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S.343.

opéra

CHAPITRE XII.

De la feconde operation de l'Entende

ment.

LE JUGEMENT.

Seconde E paffage de la premiére à la feL conde opération, dans cette eftion con. pèce de connoiffance que nous avons fiderée nommée Intuitive, eft presque infendans la fible; l'une, comme nous venons de connoif- le voir, fe répréfente les chofes, qui intuitive, compofent un objet, comme distinctes

fance

de l'objet, & diftinctes entre elles;

elle ne va pas plus loin: l'autre les -confidère comme étant dans cet objet, où s'y rapportant de quelque maniére que ce foit cette différence qui confifte à envisager les chofes qui compo- fent l'objet comme exiftantes dans l'objet; ce point de vue d'existence, est ce qui conftitue la feconde opération, le jugement.

Je me représente dans un arbre le tronc, les branches, les feuilles; tou

tes

tes ces chofes qui forment l'arbre, je me les représente, dis-je, comme diftinctes en quelque façon de l'arbre, & diftinctes entre elles; ou j'ai une de ces notions que nous nommons compofées, un bel arbre, un arbre élevé &c. voila la premiére opération je confidère enfuite ces branches & ces feuilles, comme étant dans l'arbre, cette beauté, cette élevation comme appartenante à l'arbre, voila la feconde : car il faut bien remarquer > que ces deux opérations ne doivent pas être moins diftinguées dans ce genre de connoiffance, où l'Ame eft fuppofée se représenter les objets par les Sens & l'Imagination, fans employer le fecours des termes ou des mots, qu'elles le En font dans l'autre efpèce de connoiffan- quoi elle confifte. ce, que l'on nomme fymbolique; or 5.344. elles ne le fauroient être que par cette exiftence ou rapport, auquel l'Ame s'attache précisément dans le jugement de la premiére opération.

Mais comment fe fait ce jugement? Avant de l'expliquer, il eft bon de remarquer, qu'il en eft de deux for tes, les uns affirmatifs, par lefquels nous joignons deux notions, ou affirN 5

mons

Ce que

opéra

'mons qu'elles fe conviennent; les autres negatifs, par lefquels nous feparons ces Notions, où nions qu'elles doivent être unies.

renfer. 2. Que tout jugement renferme par me cette conféquent deux Notions, l'une de feconde P'objet, duquel nous jugeons, & que tion, ou nous nommons pour cela le sujet du le juge jugement; l'autre de la chofe que nous jugeons convenir, ou ne pas convenir à Pobjet, & que nous nommons attri

ment.

It en eft

but.

de deux 3. Que cette chofe ou cet attribut fortes, peut convenir où repugner effentiellel'un afferment au fujet, comme dans ces deux matif, idées, un Dieu jufte, un Dieu injufte; negatif. ou accidentellement, comme dans celles-ci, un papier qui eft blanc, un papier qui n'eft pas blanc.

l'autre

connoi{

fance in

Difficul- Cela pofé: quoique dans ces opératé d'ex- tions fi intimes de l'Ame, & fi l'on pliquer le dernier peut parler ainfi, fi fpirituelles, qu'il dans la ne s'y mêle pas même de mots, ou de termes, car c'eft de celles-là dont il tuitive. s'agit, tout foit abftrait, & difficile l'on peut dire toutefois que la plus grande difficulté n'eft pas pour les jugemens affirmatifs, puisque l'on voit fouvent dans le fujet même l'attribut,

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qu'il faut lui donner, comme dans cet exemple Dieu eft jufte, ou qu'on perçoit au moins l'attribut avec le fujet comme dans cet autre, ce papier eft blanc la difficulté eft pour les jugemens negatifs, où l'attribut ne fe perçoit point avec le fujet, & où il s'agit pourtant de décider de la difconvenance de l'un & de l'autre; or l'on ne fauroit décider de cette difconvenance fans comparaison, ni faire de comparaifon, fi l'un & l'autre n'eft repréfenté préfent; il faut donc que l'ef prit aille prendre l'attribut où il eft, ou qu'il le rapporte à fon fujet, pour les comparer enfemble.

Imagineroit-on tout ce chemin que fait l'efprit, fi la réflexion ne nous faifoit pas appercevoir la néceflité, où il eft de le faire,& fi nous ne connoiffions d'ailleurs toute fa célerité dans ses opérations?

difcon

Mais pour nous rendre ce fyftême 5.345 plus familier & plus fenfible, exami- Soit que nons-le dans deux fortes de cas, l'un, l'attribut où l'attribut difconvient effentielle- vienne ment au fujet, l'autre, où il ne lui effentieldifconvient qu'accidentellement, & pre-lement, foit qu'il

N 6

nons

ne dif- nons les mêmes exemples que nous convien donne M. W.

ne qu'ac- Ce papier n'eft pas de fer, dit-il, voicidentel-là fans doute un jugement negatif de au fujet. la premiére espèce; pour parvenir à

lement

སྐྱར།

décider de la difconvenance du fujet & de l'attribut dans ce jugement, quel chemin doit faire l'efprit? écoutons le maître l'efprit, dit-il, fe représente d'abord du papier, & fixe fon attention fur l'idée qu'il en a, voilà le premier pas: il paffe enfuite à l'attribut mais parce qu'il ne fauroit fe représen ter intuitivement cet attribut, de fer, fans voir en même tems l'idée de l'individu dans lequel il eft, favoir le fer, il fe représente cette idée avec tout ce qui y eft, voilà le fecond pas; il met alors en œuvre l'art que nous lui connoiffons, de pouvoir confiderer ce qui eft dans l'objet comme diftin&t de l'objet, il détache l'attribut, pour le rapprocher du fujet de fon jugement; voilà le troifième pas, & celui qui le met en état d'appercevoir fon but; car frappé, dans l'inftant de la comparai fon, frappé, dis-je, de l'affreufe difconvenance de toutes ces notions ainfi rapprochées, il conclut à cette fépa

ra

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