémoire, qu'il appartient de reproduire les idées, & que l'on ne fauroit attribuer cette prérogative à la derniére, fans confondre entiérement ces deux facultés.

Et en effet pour raifonner conformément à ce principe; je fuppofe que quelqu'un accoutumé à réflechir ait vu dans les Livres de M. de la Ro chefoucault, ou de M. de la Bruyère une maximne, une penfée, & que dans la fuite oubliant qu'il l'a lue autrefois, il vienne à la retrouver comme par hazard , parce que fon Imagination qui le fert à fon infçu la lui retracera, fans lui rappeller le Livre où il l'a vue; dans ce cas il. pourra s'en croire de bonne foi l'Auteur Loupçonnant pas même la trahifon que lui fait fon Imagination, il n'attribuera point cette maxime, cette penfée à fa Mémoire; mais pourquoi

& ne