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§. 96.

idées de

ma Vue, l'idée que j'ai du fon de la Trompette, lorsque je l'entends fonner, & qui n'exilte de même en moi, que parce que ce fon caufe un changement dans mon organe de l'Ouïe, font des Idées des Sens. La fuite nous montrera 'l'utilité de cette diftinction, lorsque nous oppoferons d'une maniére encore plus particuliére les idées des Sens à celles de l'Imagination.

Je viens déja de dire que les premiéDifferen- res l'emportent en clarté fur les feconce des des; & en effet, fi nous nous rappellons l'Imagi- les principes déja établis, il eft évination &dent, que quoi que nous ne percedes Sens. vions un objet par les Sens que confufément, cette confufion n'empêche point la clarté, puisque, comme nous l'avons dit, une idée bien que confufe, peut être claire, ainfi que nous le voyons par l'exemple de la lumiére, & des couleurs., au lieu que comme nous ne nous repréfentons plus clairement dans l'Imagination, ainfi que nous venons de le dire, que les objets dont nous avons une idée diftincte, cette qualité venant à manquer, il doit arriver que l'dée de l'Imagination

n'aura

n'aura pas à l'égard du même objet la clarté de celle des Sens, & que tandis que celle-ci nous représentera clairement dans ceux des objets qui tombent fous le sens de la Vue, des endroits que nous ne percevons cependant que confufément, comme font les couleurs qui les diftinguent, l'idée de l'Imagination ne pourra atteindre à cette clarté, parce que comme nous ne faififfons dans ces couleurs rien de ce qui les diftingue, & que nous ne les percevons par conféquent que confufément, l'Imagination ne fauroit les repréfenter clairement; auffi fentonsnous que les idées qu'elle retrace en nous du Soleil ou des couleurs n'ont jamais une clarté égale à celle qu'y produisent les Sens.

ment on.

C'est ce degré différent de clarté qui se trouve entre les idées de l'Imagina- §. 97. tion & des Sens, qui nous fert à diftin-Comguer les unes des autres, comme nous les diftinfentons affez par expérience, que nous gue. les diftinguons en effet, fans que nous. foyions en risque de les confondre: car quel eft l'homme qui, lorsqu'il veille, ne demêlera pas ce qui n'eft que dans E

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foibles

idées de

l'Imagination, d'avec ce qu'il perçoit par les Sens.

Au refte la comparaifon de ces deux fortes d'idées n'est ni fi isolée, nifi inu tile, qu'elle pourroit paroître d'abord, elle tient aux principes établis fur les Senfations, & peut nous faire connoître quel eft précifément le degré de clarté qu'ont les idées de l'Imagination, & par-là, quel eft précisément le degré de force qu'elle a elle-mêine: car

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nation. tant que

ne peut-on pas raifonner ainfi ? Les Les Sen- idées de l'Imagination & celles qui profations duifent les Senfations foibles font les font en mêmes quant à la clarté, ces deux équilibre fortes d'idées convenant en ce qu'elles avec les n'en ont qu'un moindre degré, & la l'Imagi- feule différence qui eft entre elles n'étant que du côté du principe, entant que les unes font produites par les Sens, & les autres par l'Imagination. Or des effets qui font les mêmes fuppofent la même force dans la caufe qui les produit: donc les Senfations foibles font l'équilibre à l'Imagination, & l'Imagination aux Senfations foibles, done les règles de celles-ci peuvent conve nir & être appliquées à celle-là.

Of

Or nous fommes convaincus par Pexpérience, que les Senfations foibles n'ont pas un plus grand, & ont quelquefois même un moindre degré de clarté que les images de l'Imagination; car lorfque nous appercevons un objet aux approches de la nuit, ou que nous le voyons pendant le jour à une certaine diftance, fi cet objet nous eft déja connu, nous éprouvons que notre Imagination nous le repréfente plus clairement encore que cette Senfation foible.

Cela pofé, il s'enfuivra que

Comme des Senfations plus fortes é- §. 9. teignent celles qui font plus foibles

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Effet

des Sens

ces mêmes Senfations fortes affoibliront auffi tellement les idées de l'Ima- idées de gination, que quoique ces idées foient l'Imagi & demeurent en nous, elles paroîtront nation, tellement effacées, que nous n'en appercevrons pas même les traces. J'ai dit quoiqu'elles foient & demeurent en nous,car l'on verra dans la fuite, que -nous en avons en referve une infinité que nous n'appercevons pas, & qui ne Hous viennent vifibles & fenfibles, que lorfqu'elles font mifes en mouvement de la maniére que nous l'expliquerons. E 2

2°. Que

S. 100.

§. 101.

idées de

de clarté.

2°. Que comme les Senfations foibles acquiérent plus de clarté, lorsqu'elles ne font point éclipfées par des Senfations fortes; que la Lune, par exemple, brille à nos yeux d'un plus grand éclat pendant la nuit, que pendant le jour, où ce vifage d'un blanc vif que notre Imagination lui compofoit le foir, fe trouve changé dans un rocher, ou dans un nuage un peu plus argenté que les autres, de même les idées de notre Imagination feules & affranchies de ces Senfations fortes, auront plus de clarté que dans ces momens où elles en étoient combattues.

reur

Elles en auront, même jufqu'à nous Le tems caufer de l'embarras & une certaine eroù les comme nous l'éprouvons foul'Imagi- vent dans le fommeil, tems où toutes nation les Senfations étant fufpendues, il ne ont plus refte dans l'Ame, que les idées de l'Imagination: Combien de fois nous eftil arrivé, que trompés par l'éclat de ces idées, nous les avons confondues avec celles des Sens, en nous demandant à nous-mêmes, fi nous ne veillions pas en effet, tant le Menfonge fe montroit à nous avec toutes les couleurs de la Vérité.

Cette

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