§. 314.

les feuls objets, dont les notions n'aient rien en effet de confus & d'obscur, parce qu'ils peuvent être refolus par une analyse exacte & parfaite, jusqu'à la notion de l'Unité.

Je dis les feuls, car bien qu'à la rigueur la forme Algebrique appartienne à l'Entendement pur, il eft cependant vrai de dire que les Notions qui répondent à cette forme, font des quantités, & que les quantités fe rapportent au continu, lequel eft du reffort de l'Imagination, & dont nous ne faurions avoir qu'une Notion confuse.

On ne fera pas furpris après cela d'entendre M. W. nous dire que tout ce qui eft Notion phyfique & morale ne fauroit appartenir à l'Entendement pur: pour qu'elles lui appartinffent, il faudroit que ces Notions puffent être refolues par une Analyse parfaite, mais Pour-quelque Analyfe qu'on en faffe, on trouve toujours qu'elles fe terminent tende à quelque chofe que nous percevons ment clairement à la vérité par le fecours ne l'eft des Sens, mais toujours avec quelque presque confufion cependant, & tout cela ne fuffit pas pour l'Entendement pur; ib

quoi no

tre En

jamais.

оп

faudroit

faudroit en venir jusqu'à ces Substances fimples, qui forment un Monde invifible ces Monades femblables à l'Unité, qui eft le commencement des nombres, fans être un nombre ellemême.

· De là vient que M. W. croit que 5.315 notre Entendement n'eft presque jamais affranchi des Sens & de l'Imagination; or nous favons que ce que nous percevons par les Sens & l'Imagination nous ne le percevons que confufément.

tant

Pour:

quoi M

différem

C'eft auffi là une des raifons, pour 5.316. lesquelles nous avons défini l'Entendement une faculté de représenter distinctement les objets: & bien que cette définition paroiffe d'abord s'éloigner W. le de nos idées ordinaires, on verra pour-définit fi l'on veut y faire attention, ment. qu'elle s'en rapproche plus qn'on ne penfe: & en effet n'attribuons-nous pas aux bêtes des Sens & une Imagination, tandis que nous leur refufons un Entendement que nous n'accordons qu'à l'homme? or quelle fera la fonction de cet Entendement propre de Phomme, fi ce n'eft de percevoir distinctement les chofes? Toute autre

façon de connoître le confondroit avec les Sens & l'Imagination, & feroit qu'il pourroit être attribué aux bétes mêmes. Ce que perfonne ne voudroit, ni ne pent en effet admettre.

L'erreur vient de ce que nous nommons du nom d'Entendeinent, toute faculté de connoître en general, foit qu'elle nous repréfente confufément, foit qu'elle nous repréfente diftinctement fon objet, comprenant fous ce nom, les Sens & Imagination, que l'on doit pourtant bien diftinguer de l'Entendement, ainfi que nous l'avons montré.

3.3x7. Nos connoiffances prennent diffe &318. rens noms des différens objets qu'elles Différen ont: fi elles ont pour objet des Nonoiffan- tions univerfelles, comme font celles ces fui de l'Efpèce & du Genre, elles fe vant nomment Connoiffances universelles!

tes.con

jets.

leurs ob- Telles font celles que l'on donne dans les Con- Elemens de Géométrie, & dans toutes noiffan- les Sciences en genéral, où l'on ne met ce uni- guères que des définitions des Genres, verfelle. & des Efpèces, & des Propofitions que

S. 319

l'on nomme univerfelles.

Si ces connoiffancés n'ont pour objet 5.320. que des Notions d'Individus, elles fe

nom

ou fin

› guliére.

nomment finguliéres: telles font cel- Indivi les que nous donne l'Hiftoire fimple-duelle ment dite, ou l'Hiftoire Naturelle parce que les actions des hommes, ou les opérations de la Nature, que l'une au l'autre nous repréfente, font telle ou telle action, telle ou telle opération en particulier, ou individuelle.

Particu

La connoiffance que Fon nomme 5.3217 particuliére, a pour objet des Notions auffi particuliéres la Notion particu- liére. liére eft celle qui repréfente quelque chose de commun à quelques individus de la même espèce, comme quand on dit; il eft des hommes, qui ont me Mémoire heureufe, il eft des perfon nes propres à faire fentir toute la douceur de l'amitié par la délicatesse de leurs fentimens, & les agrémens de leur Efprit.

une

CHAPITRE X I. :

Des trois Opérations de l'Entendement confiderées en particulier.

3.325. ON fait affez que l'on diftingue or

Trois

dinairement trois Opérations de Opéra- l'Entendement, la Notion avec une tions de fimple appréhenfion, le jugement & Entendement. le raifonnement.

Mais avant que d'entrer dans le dé tail, il faut fe rappeller le partage que nous avons fait & des objets, & des facultés de notre Ame, par lesquelles nous connoiffons ces objets : nous avons dit que c'étoit aux Sens à nous repréfenter les objets préfens, à notre Ima gination à nous retracer cenx qui font abfens, que les Sens & l'Imagination nous les représentent toujours confufément, parce qu'ils nous les représentent tels qu'ils font, & par conféquent fans diftinguer les chofes, qui leur font communes avec d'autres objets, de celles qui leur font particuliéres, & qui les diftinguent eux-mêmes; & que c'é