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alomnie de Mr. Baillet. Mr. Baillet l'accufe d'avoir pris dans fes Lettres par vanité le nom de Balzac, qui étoit celui de fa Terre; pour faire croire qu'il étoit de l'illuftre Maifon de Balfac d'Entragues. Je raporterai ici fes propres termes; afin qu'on ne croye pas que je lui aye impofé dans une chofe auffi peu croyable qu'est l'accufation dont je viens de parler.

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M. de Balzac s'imaginant que le nom de Mr. DE GUEZ ,, n'avoit rien de relevé, & qu'il n'étoit point propre à donner crédit à fes Lettres, a pris celui de fa Terre près d'Angoulême, » pour tâcher d'en rehauffer le prix : croyant que ceux qui ne connoîtroient l'Auteur que par ce nom, le prendroient aifé,, ment pour quelqu'un de l'illuftre Maifon d'Entragues. Tom. I. p. 258.

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Mr. Baillet qui eft la vanité même, accufe tout le monde de vanité. C'eft un homme qui ne fait aucune Science. Il n'eft ni Théologien, ni Jurifconfulte, ni Philofophe, ni Médecin, ni Mathématicien. Il n'eft ni Poëteni Orateur, ni Hiftorien, ni Géographe. Il ne fait point le Grec; qui eft la Langue des Sciences, & avec ce peu de capacité, il a la présomption de croire qu'il eft capable de juger de tous les Livres qui font au monde : car il en juge, quoiqu'il protefte qu'il n'en juge point. N'est-ce pas être la vanité même ? Et cet homme qui eft la vanité même, accuse, comme je viens de le dire, tout le monde de vanité.

Mr. de Balzac n'a pû avoir la penfée que lui attribuë Mr. Baillet. Et la calomnie de Mr. Baillet eft fuffifamment refutée par l'édition des Poëfies & des Lettres Latines de Mr. de Balzac, ой Mr. de Balzac a pris le nom de Guez. Joannis Ludovici (1) Guezei Balzacii Poëmata Latina. Joannis Ludovici Guezei Balzacii Liber adoptivus Joannis Ludovici Gwezai Epiftola Selecta. Cette calomnie eft refutée de même par les portraits de Mr de Balzac gravez de fon vivant, & par fes ordres, où il est appellé de Guez: & par une de fes Lettres Françoifes qu'il a écrite à fon pere, avec cette infcription, Monfieur de Guez, & avec ces mots, Monfieur mon très-cher-pere. Et par l'Eloge Latin de Mr. de Guez fait par Mr. de Girac à la priere de Mr. de Balzac, où Mr. de Guez eft appellé pere de Mr. de Balzac. Cet Eloge eft imprimé dans les Ouvrages de Mr. de Balzac. Et par une Lettre de Mr. de Guez écrite à Mr. de Balzac, qui commence par ces mots, Mon très-cher fils,

¶ 1. Il y a Guezii dans tous ces endroits non pas Guzai. Cela paroit une vetille,

& c'eft pourtant comme fi je difois Jacobus Cajacans pour Jacobus Cujacius.

& que Mr. de Balzac m'envoya en m'écrivant la Lettre 28. du Livre XVI. de fes Lettres. A quoi on peut ajoûter que le nom de la Terre de Mr. de Balzac s'écrit par un z, & que celui de la Maison de Balfac d'Entragues s'écrit par une f.

Que fi Mr. Baillet dit qu'il a Mr. Sorel pour garant de ce qu'il a dit de Mr. de Balzac, on lui répondra qu'il n'y a point de garant à malfaire ; & que Mr. Sorel étoit l'ennemi déclaré de Mr. de Balzac ; & qu'il a écrit plufieurs Livres contre Mr. de Balzac. Si Mr. Baillet vouloit donc faire mention de cette calomnie, il devoit la rapporter comme une calomnie, & la réfuter par les raisons que je viens de dire. Mais Mr. Baillet eft un homme qui eft ravi de trouver quelque chofe d'injurieux contre les Ecrivains dans les écrits de leurs Adverfaires, & qui va ramassant tout ce qu'il y a de venin dans les Livres.

Sordes, quifquilias, ineptiafque
Omnes, omnia colligit venena.

II.

Emportement de Mr. Baillet contre Mr. de Saumaife.

LES

Es mêmes raisons qui m'ont obligé d'entreprendre dans la Remarque précédente la défenfe de Mr. de Balzac contre la calomnie de Mr. Baillet, m'obligent de juftifier ici Mr. de Saumaife contre fa médifance. Car Mr. de Saumaife m'a auffi honoré de son amitié, & fi je l'ose dire, de fon eftime. Pour ne point parler d'un grand nombre de Lettres Latines très-favantes, qu'il m'a écrites, qui m'ont fait honneur dans le monde, il m'a adreffé La Réponse à Mr. Fabrot, fur la Question de l'Aliénation du Preft, & fa Differtation fur l'Herodes infanticida d'Heinfius. De mon côté, je lui ai auffi donné plufieurs marques publiques de ma vénération & de mon admiration. J'ai dit dans mon Epigramme fur le Phaleg de Mr. Bochart,

Ditior in noftris non
Non ipfa herois pagina Salmafii.

furgit pagina terris:

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J'ai dit dans une de mes Lettres à la Reine de Suede; par laquelle je lui ai dédié les Ouvrages Latins de Mr. de Balzac, que le nom de Saumaife étoit celui de la Science même. Claudius Salmafius, vir

undecumque doctiffimus, & qui divinis in omni difciplina lucubratio= nibus hoc confecutus eft, ut jam non hominis fed ipfiusmet Scientiæ SA LMASIUS nomen habeatur. J'ai dit à peu près la même chose dans cette Epigramme Grecque.

Νανολιαίς ἐθέλων γράψαι ποτέ πολυμαθείω

Ενθάδε πολυμαθῆ γράψατο Σαλμάσιον.

J'ai dit dans cette autre qu'il avoit tout lû, tout retenu, & tout enfeigné.

Πάντ' αναγνὸς, καὶ πάντα μαθών, ἢ πάντα διδάξας,
Τῇ μέγας ἐν μικρῷ μνήματι Σαλμάτιο.

Et j'ai dit la même chofe dans cette troifiéme.

Πολλά διδασκόμ γήρασκε Σόλων, σὺ δὲ, πάντα
Εἰδώς Σαλμασίδη, γηράσκεις, πάντα διδάσκων.

Et ainfi je me trouve engagé par mon Jugement, non moins que par mon inclination, à foutenir que Mr. de Saumaise étoit un des plus favans Hommes du monde ; & à refuter Mr. Baillet qui le traite d'ignorant en toutes chofes : en Théologie, en Philofophie, en Jurifprudence, en Médecine, en Mathématique, en Hiftoire, en Rhétorique, en Poëfie, & en Grammaire. Voici fes termes Tom. II. pag. 428.

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Quelques-uns des principaux & des plus moderez de fa Com,, munion même, auffi-bien que les Catholiques, ont fait voir ,, que la Théologie n'étoit nullement fon fait. Mr. Fabrot, le ,, fameux Milton, & plufieurs autres, ont montré qu'il étoit un fort mauvais Jurifconfulte. D'autres ont fait voir combien les Obfervations qui ont donné lieu de croire qu'il étoit bon Médecin, font fujettes à l'erreur (1). Et pour montrer qu'il n'étoit ,, ni bon Philosophe, ni bon Mathématicien, il fuffit, dit-on, de produire fon Livre des Années Climateriques. Enfin quoi,, que Boxhornius ait écrit qu'il étoit très bien verfé dans l'Hiftoire, perfonne ne dit aujourd'hui que Mr. de Saumaise ait été, ,, ni Historien, ni Orateur, ni Poëte (2). Le voilà dont réduit à la qualité de bon Grammairien & d'habile Critique : encore ,, n'eft-il pas aifé de l'y bien maintenir: car pour ce qui regarde la Grammaire, le Pere Vavaffeur remarque qu'il étoit si négli1. Sujettes à l'erreur. Quelle façon de par

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ler.

2. Il n'eft ici queftion ni d'Orateur, ni de Poëte.

„gent & fi étourdi en écrivant, qu'il a laiffé fouvent gliffer des ,,fautes contre les regles de la Syntaxe, & que fa Latinité n'eft », pas toujours dans une grande pureté.

Peut-on parler de la forte d'un des plus favans hommes de notre fiécle? D'un homme, à qui tous les Savans de fon tems, à la reserve de ses Adverfaires, ont rendu des témoignages d'estime, de respect, de vénération, d'admiration, d'adoration. Mr. Baillet lui-même a produit un grand nombre de ces témoignages. En voici d'autres qu'il a ômis, ou qui ne font pas venus à fa connoiffance. Joseph Scaliger lui écrit, nunquam à litteris tuis nifi doctior recedo. C'eft dans la 248. de fes Lettres. En ce tems-là Mr. de Saumaise n'avoit guere plus de vingt ans. Mr. Grotius lui donne encore de plus grandes louanges. Felicem me plane arbitrarer, vir, fuprà quàm nos vel agnofcere poffumus, de omni litterarum genere mereri, fi ad tuos æternitate digniffimos labores aliquid contribuere poffem, & inter operas faltem tertias confiftere. C'est dans la 97. Lettre ad Gallos. Mr. Rickius dans fa Préface fur Tacite l'appelle virorum maximus. Mr. de Balzac a dit dans une Lettre qu'il m'a écrite, non homini, fed fcientiæ deeft, quod nefcit Salmafius. Et dans un de fes Poëmes Latins à Mr. Maynard Préfident d'Aurillac, il dit que Mr. de Saumaise réfifte lui feul au Pere Sirmond, au Pere Petau, & à tous fes autres Adverfaires. Quos ille, & cunctos, fuftinet unus. Et il dit ailleurs, Tot penetraffe locos, penetraffe tot abdita rerum,& vidisse unum quicquid ubique latet, laus ea Salmafide.

Il est au reste à remarqner que ce que dit ici Mr. Baillet touchant la qualité de Poëte, a été refuté par le Savant & l'Eloquent Mr. Bayle dans fes Nouvelles de la République des Lettres, à l'endroit où il a donné fon jugement fur mes Origines de la Langue Italienne. "Ceux, dit-il, qui ignorent que Mr. de Saumaife fçût faire des Vers Latins d'un tour délicat & fen» tant l'Antiquité, l'apprendront ici. Car on y cite les Vers qu'il » fit contre le Pere Petau, qui avoit pris le nom de Kercoëtius pour » écrire contre lui. Ces Vers font en effet admirables (1). Les voici.

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Δραξάμθμος δ ̓ ἄκροιο, ᾧ ἐκ ἐπέκεινα προσελθὼν Τοῖσι θεασαμένοις πρακτὸν ἔδιξε μόνον. C'eft ce que Mr. Ménage a lui-même remarqué daus fes modi di dire Italiani, mais il n'a pas remarqué que dans ces Vers de Saumaife fur lefquels il fe récrie, celui-ci, Que funt caudata, n'eft pas fans défaut. Can datus n'eft pas Latin.

Cùm depilatis natibus, & facie improba,
Malaque mente, monftrum Cercopithecium
Miros fe ludos oftenfurum dixerat
Non ante vifos, diem condixerat ;
Conveniunt omnes Cercopitheci Simia:
Clurine pecudes: omne genus Cercopium:
Que funt caudata: quæ fine caudis ambulant :
Similes hominibus beftia turpiffime.
Tunc fimiorum cœtus cùm effet maximus
Erat inter illos ingens expectatio,
Quidnam editurus & miri & novi foret
Tam grandium minator ille Simius.
Ergo ut promiffis faceret dictis fidem,
Proceram cum legiffet in campo arborem
Quam vidit unam celfiorem cæteris,
Hanc fubito afcenfu aggreffus petere protinus
Altum arrependo ut arriperet faftigium;
Sperans fe coelum poffe fic contendere.
Verùm cùm magno nifu, magnis viribus,
Sudans, laborans, aftuans, ut fcanderet;
Summum ad cacumen jam venisset arboris,
Ac fe videret non poffe ultra progredi,
Culum oftentare cœpit turpes nates,
Derifuique fpectatoribus fuit.

Ce diftique Grec qu'il fit fur le même sujet, ne sent

l'Antiquité:

Κέρκος ἐπείραζεν Μεσῶν ὄρος εἰσαναβαίνον.

Μέσα τοῖς δικρόοις καὶ πεσὶν ἐξέβαλον.

pas moins

Ces deux diftiques, qu'il fit pour fon Epitaphe, étant dangereufement malade à Heidelberg, âgé de 19. ans, & qu'il dicta à Mr. de la Miltiere (1), qui me les a communiquez, font du même caractére :

Cujus fpes nondum tota, nec fama fub auras
Venerat, hoc condor marmore Salmafius.
Mica ἐκλαύσαντο, καὶ ἐνθάδε νεκρὸν ἔθεντο,
Πολλὴν ἢ σφετέρων ἐλπίδα, Σαλμάσιον.

¶ 1. Il fignoit de la Milletiëre & je le trouve ainfi par tout.

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